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renforcée par la végétation et par la double 
façade. C’est ainsi que la température inté-
rieure peut être abaissée de 5°C. Le léger 
courant d’air lié à la thermique dans les 
pièces apporte un refroidissement complé-
mentaire. 
C’est la première fois dans ce projet que 
nous avons travaillé avec des modules de 
mur préfabriqués. Nous n’avons pas utilisé 
des blocs d’argile renforcée au ciment 
comme ceux que nous avons mis en œuvre 
dans nos projets précédents, mais nous 
avons coulé l’argile dans des modules de la 
hauteur des pièces que nous alignons les 
uns contre les autres et qui se contreventent 
mutuellement. Cela nous permet d’économi-
ser l’énorme tâche de mouler les blocs et de 
les appareiller pour réaliser les murs. Nous 
souhaitions exploiter la flexibilité de l’argile 
qui est si malléable, mettre en œuvre ses 
caractéristiques naturelles sans réaliser de 
briques. Pour pouvoir démouler rapidement 
l’argile un petit pourcentage de ciment est 
rajouté. Des expériences ont prouvé que 
cette proportion de ciment pouvait rester 
très faible, deux sacs de ciment suffisent 
pour un module. Nous sommes arrivés à 
une forme qui correspond à l’architecture 
deterre. Les matériaux de base sont direc-
tement issus du site, au plus loin dans un 
rayon de 600 m. Juste sous la couche d’hu-
mus le sol contient du fer ce qui lui donne sa 
coloration rouge. La déforestation massive 
du passé a participé à la désertification du 
paysage. Dans ce projet nous cherchons à 
soutenir la reforestation par de nouvelles 
plantations que nous arrosons avec l’eau 
depluie. Comme nous n’utilisons aucun 
 appareil de climatisation mais seulement 
des ressources régénératrices et gratuites 
laconsommation énergétique pour la 
construction et l’exploitation de l’école est 
réduite au minimum. 
Bibliothèque scolaire à Gando
Le hasard ou des décisions spontanées ont 
aussi une part importante dans nos projets. 
Quand elles sont bien intégrées au proces-
sus, ces dernières ne diminuent pas la qua-
lité des bâtiments mais peuvent au contraire 
les renforcer. Dans le cas de la bibliothèque 
scolaire de Gando nous avons découpé 
des pots en terre existants avant de les inté-
grer dans les éléments de dalles banchés 
pour créer des ouvertures de ventilation 
(ill.10 –12). Nous essayons toujours d’utili-
ser les matériaux qui sont disponibles sur le 
site et de les adapter aux besoins du projet. 
La fonction de ce type d’ouverture est sur-
tout déterminée par les conditions clima-
tiques, elles servent, au delà de l’éclairage, 
toujours pour la ventilation et le refroidisse-
ment. En revanche le réfectoire du restau-
rant du Parc national du Mali est climatisé ; 
l’ensemble du complexe a un niveau de 
confort assez élevé, c’est là par exemple 
que ce sont tenues les dernières confé-
rences des chefs d’état et de gouvernement 
sur le futur du pays. Mais là aussi on a sur-
tout besoin de grands toits qui font de 
l’ombre, comme des arbres. 
Transformation de techniques existantes
Même si nous profitons avec tous nos bâti-
ments de conditions heureuses, la base de 
notre travail est toujours l’analyse soigneuse 
et solide du site et des ressources dispo-
nibles. Nous ne développons jamais nos bâ-
timents seulement par rapport à des critères 
esthétiques. Quelques ingénieurs ont 
d’abord été plutôt sceptiques vis à vis de 
nos toitures à fort débordement. Pour moi il 
a toujours été clair que cela fonctionnait et 
j’en avais la certitude grâce à l’observation 
des constructions traditionnelles de mon 
pays. Au Burkina Faso il y a les « tuguna », 
les maisons de réunion des hommes. Ce 
sont des structures très basses avec des 
ossatures en bois recouvertes de paille 
quiservent de toiture et dépassent parfois 
 seulement d’1 m 50 au dessus du sol sous 
lesquelles les hommes se réunissent. Sou-
vent les poutres en bois sont plus rappro-
chées pour être recouvertes de nattes de 
paille et le seul élément d’assemblage est 
alors la corde. Ces bâtiments sont ouverts 
de toutes parts et tiennent souvent trois 
quatre ans avant de devoir être réparés 
parce que la paille est pourrie ou que les 
termites ont mangé le bois ; par contre, le 
vent n’attaque jamais ces structures. C’est 
pour cela que mes toits sont toujours ouverts 
de tous les côtés, pour permettre aux cou-
rants d’air de passer dessous. La charpente 
est filigrane et n’oppose pratiquement pas 
de résistance au vent. Ce sont les bâtiments 
traditionnels qui m’ont inspiré ça. Par rap-
port aux structures traditionnelles en terre, 
comme celles qu’on trouve au Mali, la com-
binaison des toits ventilés et des murs en pi-
sé constitue une nouvelle forme constructive 
contemporaine. Nous avons fait des expé-
riences avec la tradition et essayé du neuf. 
