Les antirhumatismaux pendant la grossesse et l`allaitement

4 / Le Journal de la Société canadienne de rhumatologie
Voici la suite du premier article du même nom paru
à l’été 2002, dans lequel on passait en revue les
principes de l’emploi des antirhumatismaux
pendant la grossesse et la lactation. On ne reviendra pas
sur le sujet dans le présent article, mais on discutera plus
en profondeur des antirhumatismaux mêmes, surtout des
antirhumatismaux modificateurs de la maladie (ARMM),
et de leur emploi dans le traitement des femmes
enceintes et des patientes qui allaitent. À l’aide d’un
tableau très détaillé, on présentera aussi les médicaments
qui ne sont pas commentés dans le texte ainsi que les
agents biologiques.
SELS D’OR (AUROTHIOMALATE DE SODIUM)
(INJECTION INTRAMUSCULAIRE)
Les cas d’exposition aux sels d’or pendant la grossesse
sont très rares dans la documentation médicale, et bon
nombre des rapports sont anciens – ce qui témoignerait
de l’emploi limité des sels d’or dans le traitement des
maladies rhumatismales ailleurs qu’au Canada, surtout
en raison de l’utilisation croissante du méthotrexate
(MTX) depuis 20 ans.
Les sels d’or traversent la barrière placentaire chez la
femme et ils s’accumulent dans le placenta et le foie et
les reins du fœtus1-3,5,6, mais la proportion de la dose
maternelle qui atteint le fœtus varie (de 57 % à une con-
centration dans le sang ombilical et une concentration
dans le sérum maternel équivalentes)1,2.
Aucune donnée clinique n’a révélé de taux accrus
d’effets tératogènes ou de malformations congénitales
chez les fœtus exposés aux sels d’or pendant la
grossesse1-3,5,6. Selon la Food and Drug Administration
(FDA), ces agents entrent dans la catégorie des facteurs
de risque C (voir le bas du tableau à la page 8). Presque
tous les rapports de cas d’exposition fœtale aux sels d’or
indiquent que l’accouchement a été normal et que les
nouveau-nés étaient en bonne santé. La relation entre le
faible nombre de nouveau-nés porteurs d’anomalies et
l’exposition à des sels d’or pendant la grossesse n’est pas
établie de façon certaine1,2,5.
En résumé, il semble peu probable que les sels d’or
entraînent des anomalies fœtales. Cependant, d’autres
rapports d’études, y compris d’études de longue durée,
sur l’emploi des sels d’or pendant la grossesse sont
nécessaires pour confirmer cette opinion1-3,5,6.
Les sels d’or sont le plus souvent prescrits pour traiter
la polyarthrite rhumatoïde (PR), bien que ces agents con-
viennent aussi au traitement d’autres maladies rhuma-
tismales, surtout l’arthrite psoriasique. Dans 70 % à
75 % des cas de PR, on observe une amélioration impor-
tante ou une rémission de la maladie pendant la
grossesse, annulant le besoin de médicaments pendant
cette période. Toutefois, on constate presque toujours
des poussées de PR pendant le post-partum9,10. Ainsi, les
sels d’or peuvent ne pas être nécessaires pendant la
grossesse dans la plupart des cas de PR, mais les
patientes en auront besoin après l’accouchement.
Il importe de planifier, de concert avec la patiente, le
traitement de la PR durant la grossesse, et ce, longtemps
avant l’arrêt de la contraception, à cause de la longue
demi-vie des sels d’or et des études chez des rates ayant
révélé la présence de sels d’or dans la vésicule ombilicale.
