Préservation de la fonction érectile et prostatectomie

Devant un cancer localisé de la prostate, l'objectif principal du trai-
tement est le contrôle carcinologique de la maladie. Cependant, la
topographie de la glande prostatique fait que son ablation interfère
avec des fonctions en rapport direct avec la qualité de vie. La dys-
fonction érectile après prostatectomie radicale reste un souci
majeur pour tout urologue confronté à cette chirurgie, puisque la
découverte du cancer de la prostate se fait de plus en plus chez des
hommes jeunes à potentiel sexuel normal. Le choix du traitement
par le patient est donc de plus en plus influencé par ce facteur.
PREAMBULE
Au préalable, un certain nombre de points doivent être rappelés.
Bilan de la fonction érectile :
Le résultat fonctionnel érectile dépend certes des paramètres tech-
niques mais aussi de paramètres propres au sujet ou dépendant de
son environnement. Le patient qui présente une dysérection après
une prostatectomie radicale alors qu'il avait des érections normales
avant doit bénéficier d’une évaluation globale comme tout patient
présentant des troubles de l'érection : (1) testostéronémie, (2) bilan
cardiovasculaire, (3) bilan sexo-psychologique, (4) bilan endocri-
nologique (hyperlipidémie, diabète). En effet, en préopératoire, il
doit aussi subir une évaluation de sa fonction sexuelle, car le patient
sans trouble d'érection apparent avant l'intervention peut parfaite-
ment décompenser au décours d'une prostatectomie radicale, une
dysérection comme n'importe quel autre traumatisme peut l'induire
de la même façon. Ceci compliquera la prise en charge et en tout
cas expliquera certains échecs apparents. Leur dépistage préopéra-
toire et leur correction précoce permettront éventuellement d'ap-
porter une solution.
L'âge
L'âge est un élément important quand on parle de dysérection. Cer-
taines études ont montré que les rapports sexuels dans le mois pré-
cédent étaient de 92% dans la cinquantaine, 73% dans la soixantai-
ne, 46% après 70 ans. L'âge est donc un élément déterminant non
seulement dans l'évaluation d'une dysfonction érectile mais aussi
pour le pronostic érectile [20]. Les chiffres doivent être beaucoup
plus pessimistes si l'on se réfère à l'étude MMAS puisque les
patients se déclarant “impuissants” seraient de 39% à 40 ans, 48%
à50 ans, 57% à 60 ans, 67% à 70 ans.
L’existence préopératoire d’une activité sexuelle, la présence
d’une partenaire et la libido sont aussi des éléments importants
pour apprécier la fonction sexuelle et le pronostic.
Ainsi si 50% des patients déclarent n'avoir pas de problème sexuel
avant une prostatectomie radicale, ils sont 60% à dire que c'est un
problème important 6 mois après, 52% 12 mois après et 41% 24
mois après [24].
Ces différents facteurs influençant le pronostic de la fonction érec-
tile ont été étudiés sur 314 hommes opérés de prostatectomie radi-
cale [20], 3 facteurs de bon pronostic sont retenus : (1) la fonction
érectile pré opératoire ; (2) la préservation de la bandelette vasculo-
nerveuse ; (3) l'âge jeune du patient. Le stade du cancer ne semble
pas influencer le pronostic sexuel. Ainsi, à 3 ans post opératoire, un
homme de moins de 60 ans, ayant eu des érections normales en pré
opératoire et dont les nerfs ont été préservés durant la prostatecto-
mie radicale aurait 76% de chance de retrouver des érections suffi-
samment rigides pour une pénétration normale.
Les mécanismes physiopathologiques de la dysfonction érectile
ne sont pas univoques et la récupération nerveuse après le trau-
matisme opératoire est temps-dépendante [19, 30].
Les causes de dysfonction érectile après prostatectomie radicale
sont essentiellement des lésions nerveuses : contusion, étirement,
avulsions, neurapraxie; et le temps de récupération des érections
correspond bien à la régénération nerveuse. Il y a peu d'atteintes
artérielles comme l'ont montrées les études doppler et 40% d'une
MISE AU POINT Progrès en Urologie (2005), 15, 621-625
Préservation de la fonction érectile et prostatectomie radicale :
que faut-il penser en 2005 ?
