État de l`art sur l`Économie de la fonctionnalitÉ

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État de l’art sur
l’économie de la
fonctionnalité
 Guillaume Toulorge, Morgane Lamerand, Christian Du Tertre
 Séance du 15 mars 2016
Club économie de la fonctionnalité
& développement durable
 Séance du 15 mars 2016
PRéSENTATION DE L’éTAT DE L’ART p.3
•POURQUOI UN éTAT DE L’ART ? p.3
•MéTHODOLOGIE p.3
•IDENTIFICATION DES DIFFéRENTS COURANTS DE PENSéE p.4
ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS p.6
•QUELLE ARTICULATION ENTRE LA RECHERCHE ET LE RéEL ? p.6
•DES APPROCHES ET DES MODéLES CONTRADICTOIRES OU COMPATIBLES ? p.6
•QUELLE ANALYSE DE L’éCONOMIE COLLABORATIVE ? p.6
•L’ENJEU D’INTéGRER LA DIMENSION DU TRAVAIL DANS LA RéFLEXION SUR LES MODéLES éCONOMIQUES
DURABLES p.7
•DE NOUVELLES DIMENSIONS DE PERFORMANCE QUI DOIVENT êTRE PORTéES AU NIVEAU DE LA GOUVERNANCE p.7
•DIRIGEANTS, ENSEIGNEMENTS, CONSOMMATEURS : FREINS OU FACTEURS DU CHANGEMENT ? p.8
 Participants à la séance
Barbett Florence•Baron Xavier•Bellini Béatrice•Bobroff Jacotte•Buisson Jacques•Damesin
Nicolas•Decrat Philippe•De Gasparo Sandro•Demaretz Christelle•Desgurse Valerie•Du Tertre
Renaud•Du Tertre Christian•Eirich Marina•Étilé Léon-Christophe•Funel Jean-Marie•Garant
Frédéric•Gessalin André•Huet Maryse•Kail Daniel•Lamerand Morgane•Laporte Simon•Laulhe
Martine•Le Dilosquer Pierre Yves•Leonard Brigitte•Le Pivain Aude•Libaert Thierry•Maccario Florent•Magord Valentin•Mary Alexis•Mekki Aladin•Perrier Claire•Plet Valérie•Pouteau
Nicolas•Sanson Bernard•Roussel- Dessartre Hervé•Terrien Anaîs•Toulorge Guillaume•
Trautmann Florence•Vuidel Patrice.
sommaire
 séance
du 15 mars 2016
Club économie de la fonctionnalité & développement durablE
Présentation de l’état de l’art
Pourquoi un état de l'art ?
à la fin des années 80, diverses démarches d’entreprises témoignent d’une prise de conscience
naissante des limites du modèle économique industriel. Les acteurs économiques, alors en
recherche de relais de croissance, composent de nouvelles formes d’offres basculant vers
les services ou combinant biens et services. Certains milieux de la recherche, au moyen
d’observations et d’analyses, s’approprient peu à peu ces mutations économiques en élaborant
de nouveaux concepts comme ceux de « Product-Service Systems» (PSS) que l’on retrouve
dès les années 90 dans la littérature universitaire anglo-saxonne, notamment en Europe, de «
servuction », d’économie de service, ou d’économie servicielle, dans la littérature de langue
française. Ces concepts se diffusent, ensuite, dans le monde de la recherche dans les années
2000 de manière différente selon la discipline concernée.
En économie, la notion d’économie de la fonctionnalité émerge au début des années 2000
et désigne des modèles économiques se déclinant sous différentes formes d'offres de services
ou de biens et services associés. Elle se trouve généralement associée au concept de PSS, les
solutions proposées dans ce modèle associant des biens et des services. Dans le champ de
la recherche, l'Économie de la fonctionnalité est appropriée progressivement par différentes
disciplines, allant des sciences sociales aux sciences de l’ingénieur, articulant les recherches
sur l’économie de service et les préoccupations de développement durable. L’opportunité
offerte par ce modèle de réduire l’impact de l’activité des entreprises sur l’environnement
le rend compatible avec certains enjeux du développement durable. Dans un contexte où
ce sujet prend de l’ampleur dans l’opinion publique et sur la scène politique, le spectre des
acteurs s’intéressant à l’économie de la fonctionnalité tend dès lors à s’élargir. L'hétérogénéité des acteurs et du contenu de leurs recherches peut rendre difficile la construction
au plan théorique d'un point de vue stable sur la notion d’économie de la fonctionnalité. Il était
donc utile, partant de ce constat, de réaliser un état de l’art des recherches en France et à
l’international sur le modèle de l’économie de la fonctionnalité.
