Reconstruction ou modernisation ? Un village après la tempête Le

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Rapport d'étude au
Ministère de la Culture et de la Communication
Mission du Patrimoine Ethnologique
Reconstruction
ou modernisation ?
Un village après la tempête
Le lioscfuel en Picardie
Marie-Christine Zelem
Décembre 1991
FDMJC de la Somme
5, rue des Provinciales - 80090 Amiens
MINISTERE DE LA CULTURE-DAPA
9042 007097
Je tiens à remercier tous les habitants du Bosquel qui ont
bien voulu m'aider dans cette recherche, ainsi que Monsieur
Paul DUFOURNET qui m'a si gentiment accueillie.
1
Sommaire
1. Le Bosquel avant la guerre de 39-40:
1.1. Un village picard:
- Une rue de granges
- Le village et son terroir
- Un sens très poussé de l'égalité
- La distribution de l'eau
- Des tisserands et des cultivateurs
1.2. Le remembrement de 1934
1.3. A la veille de la guerre de 1940
2. Le village sous la guerre:
2.1. L'évacuation
2.2. Le retour
- Une campagne désolée
- Une vie qui reprend
- Se reloger
2.3. L'occupation
- La vie au quotidien
- Les fêtes
- L'école
3. L'Etat face à la Reconstruction
3.1. Reconstruire
3.2. L'esprit de la Reconstruction avant la seconde guerre
3.3. L'Etat français face aux destructions de guerre
4. Le projet d'aménagement du Bosquel
4.1. Un schéma
4.1.1. La
4.1.2. La
4.1.3. La
de village théorique?
zone d'agglomération urbaine
zone d'établissement agricole
zone de grande culture
2
4.2. Une nouvelle conception de ferme
4.3. Les avantages du plan d'aménagement
4.4. L'esprit du projet de Reconstruction du Bosquel
4.4.1. Reconstruire, oui, mais quel type de village?
4.4.2. Le respect des traditions picardes
4.5. L'avant-projet
4.6. Qui va payer la Reconstruction?
5. Le remembrement de 1943
5.1. La loi du 9 mars 1941
5.2. Le principe du remembrement
5.3. Les modalités des opérations du remembrement
5.4. A quelques détails près... ou les obstacles
rencontrés
5.5. Les résultats du remembrement
- L'évolution de la structure des exploitations
- Un parcellaire différent
6. Le Bosquel sous la Reconstruction
6.1.
6.2.
6.3.
6.4.
L'équipe des architectes d'opération
La main d'oeuvre
De nouveaux procédés de construction
La construction des fermes modèles
6.4.1. Les maisons d'habitation
6.4.2. Les bâtiments d'exploitation
6.4.3. L'adduction d'eau
6.4.4. La distillerie
6.4.5. L'église
6.4.6. La mare
6.4.7. L'école des 20.000 pierres
6.4.8. Une exposition sur la Reconstruction 3 Amiens?
6.4.9. La fin de la Reconstruction
7. Les aléas de la Reconstruction
7.1.
7.2.
7.3.
7.4.
L'arrêt des chantiers?
Les relations entre architectes et sinistrés
Les expropriations
Une véritables course d'obstacles
3
8. Le Bosguel depuis la Reconstruction
8.1.
8.2.
8.3.
8.4.
Les effets du remembrement
Un nouveau paysage
Des bâtiments agricoles devenus trop vite vétustés
Des maisons au destin bien commun
9. Une expérience fructueuse?
10. Repères
11. Annexes
12. Bibliographie
4
" Placé sur une hauteur, le Bosquel fut choisi pour être
un centre de résistance.
L'avance allemande s'étant
faite
rapidement par la route nationale 16 et par la vallée de la
Selle,
cette position
fut bientôt
tournée.
Les allemands
montèrent à l'assaut
du village et la résistance
fut
sévère
(...)"
Paul DUFOURNET, Rapport justificatif de l'aménagement de la
commune du Bosquel, CTRI, 1941, 25 p.
5
La percée
de la ligne
Weygand.
"(...)
Mais nos chars ne laissent
pas un instant
de répit
à l'ennemi
en fuite.
Ils
le talonnent.
Même dans sa
retraite
il est anéanti.
Ce n'est
qu'à Grattepanche
que
l'ennemi se rétablit.
Un rude combat se déclenche pour ce
petit nid de résistance.
C'est aujourd'hui
un tas sauvage
de décombres. C'est à peine si une maison tient
encore
debout.
Ici,
c'est
un coup de plein
fouet
de
notre
artillerie
sur un dépôt de munitions ennemi. Là, c'est une
lutte
infernale.
Des heures
durant,
le combat
reste
hésitant;
des heures pendant lesquelles
nos
tirailleurs
doivent combattre pour avancer mètre par mètre à la manière
de leurs
camarades qui suivent
nos chars à droite
et
doivent mener un sauvage combat de rue jusqu'à une heure
avancée de la soirée dans Rumigny et Hébécourt.
Ce fut la première brèche décisive
qui élargit
la tête de
pont d'Amiens. C'est un coin enfoncé dans la ligne Weygand
mais celle-ci
n'est
pas encore franchie.
Nos
régiments
doivent s'emparer de chaque pouce de terrain en couvrant en
permanence leurs flancs
droit et gauche. Le Bosquel et
Essertaux
sont les objectifs
suivants.
Il y a
toujours
devant
nous
des
divisions
françaises
aguerries
que
soutiennent
des troupes coloniales.
Ces bandits
pratiquent
une tactique
insidieuse.
C'est ainsi qu'ils
font
passer
rapidement une patrouille
dans un nid de résistance
pour se
jeter ensuite avec le gros de leurs forces sur l'ennemi qui
riposte
et assurer la sûreté de cette patrouille.
Mais,
c'est
alors que notre artillerie
intervient
de manière
décisive dans le combat ainsi que notre D.C.A et nos canons
d'infanterie.
Très
avancées,
ces
pièces
atteignent
impitoyablement
les nids de résistance
les uns après les
autres.
De l'autre
côté, derrière le Bosquel, se révèle un nid de
mitrailleuses
ennemi. Il suffit
d'un seul coup pour le
volatiliser.
Mais viennent
ensuite
ces damnées
forêts
bourrées de mines d'où les français
tirent sans cesse dans
le flanc de nos chars et de nos troupes.
Une attaque de
"stukas" qui anéantit
toute cette canaille
dans la
forêt
apporte un grand soulagement.
Ils foncent sur leur
proie
6
comme des rapaces dans les bois un et deux, près de Conty
et Rogy; et de l'autre
côté, derrière
Essertaux et Jumel.
Ils font un excellent
travail.
Les motocyclistes
qui ont
mis pied à terre nettoient
le
reste.
Ce rude combat impitoyable
se prolongea pendant
trois
jours dès le matin jusqu'à une heure avancée de la soirée
et dans des escarmouches de nuit.
Trois jours
pendant
lesquels chaque pouce de terrain fut disputé.
C'est à peine
si nos hussards noirs ont dormi normalement une seule
fois.
Et, en plus, il faisait
une chaleur étouffante
dans nos
chars. Mais nos braves équipages roulaient,
attaquaient
et
remportaient
des succès jour après jour. Toujours en avant!
Puis, quand le dernier barrage d'artillerie
ennemi fut
dépassé
derrière
Essertaux
et
Jumel
et
qu'apparut
Esserteaux
à l'horizon,
semblable
à un tas de
ruines
fumantes,
la résistance
ennemie fut brisée.
Les
français
reculaient
dans une fuite éperdue pour tenter de sauver ce
qui leur restait
de vie.
Alors nous commençâmes notre
grande
poursuite.
Les régiments
d'infanterie
portée
embarquèrent,
les chars roulèrent
à toute
allure:
axe
d'effort
Saint-Just.
Talonnant
l'ennemi,
on
atteignit
l'Oise en une seule journée, soit trente kilomètres,
mais
l'ennemi continuait
à nous harceler,
nous attaquer et nous
ralentir
sur nos deux flancs.
Les yeux
écarquillés
d'étonnement,
Ins français
surgissent
des fermes qui se
trouvent devant nous. Ils n'arrivent
pas à croire que nous
sommes là, lèvent les bras en l'air et jettent
leurs armes.
Personne n'a le temps de se soucier des prisonniers;
nous
devons
avancer,.
avancer,
avancer...
à une
vitesse
infernale.
Les voltigeurs
ne descendent
pas de
leurs
véhicules.
C'est un nuage de poussière compact, avançant à
une vitesse folle qui poursuit les français dont les
chars,
les canons, les obusiers,
les caisses
de munitions,
les
sacs et les caissons gisent pêle-mêle.
Plus loin, dans un
char français
un cadavre entièrement
carbonisé.
Breteuil
est atteint,
Saint-Just
traversé.
Partout des décombres".
Sieg über Frankreich, Oberkommand der Wehrmacht, 1940, pp.
106-107.
7
Colonel Roger Le CLERC
Commandant le 50ème R.I
Oflag II D Groshom
POMERANIE
N° de prisonnier: 211
Bl-III
Baraque 41
Stùbe 11
18 décembre 1941
Monsieur le Maire de "Le Bosquel",
"De Poméranie où je suis prisonnier avec quatorze
officiers de mon régiment, nous réunissons pour vous
envoyer et à vos administrés, notre salut et nos voeux. Le
50éme R.I chargé de défense Bois Quennetot et le Bosquel
(1er bataillon) a fait tout son devoir. Sous bombardements
massifs d'avions dès le 5 juin 1940 matin, il a le 6 et 7
au Bosquel jusqu'à 15h30 résisté à tous assauts de
divisions blindées appuyées par aviation et tous engins les
plus modernes. De 15h30 à 19 h lutte poursuivie pied à pied
à la grenade et fusils dans votre localité en flammes
depuis midi. Ai traversé le Bosquel prisonnier le 8 à la
nuit la mort dans l'âme, mais fier résistance de mon
régiment; localité brûlait encore, monceaux de cendres,
sauf église. Dites vos compatriotes que si avez triste
privilège être localité de Somme la plus durement frappée,
notre brave 50éme est de tous les R.I du Sud-Ouest celui
qui a le plus souffert. Sous chacune de vos maisons, braves
petits gars de Dordogne, Charente, Bordelais. Au seuil
année 42, unissons pensées à vos foyers dévastés, vers nos
morts. Vive la France".
R. Le CLERC
8
"(...)
Le village
incendié fut détruit
dans la
proportion
des huit-dixième.
La population
qui avait
fui,
revint
rapidement.
Dès la fin juin,
la vie reprenait
dans les
ruines;
tous
les
cultivateurs
sauf
un, étaient
des
sinistrés
totaux. Des cabanes en planches étaient
édifiées,
des demeures et des caves aménagées et la culture
acquérait
immédiatement les soins de tous
(...)"
Paul DUFOURNET, Rapport justificatif de l'aménagement de la
commune du Bosquel, CTRI, 1941, 25 p.
9
1. Le Bosquel avant la guerre de 1939-1940:
1.1. Un village picard (1)
Petit village de l'Amiénois, le Bosquel se situe dans un
pays de champs ouverts où prédomine la grande culture
céréalière. Au XVIIème siècle, du fait de la rareté des points
d'eau, du fait aussi d'un parcellaire très morcelé et de
l'obligation très ancienne de l'assolement, les habitations y
sont regroupées quoique relativement espacées. C'est aux
alentours du milieu du XIXème que la physionomie du village
changea: une importante augmentation de la population (de 250
habitants en 1800, on en compte 800 en 1850) rendit l'habitat
plus dense encore.
De manière générale, les fermes qui le composent sont à
cour fermée, cour à partir de laquelle se distribuent les
fonctions tant sociales qu'économiques de la vie agricole
locale.
"Cette
disposition
d'ailleurs
très
logique
étant
données
les
sujétions
alors
existantes,
résultait
uniquement d'un parcellaire
en lanières
: la
parcelle
étant étroite,
la grange se trouvait
nécessairement
sur
la rue pour la commodité de l'engrangement;
pour jouir
du maximum d'air
et de lumière,
l'habitation
était
repoussée
entre
la
cour
et
le
jardin,
et
les
dépendances s'organisaient
sur les côtés."
(2)
L'adjonction de petits bâtiments supplémentaires au rythme
des changements agricoles, la dispersion des parcelles au grè
des successions ont contribué à modeler des fermes qui semblent
se recroqueviller sur elles-mêmes.
1. "La ferme picarde", Le progrès de la Somme, 15 août 1938.
P. DDFOOENET, "Comment se sont construits les villages picards et ce qu'il en advient",
Technique et Architecture, techniques locales. Nov.- dec. 1943, pp. 313-323.
2. P. DÜFOÜRHET, Concours d'études provinciales. Picardie. Note accompagnant les projets de HM. AUZELLE
et DÖFOÜRNET et précisant la pensée des auteurs sur la reconstruction rurale", si, nd, A. D. 80 Fonds P.
DUFOUKNET.
10
Une rue de granges
Comme la plupart des villages de la région d'Amiens, le
Bosquel se présente comme une succession de granges, accolées
les unes aux autres, sans aucune ouverture sur la rue. La vie
de chacun est ainsi préservée du regard de l'extérieur.
"Les rues dormantes des villages
picards étonnent
le
voyageur qui ne contemple que de grands murs de
torchis
que trouent
des portes cochères soigneusement
closes.
De la vie du village,
on ne perçoit
que les
bruits."
(3)
Les bâtiments les plus anciens sont effectivement en
torchis (4) sur solins (5) en dur, les autres sont en moellon
crayeux ou en briques.
Entre deux granges, on trouve une large.porte, très haute,
parfois secondée par une plus petite. La première servait au
passage des boeufs, la seconde aux piétons. Elles ouvrent
toutes deux sur la cour de ferme et font face à la maison
d'habitation.
Celle-ci n'est jamais très grande. Une salle commune dans
laquelle on pénètre directement et une ou deux chambres en
composent l'essentiel. Elle comprend rarement un étage du fait
de la fragilité des matériaux de construction. Par contre, on y
trouve un grenier qui sert à remiser les grains et les
semences.
Alors que dans la cour siège royalement un tas de fumier,
derrière la maison, on trouve souvent un potager et un verger.
"Vous sortiez
dans le purin!"
de la
(6)
maison,
vous
mettiez
les
pieds
D'aucuns expliquent la raison d'être d'un tel repli sur
soi par la protection apportée contre les vents.
3. P. PIHCHEHEL, Essai sur l'habitat rural en Picardie, p. 12, ms, avril 1944. A.D. 80, 15 J12.
4. Sorte de mortier d'argile malaxée avec de la chaux, de la paille hachée, du poil de vache et de résidu
de chanvre..
5. Soubassements, hauts d'un peu plus d'un demi-mètre, généralement en silex.
6. Entretiens
11
Le village et son terroir:
Les activités agricoles du village se partagent à peu près
pour moitié entre l'élevage et la culture. Soit la nécessité de
disposer de grands bâtiments pour l'une et pour l'autre de ces
activités.
Par ailleurs, l'habitat concentré y est un fait très
ancien (7).L'assolement triennal obligeait les villageois à
diviser le territoire cultivable en trois secteurs. L'un était
consacré à la culture du blé, l'autre à celle de l'avoine et le
dernier était laissé en jachère. Aussi, tous étaient-ils
contraints de se plier à une discipline de travail en commun
(8). Car, comment traverser le champ voisin si celui-ci n'est
pas également en période de récolte.? Comment semer son propre
champ si ceux qui l'entourent le sont déjà?
"Ces pratiques
agricoles
à elles seules
(assolement
triennal
et
vaine
pâture)
sont
un facteur
de
concentration
puisqu'elles
exigent un espace homogène
et sans obstacles
pour la rotation
des soles et la
libre circulation
du
bétail."(9)
De même, chaque exploitant devait posséder des parcelles
dans chacune des natures de culture du territoire communal, ce
qui ajoutait à l'éparpillement des propriétés.
D'autre part, du fait de ces pratiques culturales, le
village était ceint d'un tour de haie, c'est-à-dire d'un chemin
circulaire qui contournait le terroir par l'extérieur, ce qui
facilitait l'accès aux parcelles les plus éloignées du centre.
Un sens très poussé de l'égalité:
D'autre part, l'accroissement de la population lié à un
partage des héritages de type égalitaire (10) concouraient à un
morcellement
excessif
du
parcellaire
communal:
chaque
successeur potentiel d'un exploitant pouvait s'installer sur
les terres reçues en héritage pour les travailler par lui-même,
ou bien les louer. Mais l'Amiénois n'est pas un lieu où l'on
7. P. PIHCHEHEL, op. cit. p. 2
8. "L'expérience du Bosquel. Village de demain", Aux Ames, Revue du peuple français et de son année
(19), juin 1946, p. 16.
9. P. PIHCHEHEL, op. cit., p. 6.
10. Lors d'une succession, la pratique courante consistait à diviser son bien en autant de parts qu'il y
avait de descendants. Ormi dans le cas d'un enfant unique, les exploitations se voyaient ainsi morcelées
de génération en génération.
12
pratique habituellement la location intra-familiale qui permet
de reconstituer des patrimoines divisés par le biais
successoral. Souvent, les cohéritiers louent leurs parts à
d'autres cultivateurs, rarement à leurs frères ou soeurs.
Parfois, ils prennent d'autres parcelles en fermage, en
achètent certaines et exploitent ce bien nouvellement
constitué.
L'exploitation prime sur la propriété ou la notion de
patrimoine. Et si dans de nombreuses zones rurales de France,
le partage inégalitaire ou le partage égalitaire avec
rétrocession des parts à un seul héritier garantissent la
conservation d'un patrimoine familial d'une génération à
l'autre (11), l'observation de la réalité amiénoise montre que
le cultivateur local ne semble guère s'en soucier. D'où cet
endettement de la propriété qui s'accompagne d'un aspect très
découpé du parcellaire du Bosquel.
"Avant, on mariait plutôt
une fille
de
cultivateur
avec un cultivateur,
pour marier les terres.
Un bien
allait
chercher un autre
bien.
En cas de partage, on fait ce gu'on peut. Parfois,
ça
se passe à coups de fusil."
(12J
A ce propos, d'aucuns nous racontaient cette histoire très
récente qui, pour caricaturale qu'elle paraisse, en n'est pas
moins vraie, de ces deux frères qui en sont arrivés à partager
en deux une échelle afin de respecter une égalité stricte dans
le partage des biens reçus en héritage de leurs parents (13).
D'autres évoquent l'histoire d'un matelas divisé en deux.
La distribution de l'eau:
Avant la guerre, il existait un puits communal. Son débit
durant l'été était tel que les cultivateurs allaient se
ravitailler en eau à Conty, à 5 km du Bosquel. Il y avait
quatre petits puits pour tout le village. Les fermes avaient
des citernes de récupération des eaux de pluie.
En 1933, l'exploitant de la plus grande ferme eut l'idée
de faire s'associer les cultivateurs du village pour financer
11. Ou bien la succession est de type inégalitaire stricte c'est à dire qu'un seul des héritiers reçoit
l'intégralité du bien familial avec en contrepartie, l'obligation de dédommager ses frères et soeurs par
le versement de soultes. Ou bien, la succession est de type égalitaire, mais les cohéritiers louent ou
vendent leurs parts à l'un d'entre eux. L'intérêt de ces deux systèmes est de préserver l'unité du
patrimoine.
12. Entretiens.
13. Entretiens.
l'installation d'une pompe sur un des puits. La moitié des
cultivateurs participa à cette initiative; les autres la
boudèrent. Mais tous en bénéficièrent.
L'eau des citernes servait à abreuver les bêtes, faire la
lessive, le ménage. Celle du puits était davantage réservée à
la consommation humaine. L'installation de la pompe facilita
considérablement la vie quotidienne.
Des tisserands et des cultivateurs
Au milieu du XIXème, le Bosquel était un village de
cultivateurs-tisserands. Il y en avait plus de trois cents. Le
développement de l'industrie à Amiens les fit disparaître peu à
peu. En 1924, il en restait encore douze; le dernier allait
quitter les lieux peu après 1938 (14).
1.2. Le remembrement de 1934
Première opération du genre semble-t-il en araiénois: s'il
y avait, alors au Bosquel 3.000 parcelles cadastrées et 2.000
ilôts et parcelles de propriété, ce remembrement laissait 400
parcelles pour 17 cultivateurs et 30 ouvriers agricoles.
Comme nous l'avons indiqué ci-dessus, au grè des
héritages, chaque propriétaire possédait des biens, multiples,
dispersés dans toute le commune. De génération en génération,
certains en oubliaient même où se situaient quelques unes de
leurs parcelles. Les nouveaux exploitants avaient beaucoup de
mal à repérer les champs qu'ils devaient cultiver de ceux de
leurs voisins. Souvent, ils devaient en traverser plusieurs
avant d'atteindre le leur.
"Un cultivateur
d'ici
avait planté un pommier dans
chacune de ses pièces de terre, pour les
reconnaître."
(15>
Mais surtout, la culture en était excessivement gênée. Du
fait de l'assolement triennal, il fallait attendre que le
voisin soit lui-même prêt pour entreprendre tel ou tel travail.
D'autre part, la dispersion des parcelles, l'enclavement d'un
nombre considérable d'entre elles, étaient tels que leur
accessibilité même posait des difficultés.
14. "Le Bosquel, village d'essai", Le Progrès de la Sonne, 30 oct. 1942.
