Ils n’auraient rien transgressé1 et n’auraient pas été la cause de tant de mal.
Mais ils ont suivi le trompeur
Et le peuple sanguinaire a frappé nos foyers comme des serpents
Les fous ont démoli le raisonnement des gens intelligents
Et notre cause a été perdue sans pouvoir être récupérée.
Abu Rafi 2
A Yathrib , Muhammad rencontre les juifs , sous une forme organisée: plusieurs tribus ,
trois principales , et une foule de clans. Ils l'appellent, quand ils le connaissent mieux "Le
meurtrier toujours souriant", et "Celui qui vient du sud".3
Ils forment , de l’aveu des textes, la partie la plus active de la population. Il aurait pu
s’attendre à un accueil favorable pour sa doctrine , qui , de loin , s’apparente à leur propre
monothéisme. Mais le rejet massif et immédiat, plus de sa personne que de ses paroles, a
pour conséquence sa colère, non pas celle d'Allah, mais de Muhammad. La violence
extrême trahit aussi l'incapacité de l'islamisme naissant à convaincre, à convertir de bon
gré, à soutenir une argumentation contraire.
Mais la confrontation sera brutale , ponctuée d’expulsions , de massacres collectifs et
d’assassinats individuels. C’est à cette suite d’événements que le public est convié ici. Il y a
d'abord les expulsions des Banu Qaynuqa, puis des Banu Nadir. Quand l'islamisme est
assez puissant pour frapper plus fort, c'est l'extermination de la tribu la plus puissante, par
l'exécution des hommes, l'asservissement et le viol des femmes, et l'asservissement des petits
enfants. S'ajoute à cela le meurtre des chefs, comme opération de commando, et pour être
complet, les attaques contre les communautés extérieures, notamment Khaybar, comme on
le verra longuement. Les huit années de pouvoir mohammédien à Médine ont donc un
caractère absolument hostile non pas à l'influence juive, mais à sa simple présence. Les
récits des événements, certes tragiques, fournissent une quantité considérable d'informations
factuelles sur la situation sociale, économique, matérielle, de Médine dans la décennie 620-
630. La période d’anti-judaïsme de Médine porte en elle le ferment de nombreux exactions
futures, puisque l'attitude mohammédienne est considérée comme exemplaire et impeccable.
A la fin de la période , plus rien ne reste de cette communauté dans la ville4 , éliminée selon
les procédés les plus variés. Elle était pourtant à l'origine de Yathrib, et sa composante la
plus importante.
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1 Sans doute la Torah.
2 Ifsanhani , Kitap al Aghani XXI , 92-3, in Motzki 2000 , p. 14 “Maghazi authorities among the
Tabi’un”. C'est Abu Rafi , chef de clan Juif , qui s'exprime ces reproches envers ses co-
religionnaires .
3 T. Nagel, Mahomet, p.156.
4 Pour les contacts très belliqueux avec d’autres Juifs , plus éloignés (Khaybar) , cf. partie XX.