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SANDRINE HOCHSTRASSER
«La loi va trop loin», clament les
référendaires. Le diagnostic pré-
implantatoire (DPI) ouvre la porte
à «la sélection humaine sans li-
mite», estime une cinquantaine de
députés de droite comme de gau-
che. Ils appellent à voter non le
5 juin, car le projet du parlement va
plus loin que celui prévu par le
Conseil fédéral. «Il autorise les tests
chromosomiques et le développe-
ment de douze embryons», fusti-
gent-ils.
Mais de quoi parle-t-on? Une
plongée dans l’univers de la pro-
création assistée s’impose pour
comprendre les enjeux de ce scru-
tin, avec les explications de Doro-
thea Wunder, membre de la Com-
mission nationale d’éthique pour
la médecine humaine et gynécolo-
gue au Centre de procréation mé-
dicalement assistée (CPMA) à
Lausanne.
1. LORS D’UNE FÉCONDATION
IN VITRO
Plantons le décor: un couple qui
narrive pas à avoir d’enfant. Ayant
découvert que le sperme de
l’homme était de mauvaise qualité,
ils décident de recourir à une fé-
condation in vitro: «un traitement
assez lourd pour la femme», précise
Dorothea Wunder. «Elle doit s’in-
jecter des hormones une à deux fois
par jour pour stimuler la croissance
d’ovocytes (les cellules reproductrices
féminines).»
Une dizaine de jours plus tard,
quand celles-ci arrivent à matura-
tion, la femme est anesthésiée et
les ovules prélevés. «Le but est d’en
avoir une dizaine. Mais il peut y en
avoir moins si la femme a plus de 35
ans», nuance la gynécologue.
Au laboratoire, un spermato-
zoïde est injecté dans chaque
ovule et la fusion des noyaux (de
l’ovule et du spermatozoïde) peut
commencer. Le succès nest pas ga-
ranti: seuls 60 à 70% des ovules se
fécondent correctement et devien-
nent des pré-embryons formés
d’une seule cellule. Nous sommes
au premier jour de la fécondation.
C’est là que la nouvelle loi entre en
jeu, si elle est acceptée.
2. AUJOURD’HUI:
DES EMBRYONS CHOISIS
AU HASARD
A l’heure actuelle, seuls des pré-
embryons peuvent être congelés.
Le médecin en prend – au hasard
– trois maximum qu’il développe
en culture. Les autres sont conser-
vés au congélateur.
Après deux ou trois jours, le mé-
decin dépose dans l’utérus de la
mère tous les embryons dévelop-
pés. Ce qui augmente les chances
de succès, mais également de
grossesse multiple. «La femme
donnera naissance à des jumeaux
dans 15 à 20% des cas, alors que ce
taux nest que de 1 ou 2% dans la na-
ture. Voilà pourquoi nous ne préfé-
rons pas mettre plusieurs embryons
dans l’utérus», glisse la spécialiste.
Si la tentative échoue, deux ou
trois ovules fécondés seront dé-
congelés pour recommencer le
processus. Douze pré-embryons
peuvent donc être développés au-
jourd’hui… en plusieurs fois.
3. EN CAS DE OUI LE 5 JUIN:
LE DÉVELOPPEMENT
DE DOUZE EMBRYONS
Avec la nouvelle loi, la congéla-
tion pourra se faire à un stade plus
avancé, au 5e ou 6e jour de déve-
loppement. Théoriquement,
douze embryons pourront être dé-
veloppés d’un coup. «Le médecin
pourra cultiver l’ensemble des ovules
fécondés et choisir celui qui a le plus
de chance de survie. Il n’implantera
qu’un seul embryon dans l’utérus. Ce
qui réduira les risques de grossesse
multiple», souligne la gynécologue.
Les autres embryons seront pla-
cés au congélateur, s’ils nont pas
arrêté de se développer d’eux-mê-
mes. «Seuls 2 embryons en
moyenne sur 10 arrivent à ce stade
de développement et donnent une
grossesse», précise-t-elle.
Dans le meilleur des cas, le méde-
cin aura donc 2 ou 3 embryons à
disposition. Il pourra alors, sur de-
mande des parents, procéder au
diagnostic préimplantatoire. Il
prélèvera des cellules sur chacun
des embryons et les enverra au la-
boratoire génétique.
