commission des affaires etrangeres, de la defense et des forces

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COMPTE-RENDU DU RAPPORT D’INFORMATION DU SENAT
COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES, DE LA DEFENSE ET DES FORCES ARMEES
CLIMAT : VERS UN DEREGLEMENT CLIMATIQUE ?
06 octobre 2015
Résumé : Le changement climatique comporte des risques pour la stabilité internationale en raison de la
montée du niveau des mers et des océans, mais aussi à cause de l’intensité croissante des catastrophes
naturelles et de l’augmentation des tensions sur les ressources alimentaires, hydriques et énergétiques. Ce
changement climatique est susceptible de modifier les équilibres régionaux, tel qu’en Arctique. Une forte
augmentation des déplacements de population est possible.
Une aggravation des fractures entre pays pauvres et riches, entre hémisphères nord et sud en résultera.
Objectif du rapport : apprécier les conséquences géopolitiques du dérèglement climatique car possibilité de
bouleversement global.
Impacts du changement climatique :
- augmentation du niveau des mers et des océans qui dépend de trois paramètres : volume des
cuvettes océaniques (processus géologique), quantité d’eau liquide (fonte des calottes de glace) et
température de l’océan
- coûts importants de réaménagement des territoires
- déplacements de populations
- conséquences géostratégiques graves : accroissement du fossé entre émetteurs du Nord et victimes
du sud, impact sur les chaînes d’approvisionnement.
►Nécessité de renforcer les capacités à mettre en œuvre et de mieux coordonner les moyens déployés sur
les théâtres d’opération. Plus grande exposition des forces de sécurité. Renforcement des capacités
opérationnelles. Adaptation des matériels à ce type d’intervention (vigilance sur les tirants d’eau, impact sur
la propagation des ondes radio,…). Constitution d’un réservoir de forces ?
Impacts de la montée du niveau de la mer :
- submersions, (submersions temporaires : mise en danger des personnes exposées +++)
- érosion des côtes (70% des côtes actuellement en érosion)
- intrusions salines dans les aquifères côtiers
- conséquences sur les infrastructures
- impact indirect sur la biodiversité des zones littorales : volume et qualité des poissons pêchés dans
les ZEE des Etats riverains pourront conduire à des différends sur l’établissement de quotas ou de
zone d’exclusion.
- Dans les pays riches : reconstruction peut offrir de nombreux emplois non qualifiés à des travailleurs
par le chômage, dans les PVD : renforcement de la pauvreté, des déplacements de populations et
des situations conflictuelles graves. Déstabilisation du marché du travail, baisse des rémunérations
et donc du pouvoir d’achat.
- Risques aggravés sur installations industrielles à risque : arrêt de la production (pb si domaines
stratégiques liés à la défense dans les pays importateurs), dégâts aux installations (cf. Fukushima,
industrie pétrolière en Louisiane, centrales thermiques en Californie), pollution de l’environnement
(gestion des eaux usées et saturation des réseaux).
- Facteurs de crise sociale (frustration, mécontentement, manifestations, émeutes, tensions entre
différents groupes ethniques et religieux, radicalisation politique) et de guerres. Progressivité du
phénomène minimise la magnitude du risque de conflits.
- Altération de la délimitation des frontières, déclenchement de différends à propos de délimitations
maritimes, voies de circulation et accès aux ressources.
-
-
Transformation de la géographie des productions et des risques aggravés par la sécurité alimentaire
dans les zones vulnérables (bandes côtières du Pakistan à la Birmanie, régions littorales de
l’Indonésie, des Philippines, de l’Afrique et de l’est du bassin méditerranéen, îles du Pacifique).
Menaces sur le système de couverture assurantiel du risque (seulement 3% des biens économiques
assurés dans les pays du Sud).
Impact sur l’étendue des zones définies par le droit de la mer : probable dans les zones à fort enjeu
économique (zones de pêche ou zones à gisements d’hydrocarbures).
Exemples de déplacement :
27,5 millions de personnes ont quitté leur foyer en moyenne chaque année entre 2008 et 2013 en raison de
facteurs écologiques.
2013 : Asie = continent le plus touché (87% des déplacements), Sahel et Etats insulaires d’Océanie et des
Caraïbes.
Déplacements plutôt internes, notamment en raison des obstacles posés aux passages des frontières.
Conséquences sécuritaires : gestion des flux de populations et traitement de ce phénomène par les Etats
touchés.
Dans les Etats faibles, afflux de réfugiés susceptible de bouleverser des équilibres internes déjà fragiles :
conflits pour l’appropriation des terres, développement de camps de réfugiés et donc de trafics en tout
genre, augmentation de la criminalité organisée, de l’endoctrinement politique ou religieux, premiers pas
vers l’action subversive. Multiplication des actions armées contre ces problèmes pour prévenir ou rétablir la
stabilité, lutter contre les conséquences de l’instabilité et protéger les intérêts ou les frontières.
