Médecine palliative
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N° 4 – Septembre 2003
La gastrostomie percutanée par endoscopie en soins palliatifs dans les
obstructions intestinales en phase terminale
PRATIQUE DU SOIN
par un trocart à travers lequel on introduit un long fil-
guide. Celui-ci est récupéré dans l’estomac par une pince
à corps étranger type « crocodile », et extériorisé à la bou-
che en retirant le fibroscope. Il est alors solidarisé à la
sonde grâce à la boucle fixée à l’extrémité effilée. La
sonde, lubrifiée, est introduite dans la bouche et descen-
due avec douceur dans l’estomac en tirant sur l’extrémité
du fil-guide resté en dehors du trocart. Lorsque l’extrémité
rigide de la sonde arrive sous la peau, on retire le trocart
et on réalise une moucheture cutanée laissant passer la
sonde à frottement doux. Elle est alors tirée jusqu’à ce
que la tension témoigne du contact gastro-partiétal. On
peut, en cas de doute, réintroduire le fibroscope pour véri-
fier le bon positionnement. Il ne reste plus qu’à mettre en
place le clip de fixation, couper l’extrémité rigide, la rem-
placer par le raccord en Y et vérifier le bon fonctionne-
ment par injection de quelques cc d’eau.
Dans les 18 derniers mois, nous avons réalisé une
G.P.E. en période terminale de soins palliatifs pour des
vomissements incoercibles chez 5 malades en état
d’occlusion intestinale liée à :
–un cancer des voies biliaires ;
–une carcinose péritonéale d’origine ovarienne ;
–un envahissement digestif par une métastase parié-
tale d’un cancer du sein ;
–une compression digestive par un volumineux sar-
come d’Ewing ;
–un envahissement du grêle par un cancer sigmoï-
dien inextirpable ayant été dérivé.
Dans ces 5 cas, les patients avaient bénéficié de ten-
tatives de traitement médicamenteux qui s’étaient avérées
inefficaces. Les vomissements retentissaient évidemment
de façon importante sur l’état général des malades, mais
essentiellement sur leur état psychique. L’intolérance gas-
trique absolue avait une signification péjorative, en par-
ticulier pour la troisième malade qui s’était persuadée
qu’elle avait encore « une chance » tant qu’elle pouvait
s’alimenter, et se forçait malgré les vomissements.
La G.P.E. leur a été proposée
comme une solution d’
amélioration
des vomissements, en précisant
qu’elle n’obtiendrait probablement
pas un tarissement complet, mais
qu’elle permettrait le retour à un cer-
tain confort dans la mesure où :
–elle représentait un geste rapi-
de avec le minimum d’inconfort grâce à l’analgésie ;
–la sonde ne présentait ni l’inconfort ni la gène
d’une sonde naso-gastrique ;
–elle était discrète, sortant au niveau abdominal et
facilement masquée ;
–elle laissait une possibilité d’hydratation et d’ali-
mentation orale.
Ainsi présentée, la G.P.E. a été acceptée dans les 5 cas
comme un élément d’espoir. Le traitement médical anti-
émétique n’a pas été interrompu.
L’efficacité a été bonne, permettant le rétablissement
d’une certaine qualité de vie. Dans 3 cas (1, 2 et 4), les
vomissements ont été taris. Dans les deux autres, ils ont
été ramenés à 2 à 3 épisodes quotidiens de faible abon-
dance. Trois malades ont pu reprendre une alimentation
orale. Il faut cependant noter qu’ils sont parmi ceux dont
les vomissements n’ont pas été taris.
Le bénéfice a été très notable sur le plan du confort
et du retentissement psychique. La durée de vie après la
pose a été de quelques jours seulement pour les malades
1 et 4, 10 jours pour les malades 2 et 5, un peu plus de
3 semaines pour la malade 3.
Discussion
Nous n’abordons pas ici le cas des occlusions localisées
pouvant justifier une chirurgie, et qui, étant encore du
domaine du curatif, sortent du cadre des soins palliatifs.
Nous n’avons par ailleurs pas fait mention d’une G.P.E.
dont l’indication n’était pas une occlusion mais une para-
lysie de la déglutition en phase terminale d’un cancer paro-
tidien. D’autre part, nous ne pouvons pas présenter une
série significative, prenant en charge les soins palliatifs non
pas en unité spécialisée à débit important, mais en service
actif de chirurgie, le nombre de malades étant donc beau-
coup plus restreint. Par contre, nous bénéficions de l’avan-
tage de réaliser nous-mêmes les G.P.E. dans notre bloc, ce
qui nous évite d’avoir à affronter le problème d’obtention
de l’accord du confrère chirurgien ou gastro-entérologue.
Notre travail porte ainsi essentiellement sur le confort
rendu, la qualité des derniers moments de vie, et le res-
senti des familles.
Nous avons vu que la durée de survie était brève (quel-
ques jours à 3 semaines), et ce indépendamment de la
G.P.E., dont le but n’était aucunement de la prolonger.
Mais la qualité en a été améliorée de façon très notable :
–la tolérance a été bonne ;
–nous n’avons pas eu de complication liée à la
G.P.E. ;
–les malades ont vu leurs vomissements très minorés
ou taris ;
–3 des malades ont repris une alimentation ;
–le décès est survenu de façon plus sereine ;
–le bénéfice a été notable pour le ressenti des
familles.
La tolérance ne souffre aucune comparaison avec une
sonde gastrique, beaucoup moins acceptable, gênante au
niveau bucco-pharyngé comme au niveau narinaire, sup-
La G.P.E. a permis
le rétablissement
d’une qualité de vie.