15. Entretiens.
14
Ce remembrement donc apparaissait indispensable aux yeux
des cultivateurs les plus dynamiques. Oeuvre de Jean ROY,
géomètre-expert, il a été sous le contrôle du service
départemental du Génie Rural. Loin d'être parfait, son résultat
a cependant permis une nette amélioration dans la distribution
des parcelles. Demandé par l'exploitant de la plus grande
ferme, soutenu par des cultivateurs d'avant-garde, il souleva
nombre de polémiques (menaces de mort a 1'encontre de son
instigateur, empoisonnement de quelques unes de ses bêtes,
voies de fait contre le géomètre et autres déplacements de la
force publique).
"Ce fut
un véritable
drame."
(16)
Certaines personnes s'en allaient, la nuit, arracher les
jalons du géomètre. Il fallait que les gendarmes de Conty
viennent monter la garde.
Un journal (17) rapporte l'histoire d'un conflit à ce
propos entre un agriculteur et son fils: le vieillard se
refusait à tout changement dans la composition de sa propriété
alors que le fils y était très favorable. Ce sont les arguments
du plus jeune qui l'emportèrent. Déjà, les nécessités de
favoriser l'accessibilité des parcelles se faisait.sentir.
Outre les oppositions de principe, une. réclamation
concernait la valeur des parcelles attribuées. Signalant qu'il
ne pourrait plus mettre de betteraves "dans la totalité
de sa
parcelle
car il retombe dans une partie
de terre forte",
son
propriétaire se vit rétorquer que "même si la terre forte
n'est
pas propice à la betterave,
elle est d'un rapport
excellent
pour les céréales,
ce qui compense 1'inconvénient
souligné"
(18). Les opérations du remembrement ne touchaient donc pas
seulement la composition des patrimoines, elles heurtaient
l'usage même que l'on pouvait en faire et poussaient les
cultivateurs à modifier leurs habitudes.
Cependant, si ce remembrement permettait de regrouper une
partie des terres d'une même exploitation en un même lieu, s'il
favorisait la viabilité et une mise en valeur plus rationnelle
des biens, la plupart des propriétaires avaient souhaité
conserver des parcelles dans chaque "quartier" du terroir dans
le seul but de poursuivre la pratique de l'assolement triennal
qui restera collectif jusqu'en 1940.
16. Entretiens.
17. flLe reEenbreaent est m e étape indispensable", Journal Agricole, 22 cars 1946.
18. íenecbrenent du Bosquel, 9 nars 1934. Archives Génie Eural Aniens.
15
D'autres, s'étant toujours refusés à l'idée de se voir
attribuer des terres qui n'étaient pas les leurs, ont continué,
des années après ce premier remembrement, d'entretenir des
parcelles qui ne leur appartenaient plus, a la grande
satisfaction de leurs bénéficiaires (19).
1.3. À la veille de la guerre:
Il reste seize exploitants au village. Deux sont en fairevaloir direct, deux autres en fermage, les exploitants restants
sont en faire-valoir mixte (une partie seulement des terres
exploitées étant en location). Douze exploitations ont entre 30
et 50 hectares alors qu'une seule a moins de 15 hectares, deux
entre 60 et 80 hectares. Une seule exploitation se distingue
des autres par sa superficie: plus de 150 hectares.
Dans le village, il reste quatre ménagers et une trentaine
d'ouvriers agricoles. Les représentants des autres professions
restent peu nombreux (un charron, un mesuisier, un maréchalferrant, un marchand de charbon, un maçon, un cordonnier, un
couvreur, un électricien, un entrepreneur de battages, un
cantonnier, un garde-champêtre, un représentant en matériel
agricole, trois épiciers et une douzaine d'ouvriers d'usine).
(20)
19. Entretiens.
20. P. D0PO0ENET, "Etat des cultivateurs exploitants et des autres professions eu Bosguel", le 25 avril
1943. A.D. 80, 15 J3.
16
2. Le village sous la guerre (21):
2.1. L'évacuation:
Les gens ont emporté tout ce qui pouvait rouler et
transporter (autos, tracteurs, carrioles attelées ou non,
vélos, poussettes...)« U s y ont entassé ce qu'ils ont pu et
sont partis, les uns vers des amis en Province, les autres au
hasard. N'ayant souvent que des sacs de fortune, ou pas assez
de valises, le charron avait confectionné pour certains des
caisses en bois.
Les portes des pâtures avaient été ouvertes pour que les
bêtes puissent manger. Seuls les chevaux avaient été emmenés.
"Ils étaient
peu notre outil
précieux.
C'était quand
de
travail."
même un
petit
Quelques familles sont allées dans le centre de la France,
en Auvergne... D'autres sont restées très proches.
L'armée s'est chargée d'évacuer d'autorité tous ceux qui
se refusaient à quitter le village. Partis entre le 6 et le 7
juin en direction de La Rochelle, il semble qu'ils soient
rentrés une dizaine de jours plus tard. Ceux qui étaient allés
très loin ne sont revenus que plusieurs semaines .après,
certains en septembre seulement.
2.2. Le retour
* Une campagne d é s o l é e :
Quel ne fut pas l e désappointement de t o u t e s ces f a m i l l e s
l o r s q u ' a u l o i n , à des c e n t a i n e s de mètres de l ' e n t r é e du
v i l l a g e , e l l e s v i r e n t des fumées s ' é l e v e r .
est
pi
"Je vois encore mon grand-père.
descendu
de la
carriole
eurer..."
. . Il s''est arrêté,
et
il
s'est
mis
il
à
L ' é g l i s e n ' a v a i t p l u s de c l o c h e r .
"Il n'y avait plus
dans la
voiture."
rien.
Ma mère a fait
une
syncope
21. Toutes les citations sont extraites d'entretiens réalisés de janvier 1991 a septembre 1991 auprès de
la population du Bosquel
17
Le bombardement avait eu lieu depuis un certain temps
déjà, mais des ruines, des récoltes brûlaient encore.
"Tout était
par
terre."
- Paysage de désolation par excellence: des décombres
jonchaient la chaussée, des bêtes crevées, des cadavres
gisaient un peu partout alentour. Des poteaux calcinés
encombraient ce qu'il restait des routes. Des tanks, des automitrailleuses avaient été abandonnées. Pas une maison ou
presque n'avait été épargnée. Les gravats s'ammoncelaient dans
ce qu'il restait des anciennes rues. Des odeurs nauséabondes
envahissaient l'atmosphère.
Sur les 110 maisons qui composent l'agglomération, 85 ont
été totalement détruites, 21 sinistrées au point de n'être plus
habitables. Quatre ont résisté aux bombes, mais sont
suffisamment ébranlées pour nécessiter nombre de travaux de
consolidation. Il s'avère que les habitations ou bâtiments
épargnés étaient en fait soit en retrait du village proprement
dit, soit isolés des autres habitations par des coupe-feux
naturels (vides, pignons en briques....).
Ainsi, ces nombreuses gens, parties sans presque rien, ne
retrouvaient plus rien. Ni foyer, ni meubles, ni vêtements, ni
métier à tisser, plus aucun matériel agricole en bon état, plus
aucun souvenirs. Tout avait été emporté soit par le feu, soit
par des voleurs passés par là pour récupérer ce qui était
encore récupérable. Les récoltes étaient saccagées, et les
bêtes soit crevées, soit dispersées dans les champs avoisinant.
* Une vie qui reprend
Mais il fallut bien se ressaisir, fouiller les restes
d'habitation pour y retrouver l'un un bibelot en mauvais état,
l'autre quelques outils. Réapprendre à vivre.
Alors on commença de déblayer. Un tombereau et un cheval
servaient à nettoyer les ruines. Les trous étaient nivelés et
le restant de déblais mis en dépôt dans les anciennes carrières
de marbre.
Au fur et à mesure, on reprit le chemin des champs pour
les remettre en culture et récolter ce qui était encore
récoltable. Des pâturages avaient été saccagés par le passage
des tanks; des plantations étaient en piteux état; des piquets
avaient été arrachés... Il y avait des tranchées un peu
partout. Mais de manière générale, les dégâts agricoles
18
n'étaient pas considérables; les pièces de terre situées en
plaine, ou quelque peu éloignées du bourg, avaient été
épargnées.
"C'était
pestilentiel
à certains
endroits."
Les odeurs étaient si fortes, que les cadavres des
bestiaux étaient placés dans les trous d'obus et brûlés. On le
faisait avec de la paille. Et de ci, de là, on retrouvait des
cadavres de soldats. Certains étaient en décomposition depuis
plusieurs
semaines.
On
s'arrangeait
alors
pour
leur
confectionner des cercueils de fortune, avec des planches de
bois d'anciennes caisses de munitions par exemple.
"Dans le courant
du mois d'août,
ça brûlait
encore."
C'étaient la paille et l'avoine qui servaient à nourrir
les chevaux qui continuaient de se consumer peu à peu.
L'unique faucheuse lieuse du village tourna tout l'été
pour assurer la moisson chez les uns et chez les autres. Le
fuel étant venu â manquer, l'entreprise agricole qui assurait
les battages faisait marcher les tracteurs à l'essence. Les
vols de carburants ne suffisaient pas à décourager cette
population déjà bien éprouvée.
Le Bosquel ayant été un centre de résistance, il était
assez fréquent de buter contre des grenades ou de se trouver
nez à nez avec un obus non explosé. Les conditions de travail
n'en étaient que plus difficiles et périlleuses.
"Il n'y a pas eu d'accident,
mais il aurait
avoir. On était gosses à l'époque,
et on jouait
vrais
fusils."
pu y en
avec de
C'est ainsi que du matériel militaire fut également
récupéré: trois auto-mitrailleuse ici, deux tanks là, des
voitures blindées... Ce qui pouvait être réutilisé le fut,
puis, cinq ou six mois plus tard, les allemands vinrent
chercher les munitions et leur matériel de guerre.
Disséminées un peu partout dans la nature, il a bien fallu
retrouver les bêtes, les réunir et les trier. Certains en ont
profité; ne trouvant plus leurs bêtes, ils se servaient dans
les champs des communes voisines. D'autres ont même vendu les
moutons de leurs voisins au boucher d'Amiens.
Il n'y avait plus ni boulanger, ni boucher au village. Il
n'y avait donc ni farine, ni viande. Un vieil aplatissoire qui
servait jusque là à aplatir l'avoine pour les chevaux, allait
être mis à contribution pour concasser le grain. Tout le
village allait faire ses moutures ainsi. Certains allaient
chercher leur pain sac à dos à Conty. Quant à la viande, les
tickets de ravitaillement hebdomadaires ne suffisant pas, les
familles tuaient des veaux dont les morceaux, faute de mieux et
malgré un goût douteux, étaient conservés comme le porc, au
saloirî
"On était revenus au temps des gaulois!
Ca n'a
duré longtemps, deux ou trois mois
peut-être..."
pas
Ne retrouvant plus ni leurs ateliers, ni leurs instruments
de travail ou leurs fournitures, les artisans les plus âgés
cessèrent
définitivement
leurs
activités.
D'autres
se
convertirent à la culture.
2.2.1. Se reloger:
* Des abris de fortune:
Quelques caves étaient restées intactes. On les aménagea
du mieux possible pour y trouver un abri pour la nuit. Avec des
planches, de la tôle ondulée et des matériaux découverts dans
un dépôt militaire voisin, certains construisirent des baraques
de fortune. D'autres élirent domicile dans d'anciennes étables
à cochons, voire dans de grands clapiers.
D'autres encore ramassèrent les unes après les autres les
briques de leur ancienne maison pour monter un semblant
d'habitation.
"Ma mère avait récupéré 5.000 briques de nos
maisons
pour
faire
reconstruire
notre
baraquement. Mais c'était
très
rudimentaire."
propres
premier
Au départ, on se groupa par parenté, par affinité ou par
voisinage pour occuper les lieux habitables. On arrivait à se
supporter sans trop d'encombrés. Il le fallait bien.
En attendant... En attendant que les pouvoirs publics
veuillent bien s'occuper des sinistrés.
Les premiers arrivés s'étaient installés là où ils
pouvaient. Certains eurent la surprise de voir leur maison
restée debout habitée. Mais il fallait bien se loger. Le temps
que les "intrus" se trouvent un nouvel abri, une cohabitation
20
s'instaurait de fait. D'autres retrouvèrent une partie de leur
mobilier à l'autre bout du village...
* Les baraquements:
Avant même de concevoir l'idée d'une reconstruction
intégrale et idéale du village, il fallait bien songer à
reloger sa population. Avant toute chose donc, on reconstruisit
un village provisoire, fait de baraquements:
"Du provisoire
qui dura longtemps!"
(22)
L'implantation de chacun des camps, que d'aucuns appellent
des cités, et le plan de leur répartition est l'oeuvre des
architectes
d'opération.
Se
préoccupant
d'une certaine
composition des lieux, ils ont tenu compte de l'utilisation de
pentes et de l'orientation des façades selon leur fonction
(23).
Les villageois, tout comme la main d'oeuvre employée à la
reconstruction,
sont
donc
installés
dans
des maisons
préfabriquées venant d'Amérique pour certaines. Le confort des
baraques est cependant si rudimentaire qu'assez vite, il faut
les calfeutrer, refaire les couvertures, installer le chauffage
pour l'hiver, ... (24). Une nuit de forte tempête, des toitures
se sont même envolées. Du fait du manque de fenêtres, un
particulier se vit obliger de boucher une ouverture avec une
tôle (25).
Les constructions provisoires que certains habitants ont
édifiées eux-mêmes ne sont pas en meilleur état. Certaines sont
si frustes et inconfortables, sans enduit intérieur, sans sousplafond, ni menuiserie hermétique qu'elles laissent passer le
froid et le vent de toutes parts (26).
De construction très légère, ils ressemblaient à des
chalets de montagne. Deux générations de baraquements se sont
en fait succédés: les premiers étaient entièrement en bois, les
planches étaient disjointes au point qu'il fallait bourrer les
fentes avec du papier pour
se
22.
23.
24.
25.
26.
"Quand le vent
balançait."
soufflait
à 1'extérieur,
l'abat-jour
Entretiens.
J. BOSSU à P. D0F0ÜKNET. Lettre du 22 mai 1945, A.D.80, 15 J3.
Compte-rendu de la mission confiée à P. HAURIN par Monsieur le Ministre. Année 1945. A.D. 80, 15 J3.
Conférence du 2 août 1946. A.D. 80, 15 J12.
Lettre du 26 octobre 1946. A.D. 80, 15 J12.
21
"C'était
pas
stable,
il
fallait
prendre
des
précautions.
Le moindre
mouvement brusque
sur
le
plancher et le vase du buffet
se retrouvait
par
terre
en morceaux."
Les seconds avaient une charpente en bois, mais des murs
de briques et un sol en ciment. Leur isolation laissait un peu
moins à désirer que celle des précédents, mais ils n'en étaient
pas pour autant plus confortables.
On s'en souvient bien au Bosquel; surtout lors du premier
hiver où il a fait si froid au point que même les gens qui
continuaient d'habiter des restants de maisons en torchis
rafistolées, avaient du mal à chauffer leur intérieur.
"Quand en hiver vous laissiez
une casserole
pleine
d'eau sur le poêle,
vous retrouviez
l'eau
gelée
le
lendemain."
Et pourtant, d'aucuns nous ont confié que ces anciennes
maisons de torchis n'étaient pas plus agréables à vivre que ces
nouvelles constructions.
"Par rapport
aux logements qu'il
années là, ces baraquements, c'était
y avait dans ces
presque du luxe."
Il n'était pas encore question de confort, mais plutôt
d'espace. Habitués à vivre quelque peu ramassés dans de petites
pièces, les bosquellois se trouvaient au large dans des maisons
certes standards, mais spacieuses: une pièce commune servait de
cuisine et salle à manger et deux grandes pièces servaient de
chambres.
De toute façon, il fallait bien s'en accommoder jusqu'à ce
que les nouvelles maisons soient habitables. Pour certains, il
fallut attendre plus de neuf ans.
2.3. L'occupation
Le
village
ayant
été complètement
sinistré, les
bosquellois eurent la chance dans leur malheur de n'avoir pas
un seul allemand durant la période de l'Occupation. Ce qui
n'empêchait pas ces derniers de faire de nombreuses manoeuvres
dans la commune.
"Ils venaient
au village,
prenaient
les maisons pour
des bunkers, s'installaient,
nous ordonnaient de ne pas
sortir et tiraient
à tirs réels d'un lieu à
l'autre."
22
N'avoir pas d'occupants dans l'enceinte du village ne
dispensait pas de subir leur présence même irrégulière.
"Parfois, ils
et les officiers
la nuit."
stationnaient
cherchaient
la nuit dans le village
des maisons pour y passer
Souvent, ils passaient pour réquisitionner les fermes du
peu de produits récoltés.
2.3.1. La vie au quotidien:
Durant la guerre, le Bosquel n'a toujours pas d'eau
courante. Les tonnes à eau et les citernes restent d'un usage
indispensable. On continue donc de laver la lessive après avoir
puisé l'eau dans les quelques petits puits existant
La mairie ayant touché une enveloppe de 30.000 francs
destinée aux nécessiteux, toutes les villageois étant concerné,
il est décidé que cet argent serait utilisé à creuser un puits
pour l'ensemble de la collectivité. Cela facilita la vie des
ménagères. Au lieu de remonter l'eau seau par seau à l'aide de
chaines,
l'usage
de
treuils
démultipliés
simplifia
considérablement les choses.
Les fêtes:
Pendant la guerre, il y avait des bals clandestins. Il
fallait faire très attention pour ne pas se faire prendre. Ils
avaient lieu dans des granges ou dans tout autre bâtiment
agricole, pourvu qu'il soit grand. Ils étaient organisés à
l'initiative
des
villageois,
soit
spontanément,
soit
consécutivement à un "concert pour les prisonniers". Ces
concerts là étaient permis, voire fortement incités par les
allemands. Ils avaient lieu en plein jour. Selon une vieille
tradition, les gens du village et des villages voisins jouaient
des saynètes et des sketches en picard. Ils improvisaient des
danses et des chansons et le bénéfice de ces manifestations
allait aux hommes du village faits prisonniers en Allemagne.
En attendant qu'un baraquement soit construit pour faire
office de mairie, le premier mariage célébré au Bosquel après
le sinistre se fit dans la buanderie d'une ancienne maison de
maitre. L'église ayant été bien endommagée, la messe eut lieu à
23
Rogy, village tout proche. Compte tenu des restrictions, le
banquet réunit la proche famille, soit une vingtaine de
personnes,
avec
ce
que
chacun
pouvait
récupérer
en
ravitaillement.
Quelques mois plus tard, les mariages étaient célébrés
dans deux baraquements; l'un servait de mairie, muni d'un
clocheton, l'autre servait d'église. La vie ayant repris son
cours, on pouvait déjà réunir un peu plus de monde.
L'école
Il semble que la guerre mit fin à la scolarité d'un
majorité de garçons et de filles en passe d'obtenir leur
certificat d'études. Si les plus jeunes continuaient d'être
envoyés en classe, ces presque-jeunes-adolescents partaient
travailler dans les fermes ou chez leurs parents. Souvent,
leurs familles avaient besoin d'eux pour ramener quelque
argent. Ils remplaçaient en quelque sorte leurs pères ou frères
faits prisonniers en Allemagne.
Pour les autres, l'école se poursuivit durant quelques
mois à Essertaux, un village situé à 1,5 km. Après quelques
semaines de battement, l'école reprit au Bosquel. Elle se
faisait dans un baraquement. C'était une classe unique allant
du cours préparatoire au certificat d'études.
"On avait un seul livre.
Nous avons toujours
appris
le
début,
et
jamais
la fin!
Chaque
instituteur
reprenait
au
départ..."
En effet, considérant les conditions difficiles de
l'enseignement dans un tel contexte, les enfants scolarisés au
village ont vu défiler jusqu'à quinze instituteurs différents
jusqu'en 1947.
24
3. L'Etat face à la Reconstruction
Beaucoup d'encre a coulé à propos des deux premières
guerres mondiales (1914-1918 et 1939-1944), à propos de leurs
morts, à propos de leurs conséquences sur l'économie du pays
notamment. En ce qui concerne l'agriculture,- on a aussi
beaucoup parlé de la modernisation. On s'est largement attardé
sur les opportunités qu'il y avait alors à dynamiser les
activités par l'introduction de nouvelles machines, la
généralisation de l'électricité, l'apparition de techniques
agricoles plus performantes... S'il a fallu redressé une
économie effondrée, s'il a fallu reconstruire le réseau
routier, reconsolider une industrie à la dérive, l'agriculture
a été grandement sollicitée. Malgré le trop grand nombre
d'absents, malgré les pertes considérables des cheptels de
toutes sortes, malgré les réquisitions ou les restrictions,
c'est l'agriculture qui doit servir au redressement du pays.
"La France redeviendra
cesser d'être,
une nation
ce qu'elle
n'aurait
jamais dû
essentiellement
agricole". (27)
disait PETAIN. Le développement économique préconisé doit
reposer sur l'agriculture, mais une agriculture revivifiée,
modernisée.
Un agrarien aussi convaincu que Marcel BRAIBANT ne
constatait-il d'ailleurs pas que
"les conditions
matérielles
des paysanneries
qui ont
opté
pour le
progrés
( ... J attestent
qu'on
peut
associer
le
travail
de la
terre
avec
l'hygiène,
l'aisance,
le confort et l'élégance
dans
l'habitation,
le vêtement et tout le comportement de l'existence"?