Le cas du Pacifique :
A long terme, disparition possible de territoires insulaires précédée de la dégradation progressive de leur
écosystème.
Territoires français touchés : Wallis, Futuna, îles de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française.
Conséquences en droit international :
- Submersion d’un territoire ou abandon par sa population = perte de souveraineté.
- Espace maritime susceptible de revenir à la haute mer
- Population devient apatride et questionne le droit d’asile.
► A ce stade, aucun instrument international ne permet la reconnaissance d’un statut juridique de « déplacé
climatique » ni ne prévoit de protection spécifique.
L’affirmation de la souveraineté française dépend de la présence effective et visible de l’Etat.
Augmentation à venir des phénomènes climatiques + contraction des budgets de défense en Europe =
interrogation sur les capacités de réaction et de résilience des territoires qui seront frappés par les aléas.
► Nécessité de revoir la répartition des engagements des forces armées dans le prochain Livre Blanc en
cas de multiplication de ces engagements. Mutualisation à l’échelle européenne ?
Diverses politiques d’atténuation :
- Protocole de Montréal : 196 pays signataires en 2009. Impact sur le secteur de la défense, plus gros
consommateur public d’énergie dans l’UE.
- Initiative Nansen, 2011 : renforcer les connaissances et combler les lacunes juridiques et
opérationnelles sur la protection des déplacés transfrontaliers liés aux désastres naturels.
- Convention de Kampala, 2009 : approche intégrée originale sur la protection et l’assistance aux
personnes déplacées en Afrique.
Le cas particulier de l’Arctique
Le réchauffement pourrait conduire à une banalisation de l’Arctique, voire à son atlantification : émergence
d’un nouvel espace d’échanges et bouleversement des grands équilibres de la planète.
Conséquences du réchauffement climatique :
- recul de la banquise,
- fonte des glaciers qui contribue à la montée du niveau des mers (+ évaporation = diminution de la
salinité des océans, modification des courants océaniques et perturbation du Gulf Stream)
- fonte du pergélisol : apparition de marécages, déstabilisation de bâtiments, d’infrastructures, de la
végétation, risques d’affaiblissement de terrain et d’émanation de carbone sous forme de gaz
carbonique ou de méthane, risque de résurgence de virus enfouis.
- Migrations d’espèces
Divergences de vue entre les Etats riverains de l’Arctique sur le statut juridique des passages du Nord-Ouest
et la délimitation des plateaux continentaux.
Canada et Russie : voies maritimes du Nord sont des eaux intérieures sous juridiction nationale.
Franchissement nécessite autorisation de passage et peut faire l’objet d’une interdiction.
Autres pays dont Etats-Unis : statut de détroit international, liberté de transit permanente.
L’Arctique est un enjeu de la relation Russie-OTAN :
- Russie revendique une large partie de l’Arctique incluant le pôle nord. Programme d’aménagement
du territoire, installation de bases militaires et mise en exploitation de gisements d’hydrocarbures.
De loin le pays le mieux équipé pour la navigation polaire. En quête de réaffirmation de puissance.
- Organisation d’exercice militaire par l’OTAN
► Donc, risque de militarisation de l’Arctique.
L’Arctique et l’Asie :
- potentiel en ressources naturelles et perspective de nouvelles routes maritimes expliquent l’intérêt
des pays asiatiques.
- Elargissement du cercle des observateurs au Conseil arctique.
- Intérêt de la Chine à replacer dans le cadre de la politique de recherche chinoise et de sa politique
d’investissement, notamment en terres agricoles, sur tous les continents et de sa volonté de
s’impliquer dans l’ensemble des grands enjeux internationaux. Intérêt manifeste pour le Groenland
qui possède des terres rares.
- L’Inde : promeut la stabilité et la démilitarisation.
Conseil arctique :
- Créé en 1996, déclaration d’Ottawa
- Priorités : protection de l’environnement et des peuples autochtones.
- 8 membres : Canada, US, Finlande, Islande, Norvège, Russie, Suède et 12 observateurs : France,
Allemagne, Pays-Bas, Pologne, Espagne, RU, Italie, Chine, Japon, Inde, Corée, Singapour.
- Règlement des différends via le droit international de la mer. Discussion plus que décision.
- Avancées : appui aux négociations pour définition Code polaire pour la navigation et signature de 2
accords sur coopération en matière de recherche et sauvetage aéronautiques et maritimes et sur
préparation et lutte contre pollution marine par les hydrocarbures
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