Chaker KANSO (1),Edouard AMAR (1),Pierre BONDIL (2),Laurent BOCCON-GIBOD (1),Vincent DELMAS(1)
(1) Service d’Urologie, Hôpital Bichat, Paris, France, (2) Service d’Urologie, Hôpital de Chambéry, France
RESUME
La préservation de la fonction érectile chez les patients opérés d’une prostatectomie radicale a fait l’objet de
nombreuses études. Dans cet article de revue, nous discutons les différents facteurs influençant la reprise de la
fonction érectile, ainsi que les différentes modalités préventives et thérapeutiques. Celles-ci font appel actuelle-
ment à quatre possibilités : (1) la préservation nerveuse per opératoire quelques soient les techniques, (2) les gref-
fes nerveuses, (3) la stimulation des nerfs caverneux, et (4) la pharmaco-thérapie post prostatectomie .
Mots clés : Prostatectomie radicale, préservation nerveuse, dysfonction érectile.
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Manuscrit reçu : mai 2005, accepté : juillet 2005
Adresse pour correspondance : Dr. C. Kanso, Service d’Urologie
Hôpital Bichat, 46, rue Henri Huchard, 75018 Paris.
Ref : KANSO C., AMAR E., BONDIL P., BOCCON-BIBOD L., DELMAS V. Prog.
Urol., 2005, 15, 621-625
dysfonction veino-occlusive. Tout ceci se traduit par un raccourcis-
sement pénien observable par le patient. Or la nutrition du corps
érectile nécessite 3 à 5 périodes d'érection nocturne chaque nuit per-
mettant une élévation de la PO2. Ces périodes d'érection nocturne
maintiennent un haut niveau de PO2 au sein du corps caverneux ce
qui stimule la synthèse de PGE1et inhibe la synthèse de collagène
induite par le TGFb1, d'où l'importance des érections nocturnes
normales pour protéger le pénis de la fibrose. L'hypoxie chronique,
la dénervation entraînent une apoptose pénienne ainsi que l'aug-
mentation des dépôts de collagène et la diminution de l'extensibili-
tépénienne.
Ce préambule étant posé on imagine bien que l'évaluation des résul-
tats va dépendre étroitement de ces différents facteurs et que l'on ne
peut faire une lecture objective de ceux-ci qu'en ayant à l'esprit à
quel patient on s'adresse, suivant quelle technique.
PRESERVATION NERVEUSE AU COURS DE LA
PROSTATECTOMIE RADICALE RETRO-PUBIENNE OU
LAPAROSCOPIQUE
La préservation nerveuse repose sur les travaux de W
ALSH
et D
ONKER
[27]. C'est eux qui ont pour la première fois décrit les bandelettes
neuro-vasculaires contenant les nerfs caverneux situés dans les ailerons
latéraux de la prostate. Ceci était possible en raison des travaux préli-
minaires de W
ALSH
mettant en évidence l'hémostase du plexus veineux
de Santorini, hémostase élective permettant de disséquer le reste de la
prostate sereinement dans la mesure où le sang n'imposait pas la rapi-
dité du geste et ne gênait pas la vision per opératoire.
Dès lors deux techniques ont été décrites :
-Sans préservation, avec une section du tronc vésico-prostatique au
niveau des vésicules séminales et une ligature distale au ras de l'u-
rètre prostatique.
-Avec préservation nerveuse : après ligature du plexus veineux de
Santorini, l'artère vésico-prostatique était liée électivement au
contact de la prostate, puis en suivant le bord latéral de la prosta-
te au ras de celui-ci, sont sectionnées toutes les petites branches à
destinée prostatique en respectant le tronc principal avec ses élé-
ments artériels, veineux et nerveux.
Cette chirurgie de préservation nerveuse se heurtait à un certain
nombre de difficultés :
Anatomiques
Les nerfs caverneux sont variables dans leur situation par rapport à
l'aileron prostatique comme l'ont montré les travaux de QUINLAN
[19] et dans leur distribution. En effet, les nerfs caverneux peuvent
se ramifier plus ou moins haut et tout peut se voir depuis le tronc
principal courant tout le long du bord latéral de la prostate jusqu'aux
branches elles-mêmes descendant tout le long du bord latéral de la
prostate.