(28)
Il fallait mettre en valeur les potentialités sousexploitées d'un monde quelque peu méprisé pour impulser
l'émergence d'un nouveau secteur économique.
C'est donc dans l'esprit du "retour/maintien
à la
terre"
et d'une agriculture moderne, productiviste et compétitive,
intégrée au système économique que la reconstruction de la
27. Cité par H.BMIBANT in: "L'Europe espace vital de l'agriculture française", Conférences du groupe
Collaboration, Paris, septembre 1941, p.5.
28. H. BBÀIBAHT, La France paysanne et l'Europe, Sorlot, 1941, p. 61.
2
France et de ses campagnes doit se faire (29). Progrès est un
maître-mot. Le développement technique et économique ne peut
que s'accompagner d'un développement social.
Les femmes prennent les choses en mains.
3.1.
Reconstruire
Pour un architecte, une ville dévastée par la guerre,
c'est un peu comme un assemblage de légos qui se serait
accidentellement écroulé. C'est un terrain vierge à partir
duquel on peut repenser une vie nouvelle. C'est surtout
l'occasion de réaliser des projets à grande échelle qui, en
temps normal, par
faute d'espace
ou
faute d'argent,
n'aboutissent jamais autrement que tronqués.
L'après-guerre, c'est l'occasion de concevoir un village
dans son intégralité ou presque: restructuration foncière,
aménagement du réseau de communication, répartition des
commerces et services, architectures intérieure et extérieure
des habitations... Il ne s'agit plus d'un projet de vie, mais
d'un projet d'urbanisme, projet social par excellence. Alors
que la maison s'adresse à un ménage, l'immeuble à un ensemble
de ménages, la ville ou le village concernent quant à eux des
familles mais aussi et surtout les lieux autour desquels ou
dans lesquels elles évoluent, les espaces de sociabilité où
elles se réunissent, les centres économiques où elles peuvent
produire, consommer...
3.2.
L'esprit de la reconstruction avant la seconde guerre
mondiale (30)
La guerre de 1914 sera l'occasion pour les pouvoirs
publics d'adopter une politique d'intervention directe dans la
planification urbaine. Le Ministère du Blocus et des Régions
Libérées est créé le 16 septembre 1917. On lui confie la
direction des opérations de remembrement, de reconstruction des
zones sinistrées par faits de guerre et de confection des plans
d'alignement. Il a pour fonction de contrôler l'établissement
des plans d'aménagement des agglomérations concernées.
29. H. GERVAIS, H. JOLLIVET, Y. TAVERNIER. Histoire de la France rurale. Toie 4. "La fin de la France
paysanne", Paris, Seuil, 1976, pp. 92-191.
30. R.-À. C00EDEL0. Aménagement et urbanisme. L'insertion des pouvoirs publics 1919-1950, in:
Reconstructions et modernisation. La France après les ruines. 1918... 1945..., Paris, Archives
Nationales, 1991, pp. 211-223.
26
Cependant, la confection des plans, tout comme l'exécution
des travaux, ayant été laissées à la charge des communes, 10 %
d'entre elles tout au plus conduiront leur projet à terme. De
manière générale on entreprend peu ou pas de restructuration
parcellaire, de nouveaux bâtiments naissent à l'emplacement
presque exact des précédents, sans souci d'esthétique, de
fonctionnalité, de respect de l'environnement-, voire sans
amélioration notable par rapport à leur conception antérieure.
Votée le 14 mars 1919 pour obliger les municipalités de
plus de 10.000 habitants à déposer un "Plan d'Aménagement,
d'Embellissement et d'Extension", à de rares exceptions près
(Reims, Lens...), la Loi Cornudet est en fait restée quasiment
lettre morte en matière de planification urbaine. L'aprèspremière-guerre ne sera pas très enrichissant sur le plan de
l'urbanisme, encore moins sur le plan des innovations en
matière d'aménagement.
Cependant, mus par le souci de faire s'épanouir un
urbanisme progressiste, les CIAM (Centres Internationaux
d'Architecture Moderne dont le correspondant pour le France est
LE
CORBUSIER) vont
soutenir
les
premières
tentatives
d'aménagement régional: désormais, il n'est plus possible de
concevoir la naissance ou le développement d'une agglomération
aussi petite soit-elle, sans l'inclure dans un tissu socioéconomique à une échelle plus vaste.
Le décret-loi du 25 juillet 1935 va donc autoriser la
création de projets régionaux d'urbanisme, mais, faute d'un
suivi centralisé, faute d'une législation adéquate, faute même
d'une réalisation systématique des travaux engagés, leur
concrétisation restera très discrète. Il faudra attendre la
défaite de juin 1940.
3.3. L'Etat français face aux destructions du fait de la guerre
de 1939-1940:
En France, près de 350 agglomérations rurales ont été
partiellement détruites au cours de la guerre de 1939-1940.
C'est la loi du 12 juillet 1941 qui décide de la reconstruction
des
immeubles
d'habitation
partiellement
ou
totalement
détruits. Toutes les opérations sont placées sous contrôle du
Commissariat à la Reconstruction Immobilière (C.R.I) et du
Secrétariat Général à l'Agriculture.
Aidées par une participation financière de l'Etat, les
communes peuvent alors s'engager à réaliser des plans
d'aménagement incluant "toutes
les
utilités
et
commodités
27
sanitaires,
économiques et esthétiques
correspondant à la vie
/
rurale rationnelle
et à 1 exercice
moderne de la
profession
agricole" (31).
De passage en Picardie en mars 1945, Raoul DAUTRY rappelle
que la politique de reconstruction doit s ' i n s c r i r e dans la
politique générale du gouvernement (32). Le maître-mot du
moment étant "produire", la reconstruction ne doit pas
concerner seulement bâtiments e t maisons d'habitation, e l l e
s'adresse aussi et surtout à l ' a g r i c u l t u r e .
"C'est la nation qui doit organiser la
reconstruction
et non des intérêts particuliers
(...).
La grande règle
est de produire." (33)
Si les plans d'aménagement sont confiés à des architectesurbanistes, les dossiers de reconstruction proprement d i t s sont
élaborés par des architectes agréés par le C.R.I. Elaborées
conjointement
avec
les
agriculteurs
sinistrés,
leurs
propositions doivent s ' i n s p i r e r autant que possible des
indications
fournies
par
les
diverses
administrations
concernées (34).
Toutefois, avant que la reconstruction générale des lieux
s i n i s t r é s ne s o i t systématiquement entreprise,
e t sur
proposition de Paul DUFOURNET, alors architecte urbaniste, i l
s ' e s t avéré intéressant de procéder le plus t ô t possible à la
reconstruction d'un village type "pouvant donner un exemple des
dispositions
de construction et d'aménagement qui conviennent
le mieux aux constructions
rurales
et gui pourront
être
reproduites dans les diverses régions agricoles compte tenu des
adaptations locales (35). Considéré comme "champ d'expérience"
de toutes les a c t i v i t é s qui concourent à l'aménagement r u r a l ,
ce "prototype" doit être reconstruit avant tous les autres
villages.
31. Lettre de Hr. VIGNEROT, Inspecteur Général Hon. du Génie Rural à Hr. Le Directeur des Eaux du Génie
Rural. 28 nov. 1941. A. D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
32. Le Courrier Picard, 12 mars 1945.
33. Le courrier Picard, 12 mars 1945.
34.
Instructions techniques sommaires relatives au logement de l'exploitant et de l'ouvrier
agricole. Paris, Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme, Ministère de l'Agriculture, Imp.
Nationale, 1946.
Instructions techniques sommaires relatives à la construction et à l'aménagement des écuries,
étables, porcheries. Paris, Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme, Ministère de l'Agriculture,
Imp. Nationale, 1945.
Exploitations agricoles. Directives générales pour la composition des plans d'ensemble. Paris,
Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme, Ministère de l'Agriculture, Imp. Nationale, 1947.
35. Lettre du 28 nov. 1941, op. c i t .
28
Aussi, du
fait qu'il
présentait un
ensemble de
circonstances tout-à-fait favorables (village agricole, facile
d'accès, presque intégralement sinistré, aux habitants ouverts
aux idées nouvelles, aux cultivateurs acquis aux progrès...)
c'est sur le village du Bosquel en Picardie que le choix s'est
porté. "Village
d'essai",
il doit servir de "guide
et
de
synthèse
à la reconstruction
rurale
en Picardie"
{36).
Il doit servir d'exemple non seulement pour les techniques
et procédés de construction utilisés, mais aussi pour les
innovations apportées tant du point de vue du remembrement que
du point de vue de l'exploitation ou du point de vue de
l'habitat et du nouveau mode de vie.
En outre, l'expérience menée au Bosquel doit permettre
d'éprouver le bien-fondé de l'appareil législatif et contribuer
à la mise au point des dispositions administratives.
On doit y expérimenter notamment les principes posés par
la loi du 9 mars 1941. Cette loi comme nous le verrons plus
loin préconise en effet un remembrement conjoint de la
propriété bâtie et du terroir.
36. Idem.
29
"Le Bosquel est un village de 244 habitants,
situé à 20 km
/
au Sud d Amiens,
sur la R.N 320 de Moreuil à Dieppe.
L'agglomération
s'est construite
sur une eminence; le
site
en est fort agréable mais assez étroit.
La population
qui
était d'environ
300 habitants
en 1792, est montée
jusqu'à
800 habitants
vers 1840, par suite
du développement
du
tissage à domicile,
pour revenir maintenant au chiffre
de
la fin du XVIIIème siècle,
après abandon total de
cette
forme de l'artisanat
rural. La fonction actuelle
du village
est
exclusivement
agricole.
La superficie
du
terroir
(environ
1000 hectares)
est entièrement
cultivée.
On y
pratique la culture intensive
des céréales.
La
population
se répartit
de la façon suivante:
16 cultivateurs,
4
ménagers, 25 à 30 ouvriers
agricoles,
quelques
artisans,
fonctionnaires
ou rentiers.
Cette
population
est
très
évoluée et capable de progrès".
Paul DUFOURNET, "Rapport relatif à la construction de la
première ferme du Bosquel", si, nd (1945?). A. D. 80, Fonds
P. DUFOURNET.
30
4. Le projet d'aménagement du Bosguel:
C'est en début d'année 1941 (37) que Paul DUFOURNET est
désigné par le Commissariat Technique à la Reconstruction
Immobilière (C.R.I) pour l'établissement du Plan d'Aménagement
et de Reconstruction du Bosquel. Passionné par les questions
d'habitat rural d'un point de vue ethnographique, très
intéressé par la géographie humaine et l'art populaire, il
avait déjà réuni un nombre considérable de documents sur les
villages picards en vue d'une thèse de l'Institut d'Urbanisme.
Ayant préalablement rédigé un dossier fort détaillé sur
l'opportunité de reconstruire le Bosquel, c'est par un courrier
du 22 février 1941 qu'il soumet au C.R.I l'idée de faire de ce
village un "village
modèle"
(38) qui correspondrait aux
préoccupations sociales du principe du maintien à la terre. A
la même date, il rédige un rapport dans lequel il explique
l'intérêt qu'il y aurait à faire un remembrement total et
combiné de l'agglomération et du terroir, préalablement à
l'aménagement du village.
Le 28 novembre, un courrier de l'inspecteur général
honoraire du Génie Rural destiné au directeur départemental du
Génie Rural en confirme l'intérêt:
"Il est apparu qu'il
serait
intéressant
de
réaliser
dès maintenant
la reconstruction
d'un village
type
pouvant
donner
un exemple
des
dispositions
de
construction
et d'aménagement qui conviennent
le mieux
aux constructions
rurales
et
qui
pourront
être
reproduites
dans les diverses régions agricoles
compte
tenu des adaptations
locales.
Le choix s'est
fixé
sur
Le Bosquel, où les circonstances
les plus favorables
se
présentent
pour atteindre
le but proposé.
(... ) Le choix du Bosquel comme village
prototype
de
la
reconstruction
rurale
en
Picardie
entraine
nécessairement
sa reconstruction
avant celle des autres
villages;
il peut être le champ d'expériences
de toutes
les activités
qui concourent à l'aménagement rural,
ce
qui
nécessitera
la
collaboration
des
différents
organismes et particulièrement
celui du Génie Rural."
(39)
37. Commissariat à la Reconstruction Immobilière. Lettre du 20 février 1941. A.N. AFU 10788.
38. "Projet d'aménagement du Bosquel. A. D. 80, Fonds P. DUFOURNET, 22 fév. 1941.
39. H. VIGNEROT à R. LACOURLIE. Lettre du 28 novembre 1941. A. D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
31
Si l ' a v a n t - p r o j e t d'aménagement du v i l l a g e e s t f o r t bien
a c c u e i l l i dès l ' o r i g i n e par l e Ministère chargé de l a
Reconstruction (40), plus t a r d , l a r é a c t i o n du Ministère de
l ' A g r i c u l t u r e sera assez partagée puisque dans une dépêche de
1942, i l e s t d i t que Paul DUFOURNET bouleverse délibéremment
l'économie s é c u l a i r e de l a ferme picarde e t q u ' i l s ' a g i t de
v é r i f i e r l a conception q u ' i l s ' e n e s t faite- (41). Cette
conception r é s u l t a n t de l'aboutissement de "plusieurs
années
d'études faites avant la guerre en vue d'une thèse à
l'Institut
d'Urbanisme sur la formation
des villages
et de
l'habitat
rural",
c e l u i - c i se défend bien de bouleverser quoi que ce
s o i t , s i ce n ' e s t d'impulser ou d ' a c c é l é r e r une évolution de
t o u t e façon i n é l u c t a b l e .
Il faut accepter ce qui est inévitable,
mais il vaut
mieux s'en emparer et tâcher de donner au mouvement le
sens qui lui convient."
(42)
Au cours de l'année
1943, l e Commissariat à la
Reconstruction Immobilière recommande dans un premier temps à
Paul DUFOURNET de se conformer à des modèles t y p e s , puis dans
un deuxième temps, de
"couler le Bosquel dans le moule d'Orléans" car "il
s'agit principalement
d'une étude dont le véritable
but
est le calcul du coût normal de reconstruction"
(43).
Le Bosquel devient donc non seulement un prototype en
matière de r e c o n s t r u c t i o n , mais a u s s i un champ d'expérience
pour évaluer l e s dépenses à envisager pour r e c o n s t r u i r e la
France.
La mission de Paul DUFOURNET en t a n t q u ' A r c h i t e c t e en chef
doit s'exercer
à l ' o c c a s i o n du remembrement e t de la
r e c o n s t r u c t i o n proprement d i t e . Une c i r c u l a i r e en d é f i n i t
précisément
l e s grandes l i g n e s
(44). La Reconstruction
v é r i t a b l e ne pouvant commencer qu'en 1946, c ' e s t donc en 1945
que l e s plans d'aménagement doivent ê t r e é t a b l i s e t que tous
40. Coiité National de la Reconstruction. Avis de la section d'urbanisme sur le plan d'aménagement du
Bosquel. 20 septembre 1941. A.N. AFU 10788.
41.
P. DUFOURNET, Rapport d'enquête sur le Bosquel pour le délégué régional à la Reconstruction
Immobilière du 15 juillet 1942. A.D. 80, 15 J3.
Ministère de l'Agriculture. Direction des Eaux et du Génie Rural. Lettre du 26 décembre 1941.
A.N. AFÜ 10788.
42. P. DUFOURNET. Techniques et Architecture, 1943, p. 323.
43. Lettre du 31 mars 1943. A.D. 80, 15 J12.
44. Commissariat à la Reconstruction. Circulaire A.S n' 12. "Memento de l'architecte en chef d'ilôts".
Ministère de la Production Industrielle et des Communications. A. D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
32
les
problèmes
de
mises
hors
d'eau,
de
déblaiement,
d'implantation
des constructions provisoires, voire des
quelques constructions définitives doivent être résolus (45).
4.1. Un schéma de village théorique?
Le
caractère
excessivement
morcelle .de
l'ancien
parcellaire ayant largement déterminé la composition et la
structure du village tel qu'on pouvait l'observer avant la
guerre, un remembrement combiné à un nouveau mode de culture
devait pouvoir faciliter une restructuration foncière et, par
conséquent, une disposition plus aérée des fermes et des
habitations entre elles au sein du village. De ce constat,
intégrant et les potentialités de l'évolution de l'économie
agraire, et celles de la composition du village et des
bâtiments, Paul DUFOURNET conçut un projet de nouveau village.
C'est ainsi que, de manière idéale, le nouveau Bosquel
doit se décomposer en trois zones: la zone intérieure du
périmètre d'agglomération, la zone d'établissements agricoles
placée en couronne, la zone dite de "grande culture", rejetée
en périphérie et qui comprend tout le reste du territoire
communal.
Le principe ayant présidé à l'établissement de ce projet
est de sortir hors du village proprement dit la plus grande
partie des cultivateurs pour les installer dans ce qui serait
la seconde zone. Grâce au remembrement intégral, un tel
découpage du territoire communal permet de disposer chaque
exploitation à proximité directe des terres mises en valeur.
L'objectif est de déconcentrer le village et de constituer des
domaines d'un seul tenant sur lesquels se trouvent le corps de
ferme et les bâtiments d'exploitation.
Ne pas toucher au village aurait rendu caduque l'idée même
de la réorganisation foncière. La nouvelle redistribution du
territoire s'entend donc comme une sorte de découpage de la
commune en secteurs à angles variables, selon l'importance de
l'exploitation correspondante. Chaque secteur comprend toutes
les terres remembrées d'un seul et même exploitant.
De manière tout-à-fait schématique, le territoire de la
commune peut être stylisé sous la forme d'une roue. L'espace
situé au pourtour de l'axe de cette roue réunirait l'ensemble
des établissements publics (école, mairie, église, salle des
45. Ministère de la Reconstruction et de l'Orbanisie. Hôte générale aux délégués départementaux. Paris,
1er février 1945. A. D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
33
fêtes, cafés, commerces). Autour de ce centre, on trouverait
les exploitations agricoles, régulièrement réparties. L'espace
entre deux rayons correspondrait à un domaine d'exploitation.
4.1.1. La zone d'agglomération urbaine:
C'est le coeur du village. Elle accueille toutes les
activités non agricoles. Elle centralise la vie administrative
et socio-économique. On y trouve les bâtiments publics:
l'église, l'école et la mairie. Sur le plan, on projette d'y
créer un foyer social comprenant une salle de spectacle et un
musée du terroir. On y trouve aussi les boutiques des
commerçants et celles des artisans. C'est le village proprement
dit, avec son centre résidentiel, commercial, culturel et
administratif.
4.1.2. La zone d'établissements agricoles:
Cette
zone
est
réservée
aux
seuls cultivateursexploitants. Ils sont installés en périphérie de la première
zone. Leurs corps de ferme sont disposés à proximité de celleci afin qu'il n'y ait aucune exploitation isolée, afin qu'ils
puissent également bénéficier des services publics (eau,
électricité, téléphone). Leur emplacement doit tenir compte de
l'orientation des vents, mais le chef d'exploitation doit
pouvoir surveiller ses terres et son bétail directement de son
pas de porte. C'est ainsi que les étables s'ouvrent sur les
pâturages, sans qu'il y ait besoin de conduire les troupeaux
d'un bout à l'autre du pays comme auparavant.
4.1.3. La zone de grande culture:
Résultat du remembrement, cette zone se présente comme un
ensemble de secteurs culturaux, idéalement d'un seul tenant,
d'angle
variable
suivant l'importance
du domaine. Ils
communiquent
de
manière
continue
avec
les
bâtiments
d'exploitation situés à l'arrière de la maison d'habitation. La
surveillance des exploitations est ainsi facilitée, les
déplacements réduits et le fonds valorisé.
De
telles
transformations
doivent
bien
entendu
s'accompagner d'un nouveau tracé des routes et chemins
desservant le village. C'est d'ailleurs avec le souci d'éviter
des dépenses en canalisations, en electrification, en
aménagement de voierie nouvelle.... que les sièges des
34
exploitations sont tous situés à proximité immédiate du centre
du village. Aussi est-il convenu que les agriculteurs désireux
de s'installer dans la zone dite de "grande culture" auront à
leur charge les frais incombant au prolongement des services
publics jusque chez eux.
L'idée est bien de concevoir un nouveau village, non de le
dénaturer. Il s'agit d'un projet d'aménagement qui doit
(re)concilier la vie administrative, religieuse, commerciale,
artisanale, résidentielle et agricole du village. Ce nouveau
village doit respirer une certaine harmonie.
"Le pays doit
identité."
(46)
changer
de
vintage
sans
perdre
son
4.2. Une nouvelle conception de ferme
"Le souci
a été
de donner
au cultivateur
un
instrument
précis
et commode dont le
fonctionnement
soit impeccable,
et de bien l'implanter
dans le
site,
compte tenu des orientations,
du vent régnant,
de la
vue et des déclivités.
Une recherche d'esthétique
est
venue compléter les formes dégagées." (47)
Il ne s'agit plus de se contenter de reproduire le modèle
picard traditionnel. Au contraire, il vaut mieux éviter de
faire de 1"archéologie
provinciale".
