Stage sur l’alimentation Dynamique, Dornach , 10-15 mars 2013 Organisé par la Section d’Agriculture du Goetheanum Marie Jo Amiand (IPC/ F-Chatou), Susana Asquith (Ecole R.Steiner Genève), Sylvie Audouin (Structure d’accueil en Biodynamie, CH-Savigny), Odile Bachelin (Ecole R.Steiner,Genève), Jérôme Bocquet (Assoc. La Branche, Savigny), Christian Boy (Assoc. La Branche, Savigny), Ina Chesnier (LabelBio, Ecole R.Steiner en région d’Avignon), Gilles Daveau (formateur indépendant en cuisine alternative, F-Vertou), Rafaella Duret (Ecole Perceval de Chatou), Natalia Rama (Assoc. La Branche, Savigny), Cornelia Vellut (Nutritherapeute, CH-Gland) Présentation Générale du stage et de l’anthroposophie - JM Florin Au début du 20ème siècle, Rudolf Steiner, issu de la Théosophie (approches spirituelles et ésotériques de la connaissance), propose l’approche anthroposophique pour apporter des solutions opérationnelles et pratiques dans divers secteurs de la vie humaine : l’agriculture, la médecine, la pédagogie, etc. Il définit l’anthroposophie comme un moyen de relier le spirituel dans l’homme avec le spirituel dans l’univers, amenant la personne à prendre conscience de son humanité : comment, en tant qu’homme, je pense ma vie, je me soigne, je mange, etc. Steiner a présenté et développé cette approche en répondant à des questions pratiques, souvent d’ordre professionnel, dans différents domaines de la vie humaine et sociale. Conférence d’introduction sur la Biodynamie – JM Florin – 11 mars La Biodynamie est une approche « contextuelle » de l’agriculture qui vient répondre à des questions posées par les agriculteurs au début du XXème siècle, alors que se généralisent des pratiques agronomiques modernes voire industrielles, dont on ne connaît pas encore les conséquences, mais dont on constate déjà certains effets négatifs. Comment envisager alors l’agronomie dans ce contexte, notamment pour restaurer les cycles et la continuité entre plante, animal et sol, ainsi que le lien entre la terre et le cosmos ? Ces questions ne se posent pas il y a 10000 ans, aux origines de l’agriculture, lorsque l’homme se sédentarise. L’agriculture s’inscrit dans ces liens verticaux et horizontaux et est conçue comme un « culte » rendu, où l’être humain, intermédiaire actif et responsable entre le monde spirituel et la nature, ne se contente plus de prélever (cueilleur chasseur) mais vient, en semant, se lier à la terre en y amenant des forces de lumière (la graine). Cette dimension spirituelle perdure au fil des siècles, où l’on continue de prier avant de semer (jusque 19ème) ou de couper le pain (milieu 20ème). Dans la 2ème moitié du 19ème siècle l’agriculture est peu à peu envisagée comme une production industrielle et la fin de la 1ère guerre mondiale marque un tournant lorsque les explosifs sont recyclés en engrais azotés, initiant l’origine guerrière des démarches d’agro-industrie qui se retrouvera aussi dans les défoliants/herbicides et la machinerie agricole. Dans les années 20, R Steiner vient apporter des réponses à 5 types de questions exprimant des préoccupations formulées par les agriculteurs et chercheurs. • Quelles conséquences auront les apports d’engrais azotés en terre ? • Comment régénérer des espèces animales et végétales en perte de vitalité (bétail sujet aux maladies, plantes moins vivaces…), comment préserver cette vitalité ? • Comment révéler, observer, mesurer… les forces de vie d’une plante, d’un produit ? 1 • • Les forces cosmiques (lune, planètes,…) ont-elles une action ? Comment améliorer les conditions de vie des populations agricoles ? Les réponses apportées, notamment sur la question 2, révèlent comment, au 20ème siècle, on a commencé à appliquer les lois industrielles dans notre relation à la nature par une segmentation : il s’agit donc en particulier de restaurer la continuité et la boucle (le cycle sain) entre la plante (apporte la nourriture) > l’animal (apporte la fumure) > le sol > la plante etc. L'idée est donc de soigner la terre, les animaux et les hommes, de créer des paysages dans une recherche d'harmonie à partir des besoins des plantes et des animaux. Ces systèmes organiques ne produisent pas de déchets et n’ont pas de besoins extérieurs (achats d’intrants). Ils produisent un excédent (produits alimentaires animaux et végétaux) à chaque stade qui permet de nourrir les humains sur place (la ferme et ceux qui cultivent) et au delà (le monde social). L’approche Biodynamique cherche à produire plus afin de garantir l'autonomie de l’exploitation tout en respectant la cohérence organique de l'ensemble des processus. Elle aborde l’agriculture et l’élevage à l’inverse des techniques modernes basées sur la segmentation et la spécialisation, dans lesquelles les techniques employées considèrent les espèces comme des machines à produire « hors-sol ». Outre les gaspillages multiples, l’or du paysan (le fumier) est devenu un déchet, qui plus est polluant. La perte du lien vertical entre cosmos et terre est corollaire d’une