Quarterly PERSPECTIVES ON BANKING Comment fonctionne une banque ? Jean-Noël Tilman évoque le rôle des banques dans le cadre de la croissance Une initiative de BNP Paribas Fortis en collaboration avec Echo Connect édito 4 Quel est le rôle de la banque en 2014 ? Fondamentalement, il n’a pas changé : organiser un système permettant aux entreprises et aux ménages de placer leurs économies et d’obtenir des crédits. Lors de la crise de 2008, les banques se sont retrouvées dans l’impossibilité de jouer ce rôle essentiel. Leurs autres activités, comme le trading de produits bancaires américains complexes, les avaient mises en difficulté. Ces excès ont coûté cher à l’économie belge. Pourtant, certains produits de trading restent indispensables. Par exemple, pour exporter vers des pays où d’autres monnaies que l’euro ont cours, vous avez besoin de produits de trading, notamment pour amortir les fluctuations des cours de change. Une banque ne peut donc pas se contenter de ses deux tâches principales (collecte de dépôts et octroi de crédits). La Banque nationale de Belgique a fixé cette vision dans un certain nombre de mesures approuvées par le gouvernement. Il ne faut pas scinder les banques en banques d’affaires et en banques de détail, estime la Banque nationale. Il est préférable de limiter leur portefeuille de trading pour qu’elles se concentrent sur leur rôle essentiel. De plus, toutes les banques actives en Belgique, surtout en comparaison avec des pays comme la Grande-Bretagne, sont fondamentalement des banques de détail. Et c’est très bien comme cela. La Banque nationale sera également réformée en profondeur. À partir de novembre 2014, la Banque centrale européenne deviendra l’organe de surveillance d’environ 130 organismes de crédit, qui représentent 85% de l’actif total des banques dans la zone euro. Pour mener cette mission, la BCE collaborera avec les organes de surveillance nationaux. Nous sommes en train de soumettre les banques, y compris les banques belges, à un examen approfondi de leur bilan ainsi qu’à un test de résistance. Les différents crédits au bilan de la banque sont-ils valorisés correctement ? Comment la banque réagira-t-elle à un scénario de crise au cours des trois prochaines années ? Dispose-t-elle de fonds propres suffisants ? Toutes ces mesures liées aux fonds propres et aux liquidités vont dans la bonne direction. Nous avons tiré les enseignements de la crise de 2008. Nous sommes plus à l’abri aussi grâce aux règles de Bâle III, alors qu’avant 2008, celles de Bâle II n’étaient pas assez strictes. || Mathias Dewatripont, Directeur de la Banque nationale de Belgique et professeur à l’ULB B NQ B NQ est une plateforme de contenu de cross médias consacrée à la banque socialement responsable et moderne. Au travers de la diffusion d'informations, B NQ entend ouvrir le débat et le dialogue sur la base de récits remarquables, innovants et concrets. Ce magazine a été publié le 13/03/2014 www.lecho.be/bnq La caricature de la banque 14 Le rôle des banques 8 Le banquier du futur doit concilier le cœur et la raison 6 La boîte à fusibles de l’économie 16 De l’épargne au crédit 18 Produits et services financiers en vitrine 20 De l’argent auquel on ne touche pas 17 22 L’ABC de la banque 24 Les banques doivent accompagner l’évolution de notre monde Ours Une initiative de BNP Paribas Fortis en collaboration avec Echo Connect. Coordination : Veronique Soetaert Lay-out : Björn De Greef, Christine Dubois Photo : Frank Toussaint E.R. : WalterTorfs, rue des Sols 2, 1000 Bruxelles Echo Connect offre aux entreprises, organisations et organismes publics l’accès au réseau de L’Echo, pour partager leur vision, leurs idées et leurs solutions avec la communauté de L’Echo. Les partenaires impliqués sont responsables du contenu. CONNECT La caricature de la banque Roland Gillet : « Ce ne sont pas seulement les banques qui ont fait défaut au premier chef. Les particuliers et les indépendants qui ont trop emprunté sont également à la base de la crise financière. » I Activités bancaires I Accusées d’être à la source de la crise financière, les banques sontelles aussi responsables qu’on le prétend ? C’est oublier l’influence des ménages, qui ont été encouragés, par des avantages fiscaux, à surinvestir dans l’immobilier, rappelle Roland Gillet, professeur de finance à la Sorbonne (Paris) et à l’ULB (Solvay). Expert reconnu au niveau international, il nous propose une autre lecture du dossier. A l’heure actuelle, aux yeux de la société, les banques sont à la source de bien des maux. Elles ont créé la crise financière et l’ont amplifiée. Elles ont pris des risques inconsidérés. Et il a fallu les sauver avec de l’argent public, ce qui a coûté cher à tout le monde. Pour empêcher les banques de renouveler ce mauvais scénario, il faudrait donc, d’une part, leur interdire l’activité d’investissement pour compte propre et, d’autre part, réduire leur taille. En effet, si une petite banque tombe en faillite, elle ne déstabilisera pas tout le système et les pouvoirs publics auront la capacité de sauver les petits épargnants. Cette approche, très répandue dans l’opinion, est cependant caricaturale. Dans bien des cas ce ne sont pas les activités spéculatives des banques qui ont précipité leur chute, mais les innombrables crédits hypothécaires qu’elles avaient consentis à de bien paisibles ménages... L’exemple des Pays-Bas – pas un pays du Sud, donc ! – est révélateur. Beaucoup de ménages avaient investi dans l’immobilier au-delà du raisonnable, poussés par de puissants incitants fiscaux. Quand, pour des raisons budgétaires, le gouvernement a réduit ces avantages, nombre d’entre eux n’ont plus pu honorer leur emprunt. Si la classe moyenne avait surinvesti dans la brique, c’est parce qu’elle pouvait déduire cet investissement non pas de ses revenus mais de ses impôts. Étranglés financièrement, trop de vendeurs se sont manifestés en même temps, ce qui a fortement fait chuter les prix. Le marché immobilier s’est retourné avec une rare violence. La vente, sous la contrainte, de nombreux biens à prix bradés n’a pu éponger tous les crédits encore en cours, ce qui a plombé certains bilans bancaires. c’est la banqueroute. Or les banques espagnoles n’avaient pas reporté le risque sur d’autres (contrairement aux banques américaines, qui avaient pratiqué la titrisation). Et ce sont de toutes petites banques, les caisses locales (Caixas), qui réalisaient la plupart des petits crédits hypothécaires et octroyaient des crédits aux PME et aux collectivités locales, sur la base de leurs dépôts, qui ont d’abord fait faillite. Lorsque le marché s’est grippé en Espagne, les défauts de crédit ont explosé pour les ménages, mais aussi pour les PME et les collectivités locales. Celles-ci ont rencontré des difficultés économiques, amplifiées par la crise immobilière. Submergées par les trop nombreux défauts, les caisses locales en faillite ont été, pour l’essentiel, regroupées dans la structure Bankia, où elles représentaient un besoin d’aide de plus de 30 milliards d’euros. Soit un véritable gouffre en comparaison à la plus grande banque, Santander, qui n’aura sans doute pas besoin d’aide, car cette grande banque diversifiée sur le plan international peut compenser ses pertes en Espagne par ses activités qui ne sont pas impactées par l’économie espagnole. Voilà pourquoi il est essentiel de rappeler que, pour les banques aussi, la diversification reste la règle en matière de gestion des risques. À ne pas assimiler à de la spéculation. || Par Roland Gillet, professeur de finance à la Sorbonne (Paris) et à l’ULB (Solvay) L’exemple de l’Espagne Ce ne sont donc pas les banques qui ont fait défaut au premier chef, mais les particuliers et les indépendants qui s’étaient endettés au-delà de leurs possibilités. En