Ces données laissent croire que, si les sels d’or sont
tératogènes, leurs effets néfastes surviendraient très tôt, soit
au stade préembryonnaire11,12. Il serait donc inutile de
cesser l’administration des sels d’or au moment du dia-
gnostic de la grossesse si la seule raison est de protéger le
fœtus des effets néfastes potentiels (même si le risque
semble très faible). De plus, si la patiente et le rhumato-
logue souhaitent interrompre la prise de sels d’or pendant la
grossesse, on recommande de cesser ce traitement
trois mois avant le début de la grossesse. Si l’on choisit les
sels d’or pour traiter (ou prévenir) les poussées de PR,
parfois très graves, pendant le post-partum, il faut reprendre
le traitement par les sels d’or un à trois mois avant l’accou-
chement, à cause du début d’action très lent des sels d’or
(les poussées de PR après l’accouchement atteignent en
général un pic après deux ou trois mois, mais elles peuvent
survenir aussi moins de deux semaines après l’accouche-
ment). On croit que l’emploi des sels d’or pendant le
troisième trimestre de la grossesse entraînerait un risque
encore plus faible que pendant le premier trimestre.
Enfin, d’après l’American Academy of Pediatrics (AAP),
les sels d’or ne sont pas incompatibles avec l’allaitement7,
même si on a signalé des effets indésirables8.
Les antirhumatismaux pendant la grossesse
et l’allaitement (deuxième partie)
Stephanie Ensworth, B. Sc. (pharm.), M.D., FRCPC,
FRCP (rhum.), ABIM, est directrice du Rheumatic Diseases in
Pregnancy Program au Children’s and Women’s Health Centre
of British Columbia, Service de rhumatologie, université de
Colombie-Britannique, Vancouver (Colombie-Britannique).
Enjeux
médicaux
Le Journal de la Société canadienne de rhumatologie / 5
MÉTHOTREXATE
La plupart des données sur l’emploi du MTX avant et
pendant la grossesse sont tirées de la documentation sur le
cancer, un champ thérapeutique dans lequel la dose de
MTX est beaucoup plus élevée que dans le traitement des
maladies rhumatismales1,3,5,14,22. Le MTX est emmagasiné
dans les tissus maternels, traverse la barrière placentaire et
atteint le fœtus1. La prise de MTX par la mère avant une
grossesse (trois mois avant dans le cas des maladies rhu-
matismales et jusqu’à six ou sept mois avant dans le traite-
ment du cancer) et pendant la grossesse présente un
risque élevé d’avortement spontané, cause des effets toxi-
ques chez l’embryon et entraîne de nombreuses ano-
malies fœtales et un retard de croissance intra-
utérine1-3,13-23. Les caractéristiques des malformations
observées chez les nourrissons exposés au MTX ou à
d’autres antagonistes de l’acide folique, surtout pendant le
premier trimestre, sont désignées par le terme « syndrome
des aminoptérines »3,18,19,22,23. En outre, on a signalé des cas
d’aplasie médullaire du nouveau-né après l’exposition au
MTX, mais ils pourraient s’expliquer par la prise d’autres
immunosuppresseurs3,13. Chez un nouveau-né de
sexe féminin au caryotype normal, on a décelé aussi des
anomalies chromosomiques (vides et chromosome en
anneau) évoquant, en théorie, un risque accru de cancer
et d’anomalies génétiques chez les descendants1.
Dans le traitement des maladies rhumatismales, le
MTX est contre-indiqué aussi bien chez la femme que
chez l’homme trois mois avant l’arrêt de la contracep-
tion. Le MTX est également contre-indiqué pendant la
grossesse et l’allaitement2-4,13-23. La FDA a classé le MTX
dans la catégorie des facteurs de risque X.