totale irresponsabilité, d’une perte de sens avec une très forte morbidité (taux de suicides notoirement élevé) des populations agricoles. La Biodynamie cultive le lien entre ciel et terre, elle va se consacrer à retrouver une agriculture « intégrée » sur tous les plans, y compris sur le plan social, avec une réflexion sur des pratiques coopératives, afin de ne pas s’aliéner au travail agricole, si exigeant et contraignant avec son rythme de travail 365/365 jours. Les pratiques agronomiques biodynamiques vont au-delà des pratiques de l'agriculture biologique. Elles sont quasiment d’ordre thérapeutique et visent à redonner de la vitalité (« des forces de vie »), à la terre, aux plantes et aux animaux. On pratique ainsi des rotations de culture (avec notamment une phase «légumineuses» pour apporter de l’azote au sol), des assolements qui répartissent les différents types d’espèces (avec besoins et impacts différents), l’utilisation de compost (fumier) pour renforcer la vie du sol (particulièrement riche en vers de terre). Le lien terre-ciel est favorisé avec la bouse de corne qui stimule l’enracinement, et la silice de corne qui optimise l’utilisation de la lumière par les plantes. Les ambiances qui sont favorables à la résistance naturelle des plantes sont améliorées par les tisanes de prêle des champs ou d’orties (pulvérisations). Il s’agit de stimuler la plante pour qu’elle assimile mieux les éléments du sol : l’azote pour sa croissance, le phosphate et la potasse pour sa fructification : ces éléments sont rendus plus disponibles par la vie du sol. L’approche est totalement renversée par rapport à l’agriculture conventionnelle. Au-delà du fumier qu’il apporte, l’animal par sa présence et son « astralité » participe d’une ambiance favorable aux plantes : il n’y a pas de plantes sans vie animale. Le lien indéfectible entre les espèces et les terroirs est également observé. On utilise 6 types de plantes médicinales en préparation selon les observations du sol, afin de le soigner : l’achillée, le pissenlit, la camomille, l’ortie, l’écorce de chêne et la valériane. … une première approche à poursuivre. En résumé, cette approche agronomique organique favorise les liens horizontaux et verticaux, et stimule la vie à tous les niveaux : ceux qui découvrent la biodynamie le perçoivent-ils dans les produits ?... notamment par l’aspect, le goût, l’analyse de son ressenti, ou bien par ce que révèle la méthode des cristallisations sensibles ? 2 2 cours sur l’alimentation dynamique – Joël Acremant – 12/13 mars Joël Acremant se définit comme « chercheur » en alimentation saine et dynamique. Enseignant de l’école de Chatou aujourd’hui en retraite, il y a également été pendant 12 années le cuisinier. 1ère partie Joël Acremant introduit son approche en analysant les visions réductrices de l’alimentation, y compris dans les approches de l’alimentation saine, et ce afin d’éclairer certains propos de R Steiner ou d’autres chercheurs en alimentation dynamique (Gerhard Schmidt, BircherBenner…). Les approches classiques de l’alimentation peuvent le plus souvent être rattachées à une vision limitée de l’homme. L’homme a peur de l’humanité dans l’homme, de sa grandeur, de sa spiritualité, de sa liberté. Il est plus facile de l’approcher en le simplifiant, voire en le rabaissant. A l’inverse on donne aussi à voir des modèles de « surhomme » souvent considérés comme inaccessibles. On voit en général 3 simplifications classiques : • • • L’homme machine : horloge, chaudière, usine, disque dur… L’homme animal : réduit à ses sensations et ses désirs/plaisirs L’homme plante : dont on peut stimuler la croissance, la vitalité Dans toutes ces approches et particulièrement dans celle de l’homme machine, c’est la logique de la gestion et de la comptabilité dans la relation avec la terre qui prime. L’homme est un ensemble de fonctions, avec entrées et sorties, à qui on fournit dans une logique standardisée et quantitative des calories, des nutriments (glucides, protides, lipides, fibres, micro-nutriments…). Les mots clés de cette gestion sont : la quantité, la matière, l’économie, le rendement, la dépense (physique…). Et il est corollaire de représentations ou dominent la peur et le manque. Mais ce modèle se fissure de plus en plus en plus car des constats simples s’imposent : la « machine » humaine marche toujours et parfois même mieux si l’on diminue les apports, de même qu’elle dysfonctionne souvent quand on les surmultiplie (repas très chargés…). Les approches de l’alimentation « saine », quant à elles, ont pour mot clés « la qualité » selon des critères classés ici par ordre d’importance décroissante : • Aliments vivants – frais • Aliments purs • Aliments non dénaturés … par leur mode de production, de préparation, etc. Mais ces approches connaissent aussi leur dérives, avec notamment une forme de « matérialisme bio » et des tendances au fanatisme, mais aussi avec des formes dénaturées ou perverties du bio (produits bio raffinés, etc…). Plus