Nous n’inventons cependant rien, nous nous 
servons des techniques existantes et nous 
les transformons. Que cela soit pour l’école 
de Gando où l’on continue de souder la toi-
ture ou bien le projet de village opéra de 
Christoph Schlingensief, qui est aussi en 
train d’être complété par une autre équipe, 
pour tous ces bâtiments je me suis servi des 
possibilités existantes. Au début je n’ai pas 
utilisé de bois parce que je savais que tous 
les trois ans les termites dévorent tout, ce 
qui est très risqué pour les grandes portées. 
Aujourd’hui je sais comment utiliser intelli-
gemment l’Eucalyptus dans les structures 
sans mettre en péril toute la structure. 
Maison de rassemblement des femmes 
àGando
Dans le cas des bâtiments de l’association 
des femmes de Gando, association qui a 
pour objectif de proposer aux femmes de la 
région une plate-forme pour améliorer leur 
formation et leur situation économique, de 
grands pots en terre sont intégrés aux fa-
çades (ill. 13 –15). Les femmes des villages 
africains utilisent ces jarres, qu’elles réali-
sent elles-mêmes, pour conserver tout ce 
qu’elles possèdent. La terre des façades est 
mélangée à de la paille au cours d’un pro-
cessus commun entre les hommes et les 
femmes du village et les pots sont insérés 
pour créer des niches accessibles de l’inté-
rieur. Ainsi que les pots servent à la fois 
d’étagères, de réserve d’eau et de garde-
manger. 
Les initiatives locales considérées comme 
deschances
Un continent comme l’Afrique a tous les 
 potentiels pour se développer positivement 
à condition que les gens aient accès à l’in-
formation, l’éducation est décisive. On re-
garde bien trop souvent seulement l’Ouest 
et ses nombreuses possibilités pour en tirer 
des leçons qui seront fausses pour servir 
d’exemple. Que certains qui ont atteint 
quelque chose en Afrique vivent à l’Ouest 
comme des chefs de gouvernement et se 
déplacent, pour leur sécurité, dans des vé-
hicules blindés est une représentation falsi-
fiée. Le continent ne retire aucun bénéfice 
quand ses ressources sont exploitées pour 
singer ce style de vie, puisqu’après il ne res-
tera plus rien. Pour copier les pays indus-
triels occidentaux il manque en Afrique les 
moyens et les possibilités techniques et, en 
plus, nos bases culturelles sont totalement 
différentes. Investir en Afrique sur la techno-
logie des panneaux solaires, puisqu’il y a 
beaucoup de soleil, n’a pas beaucoup d’in-
térêt en ce moment. Si l’on réfléchit aux pro-
ducteurs de ces panneaux, on comprend 
que le peu de ressources sera envoyé en 
Chine pour des produits qui tomberont en 
panne plus tard et que nous ne pourrons ni 
réparer ni recycler en Afrique. C’est seule-
ment en nous inspirant de modèles de notre 
propre centre, qui restent dans le cadre de 
nos possibilités, que le continent pourra se 
développer positivement. Nos bâtiments en 
terre sont particulièrement bien acceptés au 
Burkina Faso et cela me donne l’espoir que 
de plus en plus d’initiatives locales vont voir 
le jour et attirer l’attention sur elles. C’est 
decette façon que davantage de modèles 
africains vont pouvoir se développer ce qui 
pourra améliorer le futur du continent. 
Musée international de la croix rouge et 
 croissant rouge à Genève
Dans notre pratique nous exportons du sa-
voir d’Europe vers l’Afrique mais à l’inverse 
nous pouvons aussi apprendre beaucoup 
de choses en Europe de l’Afrique et particu-
lièrement comment on peut relier les gens. 
Après la visite du directeur du musée de la 
Croix-Rouge de Genève au Burkina Faso 
avec moi nous avons pu honorer notre pre-
mière commande en Europe (ill. 20).
La nouvelle exposition permanente du 
 Musée a été conçue par trois architectes 
d’horizons et de formations différents, cha-
cun traitant d’un thème particulier. Gringo 
Cardia, du Brésil a traité la partie de l’expo-