Chez les femmes et les hommes traités par le MTX en
raison d’une maladie rhumatismale et qui souhaitent con-
cevoir un enfant, la grossesse doit être planifiée des mois à
l’avance. Il importe de diminuer progressivement la dose
de MTX (pour prévenir une poussée d’arthrite subséquente
à l’arrêt du MTX) et de remplacer le MTX par un ARMM
pouvant être administré sans danger pendant la grossesse
(sujet discuté dans le présent article ainsi que dans l’article
précédent). La substitution du MTX par un autre ARMM
doit avoir lieu au moins trois mois avant l’abandon de la
méthode contraceptive3,13. Chez les femmes atteintes de
maladies rhumatismales, par exemple d’une maladie du
tissu conjonctif (lupus érythémateux disséminé [LED]), et
chez les rares patientes souffrant d’une forme grave de
vascularite (polyartérite noueuse, angéite allergique de
Churg et Strauss ou granulomatose de Wegener), on
recommande la substitution par un ARMM six mois avant
le moment planifié pour la grossesse. L’atteinte multi-
systémique doit en effet se stabiliser et passer à la
phase quiescente sous l’effet du nouvel ARMM, et ce,
pendant six mois avant le début de la grossesse24,25,29.
Lors de l’arrêt du MTX en vue de la conception, aussi
bien chez l’homme que chez la femme, on recommande
la prise d’un supplément d’acide folique avant le début
de la grossesse et pendant toute la grossesse, car le MTX
est un antagoniste de l’acide folique, et l’on sait que ce
dernier est essentiel à la prévention des anomalies du
tube neural chez l’embryon3,13,26.
Finalement, il faut souligner que, contrairement à ce
qu’on a dit plus haut, on a signalé des cas de nouveau-
nés normaux et en bonne santé après l’exposition acci-
dentelle au MTX in utero (surtout, mais non exclusive-
ment, lors de l’exposition au MTX administré à dose
faible [10 mg par semaine] avant la sixième semaine de
gestation)2,13,14,22,23,27. Ces rapports éparses sur la naissance
de nouveau-nés sains sont de loin dépassés par des
rapports d’effets tératogènes et embryotoxiques graves,
ce qui démontre de façon concluante que le MTX est
contre-indiqué pendant les trois mois qui précèdent la
grossesse, pendant la grossesse et pendant l’allaitement.
Par ailleurs, ces rapports éparses sur les résultats
normaux de la grossesse ne modifient pas les recomman-
dations selon lesquelles les hommes et les femmes qui
prennent le MTX doivent utiliser une méthode de contra-
ception fiable pour prévenir la grossesse2,3,13,14,27.
AZATHIOPRINE (AZA)
L’AZA traverse facilement la barrière placentaire, alors que
le foie du fœtus ne contient pas l’enzyme nécessaire pour
la transformer en son métabolite actif (6-mercaptopurine),
ce qui semble le protéger des effets tératogènes2,3,5,13. On a
retrouvé seulement des traces de la 6-mercaptopurine
(dérivée de l’AZA dans la circulation maternelle) chez le
fœtus1,5,13.
On a employé très fréquemment l’AZA pendant la
grossesse pour traiter des patientes ayant subi la greffe
d’un organe et des patientes souffrant de maladies inflam-
matoires de l’intestin, sans qu’on ait signalé d’anomalies
Lors de l’arrêt du MTX en vue de la conception,
aussi bien chez l’homme que chez la femme, on
recommande la prise d’un supplément
d’acide folique avant le début de la grossesse et
pendant toute la grossesse, car le MTX est un
antagoniste de l’acide folique, et l’on sait que
ce dernier est essentiel à la prévention des
anomalies du tube neural chez l’embryon3,13,26.
8 / Le Journal de la Société canadienne de rhumatologie
congénitales reliées de façon certaine à la prise de ce
médicament1-3,5,13,16,21,30-34. De plus, l’AZA se révèle un traite-
ment efficace du LED pendant la grossesse, et elle semble
plus sûre chez cette catégorie de femmes enceintes que
chez celles qui ont subi une greffe d’organe14. On a si-
gnalé occasionnellement diverses anomalies, mais sans
pouvoir les relier à la prise d’AZA pendant la
grossesse3,5,13,21. Des cas d’avortement spontané30,33, de
retard de croissance intra-utérine et de naissance pré-
maturée ont aussi été observés, mais on n’a pu établir
avec certitude si ces événements sont reliés : 1) à l’AZA;
2) aux autres médicaments que doivent souvent prendre
Tableau
LES ANTIRHUMATISMAUX PENDANT LA GROSSESSE ET L’ALLAITEMENT
Catégories Études chez Expériences cliniques
Médicaments de la FDA* l’animal chez l’humain Allaitement
Léflunomide (LF) X Les données provenant L’emploi du LF pour traiter la PR est relativement Il n’existe pas de données sur les
des études animales nouveau, car il est disponible aux États-Unis effets du LF pendant l’allaitement
révèlent des taux plus depuis seulement la fin de 1998. Il n’existe donc et, ainsi, il est contre-indiqué pour
élevés de malformations, aucune donnée sur l’emploi de cet agent pendant traiter les mères qui allaitent.