généralement, on peut voir les pensées réductrices sur l’homme continuer à « alimenter » les approches de l’alimentation saine : l’homme machine/animal ou plante, qu’on remplit de composants, de sensations, de stimulants « bio ». Contrairement à cette vision de l’homme « diminué », et donc « désengagé », l’alimentation anthroposophique ou dynamique s’appuie sur la connaissance de la nature humaine et envisage l’idée de l’homme qui se construit dans sa globalité, et pour qui l’important est « d’être librement en chemin ». Cette approche place l’homme au cœur d’un processus. Ce processus peut se symboliser par 3 cercles ou sphères considérés comme distincts mais qui vont peu à peu communiquer. C’est un point de vue qui concerne tout particulièrement le cuisinier (moi) dans son travail de préparation (l’aliment) pour nourrir l’autre (toi) dans une continuité « organique ». Grace à l’alimentation dynamique je valorise, j’agrandis l’aliment et 3 ma relation à l’aliment (et à l’autre): l’aliment n’est plus considéré comme un simple carburant. L’alimentation saine, dynamique stimule la vie de l’âme. L’ALIMENT TOI MOI On passe du quantitatif au qualitatif : ce n’est pas la matière qui vitalise le corps, c’est l’activité que nous déployons pour se l’approprier qui le dynamise. S’alimenter veut dire travailler avec les forces en devenir, afin de permettre à l’organisme de se fortifier, de pouvoir rebondir. Ainsi selon la citation de Bircher : « l’aliment est un tourbillon de lumière solaire condensée ». Ou comme le dit Rudolf Steiner : « L’alimentation est d’avantage « activité » que substance. L’alimentation n’est pas du monde du matérialisme mais du dynamisme. » 2ème partie Joël Acremant revient d’abord sur les 3 simplifications, l’homme/machine, l’homme/animal, l’homme/plante, qui ont en commun l’approche purement quantitative : quantité de matière, quantité de plaisir, quantité de vitalité. Comme pour l’approche homme/plante qui se caricature jusqu’à des formes de vitalisme/naturisme, les 2 autres approches encouragent (exacerbent) les instincts naturels, l’individualisme (l’égoïsme) et des formes d’animalité. L’aliment est conçu comme un puzzle, un ensemble mécanique de substances, ce que l’on retrouve dans la notion d’aliment « complémenté », qui néglige la notion d’aliment vivant où les substances sont en synergie. En tant qu’humain, on goûte le monde par tous les sens. La spécificité de l’alimentation est qu’avec la nourriture, ce sont des parties du monde qui pénètrent dans notre corps, et que celui-ci va devoir les transformer en les digérant. Un proverbe arabe dit « l’homme, en mangeant, tombe malade, mais il se guérit en digérant ». Le premier profit de l’alimentation est donc l’activation générée par le fait de devoir digérer, transformer l’aliment : c’est une obligation de passer à l’action. Ce n’est pas l’aliment que je mange qui m’apporte de l’énergie, c’est l’énergie que je déploie pour le transformer qui me stimule. Penser l’aliment en tant « qu’activité » plutôt que substance est la base de l’alimentation dynamique. On va pouvoir choisir en particulier des aliments vivants qui « rebondissent », c’est-à-dire qui, en plus de l’activité qu’ils mobilisent pour les transformer, apportent un plus en stimulation. Ce n’est pas le chou, la céréale, le navet que je mange qui m’apportent de l’énergie, c’est l’énergie nécessaire pour s’approprier la dynamique vivante de ces aliments qui me stimule. Par un schéma de silhouette corporelle, Joël montre que c’est tantôt la tête, en tant que pôle neuro sensoriel ou psycho-spirituel, tantôt le corps et plus particulièrement le métabolisme qui sont activés au cours de la journée. Avant le repas, à jeun, l’activité peut être plutôt au niveau de la tête. A la suite du repas c’est le pôle métabolisme qui est sollicité, engagé. Ainsi on peut interpréter la faim, non pas comme le signe que « les batteries sont vides », mais comme un appel intérieur comme si la tête, le pôle psycho-spirituel, dissocié ou divorcé du corps, avait besoin de recréer un lien avec ce dernier. 4 De façon similaire, dans un processus d’un jeune prolongé, on peut constater que la faim s’atténue au bout de quelques jours, en même temps que s’expérimente une forme de légèreté liée à une autre relation/attention entre les deux pôles: tête et corps. Cette polarité renvoie en particulier à 2 tendances, 2 types d’individus et singulièrement d’enfants : - le type « terrestre » hyper concentré, sérieux, à petite tête…l’enfant racine, (pauvre en souffre) qui aura besoin de s’alléger, attiré par le sucre . - le type « cosmique », à grosse tête, rêveur, etc … l’enfant fruit (riche en souffre) qui aura besoin de peser, de s’enraciner, attiré par le sel. Ces 2 typologies (ici très schématisés pour simplifier) sont mis en regard de la nature humaine et sa « tripartition inversée » par rapport à la plante, soulignée par l’alimentation dynamique. Les 3 parties de la plantes, racine / tige-feuille / fleur-fruit, viennent nourrir