Espagne, on a connu le même phénomène. Certaines banques avaient prêté à très long terme, parfois jusqu’à 35 ans, car le gouvernement espagnol voulait favoriser l’achat plutôt que la location. Or, avec un prêt long, la part de capital remboursée les premières années est très faible. Pour peu que le marché s’effondre, ce qui est arrivé, la banque qui saisit un bien immobilier revend un actif qui ne couvre pas le crédit de départ. Et si un grand nombre d’emprunteurs font défaut, I5I IL NE FAUT PAS ASSIMILER DIVERSIFICATION ET SPÉCULATION. Roland Gillet Le banquier du futur doit concilier le cœur et la raison Plus que jamais, les banques doivent s’adapter à un monde en évolution rapide. En quoi cette évolution influe-t-elle sur leur fonctionnement ? À quoi ressemblera la banque du futur ? Cinq spécialistes confrontent leur vision. I8I Pierre Berger (Baker & McKenzie), Marc De Ceuster (UA), Karel Lannoo (Centre for European Policy Studies), Max Jadot (BNP Paribas Fortis), Michel Vermaerke (Febelfin). L e monde bancaire connaît une évolution extrêmement rapide. Les besoins des clients changent, la technologie ouvre de nouvelles opportunités et la réglementation subit de profonds bouleversements. L’impact cumulé de ces facteurs est immense. Les clients veulent pouvoir choisir la manière dont ils entretiennent leurs relations avec leur banquier. Ils ont tantôt besoin d’une discussion approfondie dans une agence, tantôt de pouvoir exécuter leurs opérations bancaires via leur ordinateur portable, leur tablette ou même leur smartphone. Ces nouveaux schémas mettent les banques face à un énorme défi, tout en offrant l’opportunité de combiner un meilleur service et des économies de coût. C’est l’un des constats tirés par les cinq experts que nous avons invités à confronter leur vision : Pierre Berger (partner, spécialiste banques chez Baker & McKenzie), Marc De Ceuster (professeur à l’Université d’Anvers), Karel Lannoo (CEO du Centre for European Policy Studies), Michel Vermaerke (administrateur délégué de la fédération des banques Febelfin) et Max Jadot (CEO BNP Paribas Fortis). Quel est le rôle social du secteur bancaire ? Et quels défis devra-t-il relever pour arriver à le jouer pleinement ? Vermaerke : « Les banques remplissent une fonction extrêmement importante dans le tissu économique. Une de leurs tâches essentielles consiste à attirer les dépôts d’épargne et à les I9I transformer en crédits. Toutefois, les banques proposent également un éventail équilibré de produits d’épargne et d’investissement, et sont impliquées dans l’infrastructure qui permet l’acheminement des paiements. C’est d’ailleurs l’une de ces tâches essentielles qui subit un bouleversement : la technologie évolue très vite et les attentes des clients changent. Il faut également nous interroger sur l’implication sociale du secteur. Les événements qui ont émaillé ces vingt dernières années ont creusé un gouffre entre le secteur bancaire et la société. Il ne sera possible de le combler qu’en étant davantage à l’écoute du client et en apportant une réponse à ses nombreux besoins en matière de communication. Ainsi le secteur bancaire belge – et il est le seul en Europe dans ce cas – s’est-il engagé à ne plus diffuser de produits financiers trop complexes. Plusieurs actions de sensibilisation ont également été mises en œuvre concernant la sécurité des opérations sur Internet. » Jadot : « Nous sommes confrontés à trois défis majeurs. Tout d’abord, nous devons trouver un juste équilibre entre des banques très sûres, > Max Jadot > mais aussi pleinement capables de convertir les dépôts d’épargne en crédits. Vu la profusion de nouvelles lois et réglementations, cela n’est pas évident. En outre, les banques doivent apporter une réponse à l’évolution des besoins des clients. S’ajoute à cela un défi de nature plus temporaire : les taux d’intérêt bas, qui affecteront la rentabilité d’une fonction essentielle des banques, à savoir la transformation de l’épargne en crédits, au cours des prochaines années. Ces défis auront un impact énorme sur le secteur. Nous devons dès lors tâcher de légiférer de manière équilibrée et d’instaurer un climat de sécurité dans lequel le client reviendrait au centre de nos préoccupations. » Quelle influence la révolution technologique a-t-elle sur les banques et la manière dont nous effectuons nos opérations bancaires ? Berger : « Pour ce qui est des banques en ligne, la Belgique a pris un peu de retard par rapport à ses voisins. Aux Pays-Bas, par exemple, les parts de marché des banques en ligne sont beaucoup plus élevées. Par ailleurs, les plateformes mobiles sont également appelées à gagner en importance. Dans ce domaine, la Belgique peut même jouer un rôle de pionnier : dans l’industrie du paiement, certains développements récents sont assez innovants dans le contexte européen. L’interaction avec les réseaux sociaux est également destinée à s’intensifier. Nous n’en percevons pas encore réellement les conséquences en Belgique, mais ce phénomène est en plein essor dans d’autres pays. Les organismes financiers peuvent également profiter de ces évolutions pour rapprocher le monde bancaire de l’univers des plus jeunes. » Jadot : « Les banques évoluent vers un modèle où le client pourra communiquer avec sa banque par différents canaux. Les clients sont plus que jamais au centre du processus : ils tiennent à choisir le canal par lequel ils communiquent avec leur banquier au gré de leurs besoins à un moment spécifique. Ces cinq dernières années, les activités au guichet ont diminué de 50 à 80%. En revanche, le self-banking, le contact par callcenter et, bien entendu, le PC banking ont énormément gagné en importance. Le PC banking existe depuis douze ans et son utilisation ne cesse de prendre de l’ampleur. Des applications permettent même d’exécuter les opérations bancaires par smartphone ou sur tablette. En outre, nous sommes confrontés à des entreprises du secteur technologique qui déploient des activités bancaires – comme Google et Apple – ou au développement de nouveaux moyens de paiement électronique comme le bitcoin. Les banques sont moins familiarisées avec cet univers, mais elles peuvent y trouver leur place. Et, à l’inverse, ces entreprises devront parvenir à s’adapter aux différentes réglementations, ce qui ne sera pas évident non plus. » Quel sera le rôle des agences dans un monde où la technologie ne cesser de gagner en importance ? Vermaerke : « Les opérations courantes passeront de plus en plus par des plateformes numériques accessibles en permanence. L’agence aura toujours sa place, mais il s’agira alors d’une place de valeur ajoutée et de services. » Jadot : « L’agence continuera à jouer un rôle important, mais parallèle à tous les autres canaux nécessaires au client, ce qui suppose de nombreuses possibilités. À court terme, un collaborateur d’agence pourra appeler un spécialiste sur sa tablette pour discuter par vidéoconférence d’un prêt hypothécaire ou d’investissements avec le client. Et, le soir, ce même client pourra continuer cette discussion avec son conseiller sur son I 10 I I Activités bancaires I IL FAUT ÊTRE CONSCIENT QUE L’ÉLIMINATION DES RISQUES A UN PRIX. Marc De Ceuster ordinateur ou sa tablette. Voilà comment la technologie alliera amélioration du service et réduction des coûts. » Vermaerke : « Cette évolution exigera un sérieux effort en matière de formation du personnel. Celui-ci doit être préparé à cette évolution numérique et être capable d’entretenir autrement le contact avec les clients. Le secteur investit déjà plus de 3% de sa masse salariale en formations. Il compte parmi les leaders européens dans ce domaine. Et il sera nécessaire de poursuivre ces efforts à l’avenir. » Les banques sont aussi confrontées à une foule de nouvelles lois et