revue Virologie 2014, 18 (2) : 75-86 Le virus de la maladie de Marek et ses interactions avec la peau Mathilde Couteaudier Caroline Denesvre Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. INRA, UMR1282, Unité d’infectiologie et santé publique, ISP, Équipe BIOVA, 37380 Nouzilly, France <[email protected]> Résumé. Le virus de la maladie de Marek (MDV) est un herpesvirus hautement contagieux, qui induit une immunosuppression et des lymphomes T chez la poule. Ce virus continue à circuler dans les élevages en dépit d’une vaccination largement pratiquée depuis 40 ans, avec un impact économique important au niveau mondial. Les follicules plumeux de la peau, qui permettent la genèse et l’ancrage des plumes, sont l’unique source d’excrétion connue du MDV dans le milieu extérieur. Ce tissu est à l’origine de la contamination de l’environnement et de la transmission du MDV entre oiseaux. Les cellules épithéliales des follicules plumeux sont les seules cellules identifiées produisant une grande quantité de virions infectieux matures, visibles par microscopie électronique à transmission et à partir desquelles des virions infectieux ont été purifiés. Enfin, les plumes prélevées sur les animaux ainsi que les poussières d’élevage sont aujourd’hui considérées comme d’excellents matériaux afin de suivre la vaccination, la circulation des virus pathogènes et la contamination de l’environnement. Cet article a pour objectif de résumer l’ensemble des connaissances actuelles sur l’interaction du MDV avec la peau et de proposer de nouvelles approches qui pourraient résoudre d’importantes questions biologiques relatives au MDV. Mots clés : virus de la maladie de Marek, peau, plume, réplication, morphogenèse virale Abstract. Marek’s disease virus (MDV) is a highly contagious herpesvirus which induces immunosuppression and T-cell lymphoma in chicken. This virus still circulates in flocks despite forty years of vaccination, with important economical losses at the world level. The feather follicles, which allow feathers morphogenesis and their anchor into the skin, are the unique known source of MDV excretion. This tissue causes environment contamination and MDV bird-to-bird transmission. Epithelial cells from the feather follicles are the only identified cells, in which high levels of infectious mature virions are visible by transmission electron microscopy and from which cell-free infectious virions have been purified. Finally, feathers harvested on animals and poultry dust are today considered as excellent materials in order to follow vaccination, circulation of pathogenic viruses and environment contamination. This article aims at summarizing the current knowledge on MDV-skin interactions and at suggesting new approaches which could solve important questions on MDV biology. Key words: Marek’s disease virus, skin, feather, replication, viral morphogenesis doi:10.1684/vir.2014.0562 Abréviations* CEF : fibroblastes embryonnaires de poule GaHV-3 : Gallid herpesvirus de type 3 HHV-1 : herpesvirus humain de type 1 HVT : herpesvirus du dindon (aussi dénommé MeHV, Meleagrid herpesvirus) Tirés à part : C. Denesvre MD : maladie de Marek MDV : virus de la maladie de Marek (aussi dénommé GaHV-2, Gallid herpesvirus de type 2) MET : microscopie électronique à transmission pi : post-infection PRV : virus de la pseudorage qPCR : PCR quantitative * Il est à noter que la plupart des abréviations utilisées dans cette revue sont d’origine anglophone. Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 Pour citer cet article : Couteaudier M, Denesvre C. Le virus de la maladie de Marek et ses interactions avec la peau. Virologie 2014; 18(2) : 75-86 doi:10.1684/vir.2014.0562 75 revue Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Introduction La maladie de Marek (MD) est une maladie associée à une immunosuppression transitoire et à des lymphomes T mortels chez la poule. La MD est à l’origine de pertes économiques importantes dans le monde, estimées à plus d’un milliard de dollars par an [1]. Bien que la MD ait été décrite en 1907 par Joszef Marek, le virus responsable de cette maladie, nommé virus de la maladie de Marek (MDV) ou Gallid herpesvirus de type 2 (GaHV-2), ne fut isolé qu’en 1967, indépendamment au Royaume-Uni [2] et aux ÉtatsUnis [3]. Ce virus appartient à la famille des Herpesviridae, à la sous-famille des Alphaherpesvirinae, au genre Mardivirus (pour « Marek Disease Like Viruses »). En raison de ses propriétés biologiques, il a longtemps été classé dans les Gammaherpesvirinae. En 2002, suite au séquençage complet de son génome, il a été reclassé dans un nouveau genre d’alphaherpesvirus, les Mardivirus, dont il est le prototype [4]. À ce jour, quatre autres espèces virales appartiennent à ce genre, dont deux proches du MDV au plan génétique et antigénique mais non pathogènes pour les gallinacés, le Gallid herpesvirus de type 3 (GaHV-3) et le Meleagrid herpesvirus (MeHV), communément dénommé Herpesvirus du dindon (HVT). Le premier vaccin efficace contre la MD a été obtenu en 