Ce travail de recherche a été co financé par ATEMIS, l’ADEME et l’Institut Caisse des Dépôts
pour la recherche. Il a été mené par Guillaume Toulorge et Morgane Lamerand (PAJ), sous la
responsabilité scientifique de Christian Du Tertre (ATEMIS)
Méthodologie
Une méthodologie spécifique a été construite pour réaliser cet état de l'art. Dans un premier
temps, il était important de procéder à une recherche de données afin de collecter les
articles à analyser et de mesurer l’étendue de l’appropriation du sujet. Nos recherches ont
principalement été réalisées sur internet via deux types de moteurs de recherche : BiblioSHS
(portail d’information scientifique des unités CNRS) ainsi que Google Scholar. Les langues
ciblées ont été l’anglais et le français. Bien qu'une large part des documents sont accessibles
sur internet via les plates-formes utilisées, certains peuvent néanmoins n’avoir pas été identifiés
du fait du choix de notre méthodologie. Cela relève des moyens alloués à cette recherche et
du temps imparti pour la réaliser. Cependant, dans un autre sens, nous avons pu ajouter à
notre bibliographie certains ouvrages au format papier non accessible sur des plates-formes
internet.
La recherche s'est opérée en quatre temps : recherche d’articles et de publications, recherche
sur les auteurs et les structures d’exercice, constitution de bases de données, réalisation d’un
traitement statistique des données. Au final, 134 auteurs ont été sélectionnés, économiste,
consultant, ingénieur, gestionnaire, philosophe, géographe, ergonome, mathématicien,
sociologue. Cette méthode permet d’aboutir à une analyse descriptive de la manière dont se
structure la recherche sur l’Économie de la fonctionnalité.
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A partir de cette collecte, un traitement qualitatif des données a été réalisé. Il correspond à
l'analyse des articles de recherche, à la définition de différents courants de pensée et à la
rédaction du rapport. 90 articles ont été sélectionnés. Le rapport se compose ainsi de deux
grands chapitres : Un premier où nous avons cherché à délimiter le contenu théorique de
chacun des courants de pensée en tentant d'y apporter une définition claire à partir de la
pensée des principaux auteurs. Un second prenant appui sur une grille d'analyse qui traite sous
différentes thématiques l'ensemble du contenu des courants de pensées, à partir de citations
extraites des articles de recherche. Cette grille se compose de neuf dimensions qui permettent
d’appréhender et de caractériser le modèle économique proposé :
• Besoins et construction de la réponse à un besoin ;
• Production et processus de production, dont les activités de travail ;
• Rapport aux externalités ;
• Rapport aux ressources immatérielles ;
• Gouvernance ;
• Rapport de l’entreprise au territoire ;
• Contractualisation autour des dimensions de performance ;
• Financement du modèle ;
• Rapport au développement durable.
Identification des différents courants de pensée
Les différentes mobilisations du concept d'économie de la fonctionnalité ne se réfèrent pas
aux mêmes enjeux : on est en présence de différents courants de pensée. Ces courants se
constituent au regard des limites de l’économie industrielle ou en réponse au constat de
l'existence d’externalités négatives produites par ce modèle, telle la pollution ou le gaspillage
des ressources matérielles non renouvelables.
L’économie « industrielle » est le modèle économique dominant au sein des sociétés
contemporaines. Il se confronte à des limites de développement au regard des enjeux du XXIè
siècle, notamment à la nécessité d'une croissance soutenable, d'une meilleure utilisation des
ressources, d'un renouvellement des modes de consommation et plus généralement d'une prise
en compte des enjeux du développement durable. Sa rentabilité, fondée sur la croissance
des ventes en volume de produits, l’hyperspécialisation du travail et sur des dynamiques
d’innovation technologique favorisant l’obsolescence, se trouvant interrogée par la saturation
des marchés, la perte de rentabilité, des tension sur le travail, un impact sur la santé des
personnes.
S’inscrivant dans des nouvelles trajectoires de développement, les modèles ayant une
approche relevant de l’économie de la fonctionnalité vont chercher à concevoir et à produire
des solutions orientées sur le service ou associant ou intégrant des biens et des services.
