Culture, le magazine culturel en ligne de l'Université de Liège
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Les musiques religieuses noires, de 1865 à nos jours
Après 1865, les Negro Spirituals firent leur apparition suivis des Jubilee Songs (c.1900-1935) et des Gospel
Songs (des environs de 1935 à nos jours). Dans les années '60 et '70, sous l'influence de nouveaux styles
populaires auprès des adolescents comme le Rock and Roll et le Rhythm and Blues, le Gospel fut à l'origine
des Musiques Soul et Disco, tout en poursuivant sa propre évolution vers le Gospel Contemporain
Les Negro Spirituals
Au lendemain de la Guerre de Sécession, on l'a vu, les ex-esclaves eurent peu d'options pour s'en sortir,
une d'entre elles était l'éducation mais il fallait soit en avoir les moyens soit être au bon endroit au bon
moment. Des intellectuels noirs du Nord, des enseignants en majorité, descendirent en masse dans le
Sud, pour éduquer leurs frères et sœurs de race et de nombreux établissements d'enseignement pour Noirs
se créèrent : la Fisk University à Nashville mais aussi des Collèges, des Instituts et des High Schools .
Comme aujourd'hui, ces établissements
durent subvenir à leur besoins et les administrateurs de Fisk University eurent une idée originale : fonder
une chorale universitaire se faisant un répertoire de Spirituals, inspirés par la Bible et chantés a capella
ou discrètement accompagnés au piano, en mettant l'accent sur la beauté et la justesse des voix, sur une
harmonisation sans faille et en gommant toutes les rétentions africaines, sauf le canevas appel-réponse.
En effet cette chorale était amenée à se produire exclusivement devant un public blanc qui était le seul à
l'époque capable de payer pour assister à un tel récital. C'est ainsi que naquirent les Negro Spirituals. En
outre les chanteurs étaient habillés élégamment et leur maintien était digne et compassé, c'était la seule
façon de ne pas effaroucher leur public.
Fisk Jubilee Singers Marian Anderson
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Comme c'était une nouveauté des plus originales,
le succès fut immédiat et considérable, les Fisk Jubilee Singers allèrent chanter leurs Negro Spirituals
partout en Amérique et même en Europe (ils donnèrent un récital pour la Reine Victoria à Londres en
1873), l'argent rentra à flot, leur université fut sauvée et cela donna des idées à toutes les autres écoles
supérieures noires qui créèrent aussi leurs chorales de Negro Spirituals. Ce style musical se perpétua
jusqu'à nos jours mais devint l'apanage de chanteuses classiques et d'opéra qui gardèrent à ces chants
leur caractère solennel et grandiloquent. Ce furent, avant la deuxième guerre mondiale des artistes noir(e)s
comme Marian Anderson, Paul Robeson, Eva Jessye, Roland Hayes, Jules Bledsoe, etc. et après
1945, Leontyne Price, Jessye Norman, Kathleen Battle, Wilhelmina Fernandez , Barbara Hendricks et
bien d'autres encore.
Fisk Jubilee Singers :
Swing low sweet chariot
(Youtube)
Paul Robeson :
Swing low sweet chariot
(Youtube)
Leontyne Price
He shall feed his flock
(Youtube)
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Jessye Norman - Kathleen
Battle: He's got the
whole world in his hands
(Youtube)
Marian Anderson
Deep river
(Youtube)
Barbara Hendricks:
Mary had a baby
(Youtube)
Les Jubilee Songs
On l'aura compris, les Negro Spirituals destinés à un public blanc n'intéressèrent qu'une frange infime
de la population noire qui continua à fréquenter ses églises baptistes et méthodistes où on chantait des
Spirituals de plus en plus africanisés comme dans les camp meetings avec des syncopes, de l'exubérance,
en utilisant le corps comme caisse de résonance pour marquer le rythme, malgré la résistance de la plupart
des pasteurs soucieux de respectabilité et qui temporisaient, mais avec des succès mitigés. Ces chants
s'inspiraient autant de la Bible que des Évangiles. C'était un peu l'anarchie, chaque dénomination édictant
ses règles et chaque église donnée les interprétant avec plus ou moins de liberté et de fantaisie. On vit
ainsi apparaître des petites chorales avec ou sans solistes, des prêcheurs charismatiques, des groupes
masculins allant se produire d'église en église, des évangélistes itinérants … mais deux règles furent tout
autant intangibles qu'irritantes pour beaucoup : l'interdiction des instruments de musique dans les églises et
celle de danser ! Ce dernier interdit fut contourné en glissant les pieds sur le sol sans qu'ils en décollent,
pour que ce ne soit pas considéré comme une danse. On les appela des « shuffles ».
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Cela ne pouvait durer
éternellement et en 1895, un schisme, secoua l'Église Baptiste noire : le Révérend Charles Mason, à
Memphis, fonda la Church of God in Christ ( C.O.G.I.C.) qui , tout en respectant les grands principes
baptistes, accepta les instruments de musique à l'église et permit pirouettes et autres gambades qui étaient
des danses d'exultation. Très rapidement, ce schisme conduisit à l'apparition d'une foule de sectes baptistes
indépendantes, les Églises Sanctifiées et Pentecôtistes où tous les instruments de musique furent admis,
des pianos, des batteries, des guitares, des cuivres et parfois, des orchestres de jazz au complet. Cela mit
un peu d'ordre dans l'anarchie mais pas totalement. On vit se développer des Jubilee Groups masculins a
capella comme le Dinwiddie Colored Quartet, fondé en 1898, qui fut le tout premier à graver des 78 tours
en 1902 pour la compagnie Victor.
Charles Mason
D'autres groupes de ce type eurent un succès phénoménal dans les années '20 et '30 enregistrant quantité
de disques qui se vendirent comme des petits pains : le Norfolk Jubilee Quartet, le Birmingham Jubilee
Quartet, le Dunham Jubilee Quartet, les Mitchell's Christian Singers, les Heavenly Gospel Singers,
etc, etc.
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Dinwiddie
Colored Quartet
Down on the
old campground
(Youtube)
Norfolk Jazz &
Jubilee Quartet
Revival day
(Youtube)
Birmingham
Jubilee Quartet
Do you call that religion ?
(Youtube)
Des évangélistes itinérants, souvent guitaristes voire harmonicistes ou pianistes, et très proches de leurs
alter ego du blues, connurent eux aussi un succès populaire inouï et vendirent beaucoup de disques comme
Blind Willie Johnson, Mother McCollum, Blind Joe Taggart, Sister Cally Fancy, Elder Curry, Bessie
Johnson, le Révérend Edward W. Clayborn et des dizaines d'autres….
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