"Les oeuvres du passé doivent
rester
ce
qu'elles
sont, il faut les respecter,
les admirer, les choyer et
en tirer
toutes leçons utiles,
mais n'en jamais
être
les esclaves et surtout les copistes."
(48)
"Du régionalisme
certes! et de tout coeur, mais conçu
comme une réalité
vivante
et non pas comme un
formalisme désuet." (49)
Il faut "faire
humanisé".
un outil
adapté
au temps présent,
"Quant aux autres fossiles
de l'art
de
(... ) ils sont destinés
à disparaître
à plus
longue échéance." (50)
mais
construire
ou moins
46. Le Moniteur des Communes de France, 1 mai 1944.
47. P. DÜFOUENET, Projet de reconstruction du Bosquel. Kapport relatif à la construction de la première
ferme, Ministère de la Reconstruction et de l'urbanisme, sd, A. D. 80, Fonds P. DUFOOîNET.
48. Ministère de la Eeconstruction et de l'Urbanisie. Compte-rendu de la réunion des architectes
d'encadrement du 8 octobre 1948. À. D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
49. X. AUZELLE, P. DoFOOïïET, "Note présentant la pensée des auteurs sur la reconstruction rurale", si,
nd, A. D. 80, 15 J3.
50. P. D0F00KHET. Techniques et Architecture, 1943, p. 323.
35
Le plan de la première ferme est de ce point de vue tout a
fait novateur. L'habitation est spacieuse, située loin de
l'espace de travail proprement dit. Elle est cependant tournée
vers les bâtiments d'exploitation installés de part et d'autre
de la cour. La vue sur la route et sur les champs est laissée
libre.
D'autre part,
"La maison
d'habitation
rurale
doit
répondre
aux
exigences
du milieu
et comporter
un équipement
moderne
comparable à celui des logements
urbains (...)."
(51)
L'intérieur de l'habitation de l'agriculteur est ainsi
conforme aux normes d'hygiène et de confort que l'on est en
droit de trouver, à l'époque, dans l'intérieur du citadin.
Les recommandations du Ministère ne laissent aucun doute:
"Il convient
d'éviter
à la fois
un luxe superflu
et
une
économie
mal
comprise,
en
édifiant
des
constructions
judicieusement
conçues
et
d'un
usage
pratique,
qui répondent
exactement
au rôle
qu'elles
doivent
remplir
dans une exploitation
moderne
bien
conduite."
(52)
Il conviendra également de respecter l'organisation prévue
par le Ministère afin d'éviter une certaine anarchie esthétique
et une éventuelle prolifération du mauvais goût. Les talents de
chacun des architectes, tout comme ceux des représentants des
autres métiers contribuant à la reconstruction, doivent être
mis en valeur afin d'atteindre une certaine unité et "éviter
la
laideur".
(53)
Un grand bâtiment multifonctionnel (grenier à grains,
étable à vaches, porcherie, cave à betteraves, mélangerie,
chambre de domestique) fait face à un "gerbier" qui doit
accueillir les pailles. A côté, on trouve un second grand
bâtiment qui abrite des dépendances (poulailler, garage,
douche, remise à outils, clapiers...).
Les cours fermées dans lesquelles on trouvait le tas de
fumier sont désormais proscrites. Les étables ne sont plus
51. Garin et Gorin, Echange (4), sd (février 1945 ou 1946), p. 48.
52. Ministère de l'Agriculture. Modèles types de constructions agricoles. Paris, La construction moderne,
sd, À. D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
53. Ministère de la Reconstruction et de l'ürbanisie. Note générale aux délégués départementaux. Paris,
15 janvier 1946. A. D. 80, Fonds P. DÜFOUKNET.
36
contigües à la maison d'habitation. Les maisons ne sont plus
accolées les unes aux autres. Elles ne tournent plus le dos à
la rue. Le nouveau village est aéré.
"La ferme doit pouvoir se surveiller
et se commander
comme un atelier
industriel
ou un vaisseau.
Elle
doit
posséder
un poste de commande qui permette
un
contrôle
rigoureux
et rationnel."
(54)
Ainsi,
"Le droit
1/injustice
(55)
à la crasse,
à la maladie,
à la laideur
et à
sociale
est de plus
en plus
restreint."
Les reconstructeurs se sont orientés vers les fermes de
type familial.
"La ferme de 1/époque machiniste
doit être
L'architecte
doit trouver
une organisation
du plan."
(56)
une
usine.
rationnelle
Une organisation rationnelle du plan signifie une
organisation rationnelle des méthodes de travail. L'idée est de
regrouper les fonctions en un seul et même bâtiment afin de
limiter les pertes de temps et d'énergie, faciliter la
surveillance et les transports des productions. Dans ce nouveau
bâtiment (appelé "mono-bloc"
d'exploitation lorsque le logis
est dans le même bâtiment que les locaux d'exploitation), les
fonctions se réalisent de haut en bas, en utilisant les forces
de gravité comme forces de manutention. Afin de maximiser les
conditions de travail, on ajoute un nombre suffisant de monorails et d'appareils élévateurs.
Le rez-de-chaussée ouvre directement sur les pâtures. Il
abrite la vacherie, l'écurie, la bergerie, les magasins à
grains et engrais, la mélangerie.... Une trappe donne accès au
sous-sol qui abrite les caves à betteraves
ou à pommes de
terre. A l'étage on trouve les fenils et le gerbier.
Le bâtiment annexe se situe à quelques mètres. De manière
contiguë, on peut y avoir installé une laverie, une buanderie,
une laiterie, une chambre pour les domestiques ou des
sanitaires pour les employés. On peut y trouver aussi un hangar
54. J. BOSSU, Techniques et architecture (34), 1946, p. 137.
55. P. D'ESPEZEL, Beaux Arts, 5 Dai 1944.
56. J. BOSSU, "Le Bosquel, prototype du village français", Bâtir la France, 5 déc. 1946.
38
considérable pour se rendre de l'une à l'autre. L'exiguïté de
certains lots de terre est parfois telle qu'elle exclut
totalement une éventuelle mécanisation, aussi rudimentaire
soit-elle. Le morcellement des exploitations n'est guère
favorable à une gestion efficace et engendre une étroite
promiscuité parfois gênante (passage fréquent des chevaux
attelés et des troupeaux dans les rues du village par exemple).
Aussi, un regroupement parcellaire accompagné d'une disposition
plus rapprochée des bâtiments d'exploitation ne pouvait que
satisfaire le souci d'efficacité, de netteté et de propreté
recherché.
D'autre part, l'objectif de faire des exploitations
agricoles des unités économiques à part entière et d'un seul
tenant devait favoriser la réduction en nombre des multiples
chemins de terre qui desservaient chacun des lots, d'où à
nouveau un gain de temps, mais aussi un gain d'espace.
Le Ministère de la Reconstruction avait prévu que les
architectes reconstruisent non seulement les fermes selon les
modèles suggérés, mais il fallait faire de même avec les
maisons des artisans, celles des ouvriers^agricoles et celles
des petits exploitants agricoles. Il y avait "intérêt
à les
maintenir pour fixer la main d'oeuvre au pays".
4.4. L'esprit du projet de reconstruction:
Pierre CAZIOT
(61), agronome
réputé, Ministre
l'Agriculture sous le gouvernement de Vichy, fut à l'origine
la doctrine relative à la réorganisation foncière et
l'urbanisme. Père de la loi du 9 mars 1941 sur
réorganisation de la propriété foncière et le remembrement,
soutenait l'idée que
"Les français,
tous les français
logés, plus propres, mieux portants,
doivent
mieux
de
de
à
la
il
être mieux
entraînés."
(62)
C'est ainsi qu'un principe essentiel de la reconstruction
reposait sur le fait de:
"Reconstruire
un village
en assurant à chaque
famille
les
conditions
d'un
travail
plus
facile
et
plus
rémunérateur par la recherche d'une nouvelle
structure
agraire et une vie physique et morale meilleure,
par un
61. H. CAZIOT, La terre à la famille paysanne, Paris, Payot, 1919.
62. P. D'ESPEZEL, "Les architecte spréparent la France de demain", Toute la vie, 25 novembre 1943.
39
logis
digne,
gai
présent."
(63)
et
bien
adapté
aux
conditions
du
La c o n s t i t u t i o n de "domaines familiaux" a p p a r a i s s a i t comme
l ' o b j e c t i f à a t t e i n d r e . Disposés en r e t r a i t du coeur du
v i l l a g e , d'un seul t e n a n t , i l s o f f r a i e n t également l ' a v a n t a g e
d'une v é r i t a b l e indépendance v i s à v i s d e s . e x p l o i t a t i o n s
a v o i s i n a n t e s . Chaque a g r i c u l t e u r pouvait enfin vaquer à ses
a c t i v i t é s sans a t t e n d r e que son v o i s i n s o i t p r ê t pour t r a v e r s e r
ses p a r c e l l e s pour a r r i v e r jusqu'à son propre champ.
"Ce domaine plein (...)
attache
la terre et assure la continuité
s'identifiant
à elle."
(64)
davantage l'homme à
de la famille
en
La notion d ' e x p l o i t a t i o n a g r i c o l e f a m i l i a l e d o i t pouvoir
prendre t o u t son s e n s . C ' e s t sur e l l e que repose l e nouveau
redéploiement économique de l a France (65). Le développement de
l a famille paysanne, des c u l t u r e s plus a i s é e s doivent rendre la
profession a g r i c o l e plus rémunératrice. I l faut
"(...)
famille
amorcer la réforme en constituant
rurale."
(66)
fortement
la
De même, on peut p r o f i t e r du f a i t que l a guerre n ' a r i e n
l a i s s é pour ne plus s'embarrasser du passé, des t r a d i t i o n s , des
h a b i t u d e s . I l faut impulser un nouveau mode de v i e , un nouveau
mode de pensée en matière a g r i c o l e .
Ne pas
craindre
d'anticiper.
"Je suis celui qui conçoit ce que vous désirez
exactement que vous-mêmes. Je me tromperai parfois,
verra quelques ruines mais..."
(67)
plus
on
Les conditions sont réunies pour que l e nouveau v i l l a g e
p a r t i c i p e à une oeuvre de plus grande envergure, c e l l e de f a i r e
évoluer l e monde a g r i c o l e pour q u ' i l devienne l e support du
progrès économique de l a France. Ainsi, des méthodes de
63. P. DÜFOÜRNET, "Le Bosquel", note Manuscrite, s i , nd, A.D.80, 15 J3.
64. Le noniteur des Communes de France, 1 mai 1944.
65. Ne l'oublions pas, la politique foncière agricole de l'époque, puis celle des lois d'orientation
1960-1962 jusqu'à nos jours a été "un moyen efficace de restructuration sociale (...) un instrument
contrôle de la concentration des terres libérées par l'exode agricole". P. COULOMB, "Des droits contre
droit: la politique foncière agricole et la propriété", in: H. RENDRAS (dir.), L'agriculture dans
monde rural de demain: à nouveaux enjeux, droit nouveau, Paris, E.N.H, 1986, pp. 61-72.
66. P. DÜFOÜRNET cité in: La Maison Rurale, 1 mai 1944.
67. P. VALERY dans Eupalinos, cité par Paul DUFOURNET.
de
de
le
le
40
culture, des techniques, de ce qu'on appelle communément
tradition ou routine, il faut pouvoir condamner ce qui peut
être préjudiciable à l'évolution souhaitée et conserver ce qui
peut y contribuer.
"Il ne faut pas
routine
séculaire,
enracinées."
(68)
craindre
de briser
un cadre de
des
habitudes
périmées
mais
On doit toutefois "éviter
de heurter
l'esprit
des
cultivateurs".
De toute façon, "le paysan ne se fie qu'à ce
qu'il voit et ce que lui enseigne son expérience"
(69). Il faut
donc s'assurer que les installations sont suffisamment
conformes à ses points de vue pour qu'il n'en fasse pas un
usage qui serait différent de celui que l'architecte aurait
prévu (70).
L'objectif est de contribuer à l'émergence d'unités
économiques, modernes, tout en respectant les savoir-faire des
villageois. Il suffit de donner l'exemple pour que les autres
villages suivent et qu'ils aient le sentiment que le mouvement
qui les porte est naturel. Entre "ancien" et "moderne", il faut
être résolument moderne sans nier pour autant les apports du
passé.
"On ne pouvait tout simplement pas reconstruire
du
vieux.
Les techniques
d'architecture
avaient
évolué,
les matériaux avaient changé, les fermes n'étaient même
plus
adaptées
aux nouveaux
besoins
du
travail
agricole."
(71)
Cependant, considérant l e contexte économique de l'époque,
i l ne semblait guère envisageable
"(...)
de reconstruire
tout très bien. Qu'au moins
(... ) quelques points soient particulièrement
soignés
pour montrer (ce qui) aurait pu être fait partout
(s'il
y) avait eu les moyens." (72)
Le Ministère de l a Reconstruction e t de l'Urbanisme a l l a i t
f a i r e du v i l l a g e du Bosquel un v i l l a g e d'exemple:
"Exemple des techniques
applicables
à la vie et au
travail
à la campagne; exemple
des procédés
de
68. Le noniteur des Comunes de France, 1 mai 1944.
69. P. DOFOORHET au Comiissaire technique à la Reconstruction I n i o b i l i è r e . Lettre du 22 février 1941. A.
D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
70. Conférence du Bosquel du 8 oct. 1945, A.D. 80, 15 J 3 .
71. P. DUFOURNET, Entretiens. •
72. P. DUFOURNET. Kote tapuscrite sur l e Bosquel, s i , nd. A.D. 80, 15 J 3 .
construction
et dans les
qui peuvent être employés dans ce
conjonctures
présentes."
(73)
milieu
Cela permet en outre de roder l'arsenal juridique et les
rouages de l'administration.
On allait bientôt parler de la parité entre agriculture et
industrie. La reconstruction se situait parfaitement dans ce
contexte: trouver une sorte d'équilibre entre la ville et la
campagne, revaloriser le monde agricole.
4.4.1. Reconstruire oui, mais quel type de village?
La guerre avait en quelque sorte fait table rase du
Bosquel. Il ne restait plus que des ruines. Reconstruire
pouvait signifier une reconstruction à l'identique, copie
conforme du village disparu. Mais reconstruire pouvait
également s'entendre comme un acte de création, la naissance
d'un nouveau village, d'un nouveau type d'agriculture.
"Ce n'est
pas de formes-types
locales
plus ou moins
idéales
qu'ilconvient
de partir,
mais de volume
d'exploitation,
de
superficie
cultivable,
de
spéculations
agricoles,
de commodités
d'exploitation,
de machinisme". (74)
Le choix de créer du neuf était une hypothèque sur
l'avenir. Dans une note sur le reconstruction du Bosquel (75),
Paul
DUFOURNET
pose
le problème
en ces termes: la
reconstruction est une occasion exceptionnelle. Des décombres
du Bosquel doit naître un village moderne.
Un village
modèle?
type, un village prototype
ou un village
Les journaux ont tendance à beaucoup modifier les
informations qu'ils reçoivent au profit du sensationnel.
Cependant, il est rare qu'ils inventent vraiment leurs propos.
Aussi, le fait que dans les textes, d'un village prototype on
soit rapidement passé à un village type puis à un village
modèle n'est peut être pas innocent, ou de leur seule
responsabilité.
73. P. D0FOÜÜNET, "Rapport relatif à la construction de la première ferae du Bosquel", si, nd. A. D. 80,
Fonds P. DUFOURNET.
74. J. BOSSU, Techniques et Architecture (34), 1946, p. 146.
75. Archives P. DUFOURNET, sd.
42
La question n'est cependant pas anodine, car si elle a
semblé n'avoir jamais gêné les journalistes, elle a beaucoup
préoccupé les responsables de la reconstruction (76):
- faire un village prototype, c'était concevoir, innover,
"apporter un progrès dans tous les secteurs"
(dispositions des
bâtiments, des systèmes de construction...)« C'était penser le
village comme un village d'essai, une référence qui devait
inspirer les reconstructeurs des autres villages sinistrés;
- faire un village type c'était reproduire un village
picard tout en l'améliorant.
Or, si la première solution participait davantage à une
recherche de progrès, la seconde avait l'avantage de parer au
plus pressé. Et si les architectes chargés des opérations de
reconstruction, disciples de Le CORBUSIER pour l'essentiel,
penchaient pour la première, le Commissaire à la Reconstruction
en Picardie (77) préférait la seconde. Cette opposition entre
les architectes et l'Administration fut à l'origine d'un
certain retard dans la décision adoptée.
Dans un article du Figaro paru en 1946, il est clairement
affirmé que "Le Bosquel reconstruit
pourra servir
de modèle"
(78).
Cependant,
si
l'expression
"village-modèle"
a
délibérément remplacé celle plus nuancée de "village-prototype"
utilisée jusque là (79), le Bosquel n'en demeurait pas moins un
terrain d'expérience duquel on pouvait s'inspirer en tel ou tel
domaine, sur telle ou telle technique... Même si "le
Bosquel
(... ) doit servir
de "village-témoin"
pour le reste
de la
France dévastée"
(80), chaque village devait être abordé comme
un cas particulier, avec ses caractéristiques propres.
"Le Bosquel,
village
d'essai
{...),
constitue
non
seulement
une très intéressante
recherche
en
matière
d'architecture
paysanne
et d'urbanisme
rural,
mais
surtout
une tentative
nouvelle
et audacieuse
pour la
résurrection
de la terre qui meurt en lui créant un
coeur neuf et en lui insufflant
un sang nouveau." (81)
Ainsi, même si
d'articles de presse
l'Architecte en chef
le principe général
76.
77.
78.
79.
80.
81.
cette période a suscité un grand nombre
ou de revue dans lesquels les propos de
ont été souvent caricaturés ou déformés,
reste celui du respect de l'identité de
Archives P. DÜFOÜRNET, note tapuscrite, 26 janvier 1968, 6 p.
H. VAUBOURDOLLE, Ingénieur en chef à la S.N.C.F, Commissaire aux Travaux sous Raoul DAUTRY.
A. VIHARD, Le Figaro, 13 juin 1946.
Commissariat à la Reconstruction Immobilière. 17 avril 1942. A.N. AFU 10788.
"La reconstruction de nos campagnes", Nouveaux Temps, 28 juin 1943.
"La reconstruction de nos campagnes", Nouveaux Temps, 28 juin 1943.
43
chacun des lieux reconstruits.
DUFOURNET est clair à ce sujet:
Le
point
de
vue
de
Paul
"Il ne faut pas chercher à uniformiser
la France; la
diversité
est/ une de ses grandes richesses;
il
faut
souhaiter qu elle
reste un jardin."
(82)
En fait,
"Il s'agissait
de satisfaire,
avec les
possibilités
du moment, mais pour longtemps,
à des programmes
paysans modernes,
transformés
par les méthodes de
culture
nouvelles,
par 1'electrification,
par
le
machinisme.
Il
s'agissait
d'aider
aux
tâches
quotidiennes
par une organisation
de l'espace à la fois
durable et souple.
Il s'agissait
de créer de toute
pièce un milieu social favorable
à une vie
collective
et familiale
évoluée : construire
sur une table rase un
cadre rural harmonieux qui soit à la fois le moyen de
développement
et l'expression
formelle
d'un
complexe
d'existences
actives
et heureuses.
Et en même temps,
tenter de pressentir
les possibilités
de l'avenir
et
marquer une orientation
d'une portée
dépassant
les
limites du programme posé". (83)
Le respect des traditions picardes
- La forme agglomérée du village devait-elle disparaître
au profit d'une disposition plus aérée des habitations?
Du fait de la juxtaposition, pignon contre pignon, de la
quasi totalité des maisons du village, les bombes incendiaires
lâchées sur la commune avaient déclenché une progression rapide
du feu. Le feu n'épargna que les quelques maisons isolées et
une maison construite en pierre de taille.
Reconstruire pouvait donc signifier éviter de reproduire
un mode d'habitat préjudiciable en cas de sinistre par le feu
notamment. Mais, cela devait signifier avant tout offrir à ces
villageois sinistrés le moyen d'améliorer le confort tant
intérieur qu'extérieur de leur habitat. Si leurs maisons
allaient bénéficier d'un nouveau bien être (deux étages,
nouvelle distribution des pièces, grandes baies...), la
structure même du village allait être modifiée (suppression des
82. P. DüFOUBNET, cité par L. DOCHENE in "La réorganisation foncière et l'urbanisme", Le Moniteur des
communes de France, 1er mai 1944.
83. "Le Bosquel. préliminaires de la reconstruction et premières réalisations", Techniques et
Architecture (34), 1946, p. 131.
44
virages, redressement des rues, constitution d'un "centrevillage" (84), adduction d'eau généralisée... ).
Comme nous le verrons par la suite, cela allait avoir des
conséquences sur les manières d'habiter.
- Les
1'identique?
maisons
devaient-elles
être
reconstruites
à
La guerre est perçue comme une opportunité. L'Etat prenant
à sa charge les opérations de reconstruction, refaire du vieux
aurait été inconcevable; bâtir des maisons à l'ancienne, sans
espace ni confort, une absurdité. Aussi, fut-il décidé que l'on
apporterait aux sinistrés des maisons spacieuses, au confort
moderne qui n'auraient rien à envier aux maisons de la ville.
La maison sera donc à cour ouverte; elle ne donnera plus
sur un tas de fumier comme ses habitants y étaient accoutumés.