Les techniques chirurgicales
Les techniques de préservation nerveuse peuvent influencer suivant
le sens de dissection des bandelettes : soit antégrade comme dans
les techniques cœlioscopiques, soit rétrograde comme dans les
voies rétro-pubienne ou périnéale, soit mixtes comme dans certai-
nes voies rétro-pubiennes [35]. De nombreux chirurgiens ont décrit
des variantes : soit isolement des nerfs caverneux à l'apex de la pro-
state puis dissection rétrograde; soit abord des nerfs caverneux aux
bords latéraux de la prostate puis dissection antégrade et rétrogra-
de; soit abord des nerfs caverneux à la base de la prostate puis
décollement de ceux-ci des bandelettes neuro-vasculaires le long du
bord latéral de la prostate jusqu'à l'apex prostatique
La troisième difficulté tient au patient en fonction de son âge
Le même traumatisme nerveux ne récupéra pas avec la même rapi-
dité en fonction de l'âge, la race et la dysfonction érectile pré opé-
ratoire.
Ceci explique que l'on puisse avoir selon les travaux publiés des
taux d'impuissance extrêmement variables allant en moyenne de 15
à40% mais jusqu'à 91%.
STANFORD abien montré en fonction de l'âge et de la race qu'avant
60 ans avant prostatectomie radicale 92% des homme étaient puis-
sants, un an après 29%, deux ans après 39%. Au delà de 60 ans,
pour une puissance variable de 84 à 48% un an après le taux moyen
était de 15%, deux ans après de 20%. Quant au facteur racial, avant
prostatectomie radicale en moyenne 80% des américains sont puis-
sants, deux ans après près de 40% des afro-américains et 20% des
hispaniques ou caucasiens [24].
Que signifie une préservation nerveuse bilatérale ou unilatérale
?Que signifie simplement la préservation nerveuse ?
Il s'agit d'une notion anatomique qualitative (l'isolement des ban-
delettes neuro-vasculaires contenant les nerfs caverneux) et l'absen-
ce de notion quantitative physiologique (car la préservation nerveu-
se ne rend pas compte des tiraillements, des étirements que peut
subir le pédicule vasculo-nerveux voir même les coagulations). Le
point important est que de toute façon avec une bonne préservation
nerveuse les érections ont toutes les chances de revenir spontanées
ou médicalement assistées.
Les différentes localisations du nerf caverneux
Al'apex
WALSH,utilisant une vidéo opératoire lui permettant de filmer ses
interventions et de comparer avec les résultats post opératoires, a
montré que pour lui le danger était à l'apex avec 4 temps à risque :
-La mise en place de points supplémentaires sur le plexus veineux
de Santorini au niveau des angles
-Le placement des points sur l'urètre membraneux et il faut éviter
tout point sortant de l'urètre membraneux et prenant les structures
voisines en particulier latéralement.
-La section de la paroi postérieure de l'urètre en dedans des bande-
lettes neuro-vasculaires.
-L'hémostase de fin d'intervention qui peut amener à coaguler un
nerf soigneusement préservé jusque là [29].
Récemment BRENDLER aapporté une nouvelle technique de dissec-
tion de l'apex par libération précoce des bandelettes sous loupe à
grossissement 2,5 : après section du plexus veineux de Santorini et
hémostase par un surjet, section antérieure de l'urètre et mise en
place de 3 fils qui serviront pour l'anastomose. La prostate est alors
roulée vers la ligne médiane permettant de libérer délicatement les
nerfs caverneux de l'apex prostatique. Ceci amène une dissection
méticuleuse de la prostate et de l'urètre. après isolement des nerfs,
section des piliers prostatiques puis section postérieure de l'urètre.
Enfin, libération des nerfs de la prostate au niveau des ailerons
avant la libération rectale [3].
C. Kanso et coll., Progrès en Urologie (2005), 15, 621-625
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BRENDLER comparant la libération classique de l'apex, la dissection
précoce des bandelettes, la dissection précoce des bandelettes sous
loupe, constate une amélioration de la fonction érectile post opéra-
toire de ses patients qui passe de 40% à 54% puis à 66% respecti-
vement. Résultats d’autant plus notables que les patients ont comme
moyenne d'âge 53 ans, 58 ans, 60 ans (mais il faut noter également
que la dernière série de patients a des érections aidées par sildena-
fil).
