Colloque International – Sciences Humaines et Cancérologie
– 12 et 13 juin 2008 - Besançon
4
dédouaner : « J’ai dit tout ce que j’avais à dire ». Peut-on
bricoler une clinique du protocole dans un rapport pour le
moins antinomique ? La dérive peut s’avérer cinglante. Et si,
malgré tout, le psy avait son mot à dire sur la question ? Tout
ne peut pas s’inscrire dans les limites d’un protocole. Qu’en
est-il alors lorsque le cadre, débordé, suinte sur les marges du
subjectif et de la relation à l’autre ?
Au-delà et par delà les limites du cadre, qu’est-ce qui
vient se jouer dans ce qui échappe ?
Du côté des patients, l’annonce voile tout autant qu’elle
dévoile, marquant la rupture indélébile dans le processus de
continuité identitaire. Parole qui informe, parole qui déforme
aussi, lorsque le corps, jusque là silencieux, semble trahir.
Etrangeté d’un soi qui devient autre. L’enveloppe se
rompt, se troue, se déchire. Enveloppe psychique autant que
corporelle. Véritable effraction, la parole entre au-dedans de
l’être jusqu’à le modeler, le déformer. Ecrasant les nuances, les
mots ne tissent plus le lien, ils le brisent .Mots qui se disent,
mots qui se taisent, mots qui se muent en passages à l’acte
lorsque les représentations se substituent au sens. Le sujet
devient malade : il est son cancer. Le mot devient la chose.
Ainsi en témoigne cette patiente : « Il n’y a pas que la maladie
qui tue, les mots tuent aussi. La différence, c’est que la maladie
vous laisse le temps ; les mots, eux, vous achèvent ». Le
traumatisme est d’autant plus grand que le diagnostic est
inattendu. La maladie est d’emblée associée à une série de
pertes dont le processus s’apparente à un véritable travail de
deuil. Il n’est alors pas rare d’entendre certains patients
évoquer un vécu de dépersonnalisation transitoire : « Au début,
quand le médecin m’a annoncé mon cancer, je n’y croyais pas.
Ce n’était pas possible. Ce n’était pas moi. Il parlait de
quelqu’un d’autre. Et puis, au bout d’un certain temps, on était