Premiers soins par Bruno Hogue [email protected] Attention! « problèmes de sécurité » dans le corps humain : hypersensibilité… réaction allergique et choc anaphylactique ous les jours, le corps reçoit de toutes parts les agressions de différents agents pathogènes : virus, bactéries et champignons. Ceux-ci sont invisibles à l’œil nu, mais selon leur type et en quantité suffisante, ils peuvent provoquer de graves infections généralisées et provoquer la mort. Par chance, le corps est muni de plusieurs systèmes de protection et barrières de sécurité. C’est le cas, entre autres, de la peau (barrière mécanique) et du système immunitaire (barrière de l’immunité), pour ne nommer qu’eux. T Pour des raisons encore inconnues, certains individus prédisposés réagissent à des éléments non pathogènes (c.-à.-d. qui n’entraînent normalement pas d’infection); c’est ce que l’on appelle une réaction d’hypersensibilité. Le système de sécurité du corps est donc déréglé et n’a plus le discernement nécessaire pour déterminer qui ou quoi est l’agresseur. Il existe plusieurs types d’hypersensibilité, entraînant différents troubles ou maladies, dont plusieurs mènent le corps à se défendre contre lui-même. Le type le plus connu est le type I, soit l’hypersensibilité immédiate, communément appelée réaction allergique ou réaction atopique. Dans ce type de réaction, le système immunitaire réagit à un agresseur externe ou allergène, qui peut être une toxine (venin de guêpe), une protéine de noix, de fruits de mer, etc. Il y a toujours deux phases dans une réaction d’hypersensibilité immédiate, et ce, pour chaque allergène : la phase de sensibilisation, où le système immunitaire est en contact pour la première fois avec cet allergène, et la phase réactionnelle, où le système immunitaire se défend contre l’allergène. Lors de la phase de sensibilisation, le premier contact avec un allergène entraîne une séquence d’évènements immunitaires très complexes. De façon simplifiée, disons que l’allergène rejoint des cellules immunitaires telles que les lymphocytes B et plasmocytes, en s’infiltrant dans la circulation sanguine et lymphatique via le système digestif, les muqueuses, à travers la peau (exemple : par une piqûre d’insecte) ou en passant directement dans la circulation sanguine (exemple : par une injection de médicament). Par la suite, les cellules plasmatiques, au contact de l’allergène, se mettront à produire une grande quantité d’anticorps IgE (immunoglobuline du type E) spécifiques à la reconnaissance de cet allergène. Les anticorps IgE iront ensuite se fixer principalement sur les mastocytes, des cellules « sentinelles » pouvant porter différents anticorps IgE, ce qui leur permet de reconnaitre les « intrus » afin de les détruire (voir fig.1). En résumé, dès que les mastocytes sont chargés d’anticorps IgE pour un allergène donné, cela peut mener à une réaction allergique envers celui-ci. Lors de la phase réactionnelle, soit lors d’une deuxième exposition avec un allergène, celui-ci doit se lier à au moins deux anticorps IgE d’un mastocyte. Lorsque ce phénomène se produit, plusieurs signaux s’activent, provoquant le largage de granules contenues dans les mastocytes (voir fig.2). Ces milliers de « bombes chimiques » contiennent de puissants médiateurs inflammatoires, tels que l’histamine. Ceux-ci provoqueront, conjointement avec les leucotriènes et les prostaglandines, (libérés eux aussi par les mastocytes), par le biais de diverses actions sur d’autrescellules (exemple : les muscles lisses des poumons) les signes et symptômes de la réaction allergique et, lorsqu’exagérée, d’anaphylaxie. Ce phénomène peut être extrêmement rapide, comme il peut prendre quelques heures. Il peut aussi y avoir un risque de « récidive » de l’allergie ou d’anaphylaxie dans les 6 à 24 heures, et ce, même si elle a été traitée 10 par une