1969, époque à laquelle cette maladie induisait une forte mortalité et morbidité [5-7]. Il s’agissait du 1er vaccin efficace contre le développement de tumeurs viro-induites. Une importante vaccination, pratiquée dans les élevages aviaires dès 1971, a permis l’essor de la production industrielle d’œufs et de viande de poulet. Trois types de vaccins sont actuellement utilisés, tous « vivants » : une souche atténuée de GaHV-2 (CVI988/Rispens) [8], une souche de GaHV-3 (SB-1) ou une souche de HVT [7, 9]. capside VP5 codée par UL19), des protéines de tégument (comme les protéines VP13/14 et VP22 codées par UL47 et UL49 respectivement) ou des protéines d’enveloppe. Un faible nombre de protéines sont spécifiques au MDV comme l’oncoprotéine Meq, la phosphoprotéine pp38 ou bien la protéine vIL8, homologue de l’interleukine 8 de poule. Le MDV code aussi des ARN qui ne sont pas traduits en protéines, comme les ARN LAT (latency-associated transcripts), des microARN ou une sous-unité ARN de la télomérase (vTR) [10-12]. Comme avec tous les herpesvirus, l’infection cellulaire aboutit soit à un cycle lytique, produisant des particules virales infectieuses soit à la latence virale, où le génome viral persiste dans le noyau des cellules infectées, sans production de particules virales. Contrairement à la plupart des alphaherpesvirus, le MDV ne rentre pas en latence dans les neurones, mais dans les lymphocytes T. Il est important de noter que la protéine Meq s’exprime aussi bien durant l’infection lytique que durant la latence [13]. En culture, la réplication virale est efficace uniquement sur des cellules primaires de poule ou de canard. De plus, le virus MDV ne peut pas être purifié à partir de lysats ou de surnageants de culture. Cela implique que les infections par MDV s’effectuent uniquement par co-culture de cellules infectées avec des cellules naïves. Cela a également des conséquences sur la nature unique des vaccins GaHV-2, qui sont constitués de cellules vivantes infectées congelées en azote liquide. Les virus MDV sont classés en fonction de leur pathotype : faiblement virulent (mMDV), virulent (vMDV), très virulent (vvMDV) et hypervirulent (vv + MDV) [14]. Il existe aussi des souches atténuées utilisées en vaccination, comme déjà mentionné. Le virus de la maladie de Marek Physiopathologie de la maladie de Marek Une particule infectieuse d’herpesvirus est constituée d’une capside centrale contenant le génome viral, d’une couche protéique complexe (plus de 15 protéines) appelée tégument, et d’une bicouche lipidique aussi appelée enveloppe virale, dans laquelle sont ancrées une dizaine de glycoprotéines d’enveloppe. Le génome du MDV est un ADN double brin linéaire d’environ 175 kb. Il est composé de deux séquences uniques, une courte (US) et une longue (UL), encadrées de séquences répétées terminales (TR) et internes (IR). Ce génome comporte une centaine de phases ouvertes de lecture et code plus de 70 protéines dont la plupart possèdent des orthologues chez les autres alphaherpesvirus. Parmi les protéines conservées, on trouve des enzymes, des protéines de capside (comme la protéine majeure de Le modèle actuel de la physiopathologie de la MD, schématisé sur la figure 1, a été initialement proposé par Bruce Calnek [15, 16]. Le MDV entre dans l’organisme par voie respiratoire, après inhalation de poussières contaminées [17, 18]. Là, il y infecte les lymphocytes B associés au tissu lymphoïde des bronches [19], avant d’être transporté dans les principaux organes lymphoïdes (bourse de Fabricius, thymus, rate). Rappelons ici que les oiseaux n’ont pas de ganglions lymphatiques comme les mammifères et que la bourse de Fabricius est un organe spécifique des oiseaux où s’effectue la sélection des lymphocytes B. Après son amplification dans les lymphocytes B, le MDV infecte les lymphocytes T activés, principalement CD4 positifs. Un très faible nombre de ces lymphocytes T subiraient 76 Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 revue ENTRÉE Tractus respiratoire (inhalation) LT Au repos LT Activé LB Infection Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Phase cytolytique précoce Immunosuppression Infection lytique Infection Infection lytique SORTIE Excrétion Virions infectieux matures (squames, poussières d’élevage) Latence Infection lytique LT infecté en latence Peau FP LT Transformation Mort Tumeurs = Lymphome T (rares cellules en cycle lytique) LT transformé (latence) LT Figure 1. Physiopathologie de la maladie de Marek, adaptée du modèle de Calnek. FP : follicule plumeux ; LB : lymphocyte B ; LT : lymphocyte T. un processus de transformation conduisant à la formation d’un lymphome T, monoclonal voire oligoclonal [20]. Ce lymphome est localisé préférentiellement dans les organes viscéraux (reins, rate, foie, gonades), les nerfs périphériques, la peau et les muscles. Le MDV demeure en phase de latence dans la plupart des lymphocytes T infectés, y compris transformés. Au niveau des lymphomes induits par le MDV, les antigènes viraux du cycle lytique sont exprimés