Paul Burlet – www.tracesdhistoire.fr
LA MONTÉE EN NORMANDIE, DEPUIS MONTAUBAN,
DE LA DIVISION « SS » DAS REICH (AVRIL-JUIN 44)
D’après « La Division Das Reich » de Max Hastings – Ed. Taillandier Texto – 2014
Les allemands disposaient, en avril 1944, dans le sud de la France, d’une force armée propre à assurer la sécurité du
territoire (dont la répression de la Résistance), mais s’intégrant aussi dans le dispositif anti invasion alliée.
C’est le général Blaskowitz1 qui commande cette force, dite « Force G » composée de 13 divisions d’infanterie, d’une
division motorisée et de 3 divisions cuirassées.
JEUDI 6 AVRIL 1944 – PRUSSE ORIENTALE
Hitler décide d’affecter, à la « Force G », la deuxième division cuirassée de la Waffen SS. Il s’agit d’une unité d’élite
faisant partie, depuis l’hiver 1941/42, d’un ensemble de 600.000 hommes, véritable « grande armée » s’étant distinguée
dans l’exécution des plans opérationnels d’Hitler dans leurs phases les plus offensives, voire délicates. Cette force compte
38 divisions dont 7 unités blindées.
« Das Reich », parmi ces unités cuirassées dont 3 sont de la Waffen SS, s’est de 1941 à 1944, particulièrement distinguée. En
particulier sur le Dniepr en détruisant un corps d’armée cuirassé russe après sa percée près de Kiev et, début 1944, en sauvant
la première armée cuirassée allemande d’une destruction certaine dans la poche de Tcherkassy.
C’est dans cette région de Prusse orientale que, le même jour, « Das Reich » apprend qu’elle doit faire route immédiatement
pour Montauban. A cette date, la « Das Reich », après de très rudes combats, est en piteux état. Elle a perdu la plus grande
partie de ses 209 chars et d’un effectif de 15.385 hommes, 2.500 seulement sont valides et aptes à rejoindre la France. Tout
est fait par le commandement de la « Force G » pour rapidement reconstituer « Das Reich ».
Aux 2.500 combattants arrivés à Bordeaux, est incorporé un flux de jeunes recrues venues de tout le Reich2, mais aussi un
contingent de « Malgré Nous » prélevé sur 2.000 requis alsaciens-lorrains qui, au lieu de rejoindre l’Est, ont été d’autorité
dirigés pour formation sur le camp de Souges près de Bordeaux. Vingt d’entre eux seront intégrés au régiment de
Panzergrenadier « Der Führer » de la « Das Reich ». Et ils seront à Oradour sur Glane.
MAI 1944 À DÉBUT JUIN – SUD OUEST
Le bataillon « Der Fürher » commandé par le major Adolf Otto Diekmann3 (ci-contre),
mène, dans le sud-ouest, des opérations de ratissages et des expéditions punitives suite à
des attentats ou à des sabotages au cours desquels des unités allemandes d’occupation
avaient eu 20 tués et une centaine de véhicules détruits.
En représailles, « Der Fürher » incendie plusieurs maisons à Monpezat, déporte 64
personnes dans le Lot (dont 40 à Bagnac), exécute une femme à Cadaillac et deux à Lauze,
détruit la totalité de Terrou, d’où les 289 habitants de ce village avaient pu s’enfuir. Le 3
juin, après l’attaque d’un véhicule SS près de Figeac, il exécute plusieurs personnes et, dans
le village de Viazac, 6 hommes et une femme sont tués. Puis à Figeac, suite à la découverte
d’un important stock d’armes parachutées, 41 personnes sont fusillées et plusieurs
centaines, déportées.
LUNDI 5 JUIN 1944 - LONDRES
La BBC à la demande du QG allié, lance l’ordre de mobilisation générale de la Résistance, sur tout le territoire national
français. C’est avec l’espoir que la multiplication des agressions contre les forces allemandes basées en France, retardera
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1 Johannes Blaskowitz (1883/1948) Commandant en chef de l'Est en Pologne à partir d’octobre 1939, il est révolté par les
atrocités commises par les SS et les Einsatzgruppen contre les Polonais et les Juifs et n’hésite pas à imposer la peine de mort aux
membres de la SS et de la Gestapo qui sont impliqués dans des crimes de guerre. Ces sentences seront abolies plus tard par Hitler
qui le relève alors de son commandement. Il devient alors gouverneur militaire du Nord de la France puis commandant en chef
du groupe d'armées G. Il est ensuite nommé commandant en chef aux Pays-Bas où il signe la capitulation des forces allemandes.