4. LE TEST GÉNÉTIQUE
Le médecin, le généticien et les
parents auront déterminé, avant
de commencer la fécondation in
vitro, ce qu’il y a lieu de chercher
dans l’ADN de l’embryon. Par
exemple: a-t-il un défaut sur un
gène qui provoquerait la mucovis-
cidose? A-t-il 23 paires de chromo-
somes à l’intérieur de ses cellules
ou a-t-il trois chromosomes 21
(syndrome de Down)? Selon la
loi, les parents pourront seule-
ment vérifier si l’embryon est por-
teur d’une «maladie génétique
grave» qui ne peut être «traitée».
Ils ne pourront pas samuser à faire
un tri en fonction du sexe ou de la
couleur des yeux.
Reste que cette définition est su-
jette à interprétation. Et les réfé-
rendaires pointent le risque que la
«liste de critères de sélection ne cesse
de sallonger». S’ils ne contestent
pas que le DPI soit utilisé par des
couples porteurs d’une maladie
héréditaire, ils redoutent que cette
technique soit accessible à tous les
couples qui ont des problèmes de
fertilité. Six mille en moyenne re-
courent à une fécondation in vitro
chaque année.
«Le paradoxe de cette votation,
c’est que tous ces tests génétiques sont
autorisés une fois que l’embryon se
développe dans le ventre de la mère»,
note Dorothea Wunder. «Depuis
des décennies, les parents peuvent
faire une amniocentèse pour détecter
une anomalie chromosomique et
avorter.» Le panel des tests, en
cours de grossesse, sest d’ailleurs
étoffé avec la mise sur le marché
en 2012 de tests génétiques préna-
taux, qui peuvent être réalisés par
une simple pris de sang
.
}
Pourquoi développer 12 embryons?
La loi sur la procréation médi-
calement assistée, en votation
le 5 juin, autorise les couples
à cultiver plusieurs embryons
et sélectionner celui qui a le
plus de chance de survie. Pour
comprendre les enjeux de ce
scrutin, une plongée dans
l’univers de la procréation
assistée s’impose.
VOTATIONS DU 5 JUIN
MARDI 26 AVRIL 2016 LE NOUVELLISTE
SUISSE
MONDE
ÉCONOMIE
z
«
La femme donnera naissance
à des jumeaux dans 15 à 20% des cas,
alors que ce taux nest que de 1 ou 2%
dans la nature
DOROTHEA WUNDER GYNÉCOLOGUE AU CENTRE DE PROCRÉATION MÉDICALEMENT
ASSISTÉE À LAUSANNE
Le diagnostic préimplantatoire (DPI) va
conduire à une «sélection systématique»
des embryons, s’inquiète le comité qui a
lancé le référendum contre la loi sur la
procréation assistée. «Tous les embryons
ayant un «défaut» seront rejetés de manière
eugéniste», souligne-t-il.
«Toutes les fécondations in vitro ne seront
pas accompagnées du DPI. Ce ne serait pas
sensé», conteste Dorothea Wunder, mem-
bre de la Commission nationale d’éthique
pour la médecine humaine et gynécolo-
gue au Centre de procréation médicale-
ment assistée (CPMA) à Lausanne.
«C’est un test invasif pour l’embryon, puis-
que l’on prélève des cellules. Certaines études
ont montré que les chances d’avoir une gros-
sesse après un DPI ne sont pas plus élevées,
même si l’embryon na pas de défaut chromo-
somique, car il y a probablement un risque
que l’embryon soit affaibli et qu’il s’implante
moins bien dans l’utérus de la mèr, pour-
suit la gynécologue.
«Il ne serait donc pas adéquat de faire ce
test systématiquement. Il faut une indication,
un risque de maladie génétique grave et incu-
rable.»
Par ailleurs, le DPI ne sera pas pris en
charge par lassurance obligatoire. «A
l’heure actuelle, une fécondation in vitro avec
DPI coûte plus de 10 000 euros à l’étranger.»
Les couples auront donc le choix, y compris
avec la nouvelle loi. «Selon leurs convic-
tions, ils pourront décider de ne développer
qu’un seul embryon et de congeler que des
ovocytes ou des pré-embryons.»
}
Des inquiétudes face à un test systématique
Le comité qui a lancé le référendum contre
la loi sur la procréation assistée craint
une dérive vers l’eugénisme.
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