dans moins de 0,01 % des cellules tumorales, cellules dans lesquelles des particules virales sont détectables par microscopie électronique à transmission (MET) [21]. Assez précocement au cours de l’infection, le virus Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 est transporté au niveau de la peau, et plus particulièrement dans les follicules plumeux. L’épithélium de ce tissu infecté est l’unique siège d’excrétion du virus dans le milieu extérieur. Les squames et les débris de plumes constituent la principale source de contamination des animaux en conditions naturelles. La transmission d’un animal à un autre se fait exclusivement par voie horizontale. Il n’y a pas de transmission verticale du virus de la poule à l’œuf, même si l’embryon peut être infecté expérimentalement après inoculation dans l’œuf [22]. Cette voie est d’ailleurs la principale voie de vaccination utilisée aujourd’hui aux États-Unis et au Brésil. 77 revue Peau et follicules plumeux de la poule La peau constitue la principale barrière de protection de l’organisme contre les éléments extérieurs chez les vertébrés. La peau des oiseaux est différente de celle des mammifères. En effet, elle est moins épaisse, ne contient pas de glandes sébacées mais surtout comporte des plumes à la place des poils. Cependant, sa structure histologique reste comparable [28, 29]. Elle est constituée d’un derme et d’un épiderme séparés par une membrane basale (ou lame basale). Les différentes couches de la peau peuvent être caractérisées par des marqueurs cellulaires présentés sur la figure 2 [30-34]. Le derme des oiseaux, constitué principalement de tissu conjonctif, est relativement mince en comparaison de celui des mammifères. Il est composé d’une assise superficielle (ou stratum superficiale) et d’une assise profonde (ou stratum profundum). Au-dessus du derme se trouve la membrane basale, constituée principalement de lamine, de collagène de type IV et de protéoglycanes, organisés en une couche fine et continue. Elle fonctionne comme un filtre moléculaire et permet également aux cellules basales de l’épiderme de s’ancrer au moyen d’hémidesmosomes. L’épiderme, épithélium pavimenteux pluristratifié et kératinisé, est constitué d’une couche profonde (stratum germinativum) et d’une couche cornée (stratum corneum). La couche profonde est composée de trois couches cellulaires superposées, les couches basale, intermédiaire et transitionnelle (figure 2). La couche basale, reposant sur la membrane basale, est formée de petites cellules cubiques, non différenciées, avec une forte activité mitotique. Les cellules filles peuvent alors migrer passivement par poussée vers les couches superficielles. La couche intermédiaire résulte de la division des cellules cubiques de la couche basale. Chez les oiseaux, cette couche est similaire à la couche épineuse des mammifères. La couche transitionnelle est spécifique de la peau des oiseaux. Elle est composée de deux à trois couches de cellules aplaties, allongées et contenant un grand nombre de vacuoles lipidiques intracellulaires. La couche superficielle de l’épiderme ou couche cornée est formée de cornéocytes. Ce sont des cellules mortes, anucléées, kératinisées, aplaties et organisées en feuillets. Les cellules basales de l’épiderme vont subir une différenciation constante au fur et à mesure de leur progression vers la surface, pour aboutir finalement aux cornéocytes. Ce processus physiologique s’achève par la perte des organites, la formation de vacuoles lipidiques et de fibrilles de kératines dans le cytoplasme ainsi que d’une enveloppe épaisse sous la membrane plasmique [29]. Le détachement régulier des cornéocytes, appelé exfoliation ou desquamation, permet un renouvellement continu de l’épiderme par les cellules de la couche inférieure. Ce processus ÉPIDERME Stratum germinativum Stratum corneum MARQUEURS CELLULAIRES Couche cornée Involucrine, Filaggrine, Loricrine Couche transitionnelle Cytokératines 10 et 75 Couche intermédiaire Transglutaminase 5, Desmogléine 2 Couche basale Cytokératines 5 et 14 Membrane basale Laminine DERME Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. L’interaction du MDV avec la peau est à l’origine de sa persistance en élevage et peut-être également de son évolution vers des génotypes de plus en plus virulents, comme cela a été proposé par certains auteurs [23, 24]. Aussi, avons-nous choisi de présenter dans cette revue l’état des connaissances actuelles sur l’interaction du MDV avec la peau de la poule. Pour d’autres aspects sur le MDV, se reporter aux revues ou ouvrages de référence suivants [25-27]. Fibronectine Figure 2. Structure de la peau aptérique de poule et marqueurs cellulaires associés. Coupe schématique transversale de peau de poule, dépourvue de follicules plumeux. L’épiderme est constitué de quatre couches de kératinocytes à des stades de différenciation différents. Les cercles rouges symbolisent les gouttelettes lipidiques. L’expression et la localisation des marqueurs cellulaires spécifiques des différentes couches de la peau sont mentionnées sur la droite de la figure. 