de tératogénicité et de la grossesse. Présentement, il est contre-indiqué
mortalité fœtale chez pendant la grossesse et il entraînerait un risque
diverses espèces3,44. d’effets tératogènes chez l’humain (un registre des
cas de tératogénicité est en voie d’élaboration).
À cause de sa longue demi-vie d’élimination, on
recommande que les femmes et les hommes qui
envisagent de concevoir un enfant cessent de
prendre le LF deux ans avant la conception ou
subissent un traitement d’élimination des
médicaments par la cholestyramine (8 g par
voie orale 3 f.p.j. x 11 jours) ou par le charbon
activé (50 g par voie orale 4 f.p.j. x 11 jours).
L’efficacité de ce traitement d’élimination doit
être vérifiée par deux analyses de sang effectuées
à 14 jours d’intervalle. Les concentrations
plasmatiques de LF doivent être inférieures à
0,02 mg/L, sinon on doit répéter le traitement3,23,44-47.
Pénicillamine D D Dans des études chez des Les données cliniques sur la d-Pen sont rares et Il n’existe aucune donnée sur les
(d-Pen) rates gravides, après contradictoires. Elles touchent l’emploi de la d-Pen effets de la d-Pen pendant
l’administration d’une dose chez les patientes atteintes de PR, de sclérodermie l’allaitement ni aucun rapport à
six fois plus élevée que la généralisée, de la maladie de Wilson et de l’effet que la d-Pen est excrétée
dose maximale chez cystinurie pendant la grossesse. La d-Pen traverse dans le lait maternel. Sa demi-vie
l’humain, on a observé des la barrière placentaire, mais on a observé la plasmatique est brève, et son taux
résorptions fœtales et des naissance de nouveau-nés en santé après de liaison protéique est très élevé.
anomalies fœtales, telles l’exposition à la d-Pen pendant une partie ou On peut donc supposer que la
que des déficits osseux ou pendant toute la grossesse, surtout dans des cas d-Pen passe en faible quantité
des fentes palatines1. On a de la maladie de Wilson. Toutefois, il existe des dans le lait maternel. Vu le
également signalé la laxité rapports décrivant des anomalies fœtales. Par manque de données, il importe
de la peau chez des conséquent, on recommande d’employer la d-Pen de conseiller aux femmes qui
animaux3. pendant la grossesse uniquement dans les cas allaitent et qui sont traitées par la
d’absolue nécessité, par exemple pour traiter la d-Pen de cesser d’allaiter1,49.
maladie de Wilson, la cystinurie ou la sclérodermie
généralisée, et ce, à la dose efficace la plus
faible possible. Il existe des médicaments plus sûrs
que la d-Pen pour traiter la PR pendant la
grossesse. Pour cette raison, on ne doit pas
prescrire la d-Pen pour traiter la PR pendant
la grossesse, et la patiente doit cesser de prendre
ce médicament avant de devenir enceinte ou
immédiatement après le diagnostic d’une
grossesse non planifiée1,3,6,48.
* La FDA aux États-Unis a établi des catégories de facteurs de risque pour la plupart des médicaments administrés pendant la grossesse en regard du degré de
risque auquel le médicament expose le fœtus (facteurs de risque A, B, C, D et X)1,4.