Dissection des ailerons prostatiques
WALSH abien montré que les nerfs caverneux couraient le long des
ailerons prostatiques et qu'en faisant une ligature élective des peti-
tes branches destinées à la prostate on respectait en arrière les nerfs
caverneux. QUINLAN [19] a montré que la préservation des bande-
lettes neuro-vasculaires qui contiennent les nerfs caverneux néces-
site de n'emporter qu'au maximum 2 mm de tissu qui contient des
nerfs dont le diamètre maximum est de 0,3 mm. Par contre, lorsque
les bandelette neuro-vasculaires sont sacrifiées, le tissu au contact
de la prostate est en moyenne de 4,9 mm et le diamètre maximum
des nerfs est de 0,7 mm.
La difficulté concernant la préservation de ces nerfs caverneux à
conduit ZINCKE [6, 21] à réaliser une dissection des bandelettes
neuro- vasculaires par une incision préalable du fascia pelvien puis
du fascia prostatique, à isoler les nerfs et à progresser en descendant
vers l'apex prostatique. Ceci amène à définir au niveau des ailerons
prostatiques un certain nombre de fascia : le fascia pelvien permet-
tant de réaliser une section extra-fasciale ; le fascia prostatique per-
mettant de réaliser une dissection inter-fasciale et la capsule prosta-
tique faisant réaliser une dissection intra-fasciale. Ainsi dans leur
description, BARRE et CHAUVEAU réalisent une dissection latérale
conservatrice du fascia prostatique en prenant avec un clamp spé-
cial, fin, des petites prises sur les vaisseaux venant des bandelettes
vers la prostate qu'ils clippent électivement. Ils nouent enfin au plus
proche de la prostate les artères vésico-prostatiques. Dans une chi-
rurgie non conservatrice, ils passent en dehors des bandelettes et
lient tous les éléments à distance donc au niveau de la bandelette
elle même. Sur une série de 200 patients ayant eu une prostatecto-
mie radicale, d'âge moyen 61 ans avec 87% de préservation bilaté-
rale et 13% de conservation unilatérale. BARRE et CHAUVEAU mon-
trent une reprise des rapport sexuels sans assistance médicamenteu-
se de 38% à 12 mois, de 56% à 18 mois, de 70% à 24 mois [2]. De
tels taux de puissance après prostatectomie radicale sont retrouvés
dans des grandes séries internationales . Sur une série de 3477
patients opérés par CATALONA,1834 ont eu une préservation ner-
veuse avec un recul de 18 mois minimum, la puissance sexuelle est
de 92% avant 50 ans, 85% après 50 ans, 70% après 60 ans, 51% au
delà de 70 ans. Il est à noter qu'il existe une différence entre pré-
servation bilatérale et unilatérale, celle-ci est modérée et diminue
avec l'âge[13].
Cette notion d'une récupération variable de la fonction érectile après
prostatectomie radicale rétropubienne suivant la conservation uni
ou bilatérale est retrouvée dans la littérature. Une conservation bila-
térale permet d'obtenir de 21 à 76% d'érection, la conservation uni-
latérale de 0 à 56 % d'érections mais il faut tenir compte de l'état
érectile pré opératoire et de l'âge du patient. En moyenne, on estime
qu’une conservation unilatérale permet une récupération des érec-
tions de 52 %, bilatérales de 75 %.
Selon le type de prostatectomie radicale
Différentes voies de prostatectomie radicale ont été décrites : rétro-
pubienne, périnéale, cœlioscopique trans-péritonéale, cœliosco-
pique extra-péritonéale. Avec un recul de plus de 1 an et en tenant
compte des patients évalués par questionnaire, on constate que le
taux d'érections est superposable qu'il s'agisse de voie chirurgicale
oude voie cœlioscopique [22]. Encore une fois, il faut tenir comp-
te dans l'évaluation des résultats de l'âge du patient, de l'état érecti-
lepré opératoire et de la technique de préservation utilisée par le
chirurgien.
L'examen extemporané peut-il être utile ?
Si l'on désire préserver à tout prix les bandelettes vasculo-nerveu-
ses, il importe de ne pas perdre de vue l'option oncologique de la
prostatectomie radicale. C'est pourquoi, certains auteurs ont préco-
nisé de réaliser dans un premier temps une chirurgie conservatrice
des bandelettes vasculo-nerveuses bilatérales, de réaliser en extem-
porané un examen anatomopathologique des marges au bord latéral
de la prostate et s'il était positif de réaliser l'exérèse des bandelettes
préalablement préservées.
