1. Reconnaître la dimension morale
Les infirmières de Winnipeg reconnaissent qu’elles ont un problème
d’ordre éthique. Même si elles veulent continuer à travailler et faire tout
leur possible pour leurs petits patients, elles se rendent compte aussi que
le silence ne protégera pas le mieux-être de ces derniers.
2. Qui sont les intéressés? Quels sont leurs liens?
Il peut y avoir beaucoup de relations en jeu dans la décision des
infirmières : relations avec des collègues, (y compris les chirurgiens, les
spécialistes en pédiatrie, les anesthésistes, d’autres infirmières), d’autres
membres du personnel de l’hôpital, les parents et les enfants, la
collectivité desservie par l’hôpital.
3. Quelles sont les valeurs en cause?
Les infirmières pourraient se servir du Code de déontologie des
infirmières autorisées pour définir les valeurs mises en danger. Le code
pourrait les aider à préciser pourquoi elles ressentent une détresse morale.
4. Pondérer les avantages et les inconvénients.
Si les infirmières s’adressent au public, elles peuvent perdre leur emploi.
Si elles demeurent muettes, elles peuvent ressentir à une culpabilité et un
stress insupportables. D’autres enfants pourraient mourir, mais la
divulgation peut entraîner la fermeture du programme, ce qui ferait
perdre des ressources à la province.
5. Rechercher des cas semblables.
De nombreux cas de dénonciation ont causé des préjudices aux
établissements et aux dénonciateurs (Hardingham, 1994). Il y a eu des
changements dans certains cas, mais aucun résultat efficace dans
d’autres. Les infirmières devraient se demander : comment la
dénonciation aidera-t-elle en l’occurrence? Les infirmières sont-elles
prêtes à faire face aux problèmes qu’on connus d’autres dénonciateurs?
6. Discuter avec des proches.
Des discussions avec des collègues, des infirmières cadres et des
associations professionnelles pourraient aider à prendre une décision.
Cette étape cruciale à franchir avant d’envisager la dénonciation pourrait
aider les infirmières en cause à mobiliser davantage d’appuis.
Dans nombre de situations, la façon la plus efficace de modifier un
système qui cause ou peut causer des préjudices consiste à mobiliser le
plus grand nombre de personnes possible. Comme elles ont besoin de
leadership efficace, les infirmières de Winnipeg font appel à la Manitoba
Association of Registered Nurses qui les appuie et les aide.
7. Cette décision est-elle conforme aux règles
imposées par la loi et à celles de l’organisation?
Même si les infirmières réalisent qu’elles enfreindraient les politiques de
l’organisation en dévoilant leurs préoccupations au public ou à des
parents, elles ont aussi une responsabilité professionnelle. Elles doivent
prêter attention aux facteurs institutionnels, sociaux et politiques qui
influent sur la santé et sur les soins de santé (AIIC, 1997, p. 8).
8. Suis-je à l’aise avec cette décision?
Même si les infirmières de Winnipeg veulent faire davantage, elles ne se
sentent pas à l’aise de dénoncer la situation, car elles croient qu’une telle
divulgation pourrait causer d’autres préjudices. Elles continuent
d’exercer des pressions à l’intérieur de l’établissement pour qu’on donne
suite à leurs préoccupations. Comme rien ne bouge, les infirmières se
retrouvent toutefois dans une situation très stressante. Elles se sentent de
plus en plus mal à l’aise et décident de s’adresser à l’extérieur.
LECASDEDAVID
Pour prendre des décisions conformes à l’éthique, David pourrait
envisager de recourir à la méthode du cercle tirée de Déontologie
quotidienne (AIIC, 1998, p. 58) pour décider comment faire face aux
problèmes de sa collègue violente. Il s’agit d’une méthode à trois volets
dont la nature circulaire intègre l’analyse et la prise en considération de
nouveaux renseignements à mesure qu’ils se présentent :
1. Information et identification :
David devrait réunir de l’information sur la situation et définir
exactement son dilemme. David croit qu’il y a de la violence dans son
service, d’autres personnes semblent d’accord avec lui mais ont peur de
parler, et les membres du personnel qui ont beaucoup d’ancienneté ont
un sentiment de loyauté les uns envers les autres. Le dilemme d’ordre
éthique est le suivant : si David divulgue la violence, il sera harcelé
davantage et aura de la difficulté à continuer à travailler dans son
service. S’il ne dit rien, il laissera la violence continuer et l’approuvera
indirectement par son silence.
Si David travaille dans une province où la loi oblige à dénoncer la
violence, son silence sera aussi contraire à la loi.
2. Éclaircissement et évaluation :
Au cours de cette étape, David chercherait à éclaircir son dilemme en
consultant de nombreuses sources d’information et en étudiant peut-être
des principes de déontologie. Déontologie quotidienne (AIIC, 1998)
décrit les principes de déontologie que constitue la bienfaisance
(promouvoir le bien), la non-malfaisance (éviter le mal) et la justice
(équité). La collègue de David ne sait peut-être pas que d’autres jugent
ses actes préjudiciables ou violents et en le lui signalant, on pourrait
peut-être mettre fin au problème. Promouvoir le bien peut obliger à
prendre des mesures pour prévenir toute autre violence. La justice
pourrait consister à assurer un environnement sûr pour tous les patients.
D’autres documents pourraient être utiles, comme le Code de
déontologie des infirmières autorisées, la loi provinciale qui définit les
responsabilités légales de David et les normes d’exercice de la
profession. Des collègues, des associations d’infirmières
professionnelles, des organismes de réglementation ou d’autres
intervenants pourraient avoir des suggestions et offrir leur appui.
3. Action et revue de la situation :
David doit évaluer les résultats de ses actes et changer d’idée, le cas
échéant. Vu qu’on n’a pas donné suite à ses préoccupations après qu’il
s’est adressé à son superviseur, David doit réévaluer la situation.
Comme professionnel, David doit «garantir la qualité des soins
prodigués par les gens de la profession» et «prendre des mesures de
préventions ainsi que des mesures correctives pour protéger les clients
contre des soins qui ne sont pas sécuritaires, compétents ou conformes à
l’éthique» (AIIC, 1997, p. 19), ce qui l’oblige à donner suite aux
incidents qui compromettent les soins des clients et leur sécurité.
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OUVERTS
Dans une organisation de soins de santé, un environnement hostile où
règnent le soupçon et le manque de communication risque de mettre en
danger les soins compétents et conformes à l’éthique. Les infirmières
chefs et les administrateurs sont tenus par l’éthique d’établir un climat de
respect mutuel et de solution de problèmes plutôt que de blâme. Il est
plus facile de définir les problèmes et de les régler dans un climat sans
crainte ni accusations qui encourage la dénonciation responsable de
problèmes et de préjudice éventuels.
Le Code de déontologie des infirmières autorisées (1997, p. 26) suggère
des mesures que la supérieure de David aurait pu trouver utiles :
•obtenir tous les détails voulus sur la situation et peser les
risques. L’infirmière chef aurait pu s’entretenir en privé avec
d’autres membres du personnel et le patient pour déterminer s’il
y a eu violence.
•vérifier les politiques, directives et procédures en vigueur avant
de signaler un incident ou un cas supposé d’incompétence ou de
manquement à l’éthique. Si la province ou le territoire oblige à
dénoncer la violence, David et sa supérieure sont tous deux
tenus par la loi de le faire.