les différents pôles de l’être humain : le pôle volontaire ou métabolisme (stimulé par les parties fleur/fruit), le système rythmique ou partie médiane, liée aux sentiments de l’homme (respiration/circulation poumon/cœur stimulé par les parties tiges-feuilles), le pôle neurosensoriel psycho-spirituel (la tête, stimulée par les parties racines). Ici les représentations de la tripartition, affichées dans la cuisine du Sonnenhof, et qui sont à la base de la conception des recettes et de la constitution des plats/menus : Ces 2 typologies (enfant à petite tête / enfant à grosse tête) peuvent être complétées par un regard sur les 4 tempéraments : mélancolique, flegmatique, sanguin, colérique avec leurs tendances caractéristiques et nuancées en chaque individu qui s’expriment en autre par des affinités/des besoins plus ou moins marqués par rapport aux 4 saveurs classiques : Le salé Le sucré L’amer L’acide - Le mélancolique (schématiquement le + « tête ») a peu de besoin en sel - Le flegmatique (schématiquement le + « ventre ») a peu de besoin d’amer - Le sanguin a peu de besoin d’acide - Le colérique a peu de besoin de sucre Cet aperçu de l’alimentation dynamique pointe la possibilité pour le cuisinier en collectivité de monter d’un cran dans son approche d’une alimentation « saine » pour ses convives. Il peut reconnaître son propre rapport aux aliments et ainsi cuisiner de façon plus consciente et responsable pour les autres en sachant comment il interagit lui-même à 5 travers ses goûts : c’est la continuité entre toi, moi et l’aliment. Il peut affiner son regard sur les besoins différents des mangeurs et comment satisfaire alternativement, ou par de petites adaptations, les différents types de convives (tempérament, classe d’âge, types d’activité, etc.) dans différents types de contextes. (C’est en particulier ce que nous avons observé dans les structures thérapeutiques (cliniques, centre de pédagogie curative) dans lesquelles nous avons travaillé cette semaine). Joël évoque enfin la typologie des aliments dans leur plus ou moins grande proximité avec l’homme : Homme Cochon Cheval Vache Mouton chêvre Volaille Poisson Crustacés Œufs Lait - Miel Soja Légumineuses Oléagineux Céréales Légumes (cuits) Herbes Fruits Feuille verte Cette répartition permet de comprendre comment la dynamisation sera la plus forte lorsqu’il s’agit de transformer ce qui est le plus « loin » (le moins pré-organisé) de l’homme. Est-ce que je propose ou mange le + « dynamisant » ou le plus facile à transformer…suis-je également en mesure d’avoir des aliments très dynamiques par rapport à qui je suis, ce que je fais, etc… Joël conclue sur le fait que ces regards sur l’alimentation constituent aussi pour le cuisinier, en tant que transformateur des aliments reçus, le défi d’essayer d’être à la hauteur, d’être en cohérence avec la qualité de la production agricole biodynamique (et biologique), avec le soin qu’elle cherche à apporter à la terre et à l’homme. 6 Conférence sur l’alimentation et la santé – Michael Kastner Michael Kaessner, spécialiste de l’alimentation, intervient notamment pour la restauration collective, notamment pour l’adaptation de l’offre aux différentes classes d’âge. 1ère partie : alimentation et santé, quelques concepts et réflexions pratiques Dans cette première partie la réflexion porte sur la relation entre ces notions d’alimentation et de santé. Chacun a ses propres croyances et attentes en ce domaine. Qu’attend-on d’un repas de midi ? D’être rempli ? D’être guéri ? D’être vivifié ? Pourtant on est souvent fatigué après un « bon » repas. On fait donc un premier constat : La digestion demande des forces avant d’en donner et l’on est parfois trop fatigué, au point de ne plus être en capacité de manger. Ceci est de plus en plus fréquent chez des enfants comme chez des adultes. Il y a en allemand plusieurs mots pour qualifier les aliments : - « Nahrungsmittel» l’aliment comme moyen de se nourrir : celui qui fortifie et nourrit, pas forcément pourvoyeur de plaisir (ex bouillie). Il laisse nos organes des sens au repos et agit surtout sur le métabolisme, nous apporte des forces; on veut en tirer des substances. - « Genussmittel» l’aliment comme moyen de se faire plaisir (pratiquement « gourmandise »), y compris par la tête (l’idée gourmande que l’on s’en fait). Il stimule essentiellement notre système neuro-sensoriel et on peut se demander si il faut le considérer sous l’angle de l’apport nutritionnel. - et puis « Lebensmittel » l’aliment « moyen de vie », traduisible par « les vivres », qui exprime la priorité de vivre et renvoie au système rythmique, dont la respiration. Il stimule essentiellement notre vitalité. On peut le concevoir comme intermédiaire aux 2 premiers types (ce qui renvoie à la tripartition dans la plante, et en l’homme). On peut ajouter 2 autres concepts que l’on peut placer sur le même axe - « Heilmittel » le moyen de santé ou remède dans le sens d’un aliment naturel préparé (phytothérapie/homéopathie) et – « Gift » le poison (dont un exemple est constitué classiquement par les champignons). C’est toujours la dose qui fait le poison, et un certain nombre de nutriments (glucides, graisses…) ou d’outils culinaires (herbes aromatiques, épices, substances torréfiées) peuvent devenir « poisons » selon leur préparation et utilisation. Un autre concept est important dans l’alimentation : la préparation du repas, le travail du cuisinier ou de la transformation (ex : extraction d’une huile, cuisson d’un aliment…) de la même manière qu’un remède est un produit de la nature qui est préparé. Dans la préparation de chaque aliment, on peut arriver au point de toxicité, de dénaturation au point qu’il ne soit plus « aliment ». On peut constater que l’être humain met de lui-même dans l’aliment qu’il prépare. Ainsi, le grain de blé dont on a chassé les forces de vie en le détruisant pour faire de la farine, reprend une forme dans un nouvel aliment – le pain – dans lequel on crée de nouveaux espaces (espaces de la mie, idem dans la chantilly, la crème qui prend forme quand on la fouette). « Ce n’est pas le pain qui nous nourrit, mais ce qui nous nourrit dans le pain, c’est le Verbe éternel de Dieu (=Nahrungsmittel), c’est la Vie (=Lebensmittel), c’est l’esprit (=Genussmittel).» Ainsi l’art de la cuisine c’est de mettre un processus en marche et de l’arrêter au bon moment (aussi en fonction du type de mangeur). De la même manière dans l’organisme humain malade, il s’agit d’un processus normal qui est allé trop loin. Normalement on aurait dû se réveiller pour lutter contre. Dans ce cas, pour renverser le processus, on aura besoin en priorité d’aliments qui nourrissent (nourrit la vie). Puis quand on a reconstitué nos forces, on retourne vers ce qui fait plaisir (nourrit l’âme). L’art de l’alimentation dans sa relation à la santé, est donc de mettre en lien les forces de Vie et les forces de l’Âme : trouver le bon rythme. Rudolf Steiner : « Verdauung ist ein Vorgang der sich in das Rythmische hineinbegibt » « La digestion est un processus qui va /vit dans ce qui est rythmique » 7 De façon caractéristique les forces de vie sont surtout présentes dans le végétal, et les forces de l’âme, les forces psychiques, dans l’animal. Mais le cuisinier en tant qu’être humain apporte lui aussi des forces de l’âme, des forces psychiques par son travail, par toutes les préparations et le soin qu’il va prendre des aliments. Le végétal se trouve ainsi modifié et enrichi, ce qui peut permettre éventuellement de se passer d’aliments animaux. Cependant dans une alimentation saine on ne peut se passer du végétal, s’agissant du seul règne qui peut, « en le soulevant », amener le minéral dans le domaine de la vie. L’être humain est un être de chaleur, et d’ailleurs le seul être qui utilise la chaleur pour préparer et transformer sa nourriture. Par la préparation de l’aliment, (ex. en le coupant, en le râpant, en le mélangeant ou l’émulsionnant) on lui apporte de l’âme, la chaleur de l’âme. Le cuisinier peut ainsi penser son travail : depuis la conception du menu, le choix des aliments, la préparation, la façon de dresser et servir… j’apporte de la chaleur. Et l’art de la cuisine est assimilable à un « art de la chaleur » qui commence déjà avec la chaleur de l’être qui cuisine ce qui suppose aussi de choisir quel type de chaleur on apporte : dans la conception initiale, mais aussi dans la question « Pour QUI je prépare ce repas ? » Quel âge, quelle constitution et pour quel moment ou circonstance. En effet l’alimentation ne peut être bonne que si elle permet d’apporter à la personne ce dont elle a besoin, au moment où elle en a besoin. Par exemple trop manger le soir risquant de perturber le sommeil, celui-ci gagnant à être un temps de « jeune » plutôt que de digestion (d’où le terme « breakfast, briser le jeune pour le petit-déjeuner). Cette réflexion sur ce qui vient après le repas est central dans l’alimentation dynamique : qu’est-ce que je veux au fond ? Que veux-je faire de ma journée suite au repas sachant que quand je mange, cela stimule mes forces de vie ? Elle vient contredire la vision d’une alimentation qui consiste à croire que l’on va prendre dans l’aliment, dans la nature, pour se remplir de ce qui nous manque. Dans cette croyance que l’être humain devient ce qu’il mange, Rudolf Steiner voit l’apogée de l’ère du matérialisme. On ne devient pas ce qu’on mange. On peut toutefois penser que cette approche qui consiste à penser que l’on prend un aliment, une substance pour ce qu’il nous apporte (vitamine C, calcium, caféine, etc.), est peut-être plus valable au niveau des aliments « plaisir ». Quand je bois du café, je deviens un peu du café. Mais un aliment qui nous nourrit (Nahrungsmittel) devrait nous laisser justement libre. Là aussi, rappelons-nous de ce proverbe : « on devient malade en mangeant et guérit en digérant. » Cette réflexion peut s’élargir à la problématique des allergies. Des aliments qu’on a consommés depuis des millénaires deviennent causes d’allergies : un peu de cette substance, le lait par exemple, suscite une réaction. La 1 ère réaction est de bannir l’aliment, puis se pose la question : suis-je devenu si faible que je ne peux plus le supporter ? Il y a peut-être déjà un problème avec ce que sont devenus ces aliments. Ainsi la méthode des cristallisations sensibles fait apparaître une nette perte de structure entre le lait de vaches avec puis sans cornes. Pourquoi ce sont justement les enfants qui présentent de plus en plus d’allergies par rapport aux aliments de BASE (blé, lait, œufs, fruits à coques etc.)