Connaître l`institution, connaître l`enfant Module 1 : Psychologie

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UE 12
Connaître l'institution, connaître l'enfant
Module 1 : Psychologie
« Développement cognitif et social de l'enfant »
Céline Clément
Psychologie du développement
Psychologie du développement
Qu'est-ce que c'est, la psychologie du développement ?
C'est l'étude du changement dans les interactions d'une personne avec son environnement.
– Interaction : Transformation de l'environnement et d'une personne → l'enfant agit sur
l'environnement et celui-ci agit en retour de façon plus ou moins égale
– Environnement : C'est, par exemple, l'environnement familial mais ce terme désigne
aussi une structure sociale au sens plus large avec un bagage culturel variable, que
l'enseignant se doit de prendre en compte.
Une approche en « Life Span »
Cette approche s'effectue tout au long de la vie du sujet, puisqu'il n'y a aucune réelle stabilité dans la
vie d'un enfant. Celui-ci évolue de façon fulgurante et aura donc des interactions et des adaptations
différentes en fonction du moment T d'analyse.
Les abords cognitivo-comportementaux
– Comportemental : Emettre des hypothèses sur la façon dont l'environnement va favoriser
ou non les apprentissages de l'enfant (structure de la classe, pratiques parentales, …)
– Cognitif : Emettre des hypothèses sur le fonctionnement interne du sujet, pour
comprendre de quelle façon il traite les informations qui viennent à lui.
Des sphères en interaction
Le développement de l'enfant affecte 3 sphères en interaction, fortement liées :
• sphère physique et motrice
• sphère perceptive et cognitive
• sphère affective et sociale
Exemple de l'apprentissage de la marche :
C'est avant tout une action motrice, mais c'est aussi la libération des mains pour l'enfant.
Cette libération engendre des conséquences multiples et néanmoins fondamentales sur les
interactions de l'enfant avec son environnement : par exemple, il va apprendre à ouvrir les placards
et disperser les objets qui s'y trouvent. Cette nouvelle gamme d'interaction physique entraîne
également la création d'interactions sociales avec, notamment, la création de nouvelles règles du
comportement en lien avec les nouveaux gestes de l'enfant. La perception de l'environnement s'en
trouve modifiée car l'enfant va cognitivement se mettre à repousser les limites fixées par ces
interactions physiques et sociales.
Les retards dans l'apprentissage de la marche entraînent des retards globaux dans les trois sphères,
on considère que c'est inquiétant si ces retards deviennent excessifs dans la moyenne du
développement psychomoteur de l'enfant.
Un comportement tri-dimensionnel
Un comportement, qu'il soit d'un enfant ou d'un adulte, a toujours 3 dimensions :
• dimension physique et motrice
• dimension perceptive et cognitive
• dimension affective et sociale
Exemple de la démarche interrogative :
C'est un comportement moteur en premier lieu, puisqu'il s'agit de formuler des sons. Le
processus donne néanmoins accès à la dimension affective et sociale du comportement, puisque des
signes se transmettent dans la démarche (par exemple, on ressent l'anxiété ou d'autres sentiments
dans la voix). La démarche est aussi cognitive et perceptive puisqu'il y a une « attente » : on se met
en situation de réflexion avant de poser des questions, pour élaborer des formulations et attendre,
par exemple, de voir si quelqu'un d'autre pose la question.
Développement des relations entre pairs
Ce sont des relations fluctuantes et rarement stables, autant dans la vie des enfants que dans celle
des adultes. Il existe deux catégories de relations, à fonctions distinctes.
Relation verticale / complémentaire :
Remarque : Pour l'enfant, cette relation se construit le plus souvent avec un pair qui sera son aîné :
parent, éducateur, enseignant, … Mais au cours de l'existence, ce lien est à même de s'établir avec
des pairs de la même génération ou plus jeunes dans certaines mesures.