Le premier courant repéré intègre l’Économie de fonctionnalité comme l’une des dimensions
de l’économie circulaire. L’un des principaux auteurs de ce courant est Walter Stahel. Ce
courant naît d’une volonté de prendre en charge les enjeux environnementaux, notamment les
déchets. Il y a une volonté de découpler la valeur des matières premières de la valeur d’usage
des biens, la notion de dématérialisation de l’économie apparaît et elle s’accompagne de
l’idée de ne plus transférer la propriété du bien du fournisseur au consommateur. La vente
de l’usage d’un bien se traduit par le maintien de la qualité de son usage dans le temps et la
recomposition des modèles d’affaires. L'originalité du modèle renvoie à la notion de boucles
dans l’économie. Ce, à trois échelles différentes : une à dimension internationale pour le
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 séance
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recyclage de la matière et des molécules, une seconde concernant les entreprises productrices
de biens et une dernière concernant le développement de l’économie locale avec l’idée d'un
maintien de l’usage voire du multi-usage des biens pour offrir la valeur d’usage la plus forte
possible.
Le second courant, anglo-saxon, renvoie à des recherches sur les modèles de type PSS «
Product-Service System », avec une volonté d’intégrer à la dynamique industrielle une logique
de service plus large (notion de « Servitization »). Mark Goedkoop, Arnold Tukker, Oksana
Mont, Baines, Morelli figurent parmi les principaux auteurs. Ce courant est le pendant des
recherches qui concernent l’économie des services en France, les services étant alors associés
aux biens. Des entreprises développent des modèles d’affaires où les consommateurs peuvent
choisir des options de service, comme dans l’automobile : la voiture est vendue avec une
assurance, de l'aide au financement et/ou des services de maintenance. Ces modèles sont
parfois désignés en France par l’expression « services associés » ou « bouquets de services».
Parallèlement apparaissent d’autres recherches à mi-chemin entre les PSS et l’économie
circulaire, avec des auteurs du Nord de l’Europe et le concept de « Servicizing », mais aussi avec
des auteurs italiens qui développent le concept de « Sustainable Product Service Systems ».
La recherche de nouveaux modèles en capacité de prendre en charge le développement
durable est au cœur des préoccupations des chercheurs à partir du début des années 2000.
Néanmoins, ces recherches restent inscrites dans une perspective industrielle : les travaux sur
les modèles d’affaires de type PSS, présentent une rationalisation des processus de production
sur un plan technique et dans l’utilisation des biens afin de réduire la consommation de
matières premières et d’énergie. Les approches ne sont pas encore homogènes et la diversité
des chercheurs sur les PSS freine l’harmonisation des définitions.
Le dernier courant est celui de l’économie de la fonctionnalité et de la coopération. Il s’est
développé plus spécifiquement au début des années 2000 en France et fait suite à des
recherches et interventions menées par Christian Du Tertre et ATEMIS sur l'économie des
services et les mutations opérées sur l'activité de travail. L’émergence de la relation de service
induit des tensions au sein des configurations productives, souvent appréhendées dans une
dynamique industrielle (spécialisation, standardisation d’une offre en vue de sa reproductibilité,
intensification du travail afin de réduire les coûts, etc.). Le modèle vise à l'intégration de biens
et de services en vue de la production de solutions intégrées, s’appuyant sur une configuration
productive et de travail adaptée à la dynamique servicielle. L’objectif est de faire croître la
valeur servicielle de l'offre, autrement dit la valeur « immatérielle ». Les spécificités de l’économie
de service telles que la coproduction dans l'activité de travail (avec le bénéficiaire notamment),
l’importance des ressources immatérielles (par exemple les compétences, la confiance) et leur
capacité à se développer à mesure de leur usage (contrairement aux ressources matérielles)
constituent les bases de ce courant. Les travaux sur les registres de la performance ont abouti
à la proposition d’élargir le périmètre de l’activité, inscrit dans une logique de secteur ou de
filière, à la sphère fonctionnelle (nouveau périmètre plus à même de prendre en charge des
enjeux de développement durable) et à la recherche d'intégration des externalités. L’ouverture
à différentes sciences humaines, telles que l'ergonomie ou la psycho-dynamique du travail, a
permis d’apporter des connaissances sur les modalités de production de valeur au travers de
l’activité de travail.
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échanges avec les participants
Quelle articulation entre la recherche et le réel ?