? N’est-ce pas que cette nourriture hyper sensibilisée ou dénaturée qui ne contient plus de vie, ou autrement dit, plus de forces formatrices provoque un rejet chez l’enfant qui aurait, au contraire, un si grand besoin en forces vitales pour se construire, se structurer. Une manière de nous signaler la médiocrité de ces aliments pervertis ? Une réaction de protection pour ne pas se faire empoisonner ? On peut faire un parallèle avec la dérive entre semences anciennes et semences hybrides, mais peut être aussi sur un autre glissement de confusion celui entre aliment nourriture et aliment plaisir. Sur un autre plan, la volonté de faire manger des légumes aux enfants se heurte à leur refus « parce que c’est pas bon », tandis qu’ils sont très attirés par des « formes » d’aliments qui n’existent pas dans la nature (ex les nouilles, faites par les hommes). Ils recherchent 8 probablement la valeur ajoutée par rapport à l’état naturel. Cela semble aussi correspondre à un besoin constant de force d’âme car fortement sollicités par une société qui demande de se positionner, de prendre des décisions, de faire des choix. Ce tiraillement constant entre sympathie et antipathie entraine un besoin renforcé en forces psychiques ou force d’âme et dans le domaine de l’alimentation les enfants trouvent ces forces dans les formes faites par l’être humain Par la créativité culinaire, la fantaisie et l’imagination, on peut pratiquement tout leur faire aimer, et c’est peut-être cette valeur ajoutée dont ils ont d’abord besoin. Voilà des considérations particulièrement enrichissantes contrairement à cette affirmation dépourvue de toute fantaisie et de toute profondeur : « l’homme devient ce qu’il mange ». 2ème partie : Alimentation et Education Comment peut-on organiser l’alimentation pour rendre la pédagogie, l’éducation, possible ? Cette question est à la base de la réflexion proposée ici sur les 3 septaines 07/7-14/14-21, la question étant à chaque fois « de quoi l’enfant, le jeune a-t-il besoin maintenant ? Que doit-il développer (au sens concret, lié au corporel et au sens large) ? » 1ère phase L’enfant vient à la vie et de 0 à 6 mois, il a surtout besoin du lait maternel autant que possible. Ensuite et jusqu’à 7 ans, tout semble aujourd’hui possible mais l’enfant n’exprime pas ses besoins : il dira-répètera ce qu’il a vu chez les autres. Il se perçoit plus grand que son corps physique, il veut grandir. Il est encore en très forte relation avec toutes les forces de vie de son environnement, il n’en a donc pas tant besoin que ça dans son alimentation, celle-ci pouvant rester très simple. Les forces de vie inhérentes à l’aliment ne sont pas négligeable mais il importe surtout qu’elles aient été transformées, préparées: exemple de la bouillie, à partir de grain écrasé puis préparée en la remuant. Le petit enfant a alors plus besoin de forces formatrices que de forces de vie afin de pouvoir croitre et grandir harmonieusement, de marcher, de parler. L’essentiel sera donc de lui donner de la nourriture vraie, préparée par l’adulte, c’est-à-dire rendue accessible, digérable. Mais, en parallèle, il faudrait aussi laisser certains aliments à l’état brut, des bâtons de carottes par exemple ou d’autres légumes et fruits crus pour que le petit enfant puisse s’exercer, s’entrainer. Les forces qui ont créé les formes agissent jusqu’à 7 ans, âge auquel l’enfant devient alors capable de former ses propres dents : il est donc capable de détruire lui-même les aliments. Ce processus se poursuit grâce aux « meules », les molaires, qui sont constituées à 9 ans. Dans la période de 0 à 7 ans, l’enfant n’a donc pas tant besoin d’une grande diversité d’aliments, mais il s’agit plutôt de phases préparatoires : il apprend à saliver, il prépare ses molaires même si une partie des aliments ressort telle quelle. Il apprend également à fabriquer lui-même son propre sucre à partir des hydrates de carbones (céréales, légumes…). Cette phase importante marque la différence entre « je reçois du sucre » et « je fabrique mon sucre » (c’est une différence comparable à « j’écoute la musique d’un CD » ou « je fais de la musique »). C’est une étape-clé de la construction du moi : le sucre a tendance à cristalliser et seul le Moi peut l’en empêcher. A l’excès on peut d’une certaine façon « sur-mobiliser » le Moi en donnant trop de sucre et ainsi favoriser une tendance à l’égoïsme. D’où l’importance de préférer