Elle sera éloignée des bâtiments d'exploitation.
- Fallait-il laisser les cultivateurs poursuivre leur
développement sur les bases des anciennes fermes picardes aux
cours fermées, au tas de fumier central, aux bâtiments
multiples, aux terres dispersées... ?
La possibilité de réfléchir à une nouvelle structure du
village (structure de l'habitat mais aussi structuré des
exploitations), jointe à l'expérience de la lourdeur du système "
agricole passé
"Nous avons trouvé que l'agglomération
du village,
le
parcellaire,
la disposition
générale
des
bâtiments,
tout cela, par voie de conséquence successive,
dérivait
d'un mode de vie agraire aujourd'hui
périmé." (85)
militaient en faveur d'une participation à la modernisation de
l'agriculture locale: le village devait être reconstruit sur de
nouvelles bases. Il devait bénéficier de tous les avantages mis
en place pour le développement d'une agriculture moderne:
application de la loi du 9 mars 1941 sur la réorganisation
foncière, adoption de bâtiments d'exploitation fonctionnels,
utilisation
de
nouvelles
techniques
de
construction,
expérimentation de matériaux... Car,
84. Centre-ville à l'échelle d'un village.
85. P. D0F0ÜKNET, "Comment se sont construits les villages picards et ce qu'il en advient", Techniques et
Architecture, Techniques locales, nov. déc. 1943, p. 323.
45
"(...)
Une certaine contrainte
est parfois
pour conduire,
malgré elles,
les populations
ou indifférentes
vers un mieux-être certain."
nécessaire
amorphes
(86)
- Fallait-il se contenter du remembrement de la propriété
ou procéder à un remembrement d'exploitation?
S'en tenir à la propriété est envisageable lorsque le
faire-valoir direct cacactérise le système d'exploitation. Mais
quand il s'agit d'exploitations en faire-valoir mixte (mipropriété, mi-fermage) qui comptent en moyenne plus d'une
dizaine de bailleurs chacune, remembrer la propriété ne change
guère
les conditions de travail de
l'exploitant. Le
morcellement du bien mis en valeur ne se modifie pas davantage.
Aussi, il parut plus judicieux d'engager un remembrement qui
tiendrait compte des exploitations, privilégiant l'aspect
conditions de travail plutôt que l'aspect patrimonial.
Aux yeux des architectes d'opération, la "remodélation
du
sol" (87) doit intervenir avant toute chose, mais ne doit être
en aucun cas une opération arbitraire. Le remaniement du
parcellaire doit être pensé et réalisé en fonction du programme
de réaménagement. La distribution des fermes elle-même doit
tenir compte de l'accessibilité aux terres.
Après une déclaration d'utilité publique préalable datant
du 22 mars 1943, les opérations nécessaires à la réalisation du
projet de reconstruction sont déclarées urgentes par des
arrêtés (88) concertés du délégué général à l'Equipement
National, du secrétaire d'Etat à la Production Industrielle et
aux Communications et du secrétaire d'Etat à l'Economie
Nationale et aux Finances. (89)
La reconstruction du Bosquel peut commencer.
Dans son contrat pour l'exécution de la mission
d'architecte en chef de la Reconstruction (1er juin 1946), il
est bien stipulé que Paul DUFOURNET devra déterminer l'esprit
général de la Reconstruction, c'est à dire en fixer les
caractéristiques générales et établir les servitudes spéciales
qui permettront d'y satisfaire. Surtout, il devra "veiller
à
l'application
des directives
techniques
86. P. D0FO01HET, op. cit. p. 323.
87 . J. BOSSU, Techniques et Architecture (34), 1946, p. 138.
88. En date du 10 janvier 1944 (J. 0 des 14 et 15 février 1944).
89. Journal Officiel du 15 février 1944, p. 490.
du Ministère
notamment
46
en matière de normalisation"
les
principes
directeurs
(90) et "déterminer
qui
doivent
être
l'esprit
suivis
pour
et
le
remembrement".
C'est ainsi que lorsqu'en décembre 1946, on lui
adresse des instructions techniques sommaires sur le logement
de l'exploitant et de l'ouvrier agricole, Paul DUFOURNET est
également invité à "ne s'écarter
cas justifiés"
(91).
de ces directives
que dans des
4.5. L'avant-projet:
En mars 1941, Paul DUFOURNET entreprend de rédiger
l'avant-projet d'aménagement et de reconstruction du Bosquel
qu'il
nomme
"plan
d'aménagement,
d'embellissement
et
d'extension"
(92). Pour ce faire, un certain nombre de
renseignements lui sont nécessaires. Il a non seulement besoin
d'un relevé du cadastre des propriétés tant privées que
communales ou domaniales, mais il lui faut aussi des données
relatives à l'alimentation en eau potable et en électricité du
village, à son réseau de routes et de chemins. Il lui faut
connaître également la composition du village: l'identité de
chacun, sa profession, le nombre de personnes composant chaque
famille, la contenance, lorsqu'elles en ont, de leurs
patrimoines respectifs. Afin de réorganiser l'habitat, des
considérations d'un type plus qualitatif sont demandées: le
nombre de maisons correspondait-il
aux besoins de la
population? Certaines familles n'avaient-elles pas plusieurs
petites maisons dispersées dans la commune? Les habitaientelles toutes et comment? N'était-il pas souhaitable que les
sinistrés
propriétaires
de
plusieurs
petits
bâtiments
reconstruisent une seule et même habitation par famille qui
soit une version améliorée (confort et espace) de ce qu'ils
avaient précédemment? Soit, un ensemble d'informations qui
permette une analyse précise de l'entité villagoise, de son
fonctionnement et de son mode de vie.
En juillet 1941, le Commissariat à la Reconstruction
Immobilière demande à ce que les avant-projets lui soient
soumis le plus rapidement possible afin qu'ils soient étudiés
par la section d'urbanisme du Comité National à la
Reconstruction. En effet,
90. Contrat n* 6-176. A.D. 80, 15 J12.
91. C. G. 517. Lettre du 13 décembre 1946. A.D. 80, 15 J12.
92. P. DUFOOKNET. Lettre du 31 nars 1941. Archives P. DUFOURNET.
"Il importe que vous preniez des mesures dans votre
département
pour mener ces études
à un rythme
plus
rapide.
Si 1/approbation
des projets
conditionne
la
mise en route de l'oeuvre
de reconstruction,
un délai
important s'écoulera
encore entre la date
d'approbation
des plans
et l'ouverture
des chantiers:
il
faudra
procéder au remembrement des parcelles,
à la
création
des
associations
syndicales
de reconstruction,
à
l'examen architectural
des immeubles à
construire.
Or,
ce
qui
importe,
c'est
en
définitive
1'installation
des
sinistrés
dans
leur
maison
reconstruite."
(93)
On connaît les méandres des circuits administratifs. Ils
n'étaient guère différents à l'époque, ce d'autant que l'Etat
français avait à faire face à une situation d'urgence qui
touchait tous les domaines. En matière de reconstruction, il
était effectivement indispensable que les procédures soient
autant que possible abrégées. Plus vite l'avant-projet pouvait
être examiné, plus vite il pouvait être remanié pour accélérer
la rédaction du projet définitif, son approbation et la
déclaration d'utilité publique conditionnant sa réalisation.
Entre-temps, le Service des Constructions Provisoires (94)
procédait à l'examen du plan d'implantation des baraquements.
Celui-ci devait être compatible avec les travaux d'aménagement
et de reconstruction envisagés. Aussi, les baraquements
devaient être installés de manière judicieuse pour ne pas gêner
les architectes (95).
C'est le 4 février 1942 que les avants-projets des
villages à reconstruire furent soumis à la Sous-Commission
départementale de la Reconstruction.
Quant aux demandes de reconstruction, les habitants du
Bosquel ne pouvaient les envisager qu'après avoir pris
connaissance de la participation de l'Etat dans les frais
engagés. C'est à cette seule condition qu'ils pouvaient faire
étudier par un architecte un projet éventuel de maison (volume,
disposition intérieure, éléments de confort...) dans la limite
du budget qu'ils étaient en droit d'y consacrer. Car la
question de la prise en charge financière des opérations de
reconstruction était tout de même essentielle. D'elle dépendait
le contenu même du projet.
93. Le Commissaire Technique à la Reconstruction Immobilière à Monsieur le délégué régional à Amiens.
Lettre du 17 juillet 1941. A.D. 80, Fonds P. DUFOUMT.
94. Dépendant du Ministère de la Production Industrielle et du Travail.
95. Lettre du 5 mai 1941. A.D. 80, Fonds P. DUFOUÏNET.
48
4.6. Qui va payer la reconstruction?
Ce qui doit être édifié au Bosquel devant avoir une
"valeur d'exemple",
"(...)
les
constructions
elles
seront
utilisées
technique
moderne
dont
pourvoir."
(96)
seront
soignées
et
pour
toutes
les
données
de
la
il
(est)
légitime
de
les
Les études commencèrent sous l'égide des lois du
gouvernement de Vichy relatives à la reconstruction et à
l'amélioration de l'habitat et des bâtiments ruraux. Les
principales, celles du 17 avril 1941 et du 12 juillet 1941,
portaient respectivement sur l'aide accordée par l'Etat à la
construction de bâtiments ruraux et sur la reconstruction des
immeubles d'habitation détruits par suite d'actes de guerre. La
législation prévoyait "de redonner
aux gens ce qui leur
était
nécessaire
pour reconstituer
leur activité
économique".
Elle ne
tenait pas compte de la valeur économique antérieure des biens
endommagés. Des normes dimensionnelles avaient été établies
pour définir des immeubles-types correspondant à chaque
catégorie de profession agricole. Ce système avait l'avantage
de reconstituer l'ancien potentiel agricole, sans avoir à
indemniser les particuliers en proportion de ce qu'ils avaient
perdu. Cela ne satisfaisait guère au goût des rentiers et
autres agriculteurs aisés, mais ce principe avait pour mérite
de rétablir un certain équilibre économique.
En 1945, le changement de gouvernement remit tout en
question mais l'ordonnance du 8 septembre 1945 ayant annoncé
que l'Etat accorderait des "crédits
suffisants
pour
la
construction
de bâtiments
correspondant
aux besoins
d'une
exploitation
agricole
rationnelle",
les sinistrés furent
rassurés. Les quatre premières fermes furent construites sur
ces bases. Toutefois, pour éviter un quelconque retard dans la
reconstruction
il fallait pouvoir travailler dans les
conditions les meilleures et faire en sorte que le projet du
village à réaliser s'entende comme étant celui sur lequel tout
le monde s'accorde. Pour ce faire, Paul DUFOURNET suggéra
"(...)
l'affaire
que les
intéressés
la moindre participation
96. P. DGFOÜKNET au H.R.Ü. Lettre du 22 fév. 1945. A. D. 80, 15 J3
(n)'aient
(pas)
dans
financière,
donc un
droit quelconque
ou de décision."
de critique
(97)
(au sens négatif
du
terme)
Le souci de pouvoir mettre sur pieds les programmes précis
et définitifs motivaient cette requête. Ce n'est pas ainsi que
l'entendait le Commissariat à la Reconstruction. Si d'une part,
l'acte dit "Loi des 11 octobre 1940 et 12 juillet 1941"
prévoyait une participation de l'Etat aux dépenses de
reconstruction d'un immeuble d'une surface utilisable et d'une
destination semblable à celle de l'immeuble détruit (...). Son
concours financier était alors fixé à 80 % du coût normal de la
reconstruction (...) avec possibilité que cette participation
soit réduite d'un tiers en raison soit de l'ancienneté de
l'immeuble détruit, soit de la nature des matériaux de
construction employés, soit de son insalubrité, soit enfin de
l'absence d'agencements modernes dans cet immeuble (98). Et si,
d'autre part, les propriétaires désireux de ne pas être
reconstruits bénéficiaient d'une indemnité égale à 80 % du
montant supposé de la reconstruction effective de leur bien.
En fait, en 1947, les crédits d'Etat seront supprimés
jusqu'à ce que soit votée une loi sur l'indemnisation totale
des dommages de guerre. Un coefficient de vétusté sera pris en
compte, mais les sinistrés devront payer les frais induits par
une reconstruction trop ambitieuse (bâtiments plus vastes qu'à
l'origine par exemple) ou bien se résigner à ne pas construire
aussi largement que prévu, ce malgré la possibilité de cumuler
les points correspondant à plusieurs constructions éparses pour
aboutir à un nombre moindre de bâtiments aux volumes
suffisants.
97. P. D0F0ÜRHET, op. cit.
98. Commissariat à la Reconstruction Immobilière. Le 20 mars 1945. A.N. AFÜ 10788.
50
5. Le remembrement de 1943
Rapport de Marcel GAY, géomètre expert chargé des
opérations.
Remembrement urbain et rural, loi du 9 mars
1941.
La commune du Bosquel ayant fait
l'objet
d'une
transformation
complète par opération
.simultanée
de
remembrement urbain et rural, le présent
rapport a
simplement
pour but de donner
quelques
éléments
d'explication
d'ensemble sur la genèse des
opérations
et sur les résultats
obtenus.
(...)
L'agglomération :
La
commune comporte
une
seule
agglomération
d'habitations
regroupées. Aucun écart. Tout se tient
et
s'échelonne
sur la route nationale
et sur les
divers
embranchements conduisant aux communes voisines.
C'est
un village
étoile
dont l'ossature
est constituée
par
les
chemins
de communication.
L'agglomération
est
habitée par 365 habitants
travaillant
tous,
directement
ou indirectement
dans
l'agriculture.
Détruite
au cours d'opérations
de guerre le 7 juin
1940, elle est actuellement
à peu près
reconstruite.
Le remembrement:
Avant la reconstruction
de 1944, la commune était
considérée comme la plus sinistrée
de France. C'est la
raison pour laquelle
les pouvoirs
publics
se sont
penchés dès 1941 sur son triste
sort. Aussi
fut-elle
désignée
en matière de reconstruction
comme commune
d'expérience
pendant les premières années
d'occupation
et même pendant les années consécutives
à la fin de la
guerre.
Les pouvoirs publics,
en 40/41 se trouvaient
devant
le thème suivant:
a) Un village
complètement
sinistré,
85 groupes
d'habitations
rasés par les bombardements,
19 autres
groupes endommagés mais demandant 1'investissement
de
sommes considérables
pour leur
restauration.
b) Un territoire
de culture
exploité
par 16
cultivateurs
s'étendant
non seulement sur le
territoire
de la commune du Bosquel, mais encore sur les communes
limitrophes:
Essertaux,
Fiers, Fransures, Rogy,
Tilloy,
Tilloy
les
Conty
et
Loeuilly.
L'ensemble
d'une
contenance
de 11.500 hectares
environ y compris
le
village.
Une partie de cette surface,
soit 913 hectares
avait
fait
l'objet
d'un
remembrement
en
33/34.
L'exécution
en avait été confiée à notre collègue Jean
ROY (... ) qui tentait
à cette
époque une première
opération
dans
une région
hostile.
Malgré
des
difficultés
considérables
d'ordre
psychologique,
il
menait à bonne fin ces travaux et arrivait
à conclure
par des résultats
excellents
(...).
En conséquence, que pouvait-on
envisager?
Premièrement,
reconstruire
les
habitations
détruites
sur les anciens
emplacements,
sans aucun
aménagement nouveau de la voierie
et du
parcellaire
51
laissant
ainsi le parcellaire
rural dans l'état
dans
lequel il se trouvait
à l'ouverture
des
hostilités.
Deuxièmement,
remanier
le
parcellaire
rural
existant
en constituant
pour chaque exploitant
des
ilôts
de culture
très
étendus,
profitant
de ce
regroupement
total
pour
édifier
les
bâtiments
d'exploitation
au milieu de
ceux-ci.
- Troisièmement,
remanier à la fois les
parcellaires
urbain et rural en les adaptant aux exigences des temps
actuels,
profitant
de ce bouleversement
général
pour
aménager l'installation
des bâtiments
d'exploitation
sur la périphérie
du village
et à proximité des fonds
de culture
correspondant.
Cette
solution
devait
permettre la réduction des frais d'exploitation
tout en
conservant
les
avantages
de la
vie
urbaine
en
agglomération
groupée.
Pour des raisons d'ordre local, c'est cette
troisième
hypothèse qui fut retenue
(...).
Pour la réalisation,
il fallait
procéder de toute
urgence au remembrement de la partie
urbaine,
au
remembrement
de
la
partie
rurale,
les
deux
remembrements devant se faire
simultanément.
Les pouvoirs
publics
étant
dans l'obligation
de
publier les dispositions
légales en vigueur,
n'avaient
à leur disposition
que la loi du 11 octobre 40 modifiée
par la loi du 8 novembre 41 pour la partie urbaine. Et
la
loi
du 9 mars 41 pour
la partie
rurale.
Malheureusement,
deux ministères
différents
devaient
assurer
l'application
de
ces
dispositions:
le
Commissariat à la Reconstruction
Immobilière
pour la
partie urbaine et le Ministère de l'Agriculture
pour la
partie
rurale.
Si le service
du génie Rural était
très
compétent
pour la réalisation
d'un remembrement rural du
fait
d'une grande expérience
qu'il
avait acquise en cette
matière pendant une vingtaine
d'années,
il n'en
était
pas de même pour le Commissariat,
aucune opération de
remembrement urbain
n'ayant
encore
été
tentée
ni
réalisée.
Le souvenir
des aménagements urbains
de
1'après guerre de 14/18 étant bien
lointains.
Enfin,
la Corporation
Paysanne voulait
également
faire
triompher
sa thèse:
"la terre à ceux qui la
cultivent",
ce qui posait des principes
nouveaux dont
il fallait
tenir
compte.
Le problème n'était
donc pas facile à réaliser,
voici
comment il fut
résolu:
Tout d'abord, la partie urbanisme fut confiée à un
architecte
diplomé, Paul DUFOURNET. C'est donc lui qui
a donné les caractéristiques
de la voirie ainsi que les
dimensions et orientations
des parcelles
urbaines.
Ces
principes
fixés,
la réalisation
des deux remembrements
nous fut
confiée.
Après bien
des hésitations,
les
deux
services
intéressés
se sont mis d'accord.
La direction
des
opérations
fut en définitive
confiée
au service
du
Génie Rural qui prit la responsabilité
de
l'entreprise.
Ainsi René LACOURLIE, Ingénieur en chef du Génie Rural
de la Somme et son collaborateur,
Charles FOURIER,
52
Ingénieur
des travaux ruraux, disposant
des
pouvoirs
les plus étendus,
assumèrent-ils
ces fonctions
très
délicates,
pendant toute la durée des travaux,
sans
enseignement
et sans texte d'application.
Ils
surent
atteindre
rapidement
le but proposé s'inspirant
et
adoptant pour l'ensemble
à réaliser
les
dispositions
prévues par la loi du 9 mars 41 et le décret loi du 7
janvier 42 sur le remembrement
rural.
Pour
les
parties
touchant
directement
à
la
reconstruction,
ils retenaient
les conseils de Monsieur
GAZET, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées,
lequel
représentait
le Commissariat
à la Reconstruction
et
prenait également part à toutes les délibérations
qui
concernaient
la partie
urbaine.
Enfin, pour toutes les questions
d'ordre
agricole,
ils firent appel à monsieur Léon ROPIQUET, Président du
Syndicat
Communal qui avait pris l'initiative
de la
seconde demande de remembrement et qui en
précurseur,
avait vu grand et
juste.
Nous avions posé toutefois,
avant toute étude
les
principes
suivants:
a) Le périmètre remembré comprendrait non seulement
le territoire
de la commune du Bosquel, village,
terres
et bois, mais également les parties
cultivées
par les
cultivateurs
du Bosquel
sur
les
territoires
des
communes voisines.
C'était
l'application
du
principe
cher à Monsieur POIREE, Inspecteur
Général du Génie
Rural,
rédacteur
de la loi
du 9 mars 1941 qui
préconisait
le remembrement par groupe
d'exploitation;
donc, plus de frontières
constituées
par le
limites
inter-communales.
Ce principe
admis,
il
avait
été
convenu que les propriétaires
exploitants
habitant
les
communes limitrophes
touchées
par le
remembrement
seraient
regroupés
en limite
du périmètre
les
intéressant
mais qu'ultérieurement,
une bande de cette
partie remembrée devrait être comprise une seconde
fois
dans une nouvelle opération exécutée sur les communes
limitrophes
que
tous
puissent
bénéficier
du
remembrement maximum. C'est ainsi qu'il
y a quelques
années,- plusieurs
bandes touchant
les communes de
Franssures,
Loeilly
et Rogy ont été remembrées une
seconde
fois.
b) La voirie
urbaine et la voirie
rurale
seraient
totalement
remaniées
pour
obtenir
une
viabilité
parfaite.
Dans le village,
la route nationale
fut
remaniée par des axes tangents
et inverses
de 300
mètres de rayon, l'emprise
ayant été portée à 22 mètres
de largeur,
les rues secondaires
furent portées à 10
mètres et des pans coupés furent prévus partout
pour
améliorer
la visibilité
et la viabilité.
Enfin,
des
terrains
communaux furent
réservés
pour les
édifices
publics,
la place,
le terrain
de sports
... les
surfaces
nécessaires
étant prélevées
au besoin sur la
masse. Une distillerie
d'alcool
de betteraves
devant
être édifiée,
il avait été accordé à cet effet
un
terrain pour la construction.