Blaskowitz, accusé de crimes de guerre, est jugé devant un tribunal militaire américain lors du procès dit « du haut
commandement ». Il se suicide pendant le procès en sautant d'une fenêtre de la prison de Nuremberg. La rumeur de son assassinat
par des SS se répand au sein des autres prisonniers, mais aucune preuve ne vient l'appuyer.
2 12 nationalités différentes : germanique, hongrois, roumains, apatrides …
3 Adolf Otto Diekmann (1914/1944)Étant mort sur le front de Normandie le 29 juin 1944, Adolf Diekmann n'a pas pu être
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our ses actes au
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rocès de Bordeau
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destiné à statuer sur le sort des res
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onsables du massacre d'Oradour.
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l’arrivée des renforts vers le lieu du débarquement et permettra ainsi la fixation rapide des unités débarquées et leur
expansion sur le territoire français.
Outre que cet ordre déclenche la mise à exécution de plans prévus de sabotage : des voies de circulation (rail et routes), des
circuits de communication par câbles et relais, des lignes électriques…, il génère rapidement un très important flux de
volontaires se dirigeant vers les maquis. Au point que ces derniers sont vite confrontés à de multiples problèmes d’accueil, de
nourriture, d’hébergement, d’équipement, d’armement et surtout d’encadrement et de formation. Mais était-il possible,
comme le demande rapidement Londres, de renvoyer chez eux ces volontaires enthousiastes et désireux de se battre ? Les
responsables des maquis s’aperçoivent vite que cela ne l’était pas. Ces volontaires avaient rompu les amarres, souvent
publiquement et par groupes, avec la vie civile. Ils étaient entrés en clandestinité. Et en masse ils le restèrent. Et malgré leur
inexpérience au combat l’assimilation avec les anciens s’opéra vite. D’ailleurs la libération venue nombreux furent ceux qui
vinrent compléter les effectifs des diverses unités venues d’Angleterre ou d’Afrique du nord.
MARDI 6 JUIN 1944 - TULLE
Il faut ajouter à l’ordre lancé par la BBC la veille, l’ordre donné dès le 6 juin par le comité national communiste aux FTP4,
d’entrer en insurrection et de contribuer à libérer le pays en s’emparant des centres urbains. Les FTP étant passés sous l’autorité
FFI4 de Kœnig, l’ordre du comité national communiste n’aurait pas du avoir de suite. Mais nous sommes en Corrèze où les
FTP ont une force nombreuse et très active. Force d’ailleurs renforcée par des volontaires de l’appel BBC du 5 juin et portée
à environ 5.000 hommes. D’ailleurs, en plein accord avec les responsables du parti, ils se considèrent chez eux en Corrèze,
décidant qu’il leur appartient de libérer ce département. A commencer par le chef-lieu : Tulle.
MERCREDI 7 JUIN 1944 - TULLE
A 5 heures les FTP déclenchent la prise de Tulle. Mais alors qu’ils estiment que la ville a une garnison de 250 allemands
renforcée par 400 GMR5, il se trouve qu’il y a un plus grand nombre de soldats allemands mais aussi 500 miliciens et
un contingent important du SD. Ce qui fait que les FTP ne progressent, dans la ville, qu’au prix de durs combats de
guérilla urbaine. Et qu’arrivée près de la manufacture d’armes, la garnison se fixe et résiste.
JEUDI 8 JUIN 1944 - TULLE
A l’aube, la fusillade reprend. A 16 heures, seul un groupe de 40 allemands se rend. Le reste se positionnant dans la
manufacture d’armes et dans l’école.
JEUDI 8 JUIN - MONTAUBAN
Aux premières lueurs du jour, « Das Reich » commandée par le général Heinz Lammerding6,
part pour la Normandie. C’est une longue colonne de 1.400 véhicules, chacun espacé de 100
mètres de distance permettant de diminuer l’impact d’une attaque de la Résistance ou de
l’aviation alliée, qui part de Montauban.
