ECS1 – Concours blanc – Proposition de corrigé Type : Dissertation sans document d’appui Sujet : Les Etats-Unis et le monde : l’affirmation de la puissance durant le court vingtième siècle Exemple d’introduction : De Théodore Roosevelt qui affirmait au début du XXe siècle « l’Amérique est l’espoir du monde » à John Connally, secrétaire au trésor en 1971, qui assène en pleine tourmente financière à une délégation européenne « le dollar est notre monnaie mais votre problème », le rapport des EtatsUnis au monde apparaît comme complexe et ambigu durant le court XXe siècle. Cette périodisation de l’histoire, qui circonscrit le XXe siècle à une période allant de 1914 à 1991 selon la vision américaine d’Eric Hobsbawm, renvoie à un « American Century » évoqué par Henry Luce dans un article resté célèbre du magazine Life de 1941. En effet, s’il semble évident que le court XXe siècle est marqué par la puissance américaine reconnue dès ses débuts, la question de son affirmation est plus complexe à analyser. La puissance d’une nation peut en effet se mesurer par comparaison d’indicateurs, et il apparaît évident, statistiques à l’appui, que les Etats-Unis deviennent rapidement la première puissance mondiale. Pourtant, la définition de la puissance doit aussi intégrer les rapports de domination et d’influence qui la fondent. Aussi, on doit considérer que pour être puissant, il faut s’affirmer aux autres. La trajectoire des Etats-Unis sur la période d’étude s’inscrit donc dans une relation au monde marquée par leur volonté d’affirmer leur puissance. C’est donc dans l’écart entre la réalité de la puissance américaine et sa légitimité à s’affirmer que se lisent les relations entre ce pays et le monde. La « Fin de l’Histoire », évoquée par Francis Fukuyama en 1992, marquée par la diffusion à l’échelle mondiale du modèle du leader américain, tendrait à prouver que cette puissance se serait légitimement affirmée à la fin de la guerre froide. On peut donc se demander si de 1914 à 1991, l’affirmation des Etats-Unis comme puissance dominante a conduit le monde à leur reconnaître une légitimité dans ce rôle. De façon plus polémique, le « siècle américain » est-il celui de l’instauration d’une pax americana ? La puissance américaine émerge dans la première partie du siècle, partagée entre Destinée manifeste et doctrine de Monroe (I). Puis, l’étude du rôle joué pendant la Seconde Guerre mondiale et le rôle de leader du monde libre endossé durant la guerre froide permet d’affirmer la superpuissance (II). Enfin, il convient de s’interroger sur l’existence d’une hyperpuissance, restée seule en position hégémonique, et sur ses responsabilités immenses (III). Exemple de plan : 1. Jusqu’au milieu du siècle, la première puissance mondiale hésite entre interventionnisme et isolationnisme, entre idéal wilsonien et le pragmatisme hérité de Monroe Après avoir obligatoirement expliqué les fondements de la puissance étatsunienne et sa place dans la hiérarchie mondiale, il faut dans cette partie mettre en lumière les contradictions de la position américaine. • • • Le territoire : fondement de la puissance américaine o Territoire immense, fondement de la puissance ≠ petits territoires européens o Population en croissance par un apport extérieur ≠ émigration européenne o Puissance fondée sur l’industrie (2nd RI) ≠ Europe qui s’enrichie par le commerce Des rapports avec le monde fondés sur la Doctrine de Monroe qui empêche tout interventionnisme o La puissance s’exprime par la mise en valeur du territoire ! pas de projection ≠ Europe qui mesure sa puissance à se projeter (colonisation par exemple) o Expansionnisme sur le continent américain et le pacifique uniquement ! absence sur la scène européenne, c’est à dire le cœur du monde où le Royaume-Uni tente de maintenir un leadership qui appartient au passé o Les désillusions de l’idéal wilsonien ! montre la vision américaine du monde (Destinée manifeste) mais qui n’est pas défendue ! retour à l’isolationnisme Un interventionnisme circonscrit aux intérêts propres du pays o Dans la tradition du « Big stick » de T. Roosevelt, les Etats-Unis interviennent quand leurs intérêts sont menacés (télégramme Zimmermann ! intervention en 1917 ; Plan Dawes pour obtenir remboursement des dettes) o Les crises confirment ce positionnement ! repli sur une stratégie nationale avec le New Deal par exemple o Refus d’assurer le rôle de leader face au cloisonnement du monde dans les années 1930 Transition : Dès 1919, les Etats-Unis sont clairement la première puissance du monde qui se reconstruit, mais ils refusent d’assumer les responsabilités inhérentes à cette position. L’interventionnisme est choisi en dernier ressort, il est sinon considéré comme une forme d’idéalisme. On ne peut donc pas parler d’affirmation même si l’influence est grandissante. L’intervention de 1941 se fait toujours selon ces principes, mais elle entraine les Etats-Unis à redéfinir leurs rapports au monde (lire l’article d’Henry Luce). 