règles. Quelles en sont les conséquences ? De Ceuster : « En matière de réglementation, on observe deux tendances très contradictoires. L’Europe nous a encouragés à exploiter la libre circulation des biens et des services, mais depuis le déclenchement de la crise, des tendances protectionnistes se manifestent plus ouvertement. Les banques doivent céder leurs activités étrangères et se replier sur leur marché national tout en ayant l’obligation de renforcer leurs réserves de capitaux. C’est une exigence parfaitement légitime, mais tout le monde ne réalise pas qu’elle s’accompagne de restrictions : un renforcement des fonds propres pèsera nécessairement sur les octrois de crédits et la rentabilité. C’est un principe économique incontestable. C’est précisément la raison pour laquelle il est important de trouver le juste équilibre. Il faut être conscient que l’élimination des risques a un prix. » Lannoo : « Les régulateurs ont une attitude contradictoire : ils imposent de plus en plus de règles, mais, simultanément, attendent des banques qu’elles fournissent davantage de capitaux. C’est naturellement impossible. Au niveau européen, le durcissement des règles a réduit les octrois de crédits, or la majeure partie du financement des entreprises passe par les banques. Aux États-Unis, les entreprises font davantage appel aux marchés des capitaux, et c’est également une des raisons pour lesquelles les États-Unis sont sortis si rapidement de la crise. De plus, l’Europe impose des règles plus strictes aux I 11 I Marc De Ceuster, Université d’Anvers financements qui ne passent pas par les banques, dans le but de protéger les investisseurs. En outre, il est encore plus difficile, dorénavant, de financer des entreprises. Pour moi, cela reste l’un des grands défis à venir. » Le financement bancaire traditionnel reste important. N’évoluons-nous pas vers un modèle où les formes alternatives de financement gagnent du terrain ? De Ceuster : « Je ne peux pas imaginer la disparition des banques. Un intermédiaire sera toujours nécessaire entre ceux qui ont besoin d’argent et ceux qui peuvent le mettre à leur disposition. Bien sûr, il est possible de les mettre en contact direct sur les marchés financiers, mais uniquement si le bailleur de fonds est capable de faire une estimation précise des risques. Or c’est cette capacité qui fait l’originalité des banques et c’est aussi pourquoi elles jouent un rôle fondamental. » Berger : « Les banques assureront encore une grande partie des besoins de financement, mais je ne crois pas qu’elles continueront à tout prendre à leur charge comme auparavant. La réglementation contraindra les banques à alléger leurs dettes et à renforcer leurs fonds propres. Cela aura sans doute un impact sur les financements qui pourront être accordés et accroîtra le besoin d’alternatives. Dans ce domaine, les autres acteurs, comme les fournisseurs de capitalrisque, les assureurs, les fonds de pension ou les fonds à effet de levier auront un rôle à jouer. » > > Pierre Berger Quel est le rôle des pouvoirs publics dans le secteur bancaire ? Comment le voyez-vous évoluer ? Jadot : « L’État doit créer un climat de confiance, garantir la sécurité juridique et veiller à ce que l’ensemble des banques soient soumises aux mêmes règles. Si l’État joue bien ces différents rôles, il aura une énorme valeur pour le secteur financier. Le passé l’a démontré : en pleine crise, l’État a tout mis en œuvre pour préserver la confiance dans le secteur bancaire. Nous devons lui en être reconnaissants. Ceci dit, avec les nouvelles réglementations, nous traversons actuellement une phase de turbulences qui s’accompagne d’incertitudes. » Berger : « Un petit pays comme la Belgique doit surtout suivre la politique européenne et transposer dans les délais les mesures imposées, si possible sans ajouter trop de règles propres. La Belgique a souvent beaucoup de retard dans la transposition de la réglementation européenne, mais en matière bancaire, nous sommes en avance sur le reste de l’Europe pour l’instant. Pourtant, nous avons tout intérêt à appliquer les mêmes règles que sur le reste du continent. L’État devrait également stimuler certaines activités au lieu de se contenter d’imposer des restrictions au secteur bancaire. Je crois plus au modèle luxembourgeois où l’État crée un climat propice au fonctionnement efficace des banques. » Lannoo : « C’est tout de même une évolution marquante : dans le contexte européen, notre pays joue de plus en plus souvent cavalier seul. Les autorités européennes sont intervenues massivement et l’opération a coûté 14,5% du PNB européen. Nous devons revenir en arrière. De ce fait, les autorités européennes exerceront une surveillance beaucoup plus distanciée que les superviseurs nationaux. Je m'attends dès lors à des regains de tension entre la BCE et les organes de surveillances nationaux. Car ce sont finalement les autorités nationales qui devront implémenter les règles. » Karel Lannoo Comment voyez-vous l’avenir des banques ? De Ceuster : « Le client doit revenir au centre de leurs préoccupations. Je pense que les banquiers ont un peu perdu de vue ce principe. Un conseil de qualité sera toujours apprécié. Peut-être pas pour les opérations quotidiennes, mais dans les phases cruciales de la vie : mariage, achat d’une maison ou ouverture d’un plan de retraite. Là, les banques ont un rôle important à jouer. Le contact humain ne disparaîtra pas, mais les banques devront mieux communiquer leurs connaissances. » Berger : « Il y aura beaucoup moins d’agences, mais elles offriront plus de qualité. Je présume que la banque du futur opérera dans une société sans cash et qu’elle se concentrera plus encore sur les canaux en ligne et mobiles. Dans cet environnement, les banques devront également évoluer vers un service plus simple, plus rapide et plus transparent. » Michel Vermaerke Vermaerke : « Je ne pense pas qu’il n’y a qu’un seul modèle de banque du futur, mais plusieurs. Et quel sera le modèle de banquier du futur ? Finalement, tout tourne autour de l’argent et des personnes. L’argent est un sujet sérieux, qui exige de la raison, mais également de la sensibilité. J’espère que le banquier du futur saura concilier le cœur et la raison. » || I 12 I I Activités bancaires I L’État doit contribuer à la confiance dans le système financier Les pouvoirs publics ont leur mot à dire dans le débat sur le rôle des banques. Explications par le ministre des Finances, Koen Geens. Koen Geens Quel rôle économique et social les banques doivent-elles jouer, selon vous ? Comment peuvent-elles l’améliorer ? Geens : « Les banques doivent accorder des crédits à l’économie réelle. Pour ce faire, un cadre législatif et prudentiel adéquat est nécessaire. Un cadre qui donne confiance aux épargnants et aux investisseurs pour permettre aux banques de continuer à prêter de l’argent. Pour s'adapter aux réglementations européennes actuelles et à venir, les banques doivent opérer une profonde réforme organisationnelle. J’en suis conscient. Cela dit, si elles se conforment à la lettre et à l’esprit de la loi relative à la maîtrise des risques, elles auront accompli un grand pas dans la bonne direction. » Quel regard portez-vous sur le rôle des pouvoirs publics dans le secteur bancaire ? Geens : « Par la réglementation, les pouvoirs publics contribuent à augmenter la confiance dans le système financier. J’ai bien dit « contribuent ». La confiance revient, c’est de plus en plus visible. Le chemin que nous avons parcouru n’est pas à sous-estimer. Pensez à l’union bancaire : à partir de novembre 2014, la BCE exercera directement la surveillance sur les plus grandes banques européennes. Pensez également aux nouvelles normes de capitaux imposées par Bâle III, introduites en Belgique avec la nouvelle loi sur