78 Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. revue résulte de la perte des jonctions desmosomales entre cornéocytes. Une des caractéristiques principales des oiseaux est la présence de plumes sur une grande partie du corps, ce qui leur permet de voler mais assure également une protection thermique. Les plumes, constituées exclusivement de -kératines [35], sont les phanères les plus complexes et les plus diversifiés que l’on puisse trouver chez les vertébrés. Elles naissent d’une dépression de la peau appelée follicule plumeux (figure 3). Au 14e jour de l’embryogenèse, qui dure 21 jours chez la poule, le follicule plumeux se forme par invagination de l’épiderme encerclant le filament cylindrique de la plume [36]. Il y a autant de follicules plumeux que de plumes à la surface de la peau, soit plus de 10 000 [36]. À la base du follicule et de la plume, se trouvent la papille dermique, le collier et le bulbe du collier (figure 3). C’est dans cette dernière région que se situent les cellules souches folliculaires, permettant le renouvellement de la plume et du follicule après une mue physiologique ou un arrachage accidentel de la plume [37, 38]. La base d’une plume est constituée d’un axe central creux dans lequel se trouve la pulpe. Les cellules de la pulpe ont pour origine des cellules de la papille dermique, alors que toutes les autres dérivent de cellules du collier épidermique et du bulbe du collier [36]. La base de la plume est vascularisée par une artériole qui passe dans la papille dermique et la pulpe de la plume. Les follicules plumeux contiennent des mélanocytes ainsi que des cellules souches mélanocytaires, récemment identifiées et localisées par le groupe de Chuong [39]. Les mélanocytes synthétisent les mélanines dont les couleurs influencent celle du plumage. Les follicules plumeux, support de l’excrétion et de la transmission horizontale du MDV La présence de lésions cutanées à l’abattoir chez les animaux atteints de MD, ainsi que la détection d’antigènes viraux par immunofluorescence dans la peau a fait suspecter très tôt que la peau pouvait être une source d’excrétion du MDV [40, 41]. Cette hypothèse a été confirmée par la détection des premières particules virales enveloppées en microscopie électronique à transmission à partir de ce tissu [42, 43]. Ces particules ont été visualisées soit sur des coupes de peau à partir de deux semaines postinfection, soit sur des homogénats de peau ou de tiges de plumes, réalisés par congélation-décongélation ou par sonication. De plus, plusieurs expériences de transmission ont démontré que les virions produits dans ce tissu étaient bien infectieux. En effet, la MD a été reproduite avec des poussières ou des débris de plumes issus d’élevages contaminés, Gaine de la plume Artère Épiderme Derme (gris clair) Calamus de la plume Mur du follicule plumeux Pulpe de la plume Cellules souches (bulbe du collier) Zone de prolifération 100µm Couche basale (gris foncé) Couche intermédiaire (rose) Collier épidermique Papille dermique Figure 3. Structure d’un follicule plumeux. A. Coupe longitudinale d’un follicule plumeux, colorée au bleu de toluidine, à partir de la peau d’une poule de 32 jours de la lignée White Leghorn. Inclusion, coupe et coloration réalisée par S. Georgeault (plate-forme des microscopies de la faculté de médecine de l’université François-Rabelais de Tours). B. Schéma d’un follicule plumeux avec une plume en croissance. Adapté de [28, 36]. Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 79 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. revue par inoculation à des poussins ou par introduction dans leur environnement [44, 45]. Il en a été de même après inoculation de particules virales extraites de peau ou de tiges de plumes [42, 43]. À ce jour, la peau et les follicules plumeux constituent la seule source d’excrétion connue de particules virales infectieuses dans le milieu extérieur et le seul matériel biologique permettant d’extraire des virions infectieux. De façon étonnante, en absence de décontamination, l’environnement reste infectieux pendant plusieurs mois [46, 47], ce qui est tout à fait inhabituel pour un herpesvirus. Cette observation indique que les virions doivent être protégés physiquement de la dégradation (cf. ci-dessous le paragraphe sur la morphogenèse virale). Méthodes de diagnostic développées pour détecter le MDV dans la peau, les plumes et les poussières d’élevage En dehors des expériences de transmission et de microscopie électronique décrites ci-dessus, les premières méthodes développées visaient à détecter les antigènes viraux exprimés durant le cycle lytique : immunofluorescence sur coupes de peau, précipitation en gélose et Elisa à partir de broyats tissulaires ou d’extrémités de plumes [41, 48, 49]. Depuis les années 1990, des techniques faisant appel à la biologie moléculaire visant à détecter le génome viral sont apparues. Si la PCR et la qPCR sont les deux techniques les plus couramment