injection d’épinéphrine (adrénaline). Cela s’explique par la libération d’autres médiateurs par les mastocytes, tels que les cytokines, qui auront un effet à plus long terme (voir tableau 1). Il existe aussi des réactions dites anaphylactoïdes; celles-ci ont les mêmes signes et symptômes, conséquences et traitements que l’anaphylaxie, mais elles ne sont pas induites par une réaction impliquant des anticorps IgE. C’est le cas de réactions aux transfusions sanguines, à certaines autres toxines, à des contrastes radiologiques, à certains médicaments, à l’exercice, au changement de température et à d’autres causes inconnues. À l’exception des réactions transfusionnelles, on en connaît encore très peu sur les différents mécanismes de ces réactions. L’épinéphrine joue un rôle très important dans le traitement de l’anaphylaxie, puisqu’elle a une action directe sur les mastocytes et basophiles, réduisant leur dégranulation. Voilà pourquoi, lorsqu’elle est administrée tôt, elle est exponentiellement efficace. De plus, elle renverse la constriction des bronches et elle a un effet vasoconstricteur, réduisant ainsi le choc en augmentant l’arrivée d’oxygène aux alvéoles et en augmentant la pression sanguine. ◆ Fig. 1 - Phase de sensibilisation 1 Exposition aux antigènes de l'allergène Antigène 2 Les cellules plasmatiques produisent des anticorps lgE spécifiquement contre l'allergène Cellules plasmatiques lgE (immunoglobuline E) 3 Les anticorps lgE s'atachent principalement aux mastocytes Mastocyte avec des anticorps lgE fixés dessus Granules contenant de l'histamine Fig. 2 - Phase réactionnelle 4 Plus d'allergènes envahissent le corps 5 Les allergènes combinés aux lgE attachés aux mastocytes et aux basophiles, provoquent la dégranulation et le largage de l'histamine ainsi que de d'autres médiateurs chimiques Antigène Les granules des mastocytes relâchent leur contenu après la liaison de l'antigène avec l'anticorps lgE Histaminie et autres médiateurs Traduction libre de : ASAP ©2001 DEY B9-508-00 7/01 Alerte plus Automne 2009 Premiers soins Tableau 1 Médiateurs des granules Substance Activités Symptômes Provoque une constriction des bronches. Respiration sifflante, difficile. Dilate les vaisseaux sanguins. Rougeur locale à l’endroit de l’administration de l’allergène; si la dilatation est généralisée, elle peut contribuer à un effondrement mortel de la pression artérielle (choc). Augmente la perméabilité des petits vaisseaux sanguins. Œdème local des tissus; si le changement de perméabilité est généralisé, il peut contribuer au choc. Stimule les terminaisons nerveuses. Démangeaisons et douleurs cutanées. Stimule la sécrétion de mucus dans les voies respiratoires. Congestion des voies respiratoires. Provoque une constriction des bronches. Comme l’histamine. Dilate les vaisseaux sanguins. Comme l’histamine. Histamine Facteur d’activation plaquettaire Autres médiateurs Cytokines (TNF, IL-4) Leucotriènes Prostaglandine D Stimulent les cellules immunitaires, provoquent des lésions aux tissus. Responsables de la réaction tardive et exagérée. Favorisent l’inflammation. Provoquent une constriction des bronches. Comme l’histamine. Augmentent la perméabilité des petits vaisseaux sanguins. Comme l’histamine. Provoque une constriction prolongée des bronches. Comme l’histamine. Modifié à partir de : http://crdp.ac-amiens.fr/edd/air/air_maj3_detail_p1_1.htm POUR EN SAVOIR plus • • • • • • www.allerg.qc.ca www.aqaa.qc.ca/accueil.asp www.mapaq.gouv.qc.ca/Fr/Consommation/Qualitedesaliments/allergiesalimentaires www.hc-sc.gc.ca/hl-vs/iyh-vsv/med/allerg-fra.php A.K.Abbas et A.H.Lichtman, Les bases de l’immunologie fondamentale et clinique, 2e édition Elsevier, 2005 K.L.Mc.Cance et S.E.Huether, Pathophysiolog:The biologic basis for disease in adults and children, 5e édition Elsevier Mosby, 2006 Alerte plus Automne 2009 11