Le rôle du psychologue dans l`accompagnement en éducation

Le ro
ˆle du psychologue dans l’accompagnement
en e
´ducation the
´rapeutique du patient en ne
´phrologie
Psychologist’s tasks in accompanying therapeutic patient education in nephrology
MAUD GRIMAULT
Service de néphrologie, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris
Re
´sume
´.
Cet article propose une vision du ro
ˆle du psychologue au sein d’une unite
´hospitalie
`re en ne
´phrologie mais
e
´galement ses actions dans l’e
´quipe multidisciplinaire d’e
´ducation the
´rapeutique du patient (ETP). L’article cherche a
`
de
´montrer que le psychologue ne peut se substituer au projet d’ETP mais qu’il garde une place essentielle dans ce pro-
gramme, notamment dans la cohe
´sion de l’e
´quipe et comme acteur incontournable a
`chaque e
´tape de la maladie
chronique aupre
`s du patient.
Mots cle
´s:
e
´ducation the
´rapeutique du patient, psychologue, ne
´phrologie, e
´quipe multidisciplinaire
Abstract.
This article displays the hospital psychologist’s tasks in a nephrology department and his function in the mul-
tidisciplinary staff of Therapeutic Patient Education (TPE). The article points out that the psychologist cannot act as a
substitute for the whole Therapeutic Education Program but he plays a main part in supporting the staff (dieticians,
nurses, physicians, pharmacists…) and helping the patient with his chronic disease step by step.
Key words:
therapeutic patient education, psychologist, nephrology, multidisciplinary staff
Que peut apporter un psychologue au sein dun
projet daccompagnement et déducation théra-
peutique du patient ? se trouve la frontière
entre le suivi psychologique de la personne soignée et le
suivi éducatif dans le cadre de son éducation thérapeu-
tique ?
En quoi et comment le psychologue peut-il intervenir dans
la dynamique du projet tant auprès du patient quauprès
de léquipe pluridisciplinaire et répondre aux critères de
qualité quexige une ETP. Il apparaît nécessaire de situer
la place du psychologue dans les différentes étapes du
processus permanent quest le projet daccompagnement
du patient et de définir lapport de compétences quil peut
mettre au service de celui-ci et des acteurs impliqués dans
sa prise en charge.
Les concepts damélioration de qualité de vie
1
, de connais-
sance de soi : « se connaître soi-même », de prise de
confiance en soi, dautonomisation, de prise de décision,
tiennent une place essentielle dans larticulation du projet
centré autour du patient et dans la mise en œuvre de toute
action liée au soin et à létat de santé général ayant pour
finalité loptimisation de sa prise en charge. Chacun des
professionnels de santé intervenant dans le projet à
quelque étape que ce soit (assistante sociale, diététicien,
infirmier, médecin, pharmacien, etc.) doit intégrer en per-
manence la problématique des compétences dadaptation
que le patient doit acquérir et développer, à celle des
compétences dauto-soins qui seront parcourues ultérieure-
ment, et à celles du suivi médical et de ladministration de
traitements et de soin du patient souffrant dinsuffisance
rénale chronique (IRC). Dans quelle mesure peut-on
demander au monde soignant
2
dintervenir auprès des
patients dans lamélioration psychosociale de leur qualité
de vie alors que parfois le soin prescrit la réduit ?
Comment le psychologue peut-il alors sinscrire dans ce
processus complexe et soutenir la démarche en tant quac-
teur attentif, aidant et efficace, au service dune finalité
thérapeutique.
Cet article va tenter de mettre en lumière, son rôle, ses
actions au sein dune structure hospitalière et, plus particu-
lièrement, ses interventions dans le projet dETP. Il sera
DOSSIER « E
´DUCATION THE
´RAPEUTIQUE »
J Pharm Clin 2010 ; 29 (2) : 93-7
doi: 10.1684/jpc.2010.0143
1
LOMS définit en 1994 la qualité de la vie comme « la perception
qua un individu de sa place dans lexistence, dans le contexte de la
culture et du système de valeurs dans lesquels il vit, en relation avec
ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. Il sagit
dun large champ conceptuel, englobant de manière complexe la
santé physique de la personne, son état psychologique, son niveau
dindépendance, ses relations sociales, ses croyances personnelles
et sa relation avec les spécificités de son environnement ».