les banques. Ces quelques étapes dans un long processus de régulation commencent à porter leurs fruits. La confiance dans le système financier européen augmente sensiblement. Il se peut que nous n’ayons pas été assez loin. Regardons du côté des ÉtatsUnis : le gouvernement américain est intervenu très rapidement quand la crise bancaire a éclaté. Je mets mes espoirs dans l’analyse des bilans des banques, entamée par la BCE, et les tests de résistance qui seront effectués. Le nouvel organe de surveillance I 13 I européen devra également se montrer strict, mais juste, sous la direction de Danièle Nouy (la nouvelle présidente de la BCE – NDLR). J’ai bon espoir. » Comment voyez-vous évoluer les banques ? Auront-elles un autre rôle ou d’autres tâches d’ici dix à quinze ans ? Geens : « Je me garderai de faire des pronostics. Il n’y a pas si longtemps, nous rêvions de la Big Belgian Bank. Aujourd’hui, nous sommes plus modestes. De nombreuses banques se sont retirées dans leurs frontières nationales. Je ne pense pas que cela soit une fatalité. Avec le nouvel arsenal européen de surveillance et de résolutions, avec la création de l’union bancaire, le terrain de jeu réglementaire sera beaucoup plus robuste. Le marché interne des services financiers me semble bien né. Il manque encore de visibilité, mais cela viendra. Je suis convaincu que, parallèlement aux banques d’épargne traditionnelles, il y a un marché pour les banques universelles transnationales tant que nous n’aurons pas perdu de vue l’importance d’une bonne maîtrise des risques. » || UN CADRE LÉGISLATIF ADÉQUAT EST NÉCESSAIRE. I Activités bancaires I I 14 I I Activités bancaires I I 15 I I Activités bancaires I De l’épargne au crédit Les banques sont le lubrifiant de l’économie, dit-on parfois, parce qu’avec l’épargne de leurs clients, elles accordent des crédits à la fois aux ménages et aux entreprises. Comment procèdent-elles ? S ouvent, les acteurs économiques ont besoin de capitaux pour certains investissements. Pensez aux ménages qui souhaitent acheter une maison ou aux entreprises qui investissent dans un nouveau parc de machines. S’ils ne disposent pas de réserves suffisantes, ils peuvent solliciter leur banque pour un emprunt. Dans un sens, celle-ci fait office d’intermédiaire entre ceux qui ont besoin de capitaux et ceux qui disposent de ressources financières excédentaires. Les opérateurs qui peuvent se passer d’une partie de leur patrimoine dans l’immédiat peuvent la confier à la banque – sur un compte à vue, un compte d’épargne, un compte à terme ou sous la forme d’un bon de caisse. En fait, les épargnants prêtent une partie de leur patrimoine à leur banque, en échange d’intérêts. La banque ne pouvant pas faire grandchose de l’épargne d’un seul épargnant, elle regroupe tous les dépôts afin d’accorder des crédits plus importants, avec lesquels elle génère à son tour des revenus d’intérêt. Cela a l’air très simple, mais cette activité confronte les organismes financiers à un énorme défi. Les dépôts d’épargne sont exigibles à relativement court terme : les épargnants peuvent retirer leur épargne à tout moment et rares sont ceux qui préfèrent des dépôts à terme à plus de dix ans. En revanche, les prêts sont souvent assortis d’échéances beaucoup plus longues. Autrement dit, la banque finance des crédits à long ou moyen terme avec des dépôts à court terme. Pour compenser le risque de liquidité, les banques doivent disposer de réserves suffisamment importantes, de manière à ce que les crédits octroyés ne soient pas compromis par les retraits des épargnants. Elles y sont également contraintes par des réglementations I 16 I bancaires internationales de plus de plus en plus strictes (voir encadré). Le risque de liquidité n’est pas le seul défi auquel est confrontée une banque qui accorde des prêts. L’emprunteur peut faire faillite ou être dans l’incapacité d’honorer son crédit, auquel cas la banque ne sera pas en mesure de récupérer la totalité du montant prêté. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les banques accordent tant d’attention à l’examen d’un dossier de crédit : elles veulent être sûres de ne pas accorder de prêt à des ménages ou à des entreprises qui présentent un risque de défaut de paiement trop élevé. En outre, la banque doit tenter de garder une marge d’intérêt positive. Cette marge correspond à la différence entre les revenus qu’elle perçoit (intérêts prélevés sur les crédits) et les coûts qu’elle engage (intérêts accordés sur les dépôts). Le souscripteur d’un crédit peut opter pour un taux fixe, pour rembourser la même somme pendant toute la durée du crédit. Et la banque ne pourra pas répercuter sur son emprunteur à taux fixe une éventuelle variation des taux sur les dépôts. Sa marge d’intérêt peut même devenir négative, ce qui l’obligera à essuyer une perte. Les banques limitent autant que possible les risques, par exemple en veillant à disposer de fonds propres suffisants et d’une marge de liquidité assez élevée. Elles peuvent se couvrir contre ces risques à l’aide de produits financiers complexes, comme un swap de taux d’intérêt, qui leur permet de transformer, moyennant des frais définis, un taux fixe en un taux variable, et d’éliminer ainsi le risque de taux. || ALTERNATIVES AU FINANCEMENT BANCAIRE © Hollandse Hoogte © Thomas De Boever Les ménages et les entreprises financent leurs activités avec l’épargne déposée dans les banques. 4 règles pour un système bancaire stable En réaction à la crise bancaire de 2008, le Comité de Bâle a élaboré de nouvelles directives pour le secteur bancaire. Depuis sa création, c’est la troisième fois que la fédération des organes de supervision du secteur bancaire élabore une nouvelle série de règles, connues sous le nom de Bâle III. Bien que ces directives doivent encore être transposées dans la législation européenne, les principes sont d’ores et déjà fixés. La réglementation devrait être introduite en plusieurs étapes jusqu’en 2019. 1 Sous Bâle III, le ratio de capital doit atteindre au moins 9%, voire plus pour les « banques systémiques », c’est-à-dire les banques dont la faillite pourrait gravement perturber l’ensemble du système financier et l’économie réelle. Le ratio de capital représente le rapport entre les fonds propres d’une banque et ses actifs, pondérés en fonction des risques. Un ratio de capital plus élevé obligera les banques à constituer des réserves de capitaux plus importantes pour limiter les risques. 2 Le rapport entre le capital d’une banque et la taille de son bilan (le leverage) sera limité. Par le passé, la taille des banques n’était soumise à aucune restriction. Avec les nouvelles règles, ce n’est plus le cas. C’est la raison pour laquelle de nombreuses banques cèdent des activités qui ne relèvent pas de leur cœur de métier. 3 Bâle III obligera les banques à constituer des réserves de liquidités suffisamment élevées. Elles devront notamment détenir assez d’actifs liquides (cash ou actifs négociables sur le marché) pour résister pendant trente jours à une crise qui affecterait leur cash-flow. L’objectif de cette règle est d’éviter qu’elles soient mises en difficulté si elles sont privées de l’accès aux liquidités sur le marché interbancaire. 