Et si d’aucun peut penser que cette unité, en large partie constituée de jeunes soldats venus de
multiples horizons, n’est pas porteuse d’une grande efficacité au combat, c’est sans compter
sur la présence des 2.500 rescapés des durs combats de l’Est, tous des « SS » d‘élite, très
aguerris, encadrés, pour l’essentiel, d’anciens très expérimentés et aptes à conduire aussi bien
la confrontation que la répression et qui, sachant qu’ils doivent tout au nazisme, sont résolus
à se battre jusqu’au bout.7
En tête, le bataillon « Der Fürher » de Diekmann. Normalement, c’est le bataillon éclaireur, monté sur des half-tracks
armés d’un canon de 75, du major Heinrich Wulf qui aurait dû être en tête. Mais il arrive en retard au rassemblement,
permettant à Diekmann de griller la politesse à Wulf qui, mieux armé, sait qu’en cas d’accrochages sévères, et il le
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4 FTP : Francs-Tireurs et Partisans – FFI : Forces Françaises de l’Intérieur
5 Groupes Mobiles de Réserve, unités paramilitaires créées par le gouvernement de Vichy et qui, dès l’automne 1943, participent
activement, avec l’accord des allemands, aux offensives contre les maquis.
6 Heinz Lammerding (1906/1971) Cet officier Waffen SS, en 1943, est en charge de la lutte contre les partisans sur le front de l'Est.
À cette fonction, il signe divers ordres de représailles. En 1944, par faveur spéciale de Himmler, il est promu général de brigade et est
chargé de reconstituer la « Das Reich ». En avril 1945, il sera le commandant de la dernre division de Waffen SS. Condamné à mort
par contumace pour crimes de guerre (Tulle et Oradour), il ne sera jamais réellement inquiété (voir en fin de digest).
7 D’ailleurs le comportement des hommes de « Das Reich » face aux entraves mises à son mouvement vers la Normandie, par la
Résistance, va montrer que ce sont des unités très disciplinées, ne manifestant aucun recul, aucune velléité de désertion dans les
actions les plus horribles de répression. Tout comme l’on sait que « Das Reich », confrontée aux Alliés, a su dans la défaite
montrer qu’elle était apte à mener âprement le combat.
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prouvera tout au long du parcours, il domine. Et qu’au-delà ces petites querelles d’égo, ces
deux hommes sauront montrer que dans la répression, ils s’égalent : Wulf
8
(ci-contre) sera
à Tulle et Diekmann à Oradour.
Derrière « Der Fürher » suit une unité de Panzergrenadiers, puis le bataillon de Wulf, le
bataillon d’artillerie du commandant Karl Kreusz, le bataillon d’artillerie d’appui direct,
le bataillon de canons d’assaut automoteurs, l’Etat-major de la division (avec son chef le
major Stuckler), les unités de D.C.A et, enfin, 2 bataillons de chars qui allaient être,
parfois, obligés de rechercher un parcours plus adapté au poids sur chenilles, obligeant
« Der Fürher » à diviser son effectif pour assurer la protection des blindés.
JEUDI 8 JUIN – ROUTE DE MONTAUBAN À TULLE
Premier accrochage avec le maquis à Grolejac. « Der Fürher » riposte. Bilan : des maisons brulent et 10 maquisards ou
civils sont tués. A Carsac, nouvel affrontement (4 maquisards tués, 13 civils froidement abattus, plusieurs maisons
incendiées). A Ruffilac, une barricade est dressée (un maquisard tué, 14 civils abattus). Deux kilomètres plus loin, près
de Carlus, 2 femmes tuées. A Gabaudet, à quelques kilomètres au sud de Gramat, au cœur du Lot, une unité allemande,
patrouillant sur le flanc droit de « Das Reich » par des chemins vicinaux, tombe sur un rassemblement de jeunes (parmi
eux, quelques gendarmes) voulant rejoindre la Résistance
9
. Résultat : 10 hommes et une jeune fille abattus, 80
personnes arrêtées pour être déportées
10
.
