Écouter l’océan
pour une meilleure gestion des pêches
Institut de recherche pour le développement - 44, boulevard de Dunkerque, CS 90009
F-13572 Marseille Cedex 02 - France - www.ird.fr
Retrouvez les photos de l'IRD concernant cette che, libres de droit pour la presse,
sur www.ird.fr/indigo
Fiche n°345 - Mars 2010
Depuis 50 ans, le réchauffement climatique
et à l´inuence anthropique entraînent une
extension des zones de minimum d’oxy-
gène, couches d’eau océanique à teneur
réduite en oxygène de plusieurs centaines
de mètres d’épaisseur. Sous-jacentes aux
eaux de surface oxygénées, elles couvrent
aujourd’hui près de 10 % de la supercie
de l’océan mondial, menaçant ainsi une
grande partie des écosystèmes marins et
des activités de pêches.
Un cercle vicieux
L’eau de surface des océans se réchauffe.
Or, selon un processus strictement
chimique, plus l’eau est chaude, moins
l’oxygène peut-être dissout et absorbé par
l´océan. Par ailleurs, plus l’eau de surface
des océans est chaude, plus la barrière
avec les eaux profondes froides est forte.
Les couches supercielles oxygénées se
mélangent donc plus difcilement avec les
eaux profondes, moins oxygénées. De
plus, l’impact anthropique conduit à une
eutrophisation, qui elle-même entraîne une
consommation d’oxygène et la formation
de « zones mortes ». D’où une augmen-
tation importante des couches anoxiques
dans le monde, qui affecte ainsi grandement
les processus biogéochimiques et met à
mal la vie marine, contraignant notamment
l’habitat vertical de la plupart des organismes
marins.
Par ailleurs, si ces zones venaient à afeurer
à la surface de l´océan, cela poserait un
énorme problème car elles sont fortement
concentrées en CO2 et en oxyde nitreux
(un gaz ayant un effet de serre 300 fois
plus élevé que le dioxyde de carbone).
Cela provoquerait donc un relargage direct
de puissants gaz à effet de serre dans
l’atmosphère, qui pourrait à son tour
augmenter le réchauffement global. Ce
risque est très psent sachant que, par
exemple, le long des côtes péruviennes,
les eaux anoxiques affleurent parfois à
moins de 10 m de profondeur.
Des cartes de haute précision
Les chercheurs de l’IRD et leurs parte-
naires1 ont cartographié la limite supé-
rieure de ces zones, aussi appelée
Campagne océanographique multidisciplinaire «Filamentos», réalisée en 2008 à bord du navire José Olaya
de l’IMARPE, principal partenaire de l’IRD au Pérou pour les recherches en sciences de la mer. Au cours de
cette campagne de nombreuses mesures physiques, chimiques, acoustiques et biologiques ont été réalisées.
© IRD / Arnaud Bertrand
L’océan manque
d’oxygène : depuis une
cinquantaine d’années, du
fait du réchauffement
climatique et des activités
humaines, les zones de
minimum d’oxygène
s’étendent. Elles couvrent
désormais près de 10 % de
l’océan mondial et
contraignent fortement la
vie marine située en
profondeur. Pour suivre
leur évolution, des
chercheurs de l’IRD et
leurs partenaires1 ont
développé une méthode
acoustique innovante.
Facile à mettre en œuvre,
celle-ci fournit à chaque
seconde des données sur
la limite supérieure de ces
zones anoxiques2. Les
scientiques ont ainsi
établi, au large du Pérou,
des cartes environ
100 000 fois plus détaillées
que celles obtenues avec
des prols hydrologiques
classiques. Ils peuvent
alors estimer avec une très
haute résolution l’habitat
disponible en surface pour
les poissons. Ces travaux
ouvrent de grandes
perspectives notamment
en termes de gestion des
pêches.
Institut de recherche pour le développement - 44, boulevard de Dunkerque, CS 90009
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Gaëlle Courcoux, coordinatrice
Délégation à l’information et à la communication
Tél. : +33 (0)4 91 99 94 90 - fax : +33 (0)4 91 99 92 28 - [email protected]
Pour en savoir plus
Fiche n°345 - Mars 2010
CONTACTS :
Arnaud BERTRAND
chercheur à l’IRD
Michael BALLÓN
chercheur de l’IMARPE
doctorant à l’IRD
UMR Écosystèmes marins
exploités (IRD / Université
Montpellier 2)
Tél. : +51 (1) 6250800
Annexe 864
Adresse :
IRD -c/o Instituto del Mar del
Perú (IMARPE),
Esquina Gamarra y Gral.