4 En 2018, le comité de Bâle imposera aux banques un net stable funding ratio. Celui-ci détermine la mesure dans laquelle les activités bancaires doivent être couvertes par des financements disponibles et stables. L’objectif est de limiter le risque qu’engendre l’utilisation de dépôts à court terme pour fournir des crédits à moyen ou long terme. I 17 I Les banques ne sont pas la seule source de financement pour les entreprises. Si ses besoins de capitaux ne sont pas trop importants, le chef d’entreprise peut d’abord solliciter son environnement proche. Des business angels peuvent également lui fournir des fonds. Ceuxci sont généralement des gérants ou anciens gérants d’entreprises, qui investissent dans des sociétés prometteuses qui démarrent leur activité ou affichent une croissance sensible. Les investisseurs privés peuvent également fournir aux entreprises les capitaux dont elles ont besoin. Il peut s’agir de fonds de capital-risque ou de hedge funds qui, en tant qu’actionnaires, s’introduisent également dans le cockpit de l’entreprise. Pour les grandes entreprises, la Bourse est aussi une source de capitaux envisageable. Enfin, le crowd funding consiste à proposer directement un projet à des investisseurs particuliers par le biais des médias sociaux ou d’autres plateformes Internet. Cette nouvelle source de financement n’est pas encore très répandue dans notre pays. Vous trouverez de plus amples informations sur les crédits aux entreprises sur bnq.lecho.be. I Activités bancaires I De l’argent auquel on ne touche pas 23 décembre 2013, 16 heures. Le shopping de Noël bat son plein. C’est précisément à ce moment-là que les terminaux de paiement Bancontact tombent en panne pendant deux heures. Plus de deux millions de transactions ne peuvent être effectuées et les commerçants voient filer plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. T elle est la face obscure du traitement électronique des paiements. Contrairement à une transaction traditionnelle en cash – un service ou un bien en échange d’argent comptant –, il faut pouvoir compter sur un support technologique fiable lorsque vous utilisez de la monnaie scripturale intangible. Cette confiance est méritée dans 99,9% des cas. Mais 99,9%, ce n’est pas 100%. Pas une semaine ne passe sans qu’on évoque la défaillance d’un système de paiement ou un vol d’informations bancaires dans le cyberespace financier. Admettons-le, les défaillances électroniques sont exceptionnelles. Et elles sont la seule part d’ombre d’un système qui présente par ailleurs de nombreux avantages. En effet, le paiement électronique complique considérablement le vol et la fraude, car le monde électronique est un univers ouvert et contrôlé. Et surtout un univers pratique. Confortablement installés dans notre fauteuil, nous ne craignons plus de perdre des billets, nous faisons des achats et des ventes où et quand nous le voulons. Sans nous soucier des mécanismes complexes qui sous-tendent cette amélioration de notre confort financier. Ce confort nous est fourni par la banque. Le cœur d’activité de chaque banque est clair : fournir des services. En tant LE TRAITEMENT ÉLECTRONIQUE DES PAIEMENTS DEVIENT UN RÉSEAU GÉANT DE BITS ET D'OCTETS. I 18 I qu’intermédiaire, la banque veille à ce que les capitaux excédentaires des uns soient dirigés vers les autres, qui souhaitent en faire quelque chose. Si l’objectif est simple, la tâche est éminemment compliquée. Recevoir des dépôts et accorder des crédits est une chose. Gérer les flux financiers gigantesques qui en découlent, de et vers les particuliers, entreprises, pouvoirs publics et autres banques, est une autre paire de manches. Dès lors, la gestion de ces flux financiers est une des tâches cruciales des banques. Une tâche dont l’ampleur s’est encore accrue ces dernières années. Car il ne s’agit pas uniquement d’alimenter un terminal en billets, ou d’accepter une carte de crédit au restaurant. Proton ? Puce de GSM ? Sites web ? Vous payez où, quand et comme vous le souhaitez, à l'aide de vos revenus, virés automatiquement sur votre compte. Aujourd’hui, la Belgique compte 14 millions de cartes de débit et 4 millions de cartes de crédit. C’est environ deux fois plus qu’en 1995. L’an dernier, les Belges ont retiré environ 40 milliards d’euros des distributeurs automatiques du pays, deux fois plus qu’en 2000. Et plus de 10 milliards d’euros à l’étranger, deux fois plus qu’en 2010. Le PC banking connaît une croissance exponentielle, comme les achats en ligne. Les chèques disparaissent. Le cash aussi. Le traitement électronique des paiements se métamorphose de plus en plus en un gigantesque réseau de bits et d’octets.|| I Activités bancaires I Swift et SEPA La libre circulation est inscrite dans les textes fondateurs européens. Et à raison : la fluidité des paiements constitue l’un des piliers d’un commerce international prospère, qui, à son tour, est une condition essentielle à une économie saine et à l’accroissement de la richesse. Comment la libre circulation des paiements est-elle organisée ? Comment éviter les erreurs et la fraude ? Quand il y a de l’argent en jeu, la situation devient rapidement délicate, d’autant plus que les montants sont considérables. Chaque transaction et chaque partie prenante doit pouvoir être identifiée de manière univoque. Cette identification passe par le code IBAN (International Bank Account Number) pour les comptes personnels et le code BIC (Bank Identifier Code) pour l’organisme financier. Grâce à ces codes, chaque compte dans chaque pays a une adresse unique, ce qui facilite le suivi et le contrôle. Ce trafic passe par une série d’institutions spécialisées. La Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication (SWIFT), basée à La Hulpe, est de loin la plus importante. SWIFT est la propriété de plus de 10 000 organismes financiers dans 214 pays, dont toutes les banques importantes, également parties prenantes. Rien qu’en Belgique, on en dénombre 104. Grâce au réseau de SWIFT, ces organismes s’envoient des informations concernant les paiements. En Belgique, environ 1,5 million de messages sont échangés par jour. SWIFT assure ainsi un rôle essentiel dans le trafic des paiements transfrontaliers. Toutefois, elle n'est pas seule dans ce domaine. Target2 – Trans-European Automated Real-Time Gross Settlement Express Transfer – est une plateforme paneuropéenne qui assure d’importants transferts libellés en euros et le règlement des opérations de la Banque centrale européenne. La circulation monétaire est régie par les autorités européennes, par le biais de la SEPA (Single Euro Payments Area). Depuis le 1er février 2014, tous les virements et domiciliations des pays européens se font de la même manière, par le biais d’une grande infrastructure, avec un seul type de formulaire de virement et une seule législation européenne. L’Europe est devenue une zone de paiement unique, où les paiements en euros sont exécutés partout de manière identique. Pour le plus grand bénéfice des entreprises. LA CONCURRENCE EST LÀ © Shutterstock Aujourd’hui, pièces et billets sont toujours en circulation ; en 2020, ce ne sera peut-être plus le cas. Nous pouvons déjà effectuer une foule de paiements à l’aide d’un smartphone ; en 2020, ce sera sans doute notre seul porte-monnaie. Le bitcoin est en plein essor ; en 2020, une devise virtuelle sera peut-être aussi importante que l’euro ou le dollar. Le cash existera-t-il encore en 2020, trois générations après le lancement de la carte de crédit, en 1958 ? Qui gérera le trafic des paiements ? Les banques sauront-elles résister aux géants de la technologie comme Google ? eBay est déjà propriétaire de PayPal, et d’autres entreprises informatiques sont en quête d’une licence bancaire – quand elles n’en détiennent pas déjà une. De l’autre côté de la chaîne, les opérateurs téléphoniques et les supermarchés se trouvent exactement là où se font la plupart des paiements. Les banques semblent peu à peu évincées du centre de la chaîne des paiements. Qu’elles s’accrochent ! I 19 I I Activités bancaires I Produits et services financiers en vitrine Cela fait longtemps que vous ne vous rendez plus chez votre banquier uniquement pour vos produits d’épargne et votre prêt hypothécaire. Les banques proposent une gamme de plus en plus vaste de produits et services financiers, dans laquelle une clientèle aussi large que