les hydrates de carbones (glucides lents). L’enfant apprend à s’exercer (dans sa globalité) notamment avec son corps. R Steiner indique que « seul un corps sain permet une pensée saine ». De 0 à 7 ans l’enfant apprend à s’exercer au niveau du corps, ce qu’il doit ensuite faire au niveau de l’âme quand viendront les années d’apprentissage à l’école pendant les deuxième et troisième septaines. Beaucoup d’enfants aujourd’hui ne veulent plus exercer mais tout savoir, et surtout savoir tout de suite … 9 Si on résume les besoins du jeune enfant de 0 à 7 ans, il faut donc une petite variété d’ingrédients de très bonne qualité : - 2 à 3 sortes de céréales suffisent - environ 5 sortes de légumes réguliers, ce qui peut s’élargir peu à peu jusqu’à 7 ans (exercice) - 5 sortes de fruits, idem. - du lait et des produits laitiers - éventuellement des fines herbes domestiques/locales mais pas d’épices Préférer des repas simples, une forme de stabilité, sans cultiver la diversité pour la diversité avec tous types d’aliments. Quand un enfant rejette un aliment (souvent suite à une mauvaise expérience) il faut déjà l’accepter et observer à quel moment et dans quelles conditions il ne l’aime pas (différence quelquefois entre maison et cantine). On peut par contre contribuer au besoin de « formation » en cultivant l‘imagination par les présentations, … Pour la question des protéines : tant que l’enfant a du lait (ou 2 produits laitiers) et éventuellement des fruits secs, il n’a pas besoin absolument à ces âges de : viande, poisson, œufs, légumineuses. Il peut en prendre mais ça ne relève pas du besoin. Par contre il a besoin du sens de la valeur de la vie animale, dans une consommation ritualisée et non banalisée. Dans la vie animale, les nutriments végétaux ont déjà été dynamisés, la viande constitue donc un aliment « facile ». L’excès en ce sens va développer une tendance à la facilité chez l’enfant qui ne mobilise pas sa propre capacité à dynamiser les aliments. On observe des apports de 3 à 4 fois trop importants en protéines animales pour les enfants aujourd’hui. La quantité journalière, préconisée comme suffisante par R. Steiner et certains scientifiques de nos jours serait de 30g/personne/jour (pour un adulte). 2ème phase : De 7 à 14 ans l’enfant découvre le monde, à l’école le professeur lui en parle. Il découvre notamment toute la diversité des cultures alimentaires et la diversité des espèces qui y contribuent. La découverte des épices, en racines ou graines, avec leurs propriétés gustatives, médicinales, bactéricides, mais aussi psychotropes, peut être découverte à petite dose. - Le régime va pouvoir s’enrichir par la découverte de la diversité des graines et des autres familles végétales. Et les légumineuses sont d’avantage indiquées. - L’œuf, qui symbolise le début d’un nouvel animal, est recherché. C’est l’occasion de sensibiliser l’enfant à la noblesse des animaux et à la question de la responsabilité de l’homme face aux animaux. Pour qu’une poule puisse donner un œuf on doit prendre bien soin d’elle. Se pose aussi concrètement la question de la vie et de la mort, une question profonde que l’enfant porte fortement en lui vers l’âge de 9/10 ans. 3ème phase : L’éducation de l’organisme par l’alimentation peut se faire jusqu’à 14 ans environ, après le jeune peut « partir dans le monde » et faire ses propres expériences, en confiance, et d’autant plus si son corps a été bien fortifié par une bonne alimentation les années précédentes. Avec la puberté débute une autre phase : la vie de l’âme devient autonome, le jeune veut aller à la rencontre du monde de l’âme, expérimenter son monde psychique et vivre ses sentiments dans sa relation aux autres humains (sympathie/antipathie) mais aussi à travers l’alimentation. Dans ce contexte, la rencontre avec la viande peut être opportune. Mais des relations fortes avec des animaux vivants auront d’avantage d’impact: il restera toujours plus difficile, plus exigeant et plus formateur de monter un cheval que de le manger. 10 Le contexte du stage : Le Goetheanum et son environnement Le programme du stage a également permis de découvrir des lieux historiques de l’Anthroposophie, le Goetheanum dans son environnement, avec un regard qui complète les questions soulevées sur l’alimentation. Le Goetheanum dans son environnement : JM Florin nous présente l’histoire du bâtiment conçu dans les années 20 suite à l’incendie du premier Goetheanum, entièrement construit en bois. Le siège actuel de la section internationale d’Agriculture et de la recherche, dans lequel nous avons suivi les conférences, reste le seul vestige du style architectural de ce premier bâtiment détruit, conforme au style « art nouveau » du début XXème. En effet R Steiner a mis en œuvre ses idées architecturales en phase avec les courants contemporains : art nouveau, art déco, boisbéton. Il n’y a pas de systématique, pas de dogmatisme sous forme d’un idéal architectural, mais on peut voir une recherche constante d’être architecturalement