Terrain dont le lieu et
la dimension avaient été fixés par le Service du Génie
53
Rural qui avait procédé à l'étude
technique du projet
d'installation.
Dans la
partie
rurale,
les
chemins communaux
conduisant
aux
localités
voisines
avaient
été
conservés,
mais élargis,
tous les chemins
inutiles
supprimés et remplacés par d'autres d'au moins 6 mètres
de largeur et plus, créés en des endroits
convenables
pour une desserte rationnelle
partant du Bosquel.
c) Un seul compte avait été établi par
propriétaire,
les
parties
urbaine
et rurale
étant
bloquées
en
surface,
ceci pour permettre
la création
de
terrains
utiles
à la reconstruction,
mais répondant à
certaines
données imposées par
l'architecte.
d) Les lots à l'intérieur
de 1'agglomération
urbaines
devaient
être réguliers.
Leurs dimensions
avait
été
fixées
par
l'urbaniste.
Comme les
19
immeubles
réparables
constituaient
parfois des obstacles
pour la
création
d'un parcellaire
régulier,
il
fut
décidé
l'expropriation
de 15 d'entre eux selon la procédure du
décret-loi
du 30 octobre 1935. Il fut convenu
d'autre
part que pour dégager le centre de 1'agglomération
les
fermes seraient
dans la mesure du possible,
réparties
sur la périphérie
du
village.
e) En ce qui concerne les immeubles non bâtis,
on
décida qu'ils
seraient placés aux abords des immeubles
à construire,
la plus grande surface
disponible
en
faveur
des propriétaires
des bâtiments,
ceci
pour
permettre
la constitution
de pâturages,
revalorisant
ainsi la valeur vénale des bâtiments
d'exploitation
dans l'avenir.
Enfin,
les
terres
devaient
être
regroupées
du côté de l'exploitation,
tout au moins
dans sa direction
de manière à réduire les distances au
cours de
l'exploitation.
f)
Appliquant,
à la demande de la
Corporation
Paysanne et par anticipation,
les dispositions
de la
loi sur le statut
du fermage du 13 avril
1946 qui
recherche la stabilité
des exploitations,
nous avons
marié propriétaires
et exploitants.
Ayant regroupé au
maximum au point de vue cultural,
nous avions en cette
circonstance
fait prévaloir
le point de vue du fermier
avant celui
du propriétaire.
Cependant,
ce mariage
voulait
dire
que pour
toutes
les
combinaisons
réalisées,
les géomètres s'étaient
mis d'accord
avec
les
propriétaires
exploitants
intéressés.
Cette
procédure
avait
permis lorsqu'il
y avait
plusieurs
fermiers
d'en éliminer
une partie
avec l'accord
des
évincés;
le but recherché étant le maintien par des
transformations
de baux ou de locations
des contenances
d'exploitation
par
exploitant
telles
qu'elles
existaient
avant le remembrement. En effet,
malgré ces
transformations
considérables,
toutes les
exploitations
étaient restées de même importance que par le passé.
Bien que le remembrement de 1934 ait apporté déjà une
substantielle
amélioration,
la réduction
des ilôts
de
propriété
ayant été de 70 %, de nouveaux et
très
importants
résultats
ont été obtenus par suite de la
54
bonne compréhension des propriétaires
et
agriculteurs
intéressés.
La Direction
et les conseils
éclairés
de Monsieur
LACOURLIE Ingénieur
en
Chef
du
Génie
Rural,
1'intervention
constante / de Monsieur FOURNIER Ingénieur
des travaux
ruraux,
1 influence
de monsieur
Léon
ROPIQUET, les nouvelles idées qu'ils
ont su tous
faire
triompher, font que le remembrement du Bosquel de 1944
est une des plus belles
réalisations
du service
du
Génie Rural dans le Nord de la France.
La réduction
nouvelles
de 65 % apportée sur des
parcelles
déjà remembrées fait
ressortir
l'effort
considérable
que l'on a du tenter pour se rapprocher de
la perfection.
Celle-ci
semble
avoir
été
presque
atteinte
au point de vue cultural
puisque la
réduction
sur les ilôts de culture est de 87 % pourcentage énorme
si l'on
veut bien tenir
compte du caractère
très
spécial
du régime de la propriété
et du fermage en
Picardie.
Malgré ces résultats
probants,
les
agriculteurs
bosquellois
loin
de se
lasser
des
difficultés
rencontrées
au cours de plusieurs
remembrements
totaux
ou partiels
restent
persuadés
que l'on
peut
faire
encore mieux. Ils ne sont pas encore satisfaits
avec 73
ilôts de culture dont le nombre a été encore réduit de
quelques unités
par suite de reprises
des fermes ou
d'arrangements
culturaux.
Il serait parait-il
possible
d'en réduire
le nombre, d'améliorer
leur forme ou
l'ensemble des
groupements.
Il est vrai que ce courant favorable
n'est
que la
résultante
des avantages considérables
concrétisés
par
dix années d'exploitation
que le président ROPIQUET
avait prévus dès 1941 et qui ont transformé
totalement
l'activité
agricole
de la commune et apporté beaucoup
de bien-être
chez les exploitants
et le
personnel
employé dans les
fermes.
Bâtiments de ferme entourés de pâturages,
utilisation
de moyens mécaniques puissants,
utilisation
d'une CUMA
au service de tous, rapidité
des moyens mis en oeuvre,
desserte
facile
des lots de culture,
amélioration
des
cultures
et
des
rendements,
indépendance
des
assolements,
bien-être
apporté tant du point de vue
humain que social,
sont aujourd'hui
les
bienfaits
appréciés
par tous les habitants
du Bosquel.
Ainsi
ceux-ci sont-ils
d'ardents
propagandistes
en faveur du
remembrement,
souhaitant
que de telles
opérations
s'étendent
à l'ensemble
du territoire
national,
ce qui
serait
certes
l'une des possibilités
recherchées
par
les Pouvoirs Publics pour l'abaissement
des frais
de
production et le relèvement économique de
1'agriculture
française.
(99J
99. Hontdidier, le 10 juil. 1955, signé, Harcel GAY. Archives personnelles de Marcel GAÏ.
i » h sonne
COMMUNE DU BOSQUEL
Avant le remembrement, comme l'Indique le cliché ci-dessus, le territoire du Bosquet «tait morcelé à
l'infini. On peut remarquer, en noir, toutes les terres dispersées d'une exploitation de 60 hectares. Les
deux plans ci-dessous montrent, à gauche, le premier remembrement opéré, et à droite, ces mêmes terres
regroupées en deux lots très voisins par le remembre ment définitif. L'exploitant ne perdra plus un temps
précieux pour aller d'un champ à l'autre et c'est maintenant à la porte même de son domaine qu'il pourra
se livrer à une exploitation plus rationnelle.
Ltmvjst H austfitl.
/ jiEsstrtQux
-fe*
Commune de Rogy *~i¡i ^^„-s
Com"*» de*** F*ran sures
^Commune
de
JEssertaux
rom"idJ-—TV'.*,.„.T«
Commune de Roçjy
rangures
Tu;.
12. —
lixr.Mi'i.i-:
|>I, III:MI.MIIIII:MI:NI
I;N IH-.I X TI.JU-S
(1.0 li(>-i|iirl, Somme, (J'aprés 1". Iliiimiiiii'l).
I'IIRC <1c V. lie : en liant, plan cail.i-lral, en IUI.') ; en bas, en
l'.KII. Ci-.li-v.ns. en I'M).
La leinle nuire Indique (let parcelles ilépeiulanl «l'une cxploilalioii tic W> he.-tares.
"Le
Bosquel
sera
entièrement
remembré"
le
premier
(100).
village
français
En effet, l'originalité de ce remembrement est de n'avoir
pas dissocié terroir et agglomération, donc d'avoir concerné la
totalité des parcelles bâties et non bâties de la commune.
L'idée était de donner jour à un village dans lequel l'économie
agricole serait facilitée du fait de la constitution
d'exploitations agricoles d'un seul tenant,
les
"en créant
des domaines
terres."
(101)
pleins
avec
bâtiments
sur
Le Commissariat à la Reconstruction ayant confié les
études des projets de reconstruction à Paul DUFOURNET, celui-ci
décida qu'en raison des dévastations, il y avait lieu de
remembrer l'ensemble du territoire de la commune. En ce sens,
il rédigea un aperçu théorique de ce que devrait être la
répartition des fermes autour du village. Dans le même temps,
Marcel
GAY, géomètre
expert de Montdidier
chargé du
remembrement rural pour le compte du Génie Rural, procédait au
lever des contenances rurales et à l'estimation de la valeur
des terres. C'est seulement après avoir pris connaissance des
désirs des intéressés et des possibilités financières de
reconstruction qu'une "esquisse
de la réalité
future"
put être
conjointement envisagée.
En septembre 1942, les géomètres du Nord de la France
ayant tous été réquisitionnés par l'organisation corporative
paysanne et le ravitaillement général pour procéder au contrôle
des récoltes de pommes de terre (102), les études ayant trait
au remembrement sont mises en attente. De toute façon, "tout
marche à la vitesse
d'une
tortue".
Il n'y a pas encore de
commission de remembrement, pas de réaction de la part de
l'association syndicale, aucune nouvelle de l'Etat qui en
oublie même de financer ses sous-traitants (103). Finalement,
le projet d'aménagement du Bosquel ayant été déclaré d'utilité
publique dès 1943, les opérations d'ensemble du remembrement
peuvent être entreprises.
100. "H. DAUTRY à Amiens et au Bosquel a étudié les possibilités de reconstruction", Le Courrier Picard,
12 Mars 1945.
101. P. DUFOURNET à H. GAY. Lettre du 12 av. 1945, A.D. 80, 15 J3.
102. H. GAY à P. DUFOURNET. Lettre du 11 septembre 1942. A.D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
103. Idem.
56
5.1. La loi du 9 mars 1941 ou "loi sur la réorganisation de la
propriété foncière et le remembrementM:
La loi du 9 mars 1941, dite loi CAZIOT, du nom de son père
fondateur, prévoyait un remaniement parcellaire (remembrement,
échange amiable) de sorte à réduire le nombre de parcelles
enclavées, à redistribuer les parcelles des grandes propriétés
démembrées au profit d'exploitations de taille moyenne. Grâce à
cette
loi, Pierre
CAZIOT
préconisait
la
constitution
d'exploitations agricoles d'un seul tenant, ou à grandes
parcelles bien groupées. Le principe de cette loi étant de
donner la terre aux paysans qui la travaillent, elle devait
aussi permettre la mise en valeur de terres jusque là
abandonnées, ou mal gérées, parce que difficiles d'accès. Elle
devait en fait favoriser le développement d'un certain type
d'agriculture considéré comme seul porteur de progrès:
essentiellement fondé sur la notion de famille, ne nécessitant
aucune main d'oeuvre extérieure, il devait se suffire
parfaitement à lui-même.
Cette loi du 9 mars 1941 avait été conçue dans l'idée de
fixer les- cultivateurs à leur terre grâce à la constitution
d'exploitations agricoles de type familial. N'ayant nul besoin
de faire appel à l'extérieur, ces dernières devaient favoriser
l'augmentation de la productivité agricole. Leur valeur tant
économique que sociale s'avérait alors indéniable. D'où
l'intérêt de constituer des unités d'exploitation d'un seul
tenant, autonomes.
Ce remembrement cultural était soutenu par la Corporation
Paysanne. Elle voulait en effet faire prévaloir les droits du
fermier sur ceux du propriétaire. C'était là l'occasion d'unir
propriétaires et exploitants dans la recherche d'une stabilité
des
exploitations,
une
sorte
d'anticipation
sur
les
dispositions de la loi sur le statut du fermage du 13 avril
1946.
Pour leur part, les architectes souhaitaient que l'équipe
des géomètres
"(...)
accorde, dans toute
vue
théorique
et
idéale
possibilités
du remembrement
du plus près." (104)
la mesure du possible,
la
(communiquée)
avec
les
(en cherchant)
à la serrer
104. P. D0F0DWŒT à K. GAY. Lettre du 24 décenbre 1942. A.D. 80, 15 J12.
57
Cependant, le remembrement des terres de culture et le
remembrement de la propriété bâtie ne rélèvent pas des mêmes
compétences. Si le premier dépend du ministère de l'Agriculture
et plus exactement du service du Génie Rural du fait de cette
loi du 9 mars 1941, le second dépend du ministère de la
Reconstruction et de l'Urbanisme en vertu des lois du 11
octobre 1940 et du 12 juillet 1941. Il va sans dire que penser
l'aménagement de cette commune ne pouvait se concevoir sans une
coordination entre les deux ministères.•
A posteriori, on apprend qui plus est que la procédure
suivie alors était tout à fait irrégulière (105) puisque
l'ensemble des opérations de restructuration foncière a été
réalisé en application de la seule loi du 9 mars 1941 alors que
l'article 18 stipule:
"Ne peuvent
être
incorporés
dans le périmètre
à
remembrer qu'avec l'assentiment
des
propriétaires:
- a) les
immeubles qui,
en raison
de
leur
situation,
peuvent
être considérés
comme terrains
à
bâtir,
b) les
immeubles
faisant
corps
avec
des
bâtiments qui appartiennent
à un même
propriétaire,
(...)
- d) les propriétés
closes de murs,
- e) et d'une façon générale tous immeubles qui
ne peuvent,
en raison
de leur utilisation
spéciale,
bénéficier
de l'opération
de remembrement". (106J
Cela allait de soi, l'objet exclusif de la loi étant
l'amélioration
des conditions d'exploitation
des terres
cultivées, non l'aménagement global des territoires communaux.
C'est ainsi que dans un premier temps, Paul DUFOURNET donna les
caractéristiques de la voirie, les dimensions et orientations
des parcelles urbaines, ainsi que ses consignes en matière de
regroupement des parcelles par exploitation. Puis, la
réalisation des deux remembrements simultanés fut confiée au
Génie Rural. René LACOURLIE, alors ingénieur en chef du Génie
Rural eut la lourde responsabilité d'assumer la direction des
opérations en composant avec les réglementations alors en
vigueur, aidé en ce sens par Monsieur GAZET, Ingénieur en Chef
des Ponts et Chaussées, lequel représentait le Commissariat à
la Reconstruction (107).
105. Ministère de la Reconstruction et de l'urbanisme. Rapport du délégué départemental. 7 janvier 1946.
A.N. AFÜ 10788.
106. Rapport rédigé pour la réunion des urbanistes du 9 avril 1945. A.D. 80, 15 J3
107. H. GAY. "Rapport sur le remembrement du Bosquel", Service du génie Rural, 10 juillet 1955. Archives
privées de Marcel GAY.
58
Parce que la procédure suivie, bien qu'illégale, s7 est
avérée efficace,
"(•-•)
il y a lieu quelquefois
d'anticiper
sur
règles
à appliquer,
justement
pour leur permettre
s'appliquer
mieux ensuite."
(108)
les
de
il avait été demandé à l'époque qu'elle soit généralisée
grâce à l'extension du champ d'application de la loi du 9 mars
1941 aux zones bâties et à bâtir. Un projet d'ordonnance dans
ce sens avait été soumis au Ministère de l'Agriculture. En
vain.
Ainsi, le Bosquel est semble-t-il la seule commune en
France à avoir bénéficié d'un remembrement urbain et rural
simultané.
5.2.
Le principe du remembrement:
Il s'agit de desserrer l'agglomération, de l'étendre sur
ses quatre routes en croix de façon à installer les fermes aux
extrémités de leurs terres réunies en une seule unité. Il est
prévu de regrouper les bâtiments publics ainsi que les maisons
destinées aux habitants ne travaillant pas dans l'agriculture
au centre du village. Ce projet n'est réalisable qu'en
procédant à un remembrement total de la commune: remembrement
rural
(constitution
d'exploitations
unitaires)
mais
remembrement urbain aussi (chaque habitant verra l'ensemble de
son patrimoine communal (maison d'habitation, petits bâtiments,
jardins...) jusque là dispersé rassemblé en un même lieu, de
part et d'autre d'un nouveau tracé de voies de communication).
"Le village
est un cadre trop restreint;
il
n'existe
qu'en fonction
des champs qui le font
vivre;
les
bâtiments
d'une
exploitation
agricole
ne font
que
concentrer
les
moyens d'action
d'une industrie
qui
s'exerce
à la fois aux champs et à la ferme et
cette
liaison
intime
de la terre et des bâtiments
est
si
profonde que l'on ne peut concevoir le plan
rationnel
d'aménagement
du
village
sans
l'associer
au
remembrement rural des champs." (109,)
Pour mener à bien ce remembrement d'un genre tout-à-fait
nouveau, une association syndicale fut constituée. On nomma
108. P. DUF0ÖRNET au Chef de la Section d'Urbanisme du C.R.I. Lettre du 29 mai 1942. A.D. 80, Fonds P.
DÜF0UKNET.
109. K. P0IKEE, "Réorganisation foncière et remembrement de la propriété rurale", extrait p. 187, si, nd.
A.D. 80, 15 J3.
59
pour directeur de cette association l'agriculteur du Bosquel
qui "a été l'âme très agissante
du remembrement rural de 1934"
(110). Non originaire du Bosquel, ancien fermier de la plus
grosse exploitation, il est aussi l'agriculteur le plus
dynamique et le représentant des sinistrés de la commune. On
compte beaucoup sur lui car "son exemple a une très
grande
influence
sur ses
concitoyens".
L'entreprise même du remembrement ayant éveillé quelques
inquiétudes, une réunion des intéressés fut provoquée à
l'initiative du syndicat agricole local. Marcel GAY, le
géomètre chargé des opérations, y fut convié afin d'exposer les
nécessités de procéder à ce nouveau remembrement. Exploitation
après exploitation il étudia longuement le cas de chacun.
"Les
fermes
devront
être
établies
sur
leur
emplacement
actuel,
agrandies,
si
possible
avec
d'autres
éléments disparates
situés un peu partout dans
la localité,
appartenant
à un même propriétaire
et
servant
actuellement
de dépendances à la ferme. Pour
ceux qui possèdent
beaucoup de terrains
il
faudra
envisager des lots distincts
(...).
Les contours de ces
lots devront être modifiés
de manière à établir
des
limites
de
propriété
régulières,
sensiblement
perpendiculaires
sur les voies publiques."
(111)
Puis, ce fut à Paul DUFOURNET de lui fournir les
renseignements concernant les contenances et les largeurs des
façades à accorder à chaque maison de cultivateur, d'ouvrier,
de commerçant, d'artisan.... (112).
Le remembrement urbain:
Du fait d'achats divers, d'héritages ou de locations, les
exploitants du village en étaient arrivés à utiliser des
bâtiments disséminés un peu partout dans la commune. L'urgence
d'un remembrement urbain n'était cependant pas criante. Après
la guerre, le mouvement de regroupement des parcelles non
bâties pour tenter de reconstituer les propriétés impulsa un
mouvement comparable de regroupement des parcelles anciennement
bâties.
De la même manière, le tracé des anciennes rues du village
était peu approprié au développement croissant de la
110. Lettre du 26 mars 1942 adressée au Commissaire à la Reconstruction Immobilière. A.D. 80, Fonds P.
DUFOURNET.
111. H. GAY à P. DUFOURNET. Lettre du 13 novembre 1941. A.D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
112. H. GAY à P. DUFOURNET. Lettre du 21 avril 1942. A.D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
60
mécanisation. Leur manque de dégagement gênait considérablement
les manoeuvres des machines agricoles et devenait parfois un
danger pour la circulation automobile. Une modification du
réseau routier, donc un nouvel alignement cause de nombreuses
expropriations de parcelles autrefois construites, pouvait être
envisagé.
"On a donc considéré que les 19 groupes
d'habitations
juste
endommagés seraient
sinistrés
complets.
Cela
permettait
de démolir
toutes
les
maisons
pour
satisfaire
à l'alignement
prévu". (113J
C'est
ainsi
qu'expropriations
et
regroupements
parcellaires rendirent nécessaire le remembrement urbain.
Le remembrement rural:
Le plan traditionnel, en habitat concentré répondait aux
besoins de l'ancien système agraire des pays d'openfield du
Bassin parisien. La rotation triennale et la vaine pâture
exigeaient qu'il n'y ait ni clôtures, ni bâtiments sur les
terres. De même, chaque cultivateur exploitait des parcelles
situées dans tous les secteurs culturaux du terroir communal.
La
modernisation
de
l'agriculture,
la
disparition
progressive des pratiques communautaires allaient rendre
l'ancien système de culture, ainsi que la distribution du
foncier, très contraignants. Pour certains, la guerre fut donc
l'occasion de remanier leurs biens de façon à créer des unités
d'exploitation se suffisant à elles-mêmes.
Il s'agissait
en fait d'un remembrement non des
propriétés, mais des exploitations agricoles. L'objectif
n'était pas de constituer des patrimoines unitaires, mais de
procéder à un regoupement des terres participant à une même
exploitation.
Dans un premier temps, il suffisait de réunir autour du
corps de ferme le maximum de terres exploitables. Puis, il
fallait regrouper au sein d'une ou plusieurs parcelles
d'exploitation les terres cultivées par un même exploitant,
quels que soient leurs propriétaires respectifs. En fait, dans
l'idée de garantir à l'exploitant une certaine sécurité dans la
gestion de sa ferme, le regroupement parcellaire devait
s'organiser autour de la notion d'exploitation, non autour de
celle de propriété. Aussi, du fait de la présence dans son
113. Entretiens avec Marcel GAY.
61
unité d'exploitation de parcelles louées, l'exploitant se
trouvait ainsi à l'abri de leur vente éventuelle (rendue plus
aléatoire parce que trop enclavées pour intéresser un
quelconque acquéreur).