Cette relation désigne un attachement à une personne qui a des connaissances et des pouvoirs
supérieurs à ceux de l'enfant. Elle permet la construction du modèle interne de l'enfant, qui fait
référence à la qualité de l'attachement. Il est indispensable pour l'enfant de créer ce lien avec une
personne de son environnement proche pour qu'il puisse, plus tard, mieux s'en détacher et s'attacher
ainsi correctement à d'autres personnes dans une relation sécurisante. Cette relation participe aussi à
la construction du modèle de soi de l'enfant, on lui donne une définition en lui attribuant des
qualités et des capacités – mais maladroitement parfois, on transmet une mauvaise image de
l'enfant. C'est également un lien qui sollicite la transmission des habiletés sociales de base, comme
la politesse et tout ce qui fera qu'on est capable « d'être » avec les autres.
Relation horizontale / réciproque :
Remarque : C'est une relation qui s'effectue dès l'enfance et qui tendra à évoluer avec les
changements qui affectent l'existence, on assimile ce lien à de l'amitié.
Cette relation entre dans le cadre de l'apprentissage. Elle sert notamment à apprendre la coopération
avec ses pairs, pour aider et se laisser aider, mais donne également des notions de compétition. Il est
important, notamment, que l'enfant ne soit pas un mauvais perdant et qu'il puisse demeurer humble
dans la victoire. Cette catégorie de relation va également mettre en avant des notions d'intimité,
pour établir des règles aux échanges sentimentaux et affectifs précoces des enfants – c'est un début
d'affinité qui se développe et grandit avec l'âge.
Compétences socio-cognitives
Qu'est-ce que c'est ?
Les compétences socio-cognitives, ou habiletés sociales, sont un ensemble de compétences
spécifiques qui permettent à une personne d'accomplir des performances socialement adaptées.
Elles se construisent en lien avec la réception des informations, généralement subtiles, qui entourent
une conversation, et qui entraînent une décision puis un comportement.
Comprendre ce que les autres pensent et ressentent
Les compétences socio-cognitives s'établissent en lien avec les informations contenues dans une
relation (conversations, comportements, …). Les signaux sont généralement difficiles à déchiffrer, y
compris pour les adultes, ce qui entraîne parfois des absences de comportements adaptés et donc,
des problèmes dans les relations avec ses pairs. Chez l'enfant, cette habileté est « à devenir » : il doit
encore apprendre à discriminer les émotions et les cognitions afin d'agir en conséquence.
Développement et régulation des émotions et des cognitions
Nos émotions façonnent nos façons de penser et d'agir, la routine de pensée (= schéma cognitif)
affecte la manière dont nos émotions sont vécues et transmises dans l'acte en fonction de nos
expériences passées et souvent, de nos traumatismes. Un enfant aura plus de mal qu'un adulte à
contrôler ce panel d'émotions.
La discrimination des émotions chez les enfants
On assiste à une gradation dans le processus d'apprentissage de la discrimination des émotions chez
les enfants :
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6 / 7 mois : Les enfants se basent sur différentes choses, et notamment surtout les
expressions faciales des parents, afin de guider un comportement dans la situation
2 ans : Les enfants connaissent des émotions basiques (tristesse, joie, colère, peur, …) de
façon abstraite, grâce aux comportements inconscients des parents et d'autres relations
verticales qui aident à l'identification des sentiments.
3 ans : Les enfants sont de plus en plus capables d'identifier les émotions de leurs
camarades, mais le processus est difficile avec les grandes personnes qui contrôlent de façon
précise ce qu'ils ressentent.
5 / 6 ans : Les enfants identifient un certain nombre d'émotions et sont également en mesure
d'en comprendre les causes simples, pour lesquelles ils se mettent d'accord avec les adultes.
Remarque : Il existe des cas spécifiques, comme par exemple les troubles du spectre de l'autisme,
qui faussent cette discrimination des émotions et empiètent sur l'expression des compétences sociocognitives (des difficultés plus ou moins importantes à identifier les émotions, les double-sens du
langage, …).