2
Soignants : Le terme « soignant » désigne ici tout professionnel
formé à lETP et faisant partie de léquipe pluridisciplinaire quil
soit diététicien, infirmier, kinésithérapeute, pharmacien, psycholo-
gue, etc.
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intéressant de distinguer, en second lieu, lapport du
psychologue par rapport à lapport pédagogique des
soignants en essayant didentifier les limites implicites et
explicites de chaque approche et de chaque acteur du
soin. La philosophie commune et le mode dorganisation
liés à la mise en œuvre du projet daccompagnement et
déducation thérapeutique ne réduisent en rien la respon-
sabilité professionnelle de chacun et le respect du travail et
des compétences individuelles mises au service du patient.
Ils sont un « liant » nécessaire qui contribue à la réussite du
projet.
Le ro
ˆle du psychologue
dans une unite
´hospitalie
`re :
un exemple dans une unite
´de ne
´phrologie
L’importance du ro
ˆle du psychologue dans
la prise en charge de patient vivant avec une IRC
LIRC est une maladie grave qui se développe en parallèle
du vieillissement de la population française et retentit gra-
vement sur le quotidien des sujets atteints. Lâge moyen
des personnes suivies en dialyse est de 67 ans, ce qui
fait que cette population est exposée également aux
risques et aux aléas de la population vieillissante, soit le
cumul de vulnérabilités somatiques, fonctionnelles, affecti-
ves et sociales qui se traduisent aussi par de multiples
pertes ou sentiments de perte [1].
Il sagit de prendre en considération le vécu spécifique des
patients en néphrologie en partant de linsuffisance rénale
jusquà la transplantation en passant par la dialyse. En
effet, le patient est amené à traverser différentes étapes
qui bouleversent sa vie et celle de son entourage en
commençant par la première étape de lannonce de la
maladie chronique. Viennent ensuite les périodes de
« pré dialyse », le vécu de la dialyse jusquàlétape de
la transplantation si le patient choisit cette possibilité et si
cette dernière lui est offerte.
Le psychologue devrait pouvoir intervenir à chaque étape
de ce processus mais cela est souvent difficilement réali-
sable en pratique car, à la différence des pays anglo-
saxons, ils sont parfois absents des services de néphrologie
et de transplantation. Ce qui peut paraître « paradoxal »
lorsque lon considère les différentes problématiques
auxquelles les patients doivent faire face à chacune de
ces étapes de la maladie.
Il ne sagit pas ici de retracer en détail les répercussions
psychologiques de linsuffisance rénale mais de faire
ressortir en quelques points ce que le patient traverse et
limportance dun accompagnement :
lannonce de la maladie peut faire leffet dun choc et
entraîner des réactions comme le déni, la fuite ou bien
encore être à lorigine dune dépression ;
la période de « pré dialyse », quant à elle, est celle de
changements intenses où le patient et sa famille doivent
envisager des modifications de leurs styles de vie ;
la dialyse renvoie notamment à la problématique de la
dépendance à la machine ainsi quà toutes les peurs que
les patients énoncent sans détour (peur de la douleur, de
servir de cobaye, de voir son sang à lextérieur ou encore
la peur de perdre son emploi, etc.) comme la montrée
létude sur le vécu de la première séance dhémodialyse
[2]. Cette séance est un événement dont les patients
se souviennent avec acuité ;
la transplantation ravive lattente, la culpabilité, la dette,
ladoption dun organe étranger, la peur du rejet.
Le psychologue pour proposer une aide
personnalise
´e
1. Auprès de patients hospitalisés, à la demande de
léquipe soignante.
2. Auprès de patients venant en ambulatoire suite au
dépistage et lidentification dun besoin de prise en charge
psychologique. Celle-ci peut être ponctuelle et nécessiter
quelques entretiens, ou bien révéler le besoin dun suivi à
plus ou moins long terme. Il peut également sagir dun
bilan durant une séance pour orienter le patient vers des
psychiatres, des psychologues de ville, des Centres médi-
caux psychologiques, ou bien encore différents types de
psychothérapie en fonction des demandes et des besoins.