Léon-Christophe Etilé : Peut-on avoir une description des produits ou des cas concrets sur
lesquels ce sont basés les articles ? Guillaume Toulorge : Ce n'était pas l'objet de notre recherche, mais ce sont généralement
les catégories de produits qui sont visées. Un exemple décrit par Walter Stahel décline la
voiture à travers différents modèles. Dans l'économie circulaire l'enjeu va être le recyclage de
la matière et le prolongement de la durée de vie ; dans l'économie de la performance c'est la
location et l'accès à l'usage.
Christian Du Tertre : La finalité de ce travail n'est pas de rendre compte du résultat des
modèles sur le plan opérationnel. L'objectif était de repérer la manière dont les chercheurs
académiques posent la question et les enjeux de l'économie de la fonctionnalité. En effet,
l'analyse des chercheurs n'est pas sans effet sur les représentations qu'ont les acteurs. De plus,
les concepts ont une histoire théorique qui induit une approche spécifique de la société, de
l'accompagnement d'entreprises, dont il faut tenir compte, et c'est ce que nous avons cherché
à appréhender au cours de la recherche.
Des approches et des modèles contradictoires
ou compatibles ?
Philippe Decrat : Les PSS sont aussi portés en France. Ils nous permettent dans un premier
temps d'accompagner les entreprises vers un changement de modèle. Ces différents modèles
ne sont pas contradictoires.
Aladin Mekki : Il semblerait que les PSS ne remettent pas en question les fondements de la
création de valeur. Contrairement à l'économie circulaire et à l’économie de fonctionnalité qui
abordent les modèles économiques en s'intéressant à la création de valeur et à l’impact sur
l'environnement.
Christian Du Tertre : L’orientation que représente la satisfaction du client n’est pas un critère
de durabilité en soi. Le problème des PSS est de mettre en avant cette question, alors qu’il
faut chercher à rendre compatibles les attentes du client avec le développement durable. La
rentabilité ne peut être le seul critère pour juger de la pertinence de l'entreprise. La gouvernance
dans le sens du développement durable doit inclure le souci des externalités, c'est à dire les
conséquences de l'activité pour ceux qui la produisent, pour les bénéficiaires, pour les tiers,
le territoire. C’est à dire tenir compte de ceux qui subissent l'activité de l'entreprise ou au
contraire en profite. La question du territoire devient alors prégnante. Les PSS passent à coté
de cela et par là même des enjeux centraux ne sont pas abordés : ils supposent que le modèle
économique d'entreprise peut se confronter à la problématique du développement durable
sans changer son rapport à la société et au territoire sur lequel l'entreprise est implantée.
Quelle analyse de l'économie collaborative ?
Maryse Huet : L'économie collaborative n'est pas intégrée à vos travaux alors qu'elle est en
plein développement.
Christian Du Tertre : Le réel, l'opérationnel avance plus vite que la recherche académique,
qui travaille à traduire le réel. Il y a encore peu de conceptualisation sur le sujet de l'économie
collaborative.
Maryse Huet : L'économie collaborative était non marchande et on assiste à un retournement.
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 séance
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Christian Du Tertre : La plupart des entreprises qui relèvent de l'économie collaborative
sont financiarisées et ont une approche classique de l'organisation du travail et de la création
de valeur : en ce sens il n'y a pas de nouveau modèle économique, d'innovation majeure dans
des entreprises qui se disent pourtant innovantes.
Patrice Vuidel : Une séance du club aborde ce sujet : « Nouveaux modèles économiques et
enjeux du développement durable» datant de juin 2014. Y sont mis en discussion l’économie
circulaire et l’économie collaborative. Le compte rendu écrit et la vidéo sont disponibles sur le
site internet du club.
L’enjeu d’intégrer la dimension du travail
dans la réflexion sur les modèles économiques durables
Christian Du Tertre : Le travail étant une activité humaine productive de valeur, les nouveaux
modèles économiques peuvent-ils passer à côté de la question du travail ? Les conditions dans
lesquelles est produite la valeur ont un sens du point de vue du développement durable. Nous sortons actuellement d'une longue période où la question de la création de valeur était
renvoyée à la qualité des produits, dans une logique de productivité permettant aux entreprises
de dégager de la rentabilité : c'est une approche industrielle de la performance. Ces critères
de performance sont aujourd'hui remis en cause, ils se sont inversés du fait du poids de la
finance qui est devenu prépondérant (on détermine d’abord la rentabilité attendue, puis on
ajuste la qualité et la productivité), ce qui conduit à l'échec face aux enjeux du développement
durable.