A Les essais cliniques comparatifs n’ont révélé aucun risque pour le fœtus (pratiquement aucun médicament n’est classé dans cette catégorie).
B – Aucun rapport d’étude chez l’être humain n’a signalé de risque pour le fœtus.
C – Impossible d’affirmer qu’il n’y a pas de risque pour le fœtus soit parce que les données actuelles sont insuffisantes quant aux effets du médicament chez l’animal
ou chez l’humain pendant la grossesse, soit parce que les études chez l’animal ont révélé des effets indésirables, alors qu’il n’y a pas d’étude ou de rapport sur
les effets chez l’être humain.
D – Données concluantes sur le risque pour le fœtus humain, mais les bienfaits potentiels pourraient être plus importants que le risque.
X – Médicament contre-indiqué : les bienfaits potentiels ne sont pas plus importants que les risques; il existe des données à l’appui d’un risque pour le fœtus d’après
l’expérience clinique chez l’être humain.
Le Journal de la Société canadienne de rhumatologie / 9
ces patientes; 3) à l’affection ou au trouble sous-jacent
ayant motivé la prise d’AZA1-3,5,14,30,32-34.
Des rapports font également état d’une suppression de
la fonction immunitaire de gravité diverse (cytopénies et
faible taux d’immunoglobuline M, A ou G) chez les
nouveau-nés1,2,5,13,14 après une exposition in utero à l’AZA.
Dans la plupart des cas, ce trouble semble s’être résolu
sans séquelle, mais on a signalé le cas d’un nouveau-né
souffrant de pancytopénie et de déficit immunitaire mixte
grave à la naissance. Le nourrisson est décédé 28 jours
plus tard à la suite de complications1,14. Ces cas d’immuno-
suppression néonatale semblent reliés à la dose maternelle
d’AZA. De fait, une étude a révélé une corrélation signi-
ficative entre la leucocytémie à la 32esemaine de grossesse
et la leucocytémie dans le sang ombilical à l’accouche-
ment. Les chercheurs ont alors diminué de moitié la dose
d’AZA à la 32esemaine de grossesse lorsque la leuco-
cytémie était égale ou inférieure à un écart type de la
moyenne pendant une grossesse normale. Depuis l’appli-
cation de ce protocole, cet établissement de santé n’a plus
signalé d’épisodes d’immunosuppression néonatale1,3,5. Par
ailleurs, on a observé deux cas d’infection par le cytomé-
galovirus chez les nouveau-nés3,5,13 et un cas de transloca-
tion équilibrée et de délétion partielle du chromosome 7
chez un enfant qui a été exposé in utero à l’AZA, sans être
en mesure d’établir une relation certaine avec le
traitement3,14. On trouve également des rapports de cas
d’autres aberrations chromosomiques réversibles3,6.
Tableau (suite)
LES ANTIRHUMATISMAUX PENDANT LA GROSSESSE ET L’ALLAITEMENT
Catégories Études chez Expériences cliniques
Médicaments de la FDA* l’animal chez l’humain Allaitement
Tétracyclines D Chez des rates gravides, la En général, les tétracyclines sont contre-indiquées Les tétracyclines sont excrétées
(doxycycline, doxycycline a entraîné un pendant la grossesse et ne devraient pas être en faibles quantités dans le lait
minocycline) retard de la différenciation employées pour traiter des maladies rhumatismales maternel. Les concentrations
osseuse dans les os longs50.pendant la grossesse, car on a établi une relation sériques des tétracyclines chez
entre la prise de tétracyclines et la décoloration les nouveau-nés exposés à ces
des dents et les effets défavorables sur la croissance agents n’étaient pas décelables.
osseuse chez les fœtus exposés in utero. Il existe On craint par ailleurs la
des médicaments plus sûrs pour traiter les maladies décoloration des dents et
rhumatismales pendant la grossesse. Au sujet de l’inhibition de la croissance
l’emploi des tétracyclines en antibiothérapie, les osseuse chez les nourrissons
données publiées sont contradictoires quant à la allaités dont la mère a pris des
relation entre les tétracyclines et la survenue tétracyclines. On craint aussi le
d’anomalies congénitales1,51-53. risque d’altération de la flore
intestinale du nourrisson et la
modification des résultats des
cultures chez les nouveau-nés
exposés souffrant de fièvre.