possible doit trouver chaussure à son pied. E n Europe, les organismes qui ne proposent que des services de banque d’épargne ou de banque d’affaires sont en voie de disparition. De nombreuses institutions financières sont devenues des banques universelles, au point que certains les considèrent comme de véritables supermarchés financiers, où une clientèle la plus large possible peut s’approvisionner en produits et services financiers les plus divers. Il y a cinquante ans, il en était tout autrement. Les banques d’épargne se concentraient sur les ménages. Elles attiraient les dépôts qu’elles utilisaient ensuite pour accorder des prêts hypothécaires. Les banques d’affaires déployaient leurs activités de l’autre côté du spectre. Elles s’adressaient exclusivement aux entreprises, qui avaient besoin de produits et services plus spécialisés. La prospérité économique aidant, la distinction entre les deux types de banques s’est peu à peu estompée. Les ménages ont beaucoup plus de moyens financiers qu’il y a cinquante ans, et ils attendent plus de leur banque qu’un simple assortiment de comptes d’épargne et de prêts hypothécaires. De ce fait, les banques d’affaires répondent également aux besoins d’investissement des ménages, alors que les banques d’épargne classiques pénètrent le marché des services aux entreprises. Cette évolution a finalement donné naissance à des organismes financiers actifs sur les différents marchés, dont certains sont même devenus des bancassureurs intégrés. Ces derniers ont également, dans leur catalogue, des produits d’assurance : des assurances incendie ou auto aux assurances-vie. Acteurs de niche et banques universelles Aujourd’hui, 104 banques sont enregistrées auprès de Febelfin, la fédération du secteur bancaire belge. Parmi elles, de petites et de grandes banques, des banques de niche, des banques d’épargne et des banques universelles, chacune proposant produits et services spécifiques. Ces organismes vendent des produits d’épargne et de placement, accordent des crédits, dispensent des conseils lors d’introductions en bourse et de placements privés, organisent des mécanismes de couverture contre les risques de taux ou de change, financent des activités d’exportation. Ces dernières activités sont typiquement le terrain d’action des banques d’affaires ou des départements « Corporate & Commercial Banking ». Les produits d’investissement sont proposés par des départements de type « Investment Management » ou I 20 I I Activités bancaires I MiFID protège les investisseurs « Asset Management ». En gestion de patrimoine individuelle, un portefeuille de placements est confié à un spécialiste. Généralement, c’est le domaine du private banking, un service réservé aux clients les plus aisés. En gestion de patrimoine collective, les investisseurs peuvent souscrire à de nombreux fonds de placement. Ici, on distinguera les architectures fermées des architectures ouvertes. Dans le premier cas, les banques disposent de leurs propres gestionnaires de fonds et proposent aux investisseurs leurs fonds « maison ». Dans le cas de l’architecture ouverte, les fonds de placement d’autres gestionnaires de fonds sont disponibles. De nombreuses banques offrent actuellement une combinaison des deux modèles. || LE MODÈLE DE DISTRIBUTION, DU NORD AU SUD En Europe, on distingue deux modèles de distribution dans le secteur bancaire. Dans le premier, l’accent est surtout mis sur les opérations électroniques. Les agences étant moins nombreuses, les clients assurent eux-mêmes les tâches bancaires et ont accès aux produits financiers sur Internet. C’est la situation qui prédomine dans le nord du continent, de la Scandinavie aux Pays-Bas. Dans le sud de l’Europe, les réseaux d’agences sont beaucoup plus étendus. La Belgique se situe entre les deux modèles. On y trouve une offre considérable de canaux Internet, mais aussi un vaste réseau d’agences. Ce réseau est cependant de plus en plus menacé en raison de son coût. I 21 I Les banques qui commercialisent des produits financiers sont soumises à des règles. Au niveau européen, on trouve notamment la MiFID, acronyme de Markets in Financial Instruments Directive. Cette directive européenne, entrée en vigueur début 2007, a pour mission de protéger plus efficacement les investisseurs. Depuis, les banques ne peuvent vendre certains produits financiers que si elles disposent d’un profil de risque détaillé du client. Ce profil de risque est défini à l’aide d’un questionnaire, dans lequel le client identifie les risques qu’il est disposé à prendre et communique son expérience en matière de produits financiers. La MiFID comporte aussi de nombreuses obligations d’information pour les banques, qui doivent garantir que l’investisseur prend ses décisions sur base d’informations justes. La directive prévoit aussi l’obligation pour les banques d’informer les clients des possibles conflits d’intérêts, et les contraint à traiter de manière optimale les ordres d’achat et de vente de produits de placement. Pour les banques de détail, cela signifie obtenir le prix le plus bas possible, moyennant des frais d’exécution les plus bas possible. Les produits de placement sont donc soumis à des règles strictes. C’est aussi le cas de produits plus simples, comme le compte épargne. L’arrêté royal du 18 juin 2013 impose aux organismes de crédit des obligations d’information lorsqu’ils commercialisent des comptes d’épargne réglementés. Ainsi l’épargnant doit-il notamment pouvoir consulter une fiche d’information standardisée avec des renseignements essentiels. Ce document doit être approuvé par la FSMA, l’organe de supervision du secteur financier. On peut y ajouter l’arrêté royal du 27 septembre 2012, qui fixe le fonctionnement du compte d’épargne réglementé. La loi détermine le paiement du taux de base et de la prime de fidélité. Elle limite également les conditions que les banques peuvent imposer à leurs clients pour bénéficier d’un taux donné. I Activités bancaires I L’ABC de la banque Lorsqu’on s’intéresse au monde de la banque, on se voit rapidement confronté à un dédale de termes complexes. Tour d’horizon des principales notions à connaître. Banque centrale Eurosystème L’Eurosystème se compose de la Banque centrale européenne et des Banques centrales des États membres de la zone euro. La Banque nationale de Belgique (BNB) en fait donc partie. Ensemble, ces institutions définissent et exécutent la politique monétaire pour la zone euro. En outre, l’Eurosystème assure le bon fonctionnement du trafic des paiements, la conservation et la gestion des réserves de devises étrangères ainsi que la collecte des statistiques économiques et financières. Les Banques centrales veillent à la stabilité du système financier. Dans certains pays, elles assurent également la supervision des banques individuelles. Les Banques centrales déterminent la politique de taux d’un pays et d’une région, et peuvent mettre de la monnaie en circulation. Dans la zone euro, ces activités sont exercées par la Banque centrale européenne. L’objectif principal de la BCE n’est pas de piloter la croissance économique, mais de maintenir l’inflation « sous, mais à proximité de 2% ». La « Federal Reserve » est la Banque centrale américaine. La « Bank of Japan » est la Banque centrale du Japon. FSMA La Financial Services and Markets Authority (FSMA) est un organisme public indépendant qui supervise le secteur financier belge. Elle s’assure que les organismes financiers ainsi que les produits et services qu’ils proposent satisfont aux règles. La FSMA est également chargée de la surveillance des marchés financiers. En revanche, elle n’est pas responsable du contrôle de la stabilité des organismes financiers dans notre pays, lequel relève de la responsabilité de la Banque nationale de