Valle s/n, Apartado 22, Callao,
Lima, Pérou
RÉFÉRENCE :
Bertrand Arnaud, Ballon M.,
Chaigneau Alexis.
Acoustic Observation of Living
Organisms Reveals the Upper
Limit of the Oxygen Minimum
Zone. PLoS ONE 5(4): e10330,
2010.
doi:10.1371/journal.pone.0010330
MOTS CLÉS :
Océan, oxygène, acoustique,
pêche
RELATIONS AVEC
LES MÉDIAS :
Vincent coronini
+33 (0)4 91 99 94 87
INDIGO,
PHOTOTHÈQUE DE L’IRD :
Daina rechner
+33 (0)4 91 99 94 81
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oxycline, au large des côtes péruviennes
avec une résolution 50 000 à 100 000 fois
supérieure à celle des cartes obtenues à
partir de prols hydrologiques. Pour cela ils
ont utilisé, pour la première fois au monde,
des données biologiques acquises par des
échosondeurs acoustiques.
Plancton, crustacés, poissons… la plupart
sont regroupés dans la partie supérieure
de la colonne d’eau. L’oxygène est en effet
le principal facteur limitant l´extension verti-
cale des organismes marins. Dans un
premier temps, les scientifiques ont
démontré que cette dernière s’arrêtait
précisément au niveau de l’oxycline. Pour
cela, ils ont utilisé les données acoustiques
sur la distribution de divers organismes,
récoltées durant la campagne multidiscipli-
naire « Filamentos » réalisée en février
2008 au large du Pérou. Dans un second
temps, grâce aux données acquises cette
fois lors de campagnes océanographiques
de routine, ils ont réalisé des cartes très
précises de la limite supérieure de la zone
de minimum d’oxygène dans la région.
Grâce à cette nouvelle méthode acous-
tique, les chercheurs disposent de données
toutes les secondes le long du trajet du
bateau, ce qui leur permet d’accéder à des
processus physiques et biologiques de très
petite échelle. En comparaison, les prols
hydrologiques acquis lors de campagnes
océanographiques sont d’un nombre limité
et très distants les uns des autres.
Un intérêt certain pour les pêches
Les zones de minimum d’oxygène limitent
la répartition verticale de la plupart des
ressources exploitées. En combinant
données acoustiques et hydrographiques,
les chercheurs ont estimé avec précision le
volume de l’habitat disponible pour l’an-
chois du Pérou3, l´espèce de poisson la
plus pêchée au monde. Il est donc mainte-
nant possible de déterminer simultanément
le volume d´eau oxygéné où l´anchois sera
restreint et les principales communautés
biologiques qui y habitent (zooplancton,
poissons). Les scientifiques peuvent
ensuite croiser ces résultats avec toutes
les informations disponibles par ailleurs
(données satellitales, distribution des
navires de pêche, etc.) an de réaliser des
études intégrées de l’écosystème.
Cette information de très haute résolution
permet également d’étudier les processus
qui se produisent à petite échelle, de l’ordre
de quelques centaines de mètres à
quelques kilomètres. Échelles que les
scientiques ne pouvaient atteindre jusqu’à
présent, alors que ces processus struc-
turent fortement les écosystèmes marins
et l’océan supérieur et jouent un rôle clé
dans les relations prédateurs-proies.
Cette méthode, qui ouvre de grandes pers-
pectives pour l’étude des océans et la
gestion des pêches, pourrait être facile-
ment utilisée par l´ensemble des labora-
toires disposant de données acoustiques
historiques. Elle pourrait également être
appliquée en routine sur les navires de
pêche équipés d’échosondeurs.
Rédaction DIC – Gaëlle Courcoux
1. Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec
des scientifiques de l’Institut de la Mer du Pérou
(IMARPE).
2. À teneur réduite en oxygène.
3. Cette technique peut bien entendu être appliquée à
En croisant les données acoustiques avec des mesures hydrologiques réalies avec des sondes (photo de gauche),
les chercheurs ont estimé avec pcision lhabitat disponible pour l’anchois du Pérou, l’esce la plus chée au monde.
© IRD / Arnaud Bertrand
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