Réguler des émotions et des comportements
La littérature de jeunesse aide l'enfant à identifier des émotions au travers de caricatures (imagiers,
scénarios sociaux, …) - c'est un support de cours qu'on utilise afin d'aider certains enfants dont la
famille n'a pas insisté sur la reconnaissance et l'expression des sentiments dans le cadre intime de la
sphère privée. Les émotions sont alors identifiées, de même que la façon dont elles sont contrôlées,
via des images et / ou textes qui servent de modèle aux enfants.
Régulation des émotions personnelles chez les enfants
Les nourrissons utilisent des items à des fins d'apaisement, avec ou sans l'intervention d'un parent.
Pouces, tétines et doudous prennent de l'importance dans cet exercice mais ne sont pas toujours
efficace en fonction de la variation de l'irritabilité du nourrisson. Les enfants entre 2 et 6 ans
présentent des façons de faire plus ou moins complexes, mais qui ne nécessitent pas un
apprentissage spécifiques. Ils identifient la situation, leurs limites et agissent en conséquence en
mettant en oeuvre des stratégies cognitives et langagières naturelles ou « copiées » (fermer les yeux,
se boucher les oreilles, se mettre en retrait → faire tomber la pression, …).
Conséquences de bonnes compétences socio-cognitives
Les compétences socio-cognitives permettent :
• la participation à des jeux
• l'établissement de relations amicales
• l'intégration à des groupes de pairs
Chez les enfants, les interactions entre pairs sont précoces – elles commencent généralement à la
crèche ou au parc. On assiste alors à des comportements d'offrande, de dons, mais aussi d'agression.
Psychologiquement, on s'interroge encore sur l'intentionnalité de ceux-ci.
Dans les années 80, Montagner s'est intéressé aux comportements des enfants en crèche (cf. tab 2
du Power Point) : son étude montre l'importance de l'évolution du comportement chez les enfants.
L'agression est un comportement des plus fréquents, mais qui change en fonction de l'âge des
enfants → on passe de l'agression physique en petite enfance, à l'agression verbale.
Développement des relations entre pairs
Il existe deux catégories d'agression flagrantes :
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•
Les agressions physiques (ou classiques) : elles attaquent la relation mais aussi l'être en luimême, puisqu'elles s'expriment dans la violence avec des coups et des insultes
Les agressions indirectes : elles attaquent le domaine relationnel d'une classe et nuisent au
bien-être des victimes, les enfants empêchent par exemple l'intégration à leur groupe ou en
excluent un membre – au collège / lycée, commencent aussi les rumeurs.
On remarque néanmoins que les stratégies agressives sont différentes en fonction du sexe. Un
diagramme de [ … références … ] montre que ce genre d'agression est plus fréquent chez les filles
(18%) tandis que les garçons expriment plus généralement des agressions du domaine physique
(16%). C'est un comportement répréhensible qu'on attache souvent aux filles populaires.
Les agressions relationnelles passent généralement inaperçues car l'enseignant est plus facilement
déconcentré dans son métier dans le cadre des agressions manifestes, qui viennent troubler sa classe
de façon immédiate et directe.
Fonctions des relations amicales
Avec les enfants : Travailler sur ce qu'est un ami et comment il se comporte
Les relations amicales permettent d'accroître les compétences socio-cognitives, de même qu'elles
permettent de les mettre en oeuvre avec ses pairs. Les interactions sociales, qu'elles soient sur le
même plan ou décentrées, servent d'exercice de mise en oeuvre pour les enfants et continuent une
formation qui dure toute la vie.
Elles encouragent la notion de partage (donner des informations sur soi, sur les autres, sur le
monde) : les enfants communiquent des informations plus ou moins pertinentes à propos de ce qui
les entoure, mais ces informations permettent d'identifier des qualités et des défauts qui prennent un
autre sens lorsqu'elles sont exprimées par un pair du même plan.
L'amitié donne également du plaisir, dans le sens où cette relation se doit d'être à double-sens et de
satisfaire les deux personnes qui y évoluent, sans qu'il ne se produise d'injustice ou d'inégalité.
Les relations amicales servent de modèle aux premières relations intimes puisqu'elles commencent
elles aussi par un partage d'informations précieuses et personnelles.