A Cressensac, « Der Führer » sévèrement accroché a besoin d’être aidé par les half-tracks de Wulf qui à coup de canons,
détruisent plusieurs maisons. 4 maquisards tués. Wulf poursuit sa route vers Noailles, tuant 5 maquisards et brulant
plusieurs maisons. Le soir, il arrive à Brives et repart aussitôt pour Tulle, son half-track de tête exhibant, en trophée, la
dépouille du maquisard Maurice Vergne.
11
Vers 21h, les FTP de Tulle ont la surprise de découvrir que des renforts
allemands stationnent à la gare (une centaine d’half-track et des camions transportant 500 hommes). Wulf annonce
« qu’il vient régler ses comptes avec la Résistance ». Ses hommes, en 20 minutes, dégagent la garnison de lemprise du
maquis qui, face à ennemi ayant l’expérience des combats assurés par des hommes bien encadrés et mieux armés qu’eux,
ne leur laisse comme choix que le repli rapide hors de la ville
12
.
Wulf déjà furieux d’avoir pu constater l’inertie de la garnison de Brive l’est encore plus à l’égard de la garnison de Tulle
qui, avec ses effectifs, n’a pas été maître de la situation créée par les FTP et a essuyé beaucoup de pertes
12
. Vers minuit,
Wulf rend compte au major Stuckler, chef d’Etat-major de « Das Reich », venant d’arriver à Tulle. Ce dernier est
furieux qu’au cours du nettoyage de la ville, « Das Reich » ait perdu 3 hommes et compte 9 blessés. Aussi décide-t-il
que 2 compagnies SS, à l’aube du 9 juin, passent la ville entière au peigne fin, maison par maison afin « de saisir toutes
les armes cachées et rassembler tous les hommes dans la cour de la manufacture d’armes pour vérification d’identité. Tout
homme sans papiers étant considéré d’emblée comme étant un terroriste ».
VENDREDI 9 JUIN 1944 – TULLE
A Bretenoux, où il y a un pont sur le Dordogne, combat opiniâtre avec le maquis. 3 véhicules allemands flambent, 18
maquisards tués. Des maisons flambent. A Beaulieu un bref accrochage. 3 maquisards tués.
Tulle. A 10 heures 3.000 personnes de tous âges sont parquées, mitrailleuses pointées vers elles. Au cours de la rafle, le préfet
Pierre Trouille, et son secrétaire général parlant couramment allemand, Maurice Roche, s’activent, plaident, argumentent,
-------------------------------------
8 Heinrich Wulf (1917/19..) Ayant quitté l’école à 16 ans, il essaye en vain, d’intégrer l’armée. En 1934, il rejoint la S.S. Il fait
la campagne de France en 1940 avant de devenir, jusqu’en 1943, instructeur à l’école SS de Bad Tolz. En octobre 1943, il est
promu Commandant d’un bataillon de reconnaissance de la 2è Panzer Division SS. Un mois plus tard il est sur le front de l’Est.
Février 1944, de retour en France, il prend le commandement du bataillon éclaireur de la 2è division « Das Reich », s’illustrant,
entre autre, par sa cruauté à Tulle. En juillet 1944, sévèrement blessé sur le front de Normandie, il est retiré des cadres de l’armée.
Traduit devant les tribunaux pour crimes de guerre, sa peine sera ridiculement légère (voir en fin de digest).
Commentaire : On ne peut qu’être surpris devant l’absence quasi-totale d’informations sur le Net relatives à ce personnage. Un peu
comme si, l’Histoire l’avait « balayé » de son souvenir. Surprenant qu’un assassin reconnu ait pu faire ainsi table rase de son passé, à
moins que la très
grande clémence de sa condamnation ait été la conséquence d’un « échange » d’informations contre un droit à l’oubli !
Si tel a été le cas, c’était avoir fort peu de considération pour la mémoire du sacrifice de ses victimes innocentes !
Source biographique : Enquête de Ian Dixon 1990 (http://www.redcap70.net/A_History_of_the_SS_Organisation_1924-
1945.html/W/WULF,_Heinrich.html) Source iconographique : Photo donnée par la veuve de Wulf à Mark C. Yerger et parue sur
« forum.axishistory.com ». Photo éditée aussi sur l’ouvrage « German Cross Vol 2 » de Marc C. Yerger Ed. James Bender Publishing.
