Prévention des TMS des aides-soignants dans un centre

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Actes Journées Santé Travail du CISME – Tome II – 2012
Session 3 : Les partenaires à travers leur contribution aux réseaux
Prévention des TMS des aides-soignants dans
un centre de rééducation : mobilisation
autour d’une préoccupation majeure
Nicolas BOURDONNEAU – Service Prévention – CARSAT Aquitaine
Romain GOUILLE – Ergonome – AHI 33 – Bordeaux
Karine HERMIER-LEBLOND – Infirmière – AHI 33 – Bordeaux
Dr Martine MAGNE – Médecin du travail – AHI 33 – Bordeaux
– Bordeaux
Introduction
En 2007, l’établissement de rééducation de La TOUR DE GASSIES a été alerté par le service
prévention de la CARSAT sur un taux élevé d’accident de travail et de maladies
professionnelles concernant essentiellement la fonction d’aide-soignant. La direction de
l’établissement, sensibilisée, a souhaité mettre en place une démarche de prévention des
TMS. Elle se positionnait dans l’approche de prévention purement technique des aides à la
manutention. Elle a sollicité l’aide des ergonomes du service de santé au travail (AHI 33
SERVICE DE SANTE AU TRAVAIL) et du service prévention de la CARSAT. Les ergonomes de
ces deux instances ont travaillé ensemble pour proposer un plan d’action plus ambitieux,
intégrant les différents facteurs de risque, à l’entreprise en 2009.
Contexte
La Tour de GASSIES est un centre de rééducation qui accueille des patients présentant des
pathologies neurologiques, des blessés médullaires, des brûlés, des polytraumatisés, des
amputés. Compte tenu des handicaps l’accompagnement des patients vers un retour à
l’autonomie impose une forte sollicitation du personnel soignant (aides-soignants,
infirmières). Les manutentions des patients sont complexes et répétées dans la journée. Les
séjours de quelques semaines à plusieurs mois modifient la relation soignant- patient, ces
derniers s’installant parfois dans une demande plus proche de la prestation hôtelière que du
soin.
Méthodologie
Une approche centrée sur l’analyse et la compréhension des facteurs de risque concourant
au développement des TMS et intégrant les facteurs biomécaniques, psychosociaux,
Les SSTI et leurs partenaires : enjeux et modalités du travail en réseau
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Les partenaires à travers leur contribution aux réseaux
organisationnels a été proposé en même temps qu’une démarche participative intégrant
direction, médecins, cadres de santé, infirmiers et aides-soignants. Un comité de pilotage et
un groupe de travail en unité de soins ont été définis en veillant à optimiser la composition
des groupes.
Trois étapes ont été proposées :
- analyse d’activité avec repérage des risques par les ergonomes,
- objectivation et pondération des facteurs de risque et de leurs déterminants par le groupe
de travail et élaboration d’un plan d’action,
- analyse des résultats et plan d’action proposé par le groupe de travail et validé par le
COPIL.
Action de prévention, mise en pratique
La démarche rationnelle de l’analyse du travail réel proposée de pair par les ergonomes a su
convaincre la directrice des soins et le DRH qui ont compris qu’il existait là des marges de
manœuvre indispensables à trouver dans cette période de réduction d’effectifs. Tous les
acteurs ont suivi.
L’observation du travail réel par le groupe de travail a permis d’objectiver les multiples
interactions qui modifient le travail prescrit au-delà de la seule contrainte biomécanique
imposée par la manutention des patients.
Le groupe de travail a choisi d’étudier plus particulièrement une situation de travail : les
soins d’élimination de l’après-midi dans l’unité de neurologie.
Ces soins sont concentrés dans le temps obligeant le soignant à effectuer très souvent les
transferts seul.
La pression temporelle augmente la fatigue physique et psychologique.
Les soignants, accaparés par la tâche, ne sont pas disponibles pour les autres patients ce qui
engendre des mécontentements voire de l’agressivité des patients et augmentent les
incidents qui compliquent le soin (patient souillé).
Les déterminants qui perturbent ou modifient la tâche sont multiples : comportement et
exigences du patient, non-respect des horaires, effectif présent, état et disponibilité du
matériel, exigences médicales, organisation des soins, capacité de prise en charge du
collectif, formation des soignants, espace disponible autour du lit, horaire des repas…
Les interactions sont multiples et complexes pouvant aboutir à une insatisfaction du patient
comme du soignant, une majoration du stress, une accentuation de la fatigue physique et
psychologique et une sollicitation biomécanique accrue, tout ceci concourant à une
majoration du risque TMS
L’analyse des observations de terrain a permis au groupe de travail de proposer un plan
d’action afin d’améliorer les conditions de travail.
- respect des horaires : sensibilisation des patients et recadrage si nécessaire,
- mise en place de protocole avec le médecin pour une cohérence des explications données
au patient et un renforcement de la parole du soignant.
Aujourd’hui l’action se poursuit après une évaluation du plan d’action avec la volonté
d’appliquer cette méthodologie à d’autres tâches et d’autres services.
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Actes Journées Santé Travail du CISME – Tome II - 2012
Les partenaires à travers leur contribution aux réseaux
Actions de prévention technique
Nous avons vu que la contrainte de manutention des patients dans cette activité spécifique
est très élevée, le travail effectué a permis à l’établissement d’obtenir des subventions pour
équiper deux chambres de rails plafonniers ce qui améliore, entre autre, les efforts de
manutention, les problèmes de disponibilité de matériel et la contrainte d’espace.
Action de formation
Dans ces activités les aides-soignants sont très attachés à leur métier et souhaitent en
général le maintien dans le poste de travail. Les pathologies les plus fréquentes touchent les
épaules et en moindre proportion le dos. Les kinésithérapeutes de l’établissement
proposent depuis plusieurs années une formation à la manutention pour les nouveaux
embauchés. Afin d’améliorer le maintien au travail des salariés présentant des pathologies
d’épaule ou de dos J’ai proposé à l’entreprise de réfléchir à un module spécifique inspiré des
principes de rééducation dont ils sont coutumiers. Deux kinésithérapeutes et deux
ergothérapeutes ont proposé une journée spécifique pour une dizaine de salariés. Cette
journée organisée autour d’ateliers interactifs répondait à deux objectifs :
- La prévention des douleurs scapulaires et rachidiennes dans l’exercice de la fonction
d’aide-soignant par l’adaptation du geste professionnel
- La gestion des phénomènes douloureux par une proposition d’exercices simples et
reproductibles
Elle a permis de voir que les gestes de compensation spontanés n’étaient pas toujours
adaptés et mettaient en souffrance d’autres articulations et que l’utilisation d’outils d’aide à
la manutention comme les transferts au drap n’étaient pas bien maitrisés
Ces journées seront pérennisées et les observations de cette première « campagne »
serviront à améliorer la formation à la manutention des patients des nouveaux embauchés.
Conclusion
La démarche rationnelle de l’analyse du travail réel proposée de pair par les ergonomes
AHI/CARSAT a su convaincre rapidement la directrice des soins et le DRH qui ont compris
qu’il existait là des marges de manœuvre indispensables à trouver dans cette période de
réduction d’effectifs. Tous les acteurs de l’établissement ont suivi, convaincus de la
pertinence d’une approche globale, multicentrique de la prévention des TMS. Le discours
commun est une force dans l’accompagnement d’une entreprise dans une démarche de
prévention.
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