Les compétences sociales en amitié
The Friendship Algorithm de Sheldon Cooper (The Big Bang Theory) :
Savoir faire des avances : il faut une entrée en contact pour développer une relation avec autrui.
Savoir ce qui est attendu aux différentes étapes de l'amitié : il ne faut ni brusquer, ni laisser traîner
des choses dans une relation → une relation s'entretient
Ne pas interagir avec des mauvais candidats à l'amitié : il faut aller vers des gens qui nous
ressemblent pour commencer à partager des choses avec eux ; l'enseignant doit être en mesure de
visualiser des affinités dans sa classe afin d'aider les enfants à trouver les « bonnes personnes »
Approfondir des relations avec ceux qui pourraient être des amis : la relation d'amitié demande de
l'entretien, mais il faut aussi en poser de bonnes bases
Faire les choses qui conviennent aux deux parties : il faut faire des compromis qui conviennent à
tout le monde, personne ne doit se sentir en retrait ou lésé par ce que l'autre pourrait faire
Etre certain de l'effort similaire pour construire la relation : une relation fonctionne seulement si les
deux parties s'investissent, il faut s'assurer que la relation compte autant à nos yeux qu'à l'autre
partie
Les enfants les plus jeunes effectuent des jeux en parallèle, mais ils ne jouent pas ensemble. C'est
pourquoi en maternelle on encourage les activités de groupe pour des activités en groupe : ils
demandent des compétences de décentration (= la capacité à se mettre à la place de l'autre
intellectuellement et parfois aussi physiquement) et des habiletés sociales (attendre son tour, par
exemple), de même qu'ils favorisent parfois la coopération ou la compétition entre les enfants. Les
jeux de collaboration sont des supports pédagogiques visant à exploiter les compétences diverses et
variées de chaque enfant, sans exclure ceux dont les compétences ne seraient pas optimales.
L'acceptation ou le rejet d'un enfant est un élément décisif de son développement social futur, c'est
pourquoi il est important qu'il développe des compétences socio-cognitives pour s'intégrer dans un
groupe. La manoeuvre consiste le plus généralement à observer, afin de comprendre et de prendre
part à l'activité avec l'accord de ses pairs. Un déficit dans les habiletés sociales entraîne des
comportements dits inappropriés (interruption du jeu, agression, …) et les enfants qui agissent de la
sorte sont ceux qui deviennent impopulaires et sont rejetés par leurs pairs.
Popularité
La popularité est un concept nord-américain qu'on exploite dans les séries télévisées et les films, et
qui commence de fait à se répandre en France. Le film Breakfast Club (John Hugues, 1985) est un
bon exemple de définition des facteurs de la popularité, notamment :
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l'attractivité physique : plus on est beau, plus on est populaire et entouré
les compétences cognitives : un comportement adapté ouvre à plus de relations
les comportements d'agression : une personne calme se côtoie plus facilement
Ces trois facteurs servent à l'élaboration d'un statut social, même chez les enfants.
Un enfant populaire est en premier lieu attractif, il a le contact facile et son comportement importe
finalement peu tant qu'il n'est pas réellement agressif et dangereux.
Un enfant négligé est moins attractif mais aussi généralement moins sociable, ça ne signifie pas
pour autant qu'il est agressif.
Un enfant rejeté est un enfant non attractif aux compétences cognitives faibles et / ou au
comportement agressif envers ses pairs → les enfants présentant un handicap (trisomie 21, …)
entrent généralement dans cette catégorie, mais souvent à tort.
Un enfant « average » peut être agressif ou non, attractif ou non, mais il a des habiletés cognitives
et sociales qu'il sait mettre en oeuvre afin de se faire apprécier d'un certain nombre de ses pairs.
Conclusion
Il importe d'être attentif aux compétences socio-cognitives des enfants en tant qu'enseignant. Ils ne
sont pas, par essence, « mauvais » mais souffrent des interactions avec leurs pairs dans certaines
situations difficilement détectables. On propose ainsi des outils favorisant ces compétences en
classe, pour construire le « devenir » de l'enfant.
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