9 N’oublions pas que le 5 juin le haut commandement allié a lancé un ordre de mobilisation de la résistance sur tout le territoire.
10 A leur grande surprise les 80 seront relâchés sur la route de Tulle.
11 Ce « trophée » est dans cette position depuis Cressensac où Wulf a dégagé et dépassé Diekmann.
12 Les FTP, en 2 jours, ont perdu 38 hommes dont 21 blessés très gravement. La garnison a perdu 139 hommes et a eu 40 blessés.
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rencontrent le lieutenant Kowatsh, (3ème officier d’Etat-major de la division) qui leur assure, ayant entendu leur
argumentation : « qu’en toute justice les tullois sont restés à l’écart des évènements des 2 derniers jours » et ayant constaté « que les
blessés allemands avaient été correctement soignés à l’hôpital de Tulle », il n’y aurait pas de représailles.
Cependant, peu après 10 heures, des représailles sont annoncées au porte-voix dans toute la ville, et des affiches
largement placardées. Elles précisent « que l’inqualifiable assassinat de 40 soldats allemands commis par les maquisards
communistes », conduit « les autorités allemandes à décider que 3 français périraient de leur vie pour chaque allemand tué
et cela à titre d’exemple pour toute la France ». Il est également précisé « que ces soldats allemands ont été assassinés de la
façon la plus abominable. »
Que s’est-il passé pour arriver au choix des représailles si tant est qu’il n’y eut hésitation pour qu’une répression
spectaculaire existe ? Encore fallait-il un prétexte et il est contenu dans le témoignage du médecin chef « Das Reich »
qui a participé au ramassage des allemands tués et qui annonce au QG de la division « qu’avait été découvert un groupe
de 40 cadavres horriblement mutilés, visages déformés, testicules tranchés et fourrés dans la bouche » C’est donc pour cette
abomination, plus que pour l’assaut de la sistance que les représailles ont été décidées.
Mais par qui ? Les historiens semblent d’accord pour attribuer la décision au général Lammerding. Ce dernier l’a toujours
nié mais retenons que ce général S.S est un proche d’Himmler et que le « S.D », dès l’arrivée de Wulf à la manufacture, a
constamment réclamé des représailles. Retenons aussi que le général a laissé sa signature, sur le front de l’Est, au bas de
plusieurs ordres de répression. Ordres prescrivant « que pour complicité il y avait lieu de détruire tel ou tel site habité et d’y
éradiquer toute vie ». Rappelons, qu’à Montauban, le 5 juin 1944, il adressait au commandant du 58ème corps d’armées, dont
« Das Reich » dépendait, une note immédiatement applicable précisant « que dorénavant 3 terroristes seraient pendus et non
fusillés pour tout allemand blessé ; et 10 pour tout allemand tué ». Certes, à Tulle, le nom du général ne figure pas sur les affiches
après « le général commandant les troupes allemandes » mais, par contre, chaque affiche porte « sa griffe authentique » expression
de son sceau personnel dont il ne se dessaisissait jamais.
On peut aussi se poser la question : Ce type de sanction est-il inscrit dans le cadre des instructions données par le haut
commandement des armées allemandes occupant la France ? Citons, pour nous en convaincre, la note du 8 juin du
Feld Maréchal Hugo Sperrle rappelant, en tant que commandant en chef des unités allemandes déployées à l’Ouest,
« que les personnels des opérations de la Wehrmacht doivent agir contre la guérilla… avec la plus extrême sévérité et sans
aucune clémence. Les forces de la Résistance doivent être écrasées rapidement !!! » et que « pour la restauration de l’ordre, la
plupart des mesures rigoureuses doivent être prises pour dissuader les habitants de ces régions infestées, afin de décourager les
hébergements des groupes de résistance ». Reste à trouver chaque fois un prétexte servant à justifier l’acte de répression. A
Tulle, celui qui est retenu est jugé par les historiens ne reposant sur aucune preuve et, par conséquent imaginé. Car si
le constat fait par le médecin chef SS de la « Das Reich » avait été une réalité, pourquoi ne l’a-t-il assorti de preuves, tels,
par exemple, des clichés photographiques en couleur montrant l’horreur de « sa découverte » ?13 D’autre part sachant,
que toute la journée du 9, deux hauts fonctionnaires de Vichy, ont constamment été en contact avec les autorités
allemandes (en l’espèce l’Etat-major de « Das Reich »), pourquoi ne leur a-t-on pas demandé d’affirmer qu’ils avaient,
de visu, constaté le forfait commis par la Résistance ?