Soutien du psychologue aupre
`s des e
´quipes
soignantes
Les équipes soignantes ont également besoin dêtre écou-
tées dans leurs difficultés, leurs souffrances quotidiennes
face aux personnes soignées. Létude conduite au sein du
service de néphrologie du GHPS « Vécu de la première
séance dhémodialyse par les patients et soignants dune
unité hospitalière » [2], révèle des professionnels de santé
parfois « impuissants », vulnérables et épuisés, qui ont
peur ou bien encore qui ont limpression davoir à mar-
chander avec les patients lacceptation de ce soin lourd.
Ces équipes expriment leur besoin dêtre soutenues car
elles sont souvent soumises à un « burn out
3
». Ce dernier
se traduit par un « turn over » élevé des soignants entra-
vant la cohésion optimale et nécessaire à cette prise en
charge complexe des patients. Le psychologue peut
apporter un soutien aux soignants « désarmés » devant
la souffrance morale de leurs patients. Il peut aussi se
placer comme régulateur du lien « soignant/soigné » si
ce dernier savère difficile.
Le ro
ˆle du psychologue dans l’e
´ducation
the
´rapeutique en ne
´phrologie
Participer à la mise en place et à lanimation dateliers
dans le cadre du projet daccompagnement et dETP
(groupes de paroles, ateliers : « estime de soi », « affirma-
tion de soi », etc.).
Répondre à la demande dun soignant, pratiquant lETP
en consultation individuelle ou en groupe, qui a perçu un
besoin de prise en charge psychologique pour le patient.
Différencier si la demande et le besoin du patient sont
avant tout un besoin daide à la santé et daccompagne-
ment en ETP ou un besoin de prise en charge psycholo-
gique.
Aider à la coordination du projet dETP du service.
Conduire des actions de recherche, par exemple :
3
Burn out : terme utilisé par le psychanalyste américain Herberts
J. Freudenberger pour désigner lépuisement professionnel.
M. Grimault
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Le vécu de la première séance dhémodialyse par
les patients et soignants dune unité hospitalière de
la dialyse [2] ;
la perception des besoins en éducation des patient(e)s
atteint(e)s de maladie rénale chronique [3].
Partager et soumettre à la communauté scientifique,
des posters, articles et diaporamas issus des résultats des
différentes recherches.
Distinction entre la fonction du psychologue
et celle des diffe
´rents acteurs de sante
´
en accompagnement et e
´ducation
the
´rapeutique du patient
LETP selon la Haute autorité de santé : « vise à aider les
patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils
ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie
chronique. Elle fait partie intégrante et de façon perma-
nente de la prise en charge du patient. Elle comprend
des activités organisées, y compris un soutien psychoso-
cial, conçues pour rendre les patients conscients et infor-
més de leur maladie, des soins, de lorganisation et des
procédures hospitalières, et des comportements liés à la
santé et à la maladie. Ceci a pour but de les aider (ainsi
que leurs familles) à comprendre leur maladie et leur trai-
tement, collaborer ensemble et assumer leurs responsabili-
tés dans leur propre prise en charge, dans le but de les
aider à maintenir et améliorer leur qualité de vie » [4].
Ainsi, il est nécessaire de relever quelques termes clefs de
cette définition tels que : « aide, compétences, maladie
chronique, soutien psychosocial, conscients et informés,
famille, assumer leurs responsabilités, qualité de vie » qui
montrent et mettent en avant lévolution de la place du
malade et de sa famille au sein de son projet de santé
lorsque ce dernier est atteint dune maladie chronique.
Certains de ces termes sont régulièrement utilisés en
psychologie tels que : aide, soutien, famille, qualité de
vie. Il est moins habituel de les introduire dans une prise
en charge médicale de soin classique. Cest pourquoi, les
préconisations de léducation thérapeutique peuvent
rejoindre, sur certains points, les aspects dune prise en
charge psychologique.
Le but de cet article nest pas de définir et de revenir sur
tous ces termes, mais de comprendre à quel moment il est
possible de bien délimiter ce qui relève du champ de la
psychologie de ce qui relève du champ de léducation
thérapeutique.
