Fiche chronothématique réalisée par Damien Coufourier en avril 2015.
http://www.memoire-orale.org/liste-entretien.php?col=16&scol=0 3
(Plage 04) Pendant son temps libre, avec ses camarades Pierre Hémond allait au cinéma, au café-
concert ou au casino qui faisait apéritif-concert. L’affluence était forte au cinéma qui devait refuser
régulièrement des spectateurs, la salle étant chauffée les attirait d’autant plus. Le cinéma passait
des films français et allemands. Il y allait le dimanche après-midi. Le propriétaire, M. Bourdier, lui dit
après la guerre qu’il avait été convoqué à la Kommandantur car il ne diffusait pas suffisamment de
films allemands comme Le Cuirassé Sébastopol [film de propagande anti-soviétique]. Il possédait
deux salles de cinéma, une de 750 places et une autre plus petite de 350 où il diffusait les films
allemands. Pierre Hémond aimait bien certains films allemands comme Bel Ami de Willi Forst. Le
cinéma était aussi le lieu où étaient diffusées les actualités. Ces dernières étaient projetées avec la
lumière allumée pour repérer les fauteurs de trouble. Le propriétaire avait dû faire appel à la police
pour éviter de devoir fermer son cinéma. Des bals furent organisés à l’Eden (le cinéma de la ville)
mais la Kommandantur les interdit rapidement. (5mn:43s).
(Plage 05) Le centre d’apprentissage a permis à Pierre Hémond de faire des rencontres, il faisait
partie d’un groupe de cinq camarades, « dans ce temps-là, c’était bon la camaraderie ». Il aurait
voulu devenir instituteur mais il fut détourné du métier par l’un de ses instituteurs qui était violent
avec ses élèves. Il partit en colonies de vacances avec les autres apprentis en Alsace et dans les
Ardennes. Du fait de l’absence des prisonniers et du manque de moyens, les familles ne
célébraient plus les fêtes religieuses et ne participaient plus aux fêtes collectives. (3mn:16s)
(Plage 06) Pierre Hémond estime que les cheminots de Romilly-sur-Seine [Aube] n’étaient pas
« martyrisés » pendant l’Occupation. L’ingénieur Allemand du dépôt n’était pas un cheminot dans le
civil mais il pense qu’il avait dut faire la guerre de 1914/1918. Il aurait voulu lui serrer la main à la fin
de la guerre car il aurait pu faire fusiller des cheminots à cause des sabotages. C’était le seul
cheminot allemand dans les ateliers selon lui. La présence allemande à Romilly-sur-Seine [Aube]
se concentrait sur le camp d’aviation, à la Kommandantur et à la Feldgendarmerie. Il y a eu, selon
ses lectures, jusqu’à 5 000 Allemands dans la ville pour une population de 12 000 habitants mais ils
étaient discrets. Ils achetaient beaucoup de vêtements pour leurs femmes. Il évoque une
commerçante qui à la Libération a vu une croix gammée peinte sur sa boutique, sans doute en lien
avec le commerce qu’elle avait fait avec l’occupant. Il se rappelle que sa cousine sortait avec un
Allemand, qui n’était pas « hitlérien ». Les Allemands parlaient un peu avec la population en
français. Ceux du camp d’aviation allaient à l’apéritif-concert le dimanche, « puis à la longue on
s’habituait à eux […] c’est malheureux de dire ça mais la plupart étaient pas provocant ». Pierre
Hémond pense que les Allemands de la Kommandantur et de la Feldgendarmerie faisaient leur
travail mais sans faire de zèle. (5mn:37s)
(Plage 07) Au moment de l’armistice, la famille de Pierre Hémond était partie à Aurillac [Cantal], en
zone non occupée. La nouvelle fut bien reçue car « on était content que la guerre finisse ». Pétain a
alors « eu des applaudissements », mais peu à peu après la poignée de main entre Hitler et Pétain
à Montoire [entrevue de Montoire le 24 octobre 1940] et avec la répression contre les Juifs, leur
opinion a changé. Il se souvient être allé à Paris en mars 1944 et avoir vu Pétain entouré d’une
foule très importante. Il était sans doute encore très apprécié à ce moment. Lui et ses parents
écoutaient Radio-Londres. Les tracts et journaux clandestins étaient peu nombreux, principalement
issu de la Résistance. Selon Pierre Hémond au sein de l’atelier, il y avait des « collabos ». Ils
étaient selon lui une dizaine sur les 2 200 cheminots. (5mn:43s)