Toute la matinée du 9, le lieutenant Schmald et ses hommes passent au crible la foule parquée dans la cour de la
manufacture. Le directeur allemand de cette usine, Herr Brenner, fait relâcher 27 de ses ouvriers. Sont également
relâchés des personnes âgées, des malades, des handicapés. Et si deux maquisards sont découverts, il n’y a pas l’ombre
d’une preuve de complicité avec la Résistance.
Ne reste plus que l’arbitraire pour effectuer le tri. Schmald va alors regrouper les jeunes, les sales, les pas rasés,
constituant peu à peu un groupe de 120 personnes de 17 à 42 ans.
Un premier groupe de 50, accompagné de l’abbé Espinasse, se rend au sud de la ville où l’attend Kowatsh. Celui-ci
accable les malheureuses victimes de ses sarcasmes et annonce « que la ville ne sera pas brûlée en raison des soins reçus
par les blessés allemands à l’hôpital de Tulle ». Les premiers pendus le sont aux lampadaires. Ensuite, ils le seront aux
balcons du 1er étage des maisons situées à l’ouest de la gare14. Ce second groupe ne comporte que 49 personnes (au lieu
des 50 initialement « sélectionnées »). Une explication est donnée par l’abbé Espinasse : ayant offert sa vie contre celle
d’un prisonnier il lui fut concédé la grâce de ce dernier. En contrepartie, on ne pendit pas l’abbé mais il lui fut demandé
d’assister les condamnés. L’abbé rapporte que les 99 malheureux moururent « résignés mais dignes ».
Quant au 20 derniers, il est admis que leur grâce a été due à l’action inlassable du Préfet et de son secrétaire général. Qui en
a décidé ? Le général Lammerding, ou plus probablement le chef d’État-major de la division, Stuckler ? Ces 20 rejoignirent,
dans la cour de la manufacture, le groupe de 300 gardés en otages. 200 d’entre eux furent déportés. 101 moururent ce qui
porta à 200 le nombre de victimes de Tulle pendues ou mort en camp de concentration. Quant aux 99 suppliciés, une fois
dépendus, Kowatsh accepta « pour raison sanitaire » de ne pas jeter leur corps dans la rivière, comme il l’avait annoncé.
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13 A ce sujet rappelons que l’Allemagne en 1944, à une industrie qui a largement banalisé l’emploi d’appareils photographiques de
grande qualité utilisant des films couleurs. Et qu’au niveau d’une division il y avait sûrement ce type de matériel.
14 Aujourd’hui « Rue des Martyrs ».
Paul Burlet – www.tracesdhistoire.fr
Carte réalisée par G. Burlet à partir de deux cartes tirées d
e
«La
Division Das Reich » (Max Hastings – Ed. Texto 2014), d’une
carte de Thierry Maillard (12/2008 - voir http://commons.wiki
media.org/wiki/File:Carte_division_das_reich_mai_juin_1944.p
ng) et de compléments apportés par Paul Burlet.
PARCOURS DE LA DIVISION « DAS REICH » DANS LE
SUD-OUEST DE LA FRANCE (MAI/JUIN 1944) ET LORS
DE SA MONTÉE, DEPUIS MONTAUBAN, VERS LA
NORMANDIE (JUIN 1944)
Légendes
Trajet Montauban – Normandie (juin 1944)
Axes principaux de remontée
Incursions A/
R
totales ou partielles
Divers
Lieux principaux traversés par
« Das Reich » en mai et juin 1944
Ville ou villages martyrs
Villes ou villages médaillés de la
Résistance
Principaux accrochages avec la
Résistance
Stationnement des unités « Das
Reich » à fin mai 1944
xxxx
Marsoulas
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