Les compe
´tences des soignants
Si lon sappuie sur les recommandations de la HAS [5],
on voit quil existe des compétences à acquérir et à renfor-
cer du côté des patients (compétences durgence, dauto
soins et psychosociales) mais également du côté des
soignants. Ainsi, les compétences nécessaires aux acteurs
de santé pour pratiquer lETP sont :
des compétences relationnelles : empathie, écoute
active, choix du vocabulaire
des compétences pédagogiques et danimation : choix
des outils qui facilitent lapprentissage ;
des compétences méthodologiques ;
des compétences biomédicales et de soin.
Il est pertinent de se pencher sur les deux premières com-
pétences, à savoir, « relationnelles »epédagogiques »,
pour distinguer ce qui relève de la psychologie de ce qui
relève de léducation thérapeutique, en insistant sur les
concepts de pédagogie et dempathie.
En effet, en éducation thérapeutique, la pédagogie se
trouve au premier plan et au cœur de la prise en charge
dans la relation daide des personnes vivant avec une
maladie chronique, puisquelle transforme les positions
de chacun ; à savoir, celle du soignant qui doit adopter
une posture de pédagogue, mais également celle du
patient qui a souvent besoin dacquérir par le biais
dapprentissages, de nouvelles compétences.
La pédagogie a une place privilégiée en ETP mais elle ne
sacquiert pas facilement.
Une psychologue de lETP, Anne Lacroix, souligne que :
« La pédagogie nest jamais quun agent dont lobjet
demeure incertain : lappropriation des savoirs par le sujet
lui-même. De plus, sagissant de la maladie, sapproprier
des savoirs ne garantit pas leur mise en œuvre en compor-
tements pertinents. » [6].
La pédagogie suppose également ladoption dune atti-
tude empathique et un mode relationnel spécifique, surtout
lorsquelle sadresse aux personnes vivant avec une mala-
die chronique. Le patient a besoin de se sentir compris,
écouté, entendu par les soignants avant même de se lan-
cer dans tout apprentissage. Lempathie fait donc partie
des compétences indispensables que doivent également
cultiver les soignants pour se trouver dans une juste posi-
tion face aux patients.
Selon Carl Rogers, lempathie est : « Lorsque le thérapeute
devine les sentiments et les réactions personnelles éprou-
vés par le client à chaque instant, quand il sait les perce-
voir « de lintérieur » tels quils apparaissent au client, et
quand il réussit à communiquer quelque chose de cette
compréhension au client () » [7].
Pour Catherine Tourette-Turgis
4
,lempathie est de : « Ten-
ter de comprendre le monde de lautre du point de vue de
lautre. Elle suppose surtout lapprentissage dune posture
consistant à la fois à essayer de saisir ce que lautre vit et à
lui formuler ce que lon perçoit ».
Lempathie est indispensable à la pratique de tout psychia-
tre, psychologue, psychothérapeute ; cest pour cette
raison que ce dernier reçoit une formation de 5 ans au
minimum. De plus, ce dernier effectue, très souvent, un tra-
vail thérapeutique sur lui-même pour parvenir à une
« bonne distance » vis-à-vis de ses patients. En effet, il
doit comprendre et entendre la souffrance de lautre sans
pour autant se confondre, entrer en « fusion » avec lui. En
ETP, lempathie a une place importante mais « elle ne va
pas de soi ». En effet, tous les soignants ne peuvent pas
apprendre à adopter une position empathique en quel-
ques mois, même si certaines personnes sont plus enclines
àladopter naturellement.
Les compe
´tences des patients :
auto soins et psychosociales
Selon les recommandations de la HAS, il est demandé aux
soignants de permettre aux patients dacquérir ou plutôt
de renforcer deux grands types de compétences : les com-
4
Catherine Tourette-turgis, MCU, Paris VI
Dossier
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pétences dauto soins et les compétences psychosociales
(dadaptation) qui sont reprises dans le tableau 1 [8].
Ainsi, le soignant devra amener le patient à renforcer ces
types de compétences pour laider à prendre soin de sa
santé et de lui-même.
La difficulte
´d’introduire les compe
´tences
psychosociales aupre
`s des acteurs de sante
´
Lorsque les acteurs de santé ont découvert les compétences
dadaptation, des réactions de réticence, de décourage-
ment sont apparues, de façon légitime. En effet, la HAS
donne une vision quelque peu « idéale » des compétences
psychosociales mais difficilement applicables telles quel-
les sont mentionnées.