Cependant, d’après l’AAP, les
tétracyclines ne sont pas
incompatibles avec l’allaitement1,7.
Cyclophosphamide D Des données probantes Chez des nouveau-nés ayant été exposés à la La CTX est excrétée dans le lait
(CTX), agent démontrent que cet agent CTX in utero, on a signalé des cas d’anomalies maternel. L’AAP et d’autres
alkylant entraîne des effets toxiques congénitales et d’absence d’anomalies organismes sont d’avis qu’elle est
antinéoplasique sur l’embryon et le fœtus, congénitales1,13. L’exposition à la CTX pendant le contre-indiquée pendant
et des effets tératogènes et premier trimestre de la grossesse semble causer l’allaitement à cause des risques
mutagènes chez les des effets tératogènes. L’exposition pendant les de neutropénie chez le
animaux1,2,14. Dans un essai, deuxième et troisième trimestres ne semble pas nourrisson et d’effets indésirables
la tératogénicité chez la entraîner d’anomalies congénitales ou reliés à l’immunosuppression, à
souris était reliée à la neurologiques, mais les nouveau-nés risquent de des troubles de croissance et à la
dose14. manifester une aplasie médullaire ou d’avoir un carcinogenèse potentielle1,3,7,13,14.
faible poids à la naissance (ce dernier trouble
pouvant être attribuable à la maladie qui motive
la prise de CTX ainsi qu’à d’autres médicaments
concomitants). Les effets à long terme de
l’exposition à la CTX pendant la grossesse sont
inconnus. La CTX doit être considérée comme
un agent tératogène et elle est contre-indiquée
pendant la grossesse, sauf si l’emploi de ce
médicament est absolument nécessaire pour traiter
les poussées de la maladie rhumatismale menaçant
la vie de la mère pendant le deuxième ou le
troisième trimestre de la grossesse2,3,13,14,48. La prise
de la CTX doit être interrompue trois mois avant
l’abandon de la méthode contraceptive3.
AAP = American Academy of Pediatrics
10 / Le Journal de la Société canadienne de rhumatologie
On ne sait pas de façon certaine si la fréquence de ces
rapports isolés de déficit en immunoglobulines, d’anoma-
lies chromosomiques et de malformation chez les fœtus
exposés à l’AZA pendant la grossesse est plus grande que
la fréquence de ces troubles dans la population de femmes
enceintes en bonne santé14. Par ailleurs, il reste des
questions quant aux effets indésirables potentiels à long
terme sur les fœtus exposés à l’AZA in utero, par exemple
sur la fertilité future et sur le risque de carcinogenèse chez
ces enfants3,6,13,14,33-35. D’après la FDA, l’AZA est considérée
comme un facteur de risque de la catégorie D. Le risque
le plus important à l’heure actuelle pour les nouveau-nés
Tableau (suite)
LES ANTIRHUMATISMAUX PENDANT LA GROSSESSE ET L’ALLAITEMENT
Catégories Études chez Expériences cliniques
Médicaments de la FDA* l’animal chez l’humain Allaitement
Chlorambucil, D Chez les rats, le Les données, quoique moins nombreuses, sont très La documentation est muette
agent alkylant chlorambucil a exercé un semblables à celles sur la CTX pendant la grossesse. sur les effets du chlorambucil
antinéoplasique effet tératogène trois fois Les rapports signalent la naissance de nouveau-nés pendant l’allaitement, mais, à
plus puissant (en regard de en santé et de nouveau-nés porteurs d’anomalies cause du risque d’effets
la dose mg/kg) que celui congénitales après l’exposition au chlorambucil indésirables graves, l’allaitement
de la CTX14.in utero. Deux rapports signalent l’agenèse de est contre-indiqué dans le cas
l’uretère et du rein gauche après l’exposition des mères traitées par le
à cet agent pendant le premier trimestre1,13 et des chlorambucil1,3,13,14.
anomalies cardiovasculaires3. Le chlorambucil est
contre-indiqué pendant la grossesse3,13,14,48.