utilisées aujourd’hui, la LAMP (loop mediated isothermal amplification) et le séquençage direct ont aussi leur intérêt [50-57]. La LAMP, par exemple, est une méthode qui permet un diagnostic rapide et peu coûteux sur le terrain. Toutes ces nouvelles méthodes peuvent être appliquées à partir de peau, d’extrémités de plumes et même de poussières d’élevage récoltées et concentrées sur filtres. Sur le terrain ainsi que dans les conditions expérimentales, on peut cependant être confronté à la difficulté de distinguer les souches vaccinales des souches pathogènes, en particulier après vaccination avec la souche GaHV-2 CVI988/Rispens. Le génome de cette souche vaccinale présente en effet moins de 200 mutations synonymes et non synonymes comparé à celui des souches pathogènes Md5 et Md11 [58]. Récemment S. Baigent a développé une méthode de qPCR mettant à profit un SNP (single nucleotide polymorphism) dans le gène de la pp38 afin de différencier le génome Rispens des autres génomes de MDV potentiellement virulents [59]. Rappelons que pour les herpesvirus, la détection du génome viral ne signifie pas nécessairement que la réplication virale a lieu, du fait de la latence virale. Cependant pour le MDV, bien que la présence dans la peau de lymphocytes T infectés de façon latente soit 80 possible (voir ci-dessous le paragraphe sur les lésions cutanées), il est généralement admis que la présence d’ADN viral dans ce tissu est associé à une réplication virale dans l’épithélium cutané. Depuis quelques années, les plumes et les poussières d’élevage sont considérées comme un matériel biologique de choix afin de suivre la circulation des mardivirus en élevage [60]. En effet, la peau et les plumes sont les tissus les plus couramment retrouvés positifs en termes d’expression d’antigènes viraux [41, 48] et qui présentent le plus grand nombre de copies de génome viral par million de cellules [54, 61]. Tropisme et réplication du MDV dans les follicules plumeux Les modalités d’infection de la peau et des follicules plumeux par le MDV sont très mal connues. Actuellement, on suppose que ce sont les lymphocytes B ou T, cibles majeures du virus, précocement infectées, qui véhiculent le MDV jusqu’aux cellules épithéliales de ce tissu ; mais ce postulat n’a jamais été démontré. Les images obtenues par immunofluorescence, histologie ou microscopie électronique indiquent que les antigènes viraux et les virions sont présents principalement dans les couches supérieures du stratum germinativum, au niveau de la couche transitionnelle des follicules plumeux [43, 48, 62-67]. Le MDV est détectable dans la peau et/ou l’extrémité des plumes rapidement après l’infection. Avec les méthodes biochimiques, on considérait il y a encore une dizaine d’années, que le MDV atteignait ce tissu 11 à 14 jours post-infection (pi) [65, 66]. Avec la qPCR, beaucoup plus sensible, on retrouve le génome du MDV dans les plumes ou les poussières d’élevage environ une semaine pi [52, 67, 68]. Il en est de même avec un virus MDV fluorescent dont on suit l’expression d’une protéine de tégument étiquetée avec la mRFP (monomeric red fluorescent protein) [68]. Bien que des variations de cinétique soient observées en fonction des souches, les méthodes de qPCR ont également montré que les souches non virulentes de mardivirus pouvaient être détectées aussi précocement dans les plumes que les souches virulentes, et même produites en plus grande quantité [61, 67]. Lors d’infections expérimentales avec des souches pathogènes ou vaccinales, le nombre de copies de génome viral par million de cellules issues des plumes s’accroît considérablement entre 7 et 28 jours pi, passant de 103 à 108 (figure 4) [21]. De plus, les titres mesurés par qPCR dans les plumes sont fortement corrélés à ceux mesurés dans les poussières d’élevage, indiquant que la production et l’excrétion virale sont associées et progressent de la même façon [61]. Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 Une étude réalisée sur des poulets de chair en isolateur indique que l’excrétion d’un MDV virulent se stabiliserait après 28 jours pi, que les animaux soient vaccinés ou non [67]. Les follicules plumeux peuvent être le siège de co-infections de mardivirus, que les virus soient pathogènes ou non. La réplication de deux MDV pathogènes dans un même follicule plumeux a été récemment décrite en utilisant des virus fluorescents (mRFP et eGFP) ou des virus distinguables antigéniquement [57, 69]. Il a même été montré qu’une cellule épithéliale du follicule pouvait être infectée par deux virus recombinants de même génotype, étiquetés par deux protéines fluorescentes différentes [69]. De telles co-infections cellulaires suggèrent que ce tissu pourrait être le siège de recombinaison génétique entre MDV, à l’origine de nouvelles souches. nés (crête, barbillons situés de part et d’autre du bec, peau des pattes) [71]. Les lésions cutanées non tumorales s’observent par microscopie optique ou électronique dès deux semaines postinfection [43]. Elles correspondent à l’effet