Ainsi GOHARDERAKHSHAN [7], rapporte 101 patients ayant eu une
préservation nerveuse avec examen extemporané. Dans 15 cas
l'examen extemporané étant positif, il y a eu une exérèse des ban-
delettes. Seulement 92 des 101 examens ont montré une concor-
dance avec l'examen finalement. Ce qui fait conclure que l'examen
extemporané a une valeur prédictive négative de 94%, une valeur
prédictive positive de 73%.
Le rôle des artères pudendales accessoires :
Les conséquences d’une ligature des artères pudendales accessoires
au cours d’une prostatectomie radicale restent cntroversées. Cepen-
dant, DROUPY [5] a démontré que les changements hémodyna-
miques après érection artificielle dans les artères pudendales inter-
nes et accessoires étaient similaires à ceux décrits dans les artères
caverneuses, soulignant ainsi le rôle fonctionnel des artères puden-
dales accessoires dans l’érection.
LES GREFFES NERVEUSES
Les greffes nerveuses ont été proposées chez les patients chez qui
étaient retirés les nerfs caverneux. En faveur de cette technique,
SCARDINO arapporté une étude [9, 23] dans laquelle il démontre que
quand les bandelettes vasculo-nerveuses sont respectées sans gref-
fe nerveuse, il y a 76% d'érection, et quand une bandelette est résé-
quée sans greffe 30% d'érection et quand les deux bandelettes sont
réséquées sans greffe 2% d'érection. Par contre, quand une bande-
lette est réséquée avec greffe nerveuse, il y a 78% d'érection, quand
les deux sont réséquées il y a 58% d'érection.
Contre les greffes nerveuses, il y a la position de principe de WALSH
[26], pour qui, si la bandelette a été sacrifiée c'est que le patient était
suspect d'une atteinte extra-capsulaire : il n'y a donc pas lieu de
réaliser une greffe nerveuse alors que le patient devra subir en post
opératoire soit de la radiothérapie soit une hormonothérapie, soit
même que le nerf soit envahi par la tumeur et que la greffe nerveu-
se puisse servir de tuteur pour la tumeur. Sur le plan anatomique,
COSTELLO [4] a montré sur 12 dissections anatomiques que l'étale-
ment nerveux était tel qu'il semblait difficile de pourvoir réaliser
une greffe nerveuse.
Pourtant des études ont été faites par KIM [9] : les greffes nerveuses
sont justifiées si une résection nerveuse est nécessaire parce que les
biopsies positives sont multiples, parce qu'il y a une longueur de
biopsie positive suffisante, parce que le grade de Gleason est élevé
C. Kanso et coll., Progrès en Urologie (2005), 15, 621-625
623
et parce qu'il y a une suspicion d'extension extra-capsulaire en ima-
gerie. Il utilise alors une greffe du nerf sural et il rapporte [9] les
résultats sur 28 patients chez qui il a réalisé une résection bilatéra-
le : 26% des érections spontanées, 43% si l'on inclut le sildénafil.
Dans la technique de KIM,il s'agit de 12 patients sélectionnés avec
isolement et exérèse bilatérale des bandelettes vasculo-nerveuses
alors qu'il n'y a aucune raison de penser qu'ils devront subir après
une radiothérapie ou une hormonothérapie. Après exérèse des ban-
delettes, une bandelette visible ou un plexus de tissu demeure au
sommet du rectum. Les extrémités nerveuses sont clippées et est
réalisée une greffe bilatérale de nerf sural longue de 5 à 6,5 cm. La
greffe nerveuse est anastomosée au groupe de fibres nerveuses qui
en agrégat représente le nerf caverneux. TAKENAKA [25] a récem-
ment montré qu'à la jonction vésico-prostatique il s'agissait du nerf
hypogastrique supérieur, 2 à 3 cm sous la jonction vésico-prosta-
tique il s'agissait des racines nerveuses S2 et S3 et qu'en anastomo-
sant une racine nerveuse sympathique à une racine nerveuse para-
sympathique, il était difficile d'envisager une récupération des érec-
tions.
Sur le plan technique, reste comme l'a montré ALI[1], que le plexus
hypogastrique inférieur était étalé, difficile à greffer.