Belgique. Banque coopérative La banque coopérative offre à ses clients la possibilité de devenir associés ou copropriétaires en achetant des parts coopératives. Pour une banque, c’est souvent une façon d’impliquer plus étroitement (une partie de) ses clients dans la stratégie et de nouer une relation à long terme. Les parts coopératives ne peuvent être vendues à n’importe quel moment. Des avantages spécifiques sont offerts aux membres, comme des remises sur certains produits et services. Les coopératives agréées peuvent verser un dividende maximum de 6% par an. I 22 I I Activités bancaires I Interbancaire (marché) On dit parfois du marché interbancaire qu’il est le lubrifiant du système bancaire. Les organismes financiers peuvent s’y prêter mutuellement des fonds à très court terme (parfois moins de 24 heures). Le marché interbancaire est un maillon indispensable du système financier parce qu’à très court terme, il n’y a jamais d’équilibre parfait entre les dépôts placés à la banque et les crédits à long terme en cours. En effet, un jour donné, le montant des dépôts collectés n’est jamais exactement égal à celui des crédits accordés. Pour remédier à ce déséquilibre temporaire, les banques peuvent se rendre sur le marché interbancaire pour y emprunter ou y déposer de l’argent. SEPA Banque islamique Les banques islamiques appliquent les principes de la charia, la loi islamique. La charia impose notamment le partage des richesses pour plus de justice sociale. C’est pourquoi les banques islamiques ne peuvent facturer d’intérêts. Seuls les prêts sans intérêts et les comptes d’épargne sont autorisés. La spéculation leur est également interdite, tout comme les investissements dans l’alcool, le tabac, l’industrie pornographique et les casinos. En Europe, Londres est le principal centre d’activité des banques islamiques. SEPA (Single Euro Payments Area, ou espace unique de paiements en euros) a été fondé en 2008 pour uniformiser les paiements de l’Union européenne. L’objectif ? Instaurer dans chaque pays le même type de carte bancaire, de virement et de domiciliation, afin de créer une zone de paiement unique. De ce fait, en Belgique, les virements s’effectuent désormais avec des formulaires européens caractérisés par un code IBAN plus long et un code BIC. La zone SEPA se compose des pays de l’Union européenne ainsi que de l’Islande, du Lichtenstein, de Monaco, de la Norvège et de la Suisse. Banque d’épargne Les banques d’épargne s’adressent expressément aux particuliers et aux ménages. Elles prennent le moins de risques possible avec l’épargne qu’elles gèrent et l’utilisent principalement pour accorder des prêts hypothécaires. Aujourd’hui, les véritables banques d’épargne sont devenues rares, la plupart des organismes financiers ayant étendu leur gamme de produits et services financiers. Banque d’affaires Banque universelle Les banques d’épargne et les banques d’affaires pures sont en voie de disparition dans le paysage bancaire européen. La plupart des organismes financiers sont devenus des banques universelles proposant les produits et services financiers les plus divers à une clientèle la plus large possible. Ils s’adressent ainsi à la fois aux épargnants, aux investisseurs, aux clients aisés, aux entreprises et même aux pouvoirs publics. De nombreuses banques sont même devenues des bancassureurs intégrés, qui proposent également des produits d’assurances. I 23 I Les activités des banques d’affaires sont diverses, mais généralement considérées comme plus risquées que celles des banques traditionnelles. Les banques d’affaires investissent leurs ressources financières dans des actifs plus risqués, comme des actions et des obligations. Elles traitent des produits financiers complexes. Elles peuvent accompagner les entreprises et les pouvoirs publics qui souhaitent attirer de nouveaux capitaux ou conseiller les entreprises lors d’une fusion ou d’une acquisition. l Échange d’idées l Les banques doivent accompagner l’évolution de notre monde Que de chemin parcouru depuis la Tisane du Vieil Ardennais, élaborée en 1947 à Durbuy par Lucien Tilman ! Aujourd'hui, l'entreprise Tilman (entreprise de l'année 2013) croît de 15 % par an (CA 2013 : 19,2 ME), commercialise une vaste gamme de produits à base de plantes et compte 115 employés. Une croissance accompagnée par les banques, comme le raconte Jean-Noël Tilman, dirigeant depuis 1984, à Peter De Keyzer, Chief Economist de BNP Paribas Fortis. Quel rôle la banque joue-t-elle auprès des entrepreneurs débutants et des entreprises bien établies ? Qu'aimeriezvous que les banques fassent de plus ? Jean-Noël Tilman : « La banque est un partenaire essentiel de l'entreprise, qui lui permet de croître et d'investir en finançant son fonds de roulement. Chez Tilman, nous avons des contacts quotidiens avec notre banque. En revanche, pour un entrepreneur débutant, c'est plus difficile. Beaucoup de porteurs de projets ne trouvent pas de financement auprès des banques et doivent se tourner vers d'autres sources, comme le capital-risque, qui exige des rendements beaucoup plus élevés – minimum 6 % par an. C'est beaucoup plus que le taux d'un crédit bancaire. Cela dit, je comprends que les banques soient timorées, car depuis la crise, des ratios beaucoup plus stricts leur ont été imposés. Or les jeunes entrepreneurs n'offrent pas beaucoup de garanties... Donc les banques prêtent de plus en plus aux entreprises riches, car elles ne peuvent plus se permettre d'accumuler les risques. » Quels sont les critères qui entrent en ligne de compte lorsque vous décidez d’un investissement ? Sont-ils différents de ceux d'une banque ? Jean-Noël Tilman : « Forcément, car nous exerçons des métiers différents. Nous n'avons pas le même point de vue. Certains critères peuvent être communs, mais l'entreprise, outre le rendement à court terme et l'amortissement économique, décidera en fonction de l'impact stratégique sur les cinq ou dix ans à venir. Nous sommes concepteurs de produits, LES BANQUES DOIVENT S’IMPLIQUER DANS LE DÉVELOPPEMENT DURABLE. Jean-Noël Tilman, entrepreneur I 24 I fabricants, commerciaux, vendeurs. Le banquier, lui, gère au mieux l'argent qui lui est confié. » Comment envisagez-vous le rôle de Tilman au sein du paysage financier ? Quels enseignements les banques peuvent-elles tirer de votre entreprise et de vous-même ? Et, inversement, que pouvez-vous apprendre des banques ? Jean-Noël Tilman : « Nous sommes des partenaires. Ainsi, nous avons été ravis de servir de vitrine à BNP Paribas Fortis quand nous avons remporté le titre d'entreprise de l'année, en 2013. J'étais heureux que notre partenaire financier bénéficie également de retombées positives, j'ai même fait des propositions dans ce sens. De notre côté, nous avons beaucoup à apprendre : comment s'améliorer sur le plan financier, bien sûr, mais aussi comment mieux maîtriser l'environnement réglementaire, que notre banquier connaît mieux que nous ! » Comment remédier au fait que les banques donnent moins facilement accès aux moyens financiers ou aux crédits ? Jean-Noël Tilman : « Mon sentiment est Jean-Noël Tilman (à gauche) : « Nous sommes des partenaires. Nous avons été ravis de servir de vitrine à BNP Paribas Fortis lorsque nous avons remporté le titre d’entreprise de l’année 2013. » Peter De Keyzer (à droite) que cela s’arrangera naturellement, car les banques ont reconstitué leurs réserves et vont pouvoir à nouveau prendre des risques raisonnables et calculés, en respectant les nouvelles contraintes. » Comment voyez-vous la croissance économique évoluer en Belgique au cours des années à venir ? Quels seront les nouveaux relais de croissance ? Jean-Noël Tilman : « On a tellement surconsommé que je crois qu'on va forcément aller vers une décroissance. Ce qu'on voit actuellement n'est