Mofétil- C Dans les études où le MMF On trouve très peu de données sur l’emploi du Le MMF est excrété dans le
mycophénolate a été administré à des rates MMF pendant la grossesse chez la femme, et lait maternel des rates, mais il
(MMF) et à des lapines gravides à toutes proviennent d’études sur le traitement par le n’existe pas de données sur
des doses inférieures aux MMF chez des patientes enceintes qui ont subi la l’emploi du MMF chez la
doses thérapeutiques chez transplantation d’un organe. En raison du faible femme pendant l’allaitement.
l’humain, on a observé des poids moléculaire du MMF et de son métabolite et Vu le manque de données et
cas de résorptions et de d’après les résultats d’études chez l’animal, on le risque d’effets indésirables
malformations fœtales1. présume que ces molécules traverseraient la chez les nouveau-nés exposés
barrière placentaire1. On a signalé le cas d’une au MMF, l’allaitement devrait
mère ayant subi une greffe du rein et traitée par le être contre-indiqué dans le
MMF (et par le tacrolimus et la prednisone) cas des mères traitées par le
pendant toute sa grossesse. Cette femme a donné MMF1.
prématurément naissance (35 et 3/7 semaines de
gestation) à une petite fille par ailleurs en bonne
santé. Les seules anomalies notées ont été une
hypoplasie unguéale et des auriculaires plus courts
que la normale54. D’après un rapport dans le
registre de transplantation, on n’a observé « aucune
malformation des structures anatomiques » chez
les nouveau-nés exposés au MMF (5 expositions
maternelles, 29 expositions paternelles)55, bien que
les mêmes auteurs aient déclaré dans un autre
article que « l’emploi du MMF soulève des
préoccupations sur le plan de l’innocuité de la
reproduction »56. D’après un organisme de
transplantation en Europe, le MMF « n’est pas
recommandé » pendant la grossesse, « à la lumière
des données actuelles »57. Vu le manque de données
et de résultats des études chez l’animal, l’innocuité
du MMF pendant la grossesse reste un point
d’interrogation, et le fabricant du MMF recommande
que les patientes traitées par le MMF utilisent une
méthode contraceptive et attendent au moins
6 semaines après l’arrêt du traitement par le MMF
avant de devenir enceintes1.
* La FDA aux États-Unis a établi des catégories de facteurs de risque pour la plupart des médicaments administrés pendant la grossesse en regard du degré de
risque auquel le médicament expose le fœtus (facteurs de risque A, B, C, D et X)1,4.
A Les essais cliniques comparatifs n’ont révélé aucun risque pour le fœtus (pratiquement aucun médicament n’est classé dans cette catégorie).
B – Aucun rapport d’étude chez l’être humain n’a signalé de risque pour le fœtus.
C – Impossible d’affirmer qu’il n’y a pas de risque pour le fœtus soit parce que les données actuelles sont insuffisantes quant aux effets du médicament chez
l’animal ou chez l’humain pendant la grossesse, soit parce que les études chez l’animal ont révélé des effets indésirables, alors qu’il n’y a pas d’étude ou de
rapport sur les effets chez l’être humain.
D – Données concluantes sur le risque pour le fœtus humain, mais les bienfaits potentiels pourraient être plus importants que le risque.
X – Médicament contre-indiqué : les bienfaits potentiels ne sont pas plus importants que les risques; il existe des données à l’appui d’un risque pour le fœtus
d’après l’expérience clinique chez l’être humain.
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