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LA CAMPAGNE DE BELGIQUE
D – Dispositif anglo-prussien à la veille de la campagne
Le lundi 12 juin, à 4h du matin, Napoléon monte en voiture pour rejoindre l’armée du Nord. A ce
moment précis, le Soleil est à l’Ascendant, à 20° Gémeaux, au carré de Mars à 20° Poissons,
cependant que Saturne et Lune noire viennent de passer sur le Milieu du Ciel.
Thierry Lentz, directeur de la Fondation Napoléon et auteur de nombreux ouvrages sur l’histoire
du Consulat et de l’Empire, notamment sur le Congrès de Vienne et les Cent-Jours, expose, dans un
livre tout récemment paru, le plan de Napoléon :
L’intention stratégique de Napoléon était d’opérer une offensive dite sur « position
centrale », pour s’insérer entre les Anglais et les Prussiens, les séparer puis les battre
successivement, sur un front d’une trentaine de kilomètres, tandis que l’ensemble du
dispositif ennemi en couvrait plus d’une centaine.1
Ce plan répond à l’un des principes essentiels de
la stratégie napoléonienne : être toujours plus fort que
l’adversaire à l’endroit où l’on veut le frapper.
L’ordre du jour signé par Napoléon à Avesnes le 13
juin fixait pour premier objectif la ville de Charleroi.
La gauche, mise en marche la première, devait
neutraliser provisoirement les Anglais, tandis que le
centre et la droite devaient affronter les Prussiens. Un
plan qui reposait sur un postulat selon lequel chaque
armée vaincue se retirerait sur ses lignes
« naturelles » de communication : les Anglais vers
Bruxelles puis la mer, les Prussiens vers le nord-est
par la grande voie qui les ramènerait en Allemagne, par Liège et Maastricht. La tâche de contenir les
Anglais fut confiée au maréchal Ney, qui devait marcher vers le carrefour dit des « Quatre-Bras »,
croisement des routes Bruxelles-Charleroi et Nivelles-Namur. Une fois Blücher battu, on le
poursuivrait sur ses lignes de communication avec un second corps détaché (celui de Grouchy), tandis
que l’armée se reconcentrerait autour de Ney pour affronter les Anglais. Ce plan, très cohérent, fut
perturbé par un élément qu’ignorait l’Empereur : Wellington et Blücher étaient convenus de ne pas se
séparer et de toujours tenter de venir se secourir l’un l’autre, s’engageant à ne pas se replier sur leurs
lignes de communication en cas de défaite. Deux voies s’ouvraient à Napoléon : déboucher par Mons
et tomber sur les Anglais (ce que redoutait Wellington) ou par Charleroi face aux Prussiens. Thierry
Lentz estime que Wellington était en fait disposé à évacuer la Belgique en laissant ses partenaires se
débrouiller seuls – cela pour des raisons de haute politique ayant trait à la lutte pour la prépondérance
en Europe qui se jouait en coulisses. Du côté prussien en revanche, aussi bien Blücher que Gneisenau
se montrèrent fidèles aux engagements pris et, bien que battus par Napoléon le 16 juin lors de la
bataille de Ligny, ils ne se replièrent pas en direction de Liège, mais réussirent un mouvement tournant
qui les rapprocha finalement du champ de bataille de Waterloo, où leur arrivée en fin de journée fut
décisive pour donner une victoire totale aux coalisés.
1 LENTZ Thierry, Waterloo 1815, Perrin, 2015.