Le principe de limiter la dispersion des parcelles d'une
même exploitation était un gage de pérennité: une parcelle mise
en vente par son propriétaire ne pouvait être rachetée que par
l'exploitant lui-même ou par un autre propriétaire qui n'aurait
eu d'autre solution que de continuer à la louer au même
fermier. Si ailleurs, et notamment au cours de remembrements
classiques, on cherche à désenclaver des parcelles pour les
viabiliser plus facilement ou dans le but d'un échange à
l'amiable, dans le cas du Bosquel, on confirmait ou on
procédait à des enclavements volontaires de parcelles de
propriété, afin de constituer des unités d'exploitation
homogènes.
Un tel procédé eut non seulement pour effet de créer des
entités agricoles plus individualisées et plus autonomes, mais
il permit aussi de réduire le nombre de preneurs par bailleurs.
5.3. Les modalités des opérations de remembrement:
Les sinistrés s'étant organisés en un groupement, avant
toute opération, ils ont procédé à une évaluation de la valeur
des biens en leur possession. Chaque parcelle est ainsi
affectée d'une valeur fictive au moyen d'une côte allant de un
à dix. Une estimation identique est réalisée sur la base du
plan de reconstruction, c'est-à-dire en tenant compte des
nouveaux emplacements et des nouvelles attributions. La
répartition des parcelles entre les propriétaires est alors
fondée sur ces deux cotations.
"Nous avons d'abord à fixer les longueurs des façades
à attribuer
aux nouveaux lots, les contenances de ceuxci, surtout
pour les fermes,
la discrimination
des
immeubles à conserver,
la direction
du
parcellaire,
l'aménagement des pâtures."
(114)
D'après Marcel GAY, les principes de redistribution des
parcelles ont reposé sur (115):
- la recherche d'une dimension et d'une forme des fonds
adaptées aux impératifs de rentabilité et de viabilité.
114. H. GAY à P. DÜFOÜENET. Lettre sd. A.D. 80, Fonds P. DUFOUfflET.
115. X. GAY, "Les remembrements du Bosquel", si, nd. Archives privées de Marcel GAY.
62
- le souci de concilier les intérêts des bailleurs et ceux
des fermiers.
le transfert des propriétés des non résidents en
périphérie du village.
- une distribution des parcelles qui respecte les choix
proposés en matière d'aménagement et d'urbanisme par Paul
DUFOURNET.
Théoriquement
il
doit
résulter
qu'à
l'issue du
remembrement, chaque sinistré doit retrouver un capital foncier
comparable à celui d'avant les opérations: ainsi, soit la
superficie de son bien a augmenté du fait d'une diminution
générale de sa valeur agronomique moyenne; soit elle a diminué
du fait d'une augmentation de sa valeur.
"Le métier essentiel
du remembreur étant de
réaliser
ces opérations
en tenant
compte de la
productivité
différente
des parcelles
à remembrer" (116),
le résultat
personne.
des opérations
ne doit
logiquement
léser
"L'inégalité
qui semble consacrée par le remembrement
n'est
que le résultat
de deux situations
juridiques
différentes:
les immeubles productifs
étant ceux qui
existaient
avant la guerre
(et dans ces
immeubles
productifs,
il
faut
comprendre
non seulement
des
immeubles entiers,
mais des arbres fruitiers,
des pans
de murs, des puits...)
et les autres."
(117J
C'est pourquoi la Commission Communale de Réorganisation
Foncière et de Remembrement qui participe au projet de
remembrement du village, fixe également les nouvelles limites
des propriétés. Par un courrier de son président, Monsieur le
Juge de paix du canton, la population est informée de
l'ouverture d'une enquête publique lui donnant droit à
réclamations et observations du 17 au 31 juillet 1944. Dans cet
avis d'enquête, les modalités de prise de possession des
nouvelles parcelles issues du remembrement sont énoncées (118):
de manière très générale, les arbres fruitiers et forestiers
abandonnés sont estimés à dire d'expert, les parcelles semées
sont cédées après la levée des récoltes, les friches
immédiatement et les jachères au début de l'été. Les pâtures
sont libérées en janvier 1945. Par contre, les propriétaires de
116. Réunion d'information du 17 déc. 1945 sur le remembrement du Bosquel. A.D. 80, 15 J3.
117. Idem
118. Archives privées de Hádame HOSTEN.
63
vergers productifs en gardent la jouissance durant dix ans,
charge à eux d'effectuer des plantations de remplacement entretemps .
On enregistrera quarante-cinq
réclamations sur 309
propriétaires dans la commune. La plupart de ces plaintes
furent rejetées lors de leur jugement en mairie du Bosquel en
présence du Juge de Paix (119). Il s'agissait souvent de
demandes concernant l'attribution
de nouveaux biens de
contenance ou de qualité exactement équivalentes à celles que
le propriétaire venait de perdre. Mais certains se plaignaient
d'avoir été volés en la matière. Or,
"Attendu qu'en matière de remembrement, il n'est
pas
possible
de respecter
les configurations
parcellaires
anciennes,
le
but
recherché
étant
d'obtenir
les
améliorations
maximales,
(étant donné) qu'est
attribué
(à chacun) un terrain
de compensation
qui doit
lui
donner satisfaction
(...)."
(120)
il n'était guère possible de satisfaire tout le monde sur ce
plan là; tout comme il devenait illusoire de modifier la
configuration des parcelles après remembrement. Par contre, les
réclamations relatives au souhait d'intervertir des parcelles à
l'amiable étaient systématiquement étudiées et le transfert
accordé. Les demandes de suppression de chemins devenus
inutiles ou leur création pour assurer la desserte d'une
nouvelle parcelle étaient dans la mesure du possible résolues,
pourvu que cela n'ait aucune conséquence néfaste sur le projet
de reconstruction.
L'atteinte au droit de propriété était parfois ressentie
si fortement que certains en étaient arrivés à exiger que leurs
anciennes parcelles soient cultivées de telle ou telle façon
par leurs nouveaux propriétaires (121).
Cependant, bien que le Conseil Municipal soit unanime sur
la nécessité de regrouper les parcelles et de procéder au
remembrement urbain (122), il fallut bien étudier les six
réclamations concernant des refus d'expropriation ou des
"acceptations
de démolitions
à condition
que les biens
détruits
soient reconstruits
au même endroit".
119. Dossier administratif. Remembrement du Bosquel. 4 et 12 octobre 1944. Archives du Génie Rural à
Amiens.
120. Idem.
121. Ibidem.
122. Extrait du registre aux délibérations du Conseil Municipal du Bosquel. Le 17 juillet 1942. A.N. AFU
10788.
5.4.
À quelques détails près... ou les obstacles rencontrés:
Comme chacun sait, de la théorie à la pratique, il n'y a
pas qu'un pas.... Le plan d'aménagement projeté se concevait de
manière idéale, mais devait se heurter à des réalités, à des
impératifs dont il aurait été difficile de faire abstraction.
Un territoire communal est rarement homogène. Il comporte
plusieurs qualités de terre. Au Bosquel, il existait cinq
classes de terre de valeurs agronomiques différentes, il était
donc hors de question de ne pas en tenir compte. En partant des
propriétés et locations initiales, il fallait remembrer de la
manière la plus équitable qui soit. Or, toucher à la terre est
sacrilège, surtout si les parcelles concernées sont transmises
de génération
en génération, surtout si
leur valeur
sentimentale l'emporte sur leur valeur productive. Il fallut
donc concilier les besoins de la réorganisation foncière aux
desiderata parfois difficiles à argumenter des autochtones.
Comme nous le verrons par la suite, certains cultivateurs
se refusent à quitter le centre du village de peur de se
trouver isolés. D'autres "continuent
à couper les chardons
dans
leur ancienne
pièce en échange...
d'un apéritif".
Parce qu'il
existe tout de même une valeur sentimentale que l'on attache
soit au sol, soit à la maison paternelle...
Des mécontents?
Diverses coupures de presse, un article de Jean BOSSU
(123) et divers témoignages rappellent qu'il y a bien eu des
protestations concernant les opérations du remembrement. Mais
il est rare qu'un remembrement se passe sans heurts... C'est
d'ailleurs chose tout-à-fait classique.
Un ancien adversaire du premier remembrement ne déclaraitil pas lors du second:
"ça plait
à certains
et ça déplaît
à d'autres,
sûrement,
ça fait gagner du temps."
(124)
mais
Ainsi, certains se plaignent d'avoir été défavorisés par
rapport à d'autres lors de l'échange de parcelles. Telle cette
dame qui :
123. in Bâtir la France, Automne 1946.
124. S. LAMPORT, "Remembrement d'un village picard brûlé par les nazis", New-York Herald Tribune, 3 avril
1945.
65
"s'élève
énergiguement contre la dépossession
de (sa)
ferme où il ne (lui) mangue gue la maison
d'habitation.
Une cave profonde est intacte
ainsi gu'une
citerne.
(Elle n'est)
pas sinistrée
totale.
Il (lui) reste une
vaste grange en ardoises et fibres et toutes les
tables
et dépendances pour matériel
agricole,
autour
d'une
grande cour avec jardin
et plants
(... ) en
plein
rapport.
(Lui) attribuer
6a70 sensiblement
sur•
l'emplacement
actuel de (sa) ferme, c'est se moguer (d'elle),
à moins
gue l'on estime déjà gue de la façon dont (elle)
va
être
dépouillée,
(elle
sera)
dans
l'obligation
d'abandonner (son
exploitation.
Pour les terres,
on démolit (sa) culture.
On (lui)
enlève (ses) meilleures
terres pour (la) placer où les
autres ne veulent pas aller
(...).
(Aussi, elle) refuse catégoriguement
d'adhérer
à un
remembrement effectué de façon aussi partiale."
(125)
D'autres prétendent que ce sont les petits cultivateurs,
et les petits rentiers qui ont été les plus mal servis. Mais le
plus souvent, il s'agit de la jouissance de jardins ou de
parcelles de peu de valeur agronomique qui n'étaient pas
susceptibles d'être mises en valeur autrement que sous la forme
de potagers.
Qu'à cela ne tienne, comme le dit si bien Paul DUFOURNET:
"Les petits
rentiers
ne changent guère de place, un
simple ripage le long de la voie où ils
habitaient
anciennement
(...).
Ils abandonnent donc une terre à
jardin pour une autre terre à jardin."
(126)
Quant aux petits cultivateurs,
"(...)
ils referont un jardin dans une ancienne
de culture,
voila tout." (127)
terre
Aussi, à la demande d'autorisation de réparer de la part
d'un sinistré, Paul DUFOURNET émet un avis défavorable qu'il
argumente comme suit:
"Cette maison est vétusté et il n'y a aucun intérêt à
la remettre
à neuf. D'autre
part,
comme je
dois
provoguer un remembrement de la propriété
bâtie, il est
probable gue cet immeuble, situé en plein centre de
destruction
sera une gêne, et gu'il devra
disparaître.
Son état de vétusté
ne permet pas d'en tenir
compte.
125. Lettre du 17 juin 1943. A.D. 80, Fonds. P. DUFOURNET.
126. P. DUFOURNET, "Quelques précisions au sujet du Bosquel", 30 décembre 1946. A.D. 80, Fonds. P.
DUFOURNET.
127. Idem.
66
Dans ce cas (...),
il faudrait
que le sinistré
fasse
les réparations
les plus nécessaires
à ses
propres
frais,
en considérant
qu'il
vaut mieux pour
lui
d'habiter
dans sa maison que dans un baraquement.
Il
réserverait
ainsi tous ses droits à l'aide
que pourra
lui procurer la loi du 11 octobre.
Il
y aurait
lieu
d'avertir
l'intéressé
de
la
précarité
de son installation."
(128)
De manière générale, on s'oppose à toute reconstruction ou
à
toute
construction
provisoire
qui
pourraient
gêner
ultérieurement
la
réalisation
des
projets
du
Plan
d'Aménagement. Certains baraquements sont même à certaines
périodes déplacés, pour faciliter les travaux de voierie par
exemple (129).
Dans une lettre adressée au Commissaire de la Répuplique
de Saint-Quentin, cinquante signataires résidant au Bosquel
font part de leurs réclamations. Un certain nombre de
propriétaires du village étant prisonniers en Allemagne, il
leur semble tout-à-fait incorrect de ne pas attendre leur
retour pour prendre les décisions concernant les échanges de
terrains ou les démolitions de maisons. Ils reprochent à la
commission chargée de l'évaluation du classement des terres de
ne comporter que des représentants de la grosse propriété. Ils
considèrent que les petits et moyens propriétaires sont lésés
du fait que leurs parcelles perdent de leur valeur tant du
point de vue de la vente que du point de vue de la location
puisqu'elles se trouvent dorénavant enclavées dans des domaines
exploités souvent en fermage. Mais, chose plus grave encore,
ils estiment que le gouvernement PETAIN-LAVAL étant tombé, il
n'y a plus lieu de continuer les opérations commencées sous une
législation considérée comme caduque et parfaitement antirépublicaine (130).
D'autres encore contestent les mesures d'expropriation
dont ils font l'objet du fait que leur maison, ou certains
hangars de ferme, épargnés par les bombardements, sont frappés
d'alignement. Considérant le contexte financier de l'époque,
ces bâtiments, aussi vétustés et incommodes qu'ils puissent
être, représentent cependant des garanties plus rassurantes que
celles d'une démolition qui ne serait pas suivie d'une
reconstruction, ou dont la réparation leur coûterait de
l'argent.
128. Avis du 9 juillet 1941. A.D. 80, Fonds. P. DUFOURNET.
129. Lettre du 5 juin 1941. A.D. 80, Fonds. P. DUFOURNET.
130. Lettre du 24 novembre 1944 à Honsieur le Commissaire de la République à Saint-Quentin. A.N. AFU
10788.
67
Certains préféraient rester à l'intérieur du village
plutôt qu'en périphérie, du fait de l'isolement. On alla
jusqu'à parler de "déportation"
(131).
De telles réclamations ne pouvaient guère être ignorées.
Les principaux points sur lesquels portait la demande de
correction avaient été respectés: dans la mesure où la
Commission Départementale de Remembrement donnait son accord,
le Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme consentit à
ce que les bâtiments réparables soient conservés, à condition
qu'ils soient rendus utilisables à un coût inférieur au prix
d'une construction provisoire. De la même manière, les
expropriations allaient être réduites au strict minimum et dans
le seul intérêt public (132).
En fait le remous dont il est question a vu le jour et
s'est trouvé amplifié à l'occasion d'un changement de la
municipalité. D'aucuns prétendent que
"ces élections
n'avaient
rien de politique,
l'unique
plateforme
sur laquelle
les
adversaires
se
sont
affrontés
ayant été le remembrement urbain.
Résultat:
l'ancien conseil municipal composé de partisans
résolus
du remembrement urbain a été renversé et remplacé par
un nouveau conseil composé d'adversaires."
(133)
Lors d'une réunion d'information sur ce remembrement (134)
Marcel GAY présenta onze réclamations portant sur 8 % du
territoire remembré. Considérant que tous les propriétaires ont
été consultés avant toute opération, et étant données toutes
les contingences dont il a fallu tenir compte pour aboutir, les
réclamations sont jugées par une Commission Départementale. Les
réclamants ne l'entendent pas de cette oreille. Ils en
informent la presse et cela fait grand bruit, jusqu'à Paris.
Il est certain que cette hostilité ouvertement déclarée
contre
les
opérations
de
réorganisation
foncière
et
d'expropriation
a
contribué
à
mettre
en
relief
les
irrégularités dans les procédures adoptées, et surtout les
incohérences ou les vides juridiques nombreux en cette période
très troublée (135). Une révision partielle du plan d'urbanisme
131. Entretiens.
132. P. DOFOURNET, Le Bosquel. Révision du Projet de Reconstruction. 1er mai 1946. A.H. AFÜ 10788.
133. Compte-rendu de la lission confiée à P. HAURIN par Monsieur le Ministre. Année 1945. A.D. 80, 15 J3.
134. Réunion d'information du 17 déc. 1945 sur le remembrement du Bosquel. A.D. 80, 15 J3.
135. Le fait par exemple que certains aient reconstruit d'eux-mêmes sur des parcelles dont ils sont
expropriés; le fait que, les échanges de parcelles ayant eu lieu, certains ont replanté ou déboisé des
terrains nouvellement appropriés... le fait aussi que, compte tenu des expropriations envisagées, le
de la commune a donc été entreprise, dans la stricte limite de
modifications mineures et par voie amiable.
Malgré quelques autres plaintes pas toujours justifiées
(136), les présidents communaux se sont réunis le 3 avril 1946
dans le cadre de la Fédération des syndicats agricoles du
canton de Conty. Surpris par un certain nombre d'articles
diffamatoires à 1'encontre d'une opération somme toute fort
bénéfique d'un point de vue agricole, ils ont souhaité faire
savoir au monde agricole, par voie de presse également (137),
que les cultivateurs du Bosquel sont satisfaits du dernier
remembrement. La motorisation croissante nécessitant un
remaniement
parcellaire
et généralisé, l'assemblée des
présidents conseille à chaque agriculteur d'être partisan d'un
remembrement, afin "d'être toujours à l'avant-garde
du progrès"
(138).
Car il est une évidence: si autrefois un paysan était
obligé d'arrêter et de dételer son cheval de la charrue au bout
de chaque sillon pour labourer son champ, depuis la
réorganisation foncière, il le fait dans une proportion de dix
à vingt fois moindre. Tout comme il fait des économies
considérables en main d'oeuvre et en temps de travail parce
qu'il peut introduire des machines agricoles et qu'il n'a plus
à aller d'un bout de la commune à l'autre pour exploiter
l'ensemble de ses parcelles.
Qui oserait le nier?
5.5. Les résultats du remembrement:
C'est ainsi qu'
"En application
de la loi du
du 7 janvier
1942, validée
juillet
1945 et l'article
9
septembre
1945 n° 45-2063,
interministériel
du 19 octobre
9 mars 1941 et de décret
par l'ordonnance
du 7
de l'ordonnance
du 8
complétée
par
l'arrêté
1945, il a été procédé
remembrement a été opéré sur des terrains considérés come nus alors qu'après révision du Plan
d'Aménagement, les immeubles intacts seront conservés... à cheval sur plusieurs parcelles parfois!
136. Telle celle de ce particulier qui, résidant à Amiens, dit n'avoir jamais été consulté lors du
remembrement. I l aurait été oublié dans la liste des habitants et on ne lui aurait pas attribué de
terrain en échange du sien. On aurait omis de lui reconstruire sa maison sinistrée. Lettre du 30 avril
1946. A.D. 80, 15 J12.
Alors qu'une lettre du géomètre expert chargé des opérations nous apprend que ce monsieur a été
régulièrement avisé de toutes les enquêtes et qu'ayant choisi de lui-même de reconstruire sa maison dans
un village voisin, on lui a octroyé un terrain qui n'avait plus besoin d'être au centre du village... X.
GAY au H.R.Ü. Lettre du 8 juin 1946. A.D. 80, 15 J12.
137. Le Courrier Picard, 8 avril 1946.
138. Communiqué du président cantonal de Conty, le 5 avril 1946. A.D. 80, 15 J12.
69
aux opérations
du remembrement rural et urbain de tout
le territoire
de la commune du Bosquel. Ce remembrement
a été clôturé
et est devenu définitif
ainsi
qu/il
résulte
d'un arrêté de Monsieur le Préfet de la Somme
en date du 7 octobre 1946." (139)
5.5.1. L'évolution de la structure des exploitations
Le remembrement terminé, la physionomie de la commune
avait changé:
Classes de S
1899
1929
1941
1946
< 5 ha
73
16
11
13
0
2
14
6
0
17
4
1
2
3
2
11
3
1
0
1
1
8
5
1
42
27
22
16
5-10
10-20
20-50
50-100
> 100 ha
TOTAL
Evolution du nombre des exploitations par classe de surface.
Source: P. Clergeot, Le Bosquel. Un exemple d'aménagement rural, 1968.
Déjà, le remembrement de 1934 avait entrainé une
transformation considérable de la structure des exploitations.
Le désenclavement de la majorité des parcelles avait permis
l'introduction de la mécanisation et une réduction considérable
des charges de travail. Le second remembrement ne fit que
conforter le mouvement impulsé au point que seules les unités
d'exploitation considérées comme viables étaient conservées,
voire consolidées (soit par agrandissement, soit par réduction
du nombre de leurs parcelles, soit par un regroupement toujours
plus précis des terres les composant). Ainsi, il précipita la
disparition des petites et très petites fermes déjà presque
économiquement condamnées. En revanche, il favorisa et conforta
l'implantation et la pérennité des exploitations de taille
moyenne.
139. A.D. 80, 15 J12.
70
Un parcellaire tout-à-fait différent:
En 1940
En 1945
Parcelles cadastrales
1.519
599
Surface moyenne d'une
parcelle cadastrale
75,37 ares
1 ha 91
Ilots de propriété
1.323
599
Surface moyenne d'un
ilôt de propriété
86,56 ares
1 ha 91
Ilots de culture
529
69
Surface moyenne d'un
ilôt de culture
1 ha 47
11 ha 82
Longueur des chemins
21 km
18,2 km
Source: H. GAY, "Les remembrements du Bosquel", si, nd. Archives privées.