dans son époque Le second et actuel Goetheanum, conçu en 1923/24 et achevé 1929, est réalisé essentiellement en béton avec des expressions proches de l’art déco (structures trapézoïdales, ouvertures…) dans une recherche de formes organiques. En tant qu’observateur on est mis en mouvement intérieurement, les formes fluides n’arrêtent pas notre regard mais nous invitent au contraire à co-créer, à compléter les formes. Le bâtiment actuel avec ses formes uniques a été pensé aussi en fonction de son intégration panoramique comme un écho des reliefs et styles géologiques du massif du Jura. Les chemins autour du bâtiment permettent de découvrir des changements permanents et renversements de perspectives (angles/arrondis, proche/loin,…). Certains lieux sont propices au retour sur soi ou au contraire préparent à la rencontre. Une rencontre qui se veut progressive, sans accès direct, un chemin méditatif pour s’approprier petit à petit le bâtiment. Parcs et jardins ne sont pas clôturés mais ouverts au public, selon les saisons les vaches y sont présentes pour brouter autour. C’est un lieu de rencontre, plein de vie qui s’inscrit dans un équilibre harmonieux entre nature sauvage et espaces cultivés, construits, humanisés. La découverte de l’implantation dans l’environnement est une première approche de l’architecture « organique », interpellant le visiteur par la dynamique générée dans sa conscience autour du bâtiment. 11 Une approche de l’architecture « organique » et de l’intérieur du Goetheanum : Notre guide, Denis Ruff, architecte, enseignant d’art (Waldorf et école publique) et spécialiste d’architecture sacrée, envisage immédiatement la question de la « laideur » du bâtiment. Rappelant les réactions suscitées par le premier tableau cubiste de Picasso, interpellant le spectateur sur sa notion du beau, il fait le parallèle avec l’architecture unique proposée par Steiner. Celle-ci est basée sur les impulsions et mouvements de conscience expérimentés par le visiteur immergé dans les différents étages, ambiances, couleurs et formes du bâtiment. A l’ambiance un peu lourde et massive, voire oppressante, de la salle « des pas perdus » au rez de chaussée, avec son rouge profond, succède un sentiment très fort d’élévation et de respiration à l’étage, en pleine lumière, puis plus haut, c’est l’inattendu/la surprise qui surviennent au moment de découvrir, dans une posture inconfortable en mi étage un immense vitrail au symbolisme mystérieux… avant de pénétrer dans la grande salle de spectacle. Entre symboles gravés en creux ou relief sur les lourdes arches de béton, l’immersion dans les couleurs projetés par les vitraux produit l’effet d’un bain au cœur de l’être. Dans toutes les parties du bâtiment, on est pris par une respiration, un mouvement ininterrompu entre intérieur et extérieur, avec l’impression de renversements, de retournements constants. Là encore, on est saisi par l’hermétisme des symboles : rien n’est donné tel quel, il faut le faire sien, se l’approprier. La visite rapide s’achève par la découverte du Groupe, sculpté par Rudolf Steiner à la fin de sa vie. On y retrouve le représentant de l’humanité, placé entre les forces les plus désincarnées et celles qui attirent vers la plus forte matérialité les maintient à leur juste place : ceci peut se retraduire par un équilibre juste entre ancrage et inspiration. Là aussi, Denis attire notre attention sur des aspects surprenants, une représentation inhabituelle, qui suscite une mise en mouvement intérieure chez le spectateur. Les jardins et le maraîchage biodynamique au Goetheanum Lors d’une courte visite des jardins et serres du Goetheanum, Benno Otter, jardinier chef depuis 20 ans sur le site nous donne à ressentir très concrètement certains aspects de la 12 Biodynamie présentés la veille par Jean Michel Florin, notamment par une dégustation de carottes à l’aveugle. Chacun est invité à se mettre à l’écoute, à s’éveiller dans ses sens (toucher, odorat, goût) et de partager son expérience individuelle avec le groupe. Benno illustre les différents aspects du travail qui prennent en compte le rôle de la plante, sa capacité de capter de la lumière dans le sol, renforcée par la culture suivant le rythme des astres et par l’apport des préparations homéopathiques qu’on intègre au compost ou directement à la terre. Le fumier y joue un rôle particulier (il apporte la qualité de prédigestion de la force des plantes par la vache). On est surpris de goûter une carotte à peine déterrée et non lavée : quelle remise en question de nos représentations sur la nature du sol, le propre/le sale, l’hygiène… le rôle des vers de terre. Benno nous explique ensuite le fonctionnement du potager, les assolements et rotations de cultures mais aussi le rôle social qu’il joue comme un parc de détente, un lieu de promenade, y compris le jardin des plantes médicinales pour la population du quartier, ainsi que des occasions d’échanges avec la vente des produits du lieu pour ceux qui y habitent. 13