cytopathogène dû à la réplication du MDV, comme en témoigne la présence d’antigènes viraux et de particules virales (cf. paragraphe suivant). Comme mentionné précédemment, ces lésions sont visibles dans les cellules épithéliales des couches supérieures du stratum germinativum du follicule plumeux et jamais dans la couche basale [43, 48, 62]. Elles se caractérisent par des corps d’inclusion nucléaires arrondis ainsi que de grosses inclusions cytoplasmiques, contenant des particules virales enveloppées [43]. Les lésions cutanées tumorales ont été observées historiquement à l’abattoir sur des animaux présentant des follicules plumeux hypertrophiés [40] (figure 5A). Des tumeurs cutanées sont également observées de façon beaucoup plus rare, notamment dans des zones dépourvues de plumes (figure 5B). Microscopiquement, le derme contient des agrégats compacts de cellules lymphoïdes, souvent localisés au voisinage de vaisseaux sanguins. In situ, ces cellules n’exprimaient généralement pas d’antigènes viraux détectables par immunofluorescence après marquage avec des sérums de poules hyperimmunisées [62], bien que le MDV puisse être isolé de ces lésions après explantation et mise en culture [72]. On peut donc supposer que ces lésions Lésions cutanées après infection par le MDV Deux types de lésions cutanées sont associées à l’infection par le MDV : des lésions tumorales et non tumorales [27, 70]. Quel que soit leur type, elles sont surtout localisées dans le follicule plumeux ou à proximité, bien que certaines aient été décrites dans d’autres appendices cuta- 100 108 90 Nombre de copies de génome MDV/106 cellules 107 80 106 10 70 5 60 50 104 40 103 30 102 20 101 10 10 0 Incidence cumulée de la mortalité et des lymphomes induits par le MDV (%) Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. revue 0 0 7 14 21 28 35 42 49 56 Temps post-infection (jours) Sang Follicules plumeux Maladie de arek Figure 4. Charge virale et incidence de la maladie de Marek après infection expérimentale avec la souche très virulente rRB-1B. Des poussins d’une semaine ont été inoculés par voie intramusculaire avec la souche rB1-1B. La charge virale a été analysée par qPCR à partir de l’ADN extrait de sang total et de cellules de l’extrémité des follicules plumeux. Figure réalisée à partir de résultats de [21]. Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 81 revue A Ca Teg Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Env Ves B Figure 6. Particule de MDV observée en microscopie électronique à transmission (MET), au sein d’une vésicule intracytoplasmique dans une cellule primaire de peau de poulet (CESC) en culture. Il est à souligner que ces cellules sont majoritairement fibroblastiques. Du centre vers la périphérie, on observe une capside de type C (Ca), le tégument électron dense (Teg), l’enveloppe de la particule (Env) et la membrane de la vésicule (Ves). Barre, 0,2 m. Image publiée dans Virologie 2007 ; 11(6) : 471-3. Figure 5. Lésions cutanées induites par le MDV. A. Poulet fermier présentant une hypertrophie des follicules plumeux après un épisode de MD dans l’élevage. B. Tumeur cutanée sur un poulet cou nu de 18 semaines. Ce type de tumeur est relativement rare. Images généreusement données par le Dr Pierre David Gras. contiennent des cellules infectées transformées où le MDV est en latence, et desquelles il est capable de réactiver après explantation. Bien que non publié à notre connaissance, il est probable que ces cellules expriment l’oncoprotéine Meq. Morphogenèse virale particulière du MDV dans la peau Les particules virales d’herpesvirus ont une taille moyenne de 250 nm de diamètre [73]. Elles sont constituées d’une capside icosaédrique contenant le génome viral, entourée du tégument et de l’enveloppe. Ces particules résultent d’un processus complexe appelé morphogenèse virale. Dans le 82 cas des alphaherpesvirus, trois modèles ont été proposés, le plus couramment admis, étant celui de l’enveloppementdéenveloppement que nous allons brièvement résumer. Pour plus de détails se reporter aux revues suivantes [74-77]. La morphogenèse débute dans le noyau avec l’assemblage des capsides et l’incorporation du génome, aboutissant aux capsides de type C. Ces capsides sont ensuite transportées activement dans le cytoplasme, par bourgeonnement au niveau de l’enveloppe nucléaire interne et fusion des particules primo-enveloppées au niveau de la membrane nucléaire externe. Une fois dans le cytoplasme, ces capsides acquièrent leur tégument et bourgeonnent dans le Golgi (étape dite de ré-enveloppement). Les particules enveloppées matures qui en résultent sont situées au sein de vésicules et sont relarguées par exocytose dans le milieu extérieur. Pour MDV, contrairement aux autres alphaherpesvirus, aucune particule virale enveloppée mature n’a jamais été observée dans le milieu extérieur. De plus, ces particules sont en faible nombre dans le cytoplasme en culture cellulaire (figure 6) [78], comme dans la plupart des tissus infectés à l’exception des follicules plumeux (pour Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. revue revue voir [79]). En effet, par microscopie électronique à transmission, plusieurs auteurs ont observé de nombreuses particules enveloppées dans le cytoplasme des kératinocytes des couches supérieures de l’épiderme des follicules plumeux [43, 63, 64]. Toutes les zones de la peau étudiées contiennent des virions [43]. De façon étonnante, ces particules virales d’une taille de 200-250 nm de diamètre étaient généralement regroupées au sein d’inclusions cytoplasmiques denses aux électrons, et non à l’intérieur de vésicules. Ces observations nous questionnent sur les mécanismes d’acquisition de l’enveloppe et de libération des virions infectieux dans le milieu extérieur. On peut donc se demander si les virions infectieux sont activement excrétés dans le milieu extérieur ou bien s’ils restent à l’intérieur des cornéocytes ayant desquamés ou des plumes qui sont tombées. Cela pourrait expliquer : – la résistance atypique de l’infectiosité du MDV dans l’environnement ; – le besoin de recourir à un processus d’homogénéisation pour isoler et visualiser des particules virales infectieuses à partir de la peau infectée [42, 43]. Déterminants moléculaires associés à la réplication et à l’excrétion du MDV au niveau des follicules plumeux Afin d’expliquer la production virale élevée de particules infectieuses de MDV au niveau de la peau, quelques auteurs ont cherché à identifier des gènes ou des protéines virales surexprimés ou exprimés uniquement dans la peau. En absence d’études de transcriptomique ou de protéomique, seuls trois gènes codant des protéines virales ont été identifiés comme répondant à ces critères : US6 codant la glycoprotéine d’enveloppe gD [66], la protéine pp38 [66] et UL47 codant la protéine de tégument VP13/14 [80]. Prenons l’exemple de la gD. La glycoprotéine gD est une glycoprotéine majeure pour l’infectiosité des particules virales HHV-1 en initiant la fusion virale après interaction avec l’un de ses récepteurs [81]. Cette propriété en faisait donc un bon candidat. Pour MDV, gD ne s’exprime pas en culture sur fibroblastes embryonnaires de poule, alors qu’elle s’exprime dans 30 à 50 % des follicules plumeux retrouvés positifs pour d’autres antigènes viraux [66]. Cette glycoprotéine ne semble cependant pas jouer un rôle essentiel dans la production virale au niveau des follicules plumeux, car la délétion de son gène US6 n’empêche pas la transmission virale entre oiseaux [82]. Actuellement, on ne connaît rien de la relation entre la forte expression des deux autres protéines dans les follicules plumeux et la forte production virale observée dans ce tissu. Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014 À ce jour, aucun déterminant cellulaire n’a été identifié comme essentiel dans ces processus. La mise en place récente dans notre laboratoire de nouveaux modèles cellulaires de kératinocytes sensibles à l’infection par MDV permettra peut-être une avancée dans ce domaine [83]. Notons que toutes les races de Gallus gallus étudiées semblent sensibles à l’infection par le MDV, y compris les races exotiques [84, 85]. À ce jour, aucune race n’a été identifiée comme produisant plus ou moins de particules virales au niveau des follicules plumeux ou comme étant incapable de transmettre l’infection. Pour une lignée cependant, on peut s’interroger. Il s’agit de la lignée scaleless, porteuse de la mutation récessive autosomale sc (scale) à l’origine de poules « nues » sans plume. Après infection expérimentale, cette lignée est capable de produire des virions MDV infectieux au niveau de la peau [86], transmissibles par injection d’homogénats de peaux infectées. En revanche, la capacité de cette lignée à transmettre la MD par voie naturelle n’a jamais été rapportée à notre connaissance. Ces animaux n’ayant que quelques follicules plumeux épars, ce résultat serait intéressant à connaître pour savoir si les follicules plumeux sont indispensables ou non à la transmission horizontale. L’interaction des vaccins anti-MDV avec la peau. Conséquences Plusieurs études récentes réalisées par qPCR à partir d’extrémités de plumes ont montré que les trois souches vaccinales commercialisées (HVT, GaHV-3 SB-1 et GaHV2 CVI988/Rispens) se répliquent dans les follicules plumeux [54, 55, 60, 61]. Dans le cas de la souche CVI988/Rispens, son génome est détectable moins de sept jours pi dans les plumes [61, 87] et sa charge virale s’accroît au cours du temps pour atteindre une valeur élevée, supérieure à celle mesurée dans les autres tissus [61], comme avec une souche pathogène. Il est cependant important de mentionner que la charge vaccinale dans les plumes peut varier considérablement entre poules dans un même troupeau [88]. Tous les vaccins disponibles induisent une immunité non stérilisante, qui protège contre la formation des tumeurs, mais qui ne protège pas contre l’infection et l’excrétion des souches pathogènes au niveau des follicules plumeux. La persistance de l’excrétion des souches pathogènes après vaccination a été