Le Messie, promis et attendu chez les Hébreux, était principalement désigné sous les deux noms de fils de
David par tous les Hébreux et de roi de Juda par les Judéens fiers de leur privilège royal d'avoir la dynastie
de royauté la plus ancienne, celle de David sur la tribu de Juda.
La double généalogie de Jésus, d'après l'Évangile, montre qu'il était véritablement, par filiation naturelle, fils
de David, et, par descendance dynastique, roi de Juda; il était fils de David par Marie, héritier légitime de
David par Joseph. (...)
Jésus tenait ses droits familiaux et ses titres royaux de Joseph et de Marie, descendant l'un et l'autre, dans
une ligne différente, de David. Tous deux, rejetons royaux, mais devenus marginaux car depuis longtemps
écartés du trône, avaient donc à se rendre, pour le recensement, à Bethléem, la ville originaire de leur
commun ancêtre.
C'est ce que dit saint Luc : "ascendit autem et Joseph... ut profiteretur cum Maria... (2,4-5)".
Mais des critiques, qui ont encore objecté contre l'Evangile l'inutilité de la présence de Marie au
recensement, prétendent pour se donner raison que le texte de saint Luc, qui fait venir Joseph avec Marie à
Bethléem, n'est pas à traduire: "Et Joseph monta, lui aussi, à Bethléem pour se faire inscrire avec Marie",
mais "Et Joseph, lui aussi, monta avec Marie, pour se faire inscrire".
Ici, encore, la philologie condamne cette interprétation qui fait violence au texte. L'Evangile dit
formellement, en araméen puis en grec et en latin (et tous les manuscrits concordent sur ce point), que
Joseph alla à Bethléem pour se faire inscrire avec Marie: "ut profiteretur cum Maria".
Marie, en effet, avait aussi à satisfaire à la loi du recensement
Une ancienne tradition, conforme à l'Évangile, fait de Marie, selon la loi juive, une fille héritière,
c'est-à-dire une fille aînée, n'ayant pas de frère et possédant un héritage de ses parents, sinon la maison
d'Anne, sa mère, à Jérusalem, du moins, celle de Joachin, son père, à Nazareth, où l' Ange qui vint la visiter,
la trouva seule. Et, en effet, l'Évangile, qui mentionne une "sœur", c'est-à-dire pour nous une cousine d'elle
(lJn 19, 25) ne lui donne pas de frère.
C'est en cette qualité de fille héritière, et conformément à la loi mosaïque qui voulait maintenir dans leur
intégrité le territoire des diverses tribus et empêcher la confusion des propriétés, que Marie avait dû
épouser un homme de la tribu de son père, son plus proche parent, Joseph, le Booz de la nouvelIe Ruth, qui
était, comme elle, de la tribu de Juda.
Moïse avait établi la règle, en effet, selon laquelle les filles héritières ne pourraient se marrier hors de leur