Le remembrement terminé en octobre 1944, pour les seize
exploitants, il n'existe plus que 73 ilôts de culture dont le
plus petit mesure 30 hectares et le plus grand 185 hectares;
alors qu'en 1935, il y en avait encore 555.
C'est ainsi que la plus grande exploitation du village,
alors en pleine propriété, ne compte plus qu'une parcelle pour
une superficie de 185 hectares, alors qu'en 1934, elle en
comptait plus de 30.
Le remembrement aurait permis de réaliser une augmentation
de rendement de 30 % à l'hectare et une baisse de frais de
l'ordre de 30 à 40.000 francs à l'hectare (140). Cela
s'explique aisément du fait qu'ayant cherché à regrouper les
terres d'un même exploitant, les opérations ont entraîné une
multiplication par dix de la surface moyenne des ilôts de
culture ainsi qu'une amélioration de leur viabilité. Aussi,
l'augmentation
de la superficie moyenne des parcelles
d'exploitation s'accompagnait-elle également d'une diminution
de plus de moitié du nombre des ilôts de propriété.
De la même manière, suivant le principe du remembrement
d'exploitation et non plus celui du remembrement de propriété,
140. "un village détruit s'est enrichi...", Le réveil de Neufchâtel, 16 mai 1951.
71
quelques changements furent apportés dans les relations entre
bailleurs et preneurs. La redistribution des parcelles s'étant
effectuée au profit des locataires par regroupement des terres
d'un même propriétaire entre les mains d'un seul fermier, le
nombre de bailleurs par preneur diminua de moitié voire
davantage.
Une nouvelle répartition des biens nécessitait un nouveau
réseau de chemins pour les desservir. Parce que rayonnant à
partir du centre du village, l'ancien réseau mis en place lors
du premier remembrement fut en grande partie conservé et élargi
pour permettre la traversée des machines agricoles. Il était
parfaitement adapté à l'organisation concentrique du plan
d'aménagement prévu. Devenus inutiles, les chemins transversaux
quant à eux furent pour la plupart supprimés, tout comme fut
supprimé l'ancien tour de haie, vestige d'un ' ancien droit
d'usage.
D'un
point de vue qualitatif,
remembrement sont donc considérables:
les
avantages
du
"bâtiments
de
fermes
entourés
de
pâturages,
utilisation
de moyens mécaniques
puissants,
{•--)
rapidité
des moyens mis en oeuvre, desserte
facile
des
parcelles,
amélioration
des cultures
et des
rendements,
indépendance des assolements..."
(141),
autant de résultats positifs
promoteurs de la Reconstruction.
à mettre
141. H. GAY, "Les remembrements du Bosquel", si, nd. Archives de Marcel GAY.
à
l'actif des
72
6. Le Bosquel sous l a r e c o n s t r u c t i o n
"Le
village
semble
abandonné. " (142)
un
campement
de
bohémiens
Les allemands p a r t i s ,
il
a fallu
s'organiser.
La
r e c o n s t r u c t i o n proprement d i t e ne commencera qu'aux alentours
de l ' a n n é e 1945.
6 . 1 . L'équipe des architectes d'opération:
C ' e s t dans l e cadre d'une c i r c u l a i r e m i n i s t é r i e l l e que l e s
s i n i s t r é s qui en f a i s a i e n t la demande ont é t é informés de l a
l i s t e générale des a r c h i t e c t e s qui ont manifesté l e d é s i r de
t r a v a i l l e r dans l a région. Libre à eux de c h o i s i r c e l u i qui
l e u r convenait (143).
Par un c o u r r i e r du 22 f é v r i e r 1945, Paul DUFOURNET demande
au chef du Service des Matériaux, des Transports et des
Constructions P r o v i s o i r e s du Ministère de l a Reconstruction e t
de l'Urbanisme (144) de désigner Jean BOSSU, P i e r r e DUPRE,
Louis MIQUEL, Maurice GRANDJEAN e t Raymond SENEVAT comme
architectes
chargés
de
l'édification
des
constructions
p r o v i s o i r e s . Mis à p a r t Maurice GRANJEAN, tous l e s a r c h i t e c t e s
placés sous la d i r e c t i o n de Paul DUFOURNET (145), é t a i e n t
d'anciens élèves de LE CORBUSIER. S p é c i a l i s é s dans l ' h a b i t a t
r u r a l , l a plupart d ' e n t r e eux avaient p a r t i c i p é aux travaux du
c h a n t i e r 1425 d i r i g é par Georges HENRI RIVIERE.
Paul DUFOURNET souhaite l e u r c o l l a b o r a t i o n du f a i t q u ' i l s
connaissent bien l e s r é a l i t é s du monde a g r i c o l e . I l veut
s ' e n t o u r e r d'une équipe convaincue de l a n é c e s s i t é de prendre
en compte des considérations d ' o r d r e socio-économique dans l e s
r é f l e x i o n s d'aménagement. Peu l u i importe q u ' i l s s o i e n t ou non
admis à l'Ordre, des Architectes (146).
142. L'expérience du village de demain, Aux Armes. Revue du peuple français et de son armée, (19), juin
1946.
143. Sous réserve que le volume des travaux de ces derniers ne dépasse pas le plafond assigné.
L'Ingénieur des Ponts et Chaussées à Paul DUFOURNET. Lettre du 22 octobre 1943. A.D. 80, 15 J12.
144. P. DUFOURNET au Chef du service des Matériaux, des Transports et des Constructions Provisoires.
Lettre du 22 fév. 1945. A. D. 80, 15 J3.
145. Jean BOSSU, Denis HIQUEL, Pierre DUPRE....
146. Si cela est vrai lors de leur "recrutement", Paul DUFOURNET souhaite que par la suite, ils soient
admis à l'Ordre afin qu'ils soient officiellement habilités à se prévaloir d'être mandatés par le H.R.U.
Lettre du 2 mai 1945, A.D. 80; 15 J3.
73
Bien qu'ils aient tous contribué à l'édification des
bâtiments de la première ferme (la ferme QUESNEL), les
architectes d'opération se répartirent par la suite les autres
fermes et maisons d'habitation à reconstruire.
Ils travaillaient en étroite collaboration avec Paul
DUFOURNET auquel ils soumettaient leurs projets de plans. S'ils
soumettaient ces plans à leurs clients, s'ils en discutaient
certaines modifications, et sauf intervention des pouvoirs
publics, il semble qu'il n'y ait guère eu moyen de leur faire
abandonner leur projet, dans les grandes lignes tout du moins.
Quels qu'aient été leurs souhaits en la matière, ils se
devaient toutefois de respecter autant que possible les
directives du Ministère de la Reconstruction, directives
consignées dans deux fascicules supposés présenter l'essentiel
des règles à suivre (147).
5.2.
La main d'oeuvre:
L'Etat a fait appel à des entreprises locales pour mener à
bien
les chantiers de
la Reconstruction: déblaiement,
dessouchage, adduction d'eau, implantation des bâtiments...
Quelques incidents ont marqué l'intervention de la première
d'entre elles (désorganisation des chantiers, soulèvements
d'ouvriers, intervention des syndicats...) (148). La COGETRAVOC
qui lui succéda se révéla parfaitement compétente pour mener à
bien les travaux entre-temps interrompus. Ce sont 500 hommes
qui sont concernés.
En mars 1945, un camp de jeunes a été installé non loin du
cimetière. Ce sont les "jeunesses à PETAIN".
"Ils portaient
le béret.
Ils chantaient
"Maréchal
nous voila!"
et tous les jours au iaatin, ils
hissaient
le drapeau. Ca marchait comme à l'armée."(149)
Jeunes orphelins ou jeunes délinquants, ils dépendent du
service des jeunes du ministère du Travail. Ils doivent
contribuer à déblayer les décombres, puis à réaliser les
travaux de la déviation de la route nationale. Ils sont logés à
la même enseigne que les villageois. Pour améliorer leurs
conditions d'existence, pour "occuper leurs heures creuses",
on
leur installa cependant une cuisine dallée, un foyer, une
147. Reconnandations—
148. Conpte-rendu de la cission confiée à P. KAUBIN par Konsieur le Hinistre. Année 1945. A.D. 80, 15 J3.
149. Entretiens.
74
bibliothèque. On demanda même la présence d'une assistante
sociale pour être à leur écoute.
Une trentaine d'entre eux ont été réquisitionnés pour
l'exploitation de la carrière de pierre de Conty. Une
soixantaine est placée sous la responsabilité de la COGETRAVOC.
Ils sont encadrés par des ouvriers spécialisés. Cependant,
"Ces jeunes n'ont
pas été dirigés
sur le
Bosquel
uniquement pour fournir
tout
ou partie
de la main
d'oeuvre
nécessaire
au relèvement
du village,
mais
aussi pour y recevoir
une orientation
professionnelle
et la préparation
au métier qu'ils
ont choisi."
(150)
Aussi, la COGETRAVOC s'est-elle employée à les regrouper
selon leurs aspirations et prédispositions
(maçonnerie,
menuiserie, charpente, couverture, ferraillage, coffrage...).
Son directeur étant inspecteur de l'enseignement technique dans
les écoles de bâtiment de la ville de Paris, la notion
d'orientation professionnelle prend alors tout son sens. Il est
même proposé que des certificats sanctionnent le travail et les
efforts fournis par ces mineurs.
Par
contre,
leur
intervention
seule
n'est
guère
suffisante. On envisage de tirer profit de la présence d'un
grand nombre de prisonniers de guerre.
"Le M.R.U aurait
à constituer
un commando
spécial.
Les prisonniers
de guerre
pourraient
toucher
les
rations de travailleurs
de force (...).
Il faudra
aussi
faire parmi eux un tri des spécialistes
utilisables."
(151)
Les gens du Bosquel se souviennent encore des rails et des
petits wagonnets avec lesquels on charriait les gravats. Le
soir et le dimanche, les enfants les utilisaient pour jouer au
petit train.
6.3. De nouveaux procédés de construction
Le torchis a été définitivement abandonné au profit de
matériaux plus nobles, plus faciles à entretenir et surtout
adpatés aux nécessités d'économie et de rapidité. Des matériaux
locaux, utilisés à l'état brut, ne nécessitant pas de
transport,
des éléments
de
construction
préfabriqués,
l'intervention d'ouvriers non spécialisés et l'exécution des
150. Coipte-rendu de la mission confiée à P. HAURIN par Monsieur le Ministre. Année 1945. A.D. 80, 15 J3.
151. Conférence du Bosquel du 2 novembre 1945. A.D. 80, 15 J12.
75
travaux par une seule e t même e n t r e p r i s e sont l e s garants d'une
r e c o n s t r u c t i o n à moindre coût.
Mais pour v é r i f i e r l ' i n t é r ê t de t e l l e s p r o p o s i t i o n s , i l
faut c o n s t r u i r e "une maison d'essai"
(152).
"Cette première ferme doit être au Bosquel ce que le
Bosquel doit être à la reconstruction
rurale,
c'est-àdire la construction
témoin qui permettra la mise au
point
des dispositions
générales,
des
techniques
diverses
et des procédés
de construction
avant de
passer à la construction
générale du
village."(153)
A i n s i , malgré l e s r é t i c e n c e s des b o s q u e l l o i s (154), l e s
fondations de l a première ferme sont en béton de c a i l l o u x , mais
l e s murs porteurs sont en béton de t e r r e (155). Les murs
e x t é r i e u r s sont l a i s s é s nus. Tous l e s encadrements de b a i e s ,
lanterneaux d ' é c l a i r a g e , abat-foin ( 1 5 6 ) . . . sont en ciment
moulé, préfabriqué. Les planchers sont en béton armé coulé sur
p l a c e . Les charpentes sont confectionnées en bois assemblé e t
l e s couvertures en a r d o i s e s .
Le choix du béton de t e r r e (157) r e l è v e d'un souci
d'économie f o r t j u s t i f i é en c e t t e période de pénurie de
matériaux. C'est a i n s i par exemple, q u ' i l n ' e s t pas besoin de
f a i r e acheminer du sable puisque l e s c o n s t r u c t e u r s u t i l i s e n t
une t e r r e a r g i l o - s a b l e u s e qui se trouve à proximité du
c h a n t i e r . Le parement du béton de t e r r e é t a n t d'un bel aspect,
i l e s t d ' a u t r e p a r t i n u t i l e de prévoir des enduits e x t é r i e u r s ,
d'où une nouvelle économie de ciment (158).
De l a même manière, en matière de r e c o n s t r u c t i o n des
bâtiments d ' e x p l o i t a t i o n , un p r i n c i p e simple c o n s i s t e à t e n i r
compte de l ' é v o l u t i o n des techniques a g r i c o l e s : l e s é t a b l e s
152. R. AUZELLE, P. DUFOURNET, "Hôte présentant la pensée des auteurs sur la reconstruction rurale", s i ,
nd, A.D. 80, 15 J3.
153. P. DUFOURNET, "Rapport relatif à la construction de la prenière ferme du Bosquel", s i , nd. A.D. 80,
Fonds P. DUFOURNET.
154. Le béton de terre n'était pas un matériau suffisamment noble. Ils auraient préféré que l'on emploie
du ciment, cf P. DUFOURNET, "une expérience de construction en béton de terre stabilisé", Cahiers du
Centre Scientifique et Technique du bâtiment (81), 1950, pp. 20-21.
155." Le béton de terre stabilisé est l'amélioration conduite d'une manière scientifique, d'un procédé de
construction très ancien et très répandu dans différents pays où i l a donné d'excellents résultats: le
pisé de terre." in: P. DUFOURNET, "Une expérience de construction en béton de terre stabilisé", Cahiers
du Centre Scientifique et Technique du bâtiment (81), 1950, pp. 7-23.
156. Sorte de tuyau en béton qui laisse tomber du grenier le foin qu'un couloir de circulation permet de
distribuer aux bêtes.
157. "Béton de terre stabilisé à 100 kg de ciment par mètre cube pour les murs extérieurs et en
agglomérat pur sans ciment pour les murs de refend". P. DUFOURNET, Projet de reconstruction du Bosquel.
Rapport relatif à la construction de la première ferme, Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme,
sd, A.D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
158. P. DUFOURNET à H. HORIN, Ingénieur. Lettre du 2 mai 1945. A.D. 80, 15 J3.
étaient-elle devenues trop exiguës? Il s'agit de leur offrir
plus d'espace. Les récoltes demandent-elles à être rentrées? Il
suffit de prévoir un grand gerbier. Les machines font-elles
leur apparition? Les accès aux bâtiments seront élargis...
6.4. La construction des fermes modèles
L'implantation des bâtiments a été déterminée par le
relief et l'exposition. C'est ainsi que certaines cours de
ferme ont un côté courbe (parallèle aux courbes de niveau) et
oblique par rapport à la rue.
A la suite du chantier QUESNEL,
Ferme " (... ) qui devait servir
de cobaye tant au
point de vue des procédés de construction
et des prix
de revient qu'au point de vue des commodités offertes
à
l'exploitant."
(159)
pour des raisons d'économie et de rapidité d'exécution, et
parce que le ciment était de nouveau en abondance suffisante,
le béton de terre stabilisé fut définitivement abandonné. Pour
tous les autres chantiers, on adopta le principe des portiques
de béton armé entre lesquels un matériau de remplissage est
disposé: ce sera la brique pour les habitations et le parpaing
de béton de terre pour les exploitations et les annexes.
Une des fermes est décrite comme étant une ferme omnibus
(160). Elle répond au principe des fonctions multiples dans un
local unique. Le travail dé l'agriculteur y est rationnalisé à
la manière du travail de l'ouvrier en usine. Le hall de
l'étable par exemple, peut recevoir toutes sortes de bétails,
selon l'état des marchés. On y trouve notamment un fumier
couvert qui permet une stabulation libre. De même, un pont
roulant le long de la fumière ouverte assure des translations
longitudinales et transversales. Les équipements y sont
interchangeables.
Les autres fermes sont dites à économie familiale. Leur
composition, leurs structures tendent à privilégier une
exploitation du type qualitatif et non un rendement meilleur
qui participerait à un développement économique.
Pour
certains,
la
première
ferme
ressemble
indiscutablement à un blockaus (161). En Picardie, on n'est
guère habitués à ce genre de construction. On la décrit comme
159. Rapport du Délégué Départemental à la Reconstruction du 15 oct. 1945. A.D.80, 15 J3.
160. J. BOSSU, Techniques et Architecture (34), 1946, p. 136.
161. "Le reiembreient est une étape indispensable", Journal Agricole, 27 mars 1946.
77
un simple "rectangle percé de six fenêtres". Le toit plat
surprend dans une région où les pluies sont fréquentes.
L'absence de grenier dérange.
6.4.1. Les maisons d'habitation
Toujours placées aux abords de la route pour, faciliter les
rapports avec le village ainsi qu'une certaine surveillance de
l'entrée, les maisons d'habitations respectent toutes un modèle
type. On y trouve généralement un vestibule avec lavabo et
porte-manteaux. Cette entrée donne directement soit sur une
salle-cuisine, soit dans une grande salle à manger contiguë à
une cuisine par laquelle elle communique parfois par un passeplats. La laverie qui ne se trouve jamais très loin est
toujours proche d'un cellier. On a pensé à réserver une petite
pièce qui fait office de bureau pour les comptes ou la
réception des employés. Enfin, WC et chambres se répartissent
au rez-de chaussée et à l'étage où on trouve aussi une salle de
bains.
Accolés à la maison d'habitation, on trouve parfois une
buanderie, une laiterie, une laverie pour les ustensiles de la
ferme, une chambre de domestiques parfois, un bûcher pour le
bois de chauffage et un garage pour les véhicules utilitaires.
Les architectes avaient tout de même pour consigne de
respecter autant que faire se pouvait les avis des sinistrés.
Avant toute réalisation sur le terrain, les plans des futures
constructions étaient donc soumis aux intéressés et remanier si
besoin
était. Les
remaniements
devaient
consister
en
aménagements, non en transformations des structures proposées.
Agrandir une cuisine au détriment d'une salle à manger,
supprimer un'passe-plats, perfectionner la fonctionnalité d'un
bâtiment agricole en tenant compte de l'expérience des
cultivateurs... étaient envisageables. Changer d'orientation ou
déplacer l'entrée principale également. Déplacer la maison par
rapport aux bâtiments d'exploitation l'étaient moins. Modifier
quelques éléments mineurs, oui; bouleverser l'esprit même de la
Reconstruction, non.
Mais tout dépendait de l'architecte. Un simple changement
accordé par l'un prenait les proportions d'une dénaturation
source de conflits pour les autres. Tout dépendait aussi de la
perception que le sinistré pouvait bien avoir des conditions
dans lesquelles il allait pouvoir de nouveau vivre et
travailler. N'oublions pas que les hommes n'étaient pas tous là
78
et que ce sont souvent leurs femmes, seules, ou des personnes
âgées, qui durent donner des avis.
"Au point qu'à leur
nos maris modernisés."
retour
(162j
de captivité,
on a
voulu
Et puis, ces architectes représentaient la Science, du
moins un certain savoir, et l'Etat. Qui plus est, à moins
d'être attaché au passé au point de refuser d'habiter la
nouvelle construction,
"... quand on n'a
accepter..."
(163 j
plus
rien!
on
est
prêt
à
tout
Il semblait donc difficile de remettre en cause leurs
plans. A posteriori seulement, on se rend compte qu'un meilleur
dialogue aurait peut-être évité certaines rancoeurs. Et si en
ce temps là, certains considéraient par exemple que les
baignoires seraient utilisées comme abreuvoirs dans les
pâtures, d'autres pensaient que "si eux ne s'en servaient
pas,
leurs
enfants
sauraient
en profiter".
De même, si plutôt que
d'installer des waters, certains ont préféré élever des lapins
dans la pièce prévu à cet effet, leurs petits-enfants ont bien
aménagé les lieux comme on.l'imaginait pour eux.
6.4.2. Les bâtiments d'exploitation:
La note justificative des architectes sur les dispositions
générales à adopter pour la construction des bâtiments
d'exploitation donne les indications suivantes (164):
L'écurie est placée dans la partie du bâtiment la plus
voisine de l'habitation pour en faciliter la surveillance. Elle
comporte un box de juments poulinières, des stalles pour
chevaux, des portes-harnais, des mangeoires et des râteliers
individuels, un coffre à avoine directement relié à la
mélangerie. La hauteur sous plafond doit être de 5 m, le
couloir de service de 3,35 m (ce qui correspond au "recul
de
chevaux de grande race").
Les portes ont une largeur de 1,55 m,
"le fumier étant enlevé par ia benne du transporteur".
Les sols
sont en béton de ciment et comportent des rigoles.
L'étable doit être connexe avec là mélangerie et la
furniere. Elle comprend deux rangs d'animaux mis dos à dos, avec
162. Entretiens.
163. Entretiens.
164. Rapport du 6 nov. 1945. A.D. 80, 15 J3.
un couloir central pour le service et des couloirs latéraux
pour l'alimentation. Leurs dimensions sont également très
précisément calculées en rapport avec l'envergure du système
d'enlèvement du fumier et de celui de l'