Sixièmes Journées de la Recherche Avicole, St Malo, 30 et 31 Mars 2005
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INTRODUCTION
Durant les cinquante dernières années, la sélection
génétique des poulets de chair a principalement
favorisé leur croissance musculaire. Cette sélection
n’a pas permis d’augmenter en proportion leurs
viscères (cœur, appareil respiratoire ; Havenstein et
al., 2003), réduisant les capacités des poulets de chair
à résister à des conditions environnementales
extrêmes telles que les coups de chaleur. Ces
évènements climatiques sont responsables d’une
diminution de la consommation d’aliment et des
performances de croissance, accompagnée de taux de
mortalités accrus causant des pertes économiques
importantes pour la production avicole. Ceci a relancé
l’intérêt des scientifiques pour les manipulations
thermiques du poussin ou de l’embryon dans le but
d’améliorer l’acquisition de la thermotolérance du
poulet de chair (De Basilio et al., 2001; Yahav et al.,
2004). Des manipulations thermiques pendant les
premiers jours post-éclosion, pendant lesquels la
régulation de la température corporelle et les
mécanismes de rétrocontrôles hormonaux sont encore
immatures (Dunnington et Siegel, 1984), provoquent
des changements dans les seuils de réponses
thermorégulatrices (Yahav, 2000). Il se pourrait
également que des manipulations thermiques pendant
l’incubation des œufs provoquent une altération
efficace des seuils de réponses thermorégulatrices de
l’embryon et du jeune poussin, en fonction de la
période et de l’intensité de la manipulation.
Ainsi, plusieurs études ont montré que l’exposition
d’embryons de poulets ou canards à des températures
élevées ou basses pendant l’incubation améliorait leur
capacité d’adaptation respectivement à des
environnements chaud ou froid post-éclosion (Minne
et Decuypere, 1984; Janke et al., 2002). Les
manipulations thermiques pendant l’embryogenèse
nécessitent un réglage précis en période, intensité et
durée d’exposition à la température expérimentale. Le
choix de la période doit être relié au développement et
à l’activation des axes hypothalamus–hypophyse-
thyroïde (Thommes, 1987) et hypothalamus–
hypophyse-surrénales (Wise et Frye, 1975) dans le but
de changer les seuils de réponses en termes de
production de chaleur et de stress. Récemment, Yahav
et al. (2004) ont démontré qu’une manipulation
thermique modérée des jours 16 à 18 de l’incubation
avait un effet positif sur la thermorégulation des
poussins en diminuant la température interne et les
taux plasmatiques d’hormones thyroïdiennes, connues
pour stimuler la production de chaleur. Epple et al.
(1997) suggèrent également que l’embryon de poulet
est sensible au stress, c’est pourquoi l’augmentation
de la température d’incubation pendant la première
période d’incubation puis à partir du jour 15, lors de
l’activation de l’axe corticotrope (Wise and Frye,
1975), peut affecter la réponse du poussin éclos en
terme de stress, avec des conséquences sur la
thermorégulation.
Enfin, la durée des manipulations thermiques durant
l’embryogenèse doit être finement évaluée. Une
augmentation courte de la température d’incubation
active les mécanismes de perte de chaleur des
embryons (Holland et al., 1997), tandis qu’une
exposition à plus long terme affecte la morphologie
embryonnaire, augmente l’incidence des
malformations et décroît l’éclosabilité (Janke et al.,
2002). Cependant, ces études ont été menées dans des
conditions expérimentales différentes, et l’évaluation
de la durée de manipulations thermiques dépend des
conditions précises d’incubation mises en œuvre.
Cette étude vise à évaluer les périodes sensibles de
l’embryogenèse pendant lesquelles les seuils de
thermotolérance des poussins peuvent être manipulés.
Deux expériences sont conduites pour déterminer
l’effet de l’intensité et de la durée de manipulations
thermiques de l’embryon sur le poids vif (PV), la
température corporelle (Tc) et les axes thyroïdien et
corticotrope des poussins à l’éclosion (j0) et lors d’un
coup de chaleur à 3 jours d’âge (j3).
1. MATERIELS ET METHODES
1.1. Procédure expérimentale
Expérience 1. Mille oeufs fertiles Ross PM3
provenant d’un seul troupeau reproducteur (44
semaines d’âge) sont mis en incubation. Les œufs sont
statistiquement divisés en 5 traitements (JMP®
statistics; SAS Institute, 2000): témoins, maintenus
continuellement à 37,8°C et 56% d’humidité relative
(HR), EP1 – 3 h/j à 39,5oC et 65% HR pendant
l’embryogenèse précoce (jours E8 à E10
d’incubation) ; EP2 – 3 h/j à 41,0oC et 65% HR
pendant la même période; ET1– 3 h/j à 39,5oC et 65%
HR pendant l’embryogenèse tardive (ET; E16 à E18);
ET2 – 3 h/j à 41,0oC et 65% HR pendant la même
période. Les œufs sont incubés dans un incubateur
semi-commercial (La-Nationale, type B 36I, Bretagne
France). Les œufs traités sont transférés dans deux
incubateurs expérimentaux (SMA Coudelou type 540
E) pendant 3 heures (12:00-15:00) durant les périodes
EP et ET, l’un maintenu à 39,5°C et 65% HR, et
l’autre à 41°C et 65% HR, puis sont replacés dans
l’incubateur semi-commercial. Dans chaque
incubateur, les oeufs sont inclinés de 270° toutes les
heures. A sept jours d’incubation, les œufs infertiles et
les embryons morts sont élimés après mirage. Le
19ème jour d’incubation, les oeufs sont transférés dans
un éclosoir maintenu à 37,8°C et 56% HR.
Expérience 2. Mille oeufs fertiles Ross PM3
provenant d’un seul troupeau reproducteur (40
semaines d’age) sont utilisés. Les conditions
d’incubations sont les mêmes que pour l’expérience 1
excepté en ce qui concerne les traitements, tous