L'économie circulaire prend en charge cette question à sa manière, en affirmant que les
ressources humaines sont des ressources renouvelables, en posant la notion du « care » qui
signifie « prendre soin ». Le travail agit sur la ressource humaine, il peut la développer ou la
détruire. La vulgarisation de l'économie circulaire dans la presse ne rend pas compte de la
profondeur des recherches académiques sur le sujet, c'est le constat que nous avons fait au
cours de cette étude. « Faire des déchets des uns les ressources des autres » est présent mais
les recherches vont bien au-delà.
De nouvelles dimensions de performance qui doivent être
portées au niveau de la gouvernance
Aladin Mekki : à quoi renvoie la notion de gouvernance, la coopération avec les parties
prenantes ? Quels en sont les motifs/objectifs ? Quels sont les types d'acteurs impliqués ?
Guillaume Toulorge : Il y a trois niveaux de gouvernance : à l'intérieur de l'entreprise,
entre les entreprises et avec les acteurs du territoire.
Renaud du Tertre : Il est nécessaire de délimiter la gouvernance. Le niveau de gouvernance
le plus complexe est celui qui relève de l'entreprise et de son périmètre. Le principal échec vient
de la domination de la finance de marché. Bien que de nouveaux critères de gestion soient
créés (environnement, social et de gouvernance), le problème au regard du développement
durable est la manière dont on ouvre des opportunités en déplaçant les pratiques des acteurs.
Concernant l'identification des parties prenantes, les actionnaires sont aujourd'hui majoritaires.
Il faut faire entrer les travailleurs, les acteurs du territoire mais aussi des critères extra-comptables
et extra-financiers, se situant en rupture avec les critères de gestion actuels en lien avec la
logique des actionnaires. Il faut donc faire entrer dans la gouvernance d'autres acteurs par des
modalités de concertation et des droits qui restent à construire.
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 séance
du 15 mars 2016
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Christian du Tertre : Il faut repérer ce qui fait levier dans les modèles s'agissant de la
question du développement durable. Si les formes de conscience des acteurs n'évoluent pas,
l'action n'évolue pas non plus. L'enjeu de la gouvernance relève de la capacité de mettre en
coopération des acteurs de nature différente liés à une nouvelle perception de la question de la
valeur. La prise en compte des externalités comme conséquence des logiques entrepreneuriales
sur la société appelle un nouveau type de gouvernance au plan territorial ; autrement, cette
prise en compte apparaît comme une contrainte pour les entreprises et est peu efficace.
Dirigeants, enseignements, consommateurs :
freins Ou facteurs Du changement ?
André Gessalin : Une large majorité de dirigeants d'entreprise souhaite un changement de
modèle mais est incapable de le conduire. Il y a des obstacles entre la pensée, la volonté et la
capacité d'action. Les démarches de changement sont marginales.
Béatrice Bellini : Dans l'enseignement, la performance de l'entreprise est appréhendée sous
un seul critère qui est avant tout économique. Il y a donc un retard important de ce point de
vue. On parle aujourd'hui de performance globale, qui inclut le social et l'économique, mais il
y a de nombreuses limites au plan opérationnel et cela est peu pris en compte par les acteurs
du domaine de la finance. Par ailleurs, la qualité environnementale d'un produit n'est pas
valorisée auprès des clients.
Maryse Huet : Les études du Crédoc sur l'évolution des pratiques de consommation montrent
des changements qui vont dans le sens du développement durable. Les clients se tournent
davantage vers des achats d'occasion par exemple. Les jeunes sont la catégorie la plus
sensible aux questions du développement durable : ils veulent une qualité environnementale et
une qualité dans le travail. Il n'y a donc pas un client unique davantage intéressé par la baisse
de prix que par le développement durable c'est plus compliqué que cela. Christian du Tertre : Les démarches de changement de modèle ne sont pas marginales,
elles sont importantes mais embryonnaire pour le moment. Les dirigeants d'entreprise font
des accompagnements vers l'économie de la fonctionnalité de 16 mois dans le Nord-Pasde-Calais, cela représente un véritable engagement qui témoigne de la prise de conscience
qu'un changement est nécessaire. Les collectivités territoriales prennent conscience également
de la nécessité de changer leur rapport aux entreprises. A travers la logique servicielle, il y
a la volonté de construire un référentiel économique opérationnel en réponse aux enjeux du
développement durable.
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