qu'un soubresaut. Pour des raisons éthiques, climatiques, environnementales, la consommation va baisser, la population sera volontairement plus frugale. Les politiques devraient se fier à d'autres indicateurs, du bien-être, de la santé, de la diminution de la pauvreté : ils sont bien plus signifiants que la croissance au sens traditionnel du terme. Songez qu'actuellement, un automobiliste coincé dans les bouchons crée de la croissance, en brûlant inutilement du carburant, alors qu'il n'en génère pas s'il prend son vélo. » Quel sera le rôle des banques dans cette nouvelle configuration ? Jean-Noël Tilman : « S'impliquer très sincèrement dans le développement durable et la responsabilité sociétale des entreprises. Soutenir le développement de nouvelles technologies énergétiques, de protection de l'environnement, de tourisme local responsable, etc. Les pays émergents vont effectuer en dix ans le chemin que nous avons fait en trente ans, mais ils seront aussi rattrapés par les conséquences climatiques de leur course à la croissance. Le grand défi, pour les Belges, les Européens et le reste du monde, c'est la crise climatique qui va tout bouleverser : nos priorités, nos valeurs, etc. Regardez déjà comme l'attitude du Belge moyen vis-à-vis de la voiture a changé : il cherche des modèles plus sobres, moins polluants. Face à la crise climatique, les autres préoccupations comme la dette ou l’État providence sont des détails. Les banques et les entreprises devront se garder du green washing, cet “affichage“ de valeurs écologiques sans réel engagement. » Si vous vous amusiez à prédire l'avenir des banques, que diriez-vous ? Jean-Noël Tilman : « Qu'elles se débar- I 25 I rasseront enfin de la paperasse ! Pourquoi un gestionnaire de relations-clients doitil venir dans nos locaux avec un tas de papiers à signer pour débloquer un crédit ? Passons à la signature électronique, validée par visioconférence s'il le faut. Les banques sont les derniers acteurs à utiliser autant de papier. Et puis, j'aimerais que notre banque propose des facilités de crédit à nos employés, quitte à ce que tout ou partie de ces prêts soient garantis par l'entreprise. » Vous avez toujours accordé beaucoup d’importance à la R&D. Estimez-vous que les banques tiennent suffisamment compte des atouts d'une politique de R&D forte ? Quels sont leurs points forts en la matière ? Et quelles sont les possibilités qu’elles ne mettent pas (suffisamment) à profit ? Jean-Noël Tilman : « Les banques n'ont jamais financé notre R&D, car nous bénéficions de subsides très appréciables. La R&D étant par nature incertaine, il est logique à mes yeux qu'elle soit financée par des fonds publics ou semi-publics. »|| Mieux financer l'économie IL FAUDRAIT DÉVELOPPER CONSIDÉRABLEMENT LE CAPITAL-RISQUE. Daniel Gros, Centre for European Policy Studies On apprend à l'école que le rôle d'une banque est de recueillir l'épargne des particuliers et de la prêter aux entreprises. Or c'est de moins en moins le cas. Le financement de l'économie est en train de changer de modèle, et c'est l'une des raisons pour lesquelles l'Europe a tant de mal à sortir de la crise. Deux tendances de fond remettent profondément en question le modèle bancaire traditionnel. La première est la formation d'une « chaîne de transactions » beaucoup plus longue qu'auparavant. Schématiquement, un établissement bancaire recueille de l'épargne, en prête une partie à un deuxième établissement, qui prête à son tour à un troisième, et c'est seulement ce troisième qui prête à une entreprise. La longueur de cette chaîne, particulièrement marquée en Europe, fragilise l'ensemble du système. Ce phénomène est accentué par les disparités internes à l'UE : les ménages d'Europe du Nord, comme les Belges et les Allemands, ont un excédent d'épargne, qu'ils placent dans les banques, alors que les besoins d'investissement sont plus importants au Sud. Les banques du Nord prêtent donc à des banques du Sud qui placent l'argent dans l'économie. Mais en cas de crise, si les banques du Nord veulent récupérer les fonds, les économies du Sud s'écroulent. Parallèlement, on observe un changement dans la nature même de l'épargne, particulièrement visible aux Etats-Unis : les entreprises épargnent autant qu'elles investissent, elles se prêtent des fonds entre elles, et ont de moins en moins besoin des banques. C'est pour cette raison que la reprise est plus rapide et plus ferme outreAtlantique : les sociétés ont pu recommencer à investir sans le secours des banques, qui restent vulnérables. De plus, le taux de profit des entreprises américaines augmente, et beaucoup de firmes très importantes, particulièrement dans les nouvelles technologies, ne réalisent pas d'investissements tangibles et accumulent des montagnes de cash. Apple détient plus de 100 milliards de dollars de liquidités, soit autant qu'une grande banque. Les experts n'arrivent pas vraiment à identifier les causes de cette hausse tendancielle du taux de profit. Partie des Etats-Unis, elle a gagné l'Europe : en moyenne, et même s'il existe de fortes disparités entre les régions, les entreprises de la zone euro s'autofinancent aujourd'hui à 100 %. Cela dit, le mouvement est lent : l'encours des crédits souscrits par les entreprises auprès des banques reste deux fois plus élevé en Europe qu'aux Etats-Unis. La deuxième tendance observée est consécutive à la lutte contre les déficits budgétaires. Les déficits drainent une grande partie de l'épargne. Outre-Atlantique, les ménages achètent des bons du Trésor. En Europe, ils placent leurs fonds sur des livrets d'épargne, et les banques achètent des bons d'Etat avec ces fonds. La reprise en main des déficits limitera fortement le rôle d'intermédiaire entre États et ménages que jouent nos banques. Toutes ces tendances sont moins perceptibles en Belgique, où les ménages épargnent plus, s'endettent moins, et où les entreprises sont moins profitables. Il ne faut pas pour autant en sous-estimer la portée. Car, à terme, nous n'y échapperons pas : tout le financement de notre économie sera à revoir. Il faudrait développer considérablement le capital-risque, et ce alors que la crise a créé, chez les ménages, une aversion vis-à-vis de l'equity et de la bourse... || Daniel Gros, Docteur en économie, directeur du Centre for European Policy Studies Comment faites-vous travailler votre épargne ? Crédits aux entreprises : moteur de l’économie ? Comment paierez-vous demain ? Participez à la discussion sur le rôle des banques dans l’économie et la société via www.lecho.be/BNQ ou suivez-nous via twitter @BNQ_Banque Total des dépôts Total dépôts : 105,3 milliards* Si je dépose mon argent chez Fortis, ortis, BNP Paribas Paribas F que devient-il devient-il ? Pour chaque 100 € déposés Nous redis redistribuons tribuons 81,90 81, 90 €* de crédit crédits, s, soit: 908 agences* 22 Business centres* 37 priv private va ate b banking anking centres Prêts Prêt s hypo hypothécaires thécaires : 37 7,80 €* 37,80 Crédits à la Crédits la consommation consomma ation : 0 0,20 ,20 €* 4.093 4. 093 guichets guichet s automatiques a utoma ma atiques eexcl. xcl. les cr crédits édits à la consomation d’Alpha d’Alpha Credit Credit Crédits Crédits a aux ux entrepreneurs : 16,25 €* 16,25 PC b banking anking Easy b banking anking ((mobile) mobile) Crédits Crédits a aux ux entreprises : 27,65 27 7,65 €* Et le solde de 18 18,10 ,10 €* est est majoritairement majorit tairement réinves ti en réinvesti obligations obliga ga ations d’ét tat at belge belge plus plus de 500 conseillers disponibles au au 02 762 20 00 remercient nos 3.600.000 clients. Nos 16.300 collaborateurs remercient labanqueentoutesimplicite.bnpparibasfortis.be E.R. : W. Torfs, BNP Paribas Fortis SA, Montagne du Parc 3, 1000 Bruxelles, RPM Bruxelles, TVA BE 0403.199.702