Dans le futur, pour se substituer aux greffes nerveuses il est préco-
nisé des tubes de silicone le long desquels se ferait une régénération
nerveuse spontanée orientée. De grands espoirs sont encore fondés
dans les facteurs de croissances nerveuses mis au contact des extré-
mités nerveuses dans le petit bassin.
STIMULATION DES NERF CAVERNEUX
L'identification des nerfs n'est pas toujours évidente, que ce soit
avant ou après l'extirpation de prostate, pour des raisons liées à l'a-
natomie du patient ou aux facteurs chirurgicaux locaux comme les
adhérences et l'hémorragie [14, 16] d'où l'idée de stimulation ner-
veuse per opératoire pour aider à identifier et préserver les nerfs, ou
même à prédire le pronostic fonctionnel érectile. La stimulation per
opératoire entraîne une élévation des pressions intra-caverneuses et
une érection.
La stimulation per opératoire des nerfs caverneux par le système
Cavermap apportait des espoirs : elle a été décrite initialement par
LUE [14] puis reprise par WATSON et KLOTZ [11, 12, 31]. Mais KIM
[10], s'il retrouve 77% de réponses positives per opératoires, ne
retrouveque 18% de puissants avec conservation unilatérale et 27%
avec conservation bilatérale. WALSH dans une étude multicentrique
[28] est plus pessimiste montrant qu'il y a une sensibilité per opéra-
toire de 88% mais une spécificité de 54% seulement. Une seule cer-
titude s'il n'y a pas de réponse lors de la stimulation per opératoire
il n'y aura pas d'érection en post opératoire.
LA PHARMACOTHERAPIE APRES PROSTATECTOMIE
RADICALE
Chez les patients ayant une érection pré opératoire avec conserva-
tion des bandelettes neuro-vasculaires il existe des érections effica-
ces spontanées à 1 an de 24% si préservation unilatérale, de 45% si
préservation bilatérale [17].
PADMA-NATHAN [18] a montré qu'après préservation bilatérale des
bandelettes neuro-vasculaires à 6 mois, les patients prenant du sil-
dénafil avaient 27% d'érection contre 4% avec placebo. MONTORSI
[15] compare deux groupes de 15 patients, l'un recevant des injec-
tions intra-caverneuses de PGE1 trois fois par semaine pendant 4
semaines l'autre rien. Les érections spontanées reviennent dans 67%
des cas avec PGE1, 20% des cas en observation au bout de 3 mois.
Une étude comparant l'intérêt des phosphodiestérases 5 et des
PGE1 conduite par RASWEILLER,2005, montre là aussi un résultat
favorable s'il y a conservation des nerfs bilatéralement plus avec la
PGE1 qu'avec la phospho-diestérase 5.
STIEF,2005, propose un protocole de traitement pro-érectile : infor-
mation du couple avant la prostatectomie radicale pour savoir leur
motivation, expliquer la réhabilitation sexuelle précoce, débuter dès
l'ablation de la sonde par 3 fois par semaine 1/4 de comprimé de sil-
dénafil 100 au coucher, faire le bilan au bout de 3 mois. S'il n'y a
pas de tumescence, prescrire au patient des injections intra-caver-
neuses.
CONCLUSION
La chirurgie de préservation nerveuse demeure le pivot d'une
conservation de l'activité sexuelle après prostatectomie radicale.
Les différentes voies d'abord ne présentent pas de différence signi-
ficative. La chirurgie de greffe nerveuse est encore sujette à éva-
luation. La stimulation per opératoire n'apporte pas d'aide signifi-
cative. Enfin, un traitement pro-érectile précoce semble apporter
une amélioration dans la reprise des érections.
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SUMMARY
Preservation of erectile function and radical prostatectomy : what
to expect in 2005?
The preservation of erectile function in patients undertaking radical prosta-
tectomy was discussed in multiple studies. In this review article we will dis-
cuss the factors which influence the recovery of erections as well as the the-
rapeutic modalities. In fact, four possibilities of prevention and treatment
are currently available : (1) nerve sparing surgery, (2) nerve grafting, (3)
nerve stimulation and (4) pharmacotherapy after surgery.
Key-words : Radical prostatectomy, nerve preservation, erectile dys-
function.
C. Kanso et coll., Progrès en Urologie (2005), 15, 621-625
625
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