Voici, par exemple, une des difficultés fréquemment rencon-
trées au début de la mise en place des consultations dETP
des infirmières, au sein du service de néphrologie du
GHPS, ayant trait aux compétences psychosociales. Lors
de sa première consultation en ETP, un patient a livré à
linfirmière des événements douloureux de sa vie car ces
problèmes se trouvaient au centre de ses préoccupations.
Pour ce patient, les compétences dauto soins (lobser-
vance, le suivi de son équilibre alimentaire) étaient
relayées au second plan dans la mesure où dautres difficul-
tés lempêchaient de prendre soin de sa santé.
Quelles réactions doivent adopter les professionnels de
santé ? Comment doivent-ils gérer toutes les souffrances
quun patient peut exprimer au sujet de sa vie intime ou
de ses conditions de vie sociale ? Sont-ils capables et en
mesure dentendre tout cela en gardant la juste distance ?
Linfirmière pourra écouter le patient si celui-ci entre dans
une relation de confiance avec elle, à cette première
séance, pour commencer un travail de lien en sappuyant
sur les ressources de ce dernier. Première étape de rencon-
tre avec le patient qui est également celle du diagnostic
éducatif ou bilan éducatif partagé. En effet, selon Brigitte
Sandrin-Berthon : « Plutôt que la première étape dun
programme personnalisé, lentretien que lon mène avec
un patient pour initier avec lui une démarche éducative
devrait constituer lamorce dun nouveau mode relationnel
entre soignant et patient » [9]. Si la difficulté, au premier
plan, relève dun problème purement psychologique,
linfirmière devra lorienter vers un spécialiste de la
psychologie en priorité. Puis, dans un second temps, ou
bien encore, parallèlement à son suivi psychologique, le
rencontrer en consultation individuelle pour explorer avec
lui ses comportements de santé, laider dans la prise en
charge de sa maladie chronique, de son traitement, de
son alimentation mais également dans sa qualité de vie.
Elle peut également agir sur lamélioration de ce dernier
point en linvitant à des ateliers sur le thème de « lestime
de soi » ou à des groupes de paroles qui lui permettront
daborder et déchanger avec ses pairs ce qui est source
de préoccupation dans sa vie actuelle.
Des compe
´tences psychosociales au besoin
d’une e
´quipe pluridisciplinaire
Quel que soit lacteur de santé (diététicien, infirmier, phar-
macien, etc.) qui se trouverait dans cette première étape
de « diagnostic éducatif », de rencontre avec lautre, une
crainte peut apparaître chez le soignant du fait de souvrir
à « un mode relationnel » avec le patient dans des domai-
nes où il na pas lhabitude dinvestiguer. En effet, il appa-
raît plus simple de parler au patient sur un plan « cognitif »
comme de son traitement que de linviter à aborder cer-
tains sujets de sa vie tendant davantage vers de « lémo-
tionnel ». Pour autant, les recommandations en ETP sont
claires sur ce sujet et les acteurs de santé doivent soutenir
les patients dans le renforcement de leurs compétences
dauto soins et psychosociales.
Même si certains domaines de la vie du patient demeurent
« délicats » à aborder pour les professionnels de santé, il
semble difficile de « fermer les yeux », dabandonner ou
de rester dans des non-dits face à un patient qui décide
dévoquer ses problèmes sociaux ou émotionnels qui
entravent le fait quil puisse prendre soin de sa santé.
Ce sera, dans ce cas, au soignant de faire en sorte de
savoir sil pourra continuer à soccuper de ce patient ou
sil devra lorienter (en lui expliquant et sans labandonner)
vers un autre membre de léquipe plus à même de laider.
Doù la nécessité dune équipe pluridisciplinaire mais
également de lintervention des « patients experts » ou
« patients ressources » qui, en plus dintervenir au sein
du projet dans la co-animation dateliers, sont présents
pour coécrire le projet dETP au sein du service et collabo-
rent à lanalyse des besoins des patients en termes de
préparation à la dialyse et/ou préparation à la transplan-
tation, par exemple en néphrologie.
Le psychologue comme acteur inte
´gre
´
a
`l’e
´quipe pluridisciplinaire d’ETP
Ainsi, une nette distinction se perçoit entre laccompagne-
ment et laide à la santé fait par les équipes soignantes
(diététicien, infirmier, médecin, pharmacien, etc.) formées
àlAccompagnement en Education Thérapeutique des
Tableau 1. Compétences dauto-soins et compétences dadaptation.
Auto-soins Psychosociales
Soulager les sympto
ˆmes : auto surveillance/auto mesure Se connaı
ˆtre soi-me
ˆme/avoir confiance en soi
Adapter les doses de me
´dicament, initier un auto traitement Savoir ge
´rer ses e
´motions et maı
ˆtriser son stress
Re
´aliser des gestes techniques et de soins De
´velopper un raisonnement cre
´atif et une re
´flexion critique
Modification du mode de vie (e
´quilibre die
´te
´tique, activite
´physique…) De
´velopper des compe
´tences en matie
`re de communication et de relations interpersonnelles
Pre
´venir des complications e
´vitables Prendre des de
´cisions et re
´soudre un proble
`me
Fairefaceauxproble
`mes occasionne
´s par la maladie
et des re
´percussions qui en de
´coulent
Se fixer des buts a
`atteindre et faire des choix
Impliquer son entourage dans la gestion de sa maladie,
des traitements et des re
´percussions qui en de
´coulent
S’observer, s’e
´valuer et se renforcer
M. Grimault
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Patients (AETP), et, le travail que requiert la prise en
charge psychologique du patient.
Le psychologue devrait se trouver à toutes les étapes clefs
de la maladie et du soin pour permettre aux soignants de
les distinguer dans leurs spécificités de prise en charge.
Mais également accompagner les équipes, les soutenir,
les aider à renforcer leurs compétences danimation et
relationnelles. Il peut aussi contribuer à lamélioration de
la cohésion et de la coordination des équipes.
En aucun cas, le psychologue ne peut et ne doit remplacer
tout lapport multidisciplinaire (avec tout ce que cela
implique de savoir-faire, savoir être) quoffre, dans sa
grande richesse, léducation thérapeutique aux patients
et à leurs familles.
Des ateliers ont été proposés aux patients, au sein du ser-
vice de néphrologie du GHPS, en fonction des demandes
de ces derniers mais aussi en suivant les recommandations
de la HAS. Ces ateliers ont pour thèmes des demandes qui
recouvrent des besoins dauto soins :
« le médicament et moi »
« un grain de sel bien dosé »
« bien manger, une valeur sûre pour la santé »
« information pré dialyse et transplantation »
«lhypertension »
Et des demandes psychosociales :
groupes de paroles
« estime de soi »
« affirmation de soi : savoir dire non »
« comment mieux communiquer avec mes proches
autour de la maladie »
« image du corps »
Conclusion
Léducation thérapeutique du patient est un projet multidis-
ciplinaire. Le psychologue doit en faire partie à différents
niveaux mais il nest quun maillon, au même titre que les
autres acteurs de santé, de la chaîne du projet daccompa-
gnement et déducation thérapeutique. LETP ne peut se
confondre avec une prise en charge psychologique dans
la mesure où il sagit dun projet de service qui demande la
collaboration de tous les acteurs de santé avec leurs
savoirs et compétences propres. Un des rôles du psycholo-
gue est daider les membres de léquipe à trouver leur juste
place entre le patient et ces derniers au sein du projet de
soin dans un souci de partage et de coordination efficace.
Chaque psychologue doit apprendre à trouver sa place en
fonction des besoins de sa structure et du programme
dETP qui sinscrit dans une dynamique propre à chaque
service.
Conflit dintérêts : aucun.
Re
´fe
´rences
1. Tourette-Turgis C, Isnard Bagnis C, Pereira-Paulo L. Léducation
du patient dans la maladie rénale chronique : le soignant pédago-
gue. Paris : Comment Dire, 2009.
2. Grimault M, Tourette-Turgis C, Isnard-Bagnis C. Vécu de la
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3. Tourette-Turgis C, Grimault M, Peireira-Paulo L, Giraud M, Bouf-
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cours de la mise en place dun programme pilote dans une unité
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4. Pauchet-Traversat AF. Structuration dun programme déducation
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Définition, finalités et organisation. Haute Autorité de Santé,
2007.
9. Sandrin-Berthon B. Diagnostic éducatif ou bilan éducatif
partagé ? Médecine des maladies métaboliques 2010 ; 4 : 38-43.
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