montrée lors d’infections expérimentales ainsi que dans les conditions d’élevage [59, 67, 89]. Cela a pu être mis en évidence grâce au développement de méthodes de qPCR, différenciant les souches vaccinales des souches non vaccinales (voir paragraphe ci-dessus sur les méthodes de diagnostic). L’influence de la réplication 83 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. revue des virus vaccinaux sur celle des virus pathogènes au niveau de la peau et inversement commence à être connue. Ainsi, la vaccination par CVI988/Rispens réduit d’un facteur 10 la charge virale de la souche très pathogène rRB-1B dans les plumes, bien que la réplication de la souche pathogène ne soit pas écourtée dans le temps [87]. Inversement la réplication de la souche rRB-1B ne semble pas modifier celle de la souche vaccinale [87]. En revanche, deux études ont montré une augmentation de la charge génomique de HVT dans les plumes après épreuve virale, indiquant que la réplication du MDV pathogène augmentait la réplication du virus vaccinal HVT [67, 90]. La mesure de la charge vaccinale dans les plumes permet de vérifier que les animaux ont bien été vaccinés et si des virus pathogènes circulent concomitamment aux virus vaccinaux. Actuellement plusieurs équipes cherchent à savoir si la mesure de la charge virale vaccinale dans les plumes permettrait de prédire la couverture vaccinale d’un troupeau. De plus, depuis quelques années, V. Nair a émis l’hypothèse que la vaccination, en permettant une circulation silencieuse des MDV pathogènes dans les élevages (absence de signe clinique de MD), pourrait contribuer à l’évolution de ces virus vers les génotypes de plus en plus virulents [24]. Compte tenu des bénéfices de la vaccination pour la santé des animaux, il n’est évidemment pas question d’y renoncer. L’idée actuelle serait de développer un vaccin de 4e génération qui bloque l’excrétion virale des virus pathogènes ; cependant les moyens d’y parvenir restent à trouver. C’est un des grands défis actuels de la recherche sur ce pathogène. Réponse immune de l’hôte au niveau de la peau et des follicules plumeux infectés par MDV Peu d’études sont disponibles dans ce domaine. Après infection par un virus très virulent (comme le rRB-1B) ou par un virus vaccinal (Rispens ou HVT), il a été observé une augmentation de l’expression de gènes de cytokines pro-inflammatoires dans la pulpe de la plume, notamment l’interféron gamma, ainsi qu’une infiltration en lymphocytes T dans la pulpe des follicules plumeux [91, 92]. L’infiltration en lymphocytes T CD4+ et CD8+ est observée dès quatre jours pi et atteint son maximum à dix jours pi avec un virus très virulent [91]. En revanche, avec un virus vaccinal HVT ou CVI988, seule une infiltration en lymphocytes T CD8+ a été observée et la production d’interféron gamma semble moindre [92]. Cette réponse immune de l’hôte s’avère cependant assez inefficace pour inhiber la réplication virale dans les follicules plumeux ainsi que son excrétion, comme en témoignent les charges virales pré84 sentées ci-dessus pour les virus pathogènes et vaccinaux. Aussi une meilleure connaissance des mécanismes moléculaires et cellulaires pouvant avoir un effet protecteur dans ce domaine serait un atout majeur afin de limiter la circulation des virus pathogènes. Conclusion Au cours des dernières années, l’étude des interactions du MDV avec les follicules plumeux a connu un véritable regain d’intérêt. Cela tient en particulier au développement des méthodes de qPCR à partir des plumes ou des poussières d’élevage. Ces techniques ont permis de démontrer que les vaccins actuels ne protègent pas contre l’excrétion virale des souches pathogènes dans le milieu extérieur. Au niveau fondamental, de nombreuses questions restent encore à élucider, en particulier la compréhension des mécanismes moléculaires et l’identification des déterminants cellulaires responsables de la morphogenèse efficace du MDV dans l’épithélium des follicules plumeux. Une avancée dans ce domaine permettrait sans doute d’envisager de nouveaux moyens de lutte contre l’excrétion virale. Le blocage de l’excrétion virale des virus MDV pathogènes est aujourd’hui considéré comme un enjeu majeur afin de stopper l’évolution des MDV vers des génotypes plus pathogènes. Remerciements. Nous remercions Sonia Georgeault pour la photo de coupe de peau de poule non infectée colorée au bleu de toluidine et Pierre David Gras pour les photos de lésions cutanées de MD. M. Couteaudier est financée par une bourse doctorale de la région Centre. Une partie de nos travaux sur le MDV sont financés par l’ANR dans le cadre du programme EMIDA MADISPREAD. Liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêt en rapport avec l’article. Références 1. Morrow C, Fehler F. Marek’s disease: a worldwide problem. In : Davison F, Nair V, eds. Marek’s disease: an evolving problem. London : Elsevier Academic Press, 2004 [49-61]. 2. Churchill AE, Biggs PM. 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Virologie, Vol 18, n◦ 2, mars-avril 2014