Paris, au centre d’une région riche, aux cultures variées, utilise sa bonne situation géographique avec la Seine et les routes. A la fin du XIIIe siècle, elle
compte 60.000 habitants, et s’accroît de nouveaux quartiers sur la rive droite, devenue le centre les affaires autour des Halles que Philippe Auguste fait
construire à la fin du XIIe siècle.
Des liens s’organisent aussi à l’échelle internationale. En Normandie, la ville de Rouen fait un commerce actif en mer du Nord. La Champagne connaît
une activité commerciale débordante (les foires célèbres de Troyes, Provins, Lagny où se rencontrent les marchands d’Italie et de Flandres, d’Allemagne
d’Angleterre et de Catalogne).
La croissance des liens économiques rompt très tôt dans les régions les plus favorisées de la France du nord, l’extrême morcellement féodal. Une certaine
unification s’y dessine. Elle se marque par l’établissement d’un dialecte unique et de grands Etats féodaux, entre les régions les plus
économiquement liées : Duché de Normandie, comté de Champagne, domaine royal d’Ile de France. C’est la première étape de l’unification
territoriale.
c. Les luttes paysannes
L’essor économique et la division du travail entre le métier et l’agriculture entraînent une différenciation capitale au sein de la société féodale : une
nouvelle couche sociale naît, origine de la bourgeoisie, dont l’importance primordiale apparaît immédiatement : les artisans et les commerçants.
La ville doit alors engager la lutte contre la domination seigneuriale, contre le morcellement féodal qui entravent son développement. Dès le XIe siècle, se
constituent les premières corporations qui fournissent le cadre de lutte contre le seigneur. Les rapports féodaux gênent l’essor de la ville : la majorité de
ses habitants sont des serfs.
Au XIe siècle éclate « le mouvement communal », première apparition de la bourgeoisie sure la scène historique. Les villes tentent d’arracher aux
seigneurs des chartes qui accordent la liberté personnelle aux habitants, la limitation et la fixation des droits seigneuriaux, une certaine autonomie.
Le seigneur accepte parfois la charte proposée, mais souvent la lutte armée est nécessaire. Le mouvement communal connaît son apogée au XIIe siècle.
La lutte paysanne prend, elle aussi, un grand essor.
Le renforcement des liens économiques rend plus faciles l’organisation d’ententes entre villages et villes. Le développement économique, le mouvement
communal et l’affaiblissement de la puissance seigneuriale favorisent l’action paysanne.
Les croisades, entreprises par les féodaux dans l’espoir de conquérir des terres nouvelles, d’amasser un riche butin pour remédier à leurs difficultés, vont
souvent fournir une issue aux mouvements paysans. En 1212, 30.000 pauvres parmi lesquels un nombre considérable d’enfants, partent vers la
Palestine. Une mort certaine attend tous ces croisés populaires, très mal armés et sans organisation. La foi, l’ignorance des difficultés ne peuvent, à elles
seules, expliquer ce suicide collectif. Les paysans partent, avant tout, pour fuir, la lourde exploitation seigneuriale et l’atroce misère qu’elle engendre.
En 1251, à la prédication pour la VIIe Croisade répond un vaste soulèvement paysan, la Révolte des « Pastoureaux » : des prédicateurs populaires
expliquent que Jérusalem sera sauvée non par des féodaux, égoïstes et vaniteux, mais par les pauvres qu’ils méprisent. Du Nord, les masses paysannes
marchent vers Paris où elles entrent, puis continuent vers le Sud. Elles exécutent des membres du Clergé, s’emparent de leurs richesses ; partout, le peuple
les accueille et les soutient. Mais leur détachement est facilement écrasé par les armées royales.
Pressés par la résistance quotidienne des paysans, séduits par les avantages des chartes, les seigneurs commencent à affranchir les serfs. Au XIIIe siècle,
ce mouvement connaît son plein épanouissement. La disparition, précoce du servage en France explique en partie pourquoi le développement
capitaliste s’y est fait plus vite que dans les autres pays d’Europe, où le servage domine jusqu’au XVIIIe siècle, voire jusqu’au XIXe siècle. La
disparition, du servage, la limitation des droits seigneuriaux donnent à la petite exploitation de l’artisan et du paysan une indépendance plus grande. Ce qui
encourage les efforts des producteurs davantage intéressés à leur travail et favorise ainsi l’essor économique de la société au XIIe et XIIIe siècles.
Le rôle de l’Etat monarchique dans la consolidation des éléments nationaux.
Toutes ces transformations entraînent aux XIIe et XIIIe siècles un accroissement du pouvoir monarchique. Le roi n’est à l’origine qu’un seigneur mais qui
embrasse un pays riche (l’île de France) à l’essor économique rapide. Les revenus royaux augmentent, permettant au roi d’accroître ses forces militaires.
Chef de la hiérarchie féodale, le roi est appelé à freiner la résistance de la paysannerie exploitée. Il est à la tête de la défense extérieure du royaume.
Les villes vont appuyer l’Etat royal car ils ont les mêmes adversaires : les grands féodaux. La ville donne au roi de l’argent et des forces militaires
(les milices) ; le roi garantit aux villes des chartes de franchise, assure leur sécurité.
Le signe extérieur qui marque le renforcement de l’Etat monarchique est l’agrandissement rapide du domaine royal, notamment sous les règnes des grands
rois capétiens Philippe Auguste (1180-1223), Louis IX ou Saint Louis (1226-1270) et Philippe le Bel (1285-1314).
Au début du XIVe siècle, le domaine royal recouvre la plus grande partie de la France : il débouche sur la Manche, l’Atlantique et la Méditerranée,
atteint la Meuse ; les seules grandes formations féodales qui demeurent hors de son domaine sont la Bretagne, la Bourgogne, la Flandre et l’Aquitaine.