2. Dans un nouveau contexte, les Etats-Unis s’affirment comme puissance et endossent rapidement le rôle de superpuissance, protectrice du monde libre Dans cette deuxième partie, il faut s’interroger sur les raisons qui expliquent l’évolution de la position américaine et le sens donné à la superpuissance dans un monde bipolaire. Il faut introduire dans cette partie la nuance entre hard et soft power, pour argumenter sur les différentes modalités d’affirmation de la puissance. • • • 1945 : Un nouveau contexte favorable à l’interventionnisme ? o Une nouvelle fois, l’affirmation se fait au cours d’un conflit ! risque de retour à l’isolationnisme ensuite (ONU, multilatéralisme) o La mise en place de l’affrontement bipolaire donne une légitimité à l’affirmation de la puissance américaine (Discours de Fulton) qui est cette fois assumée (postulat de Yalta ! postulat de Riga) o L’affirmation de la puissance devient le nouveau credo etatsunien (doctrine Truman) qui se donne les moyens d’agir (résolution Vandenberg) Une affirmation conjoncturelle qui s’exprime par le hard power dans le contexte de la guerre froide o Réponse à la menace par la stratégie du containment o Interventionnisme ciblé sur le rimland (Corée, Vietnam contre la menace communiste mais aussi Suez pour s’affirmer dans son camp) ! contestation de l’impérialisme (De gaulle) o Le maintien de l’équilibre ! course à l’armement, course à l’espace… Une affirmation durable qui s’inscrit dans la diffusion d’un modèle accepté : le soft power o Les outils : Plan Marshall et aides multiples o L’âge d’or du capitalisme : le modèle est le fondement de la puissance (FMN) o American way of life, American dream, font la synthèse du modèle (scientifique, technique, culturel) en assurant sa diffusion ! cocacolonisation ? Transition : Le contexte de la guerre froide donne une légitimité à l’affirmation de la puissance américaine. Celle-ci utilise le hard power pour s’affirmer comme rempart et le soft power pour s’affirmer comme leader. L’affirmation laisse cependant place à une suspicion d’impérialisme qui devient évidente lorsque la menace s’estompe (détente) ou disparaît (fin de la guerre froide). 3. A la fin de la guerre froide : les limites de l’affirmation d’une puissance hégémonique dans un monde multipolaire. De l’affirmation légitime à la dénonciation de l’impérialisme Il s’agit dans cette dernière partie de discuter du rôle d’une puissance en position hégémonique. Comment affirmer légitimement sa puissance dans un monde sans rival (monde unipolaire) ou face à des rivaux multiples mais moins puissants (monde multipolaire) ? • • • L’affirmation de l’hyperpuissance à la fin de la guerre froide o L’idéalisme à nouveau mis en échec (politique des bons sentiments de J. Carter) et le retour du hard power sous R. Reagan o La victoire américaine consacre le triomphe du pays qui affirme sa puissance hégémonique o Un monde unipolaire (hyperpuissance selon H. Vedrine) ou multipolaire ? L’affirmation du modèle à travers le processus de mondialisation participe de l’affirmation de la puissance o Une puissance technologique réaffirmée dans un monde organisé en réseaux o L’influence idéologique réaffirmée par la révolution libérale o Une affirmation réellement mondiale : le monde, nouveau territoire américain ? Hyperpuissance, fin de l’Histoire et Pax Americana o La position d’hyperpuissance : des responsabilités à la hauteur de la puissance o Unilatéralisme contre multilatéralisme : le intérêts propres peuvent-ils guider l’interventionnisme américain (Première Guerre du Golfe) o Pax Americana et impérialisme : la Destinée manifeste ne l’est pas pour tout le monde ! montée en puissance de nouveaux pôles Exemple de conclusion : De 1914 à 1991, les Etats-Unis se sont affirmés comme première puissance mondiale. Triomphant des affrontements idéologiques face aux totalitarismes, leur modèle s’est imposé au monde justifiant la thèse de la « Fin de l’Histoire » de F. Fukuyama. Pourtant, les années 1990 s’ouvrent sur un monde où le multilatéralisme et l’espoir d’une gouvernance mondiale s’accordent mal avec la position hégémonique acquise par les Etats-Unis. La tentation d’une démarche unilatérale, visant à instaurer un nouvel ordre américain est grande, même si elle accepte de passer par les voies légales et notamment l’égide de l’Organisation des Nations-Unies. Après une décennie de multilatéralisme revendiqué mais souvent dénoncé comme opportuniste pars leurs détracteurs, le débat sur l’attitude à adopter dans leur rapport au monde est revenu au premier plan face à une situation de crise : en menant simultanément un repli sur leur territoire et un interventionnisme à l’échelle mondiale après les attentats du 11 septembre 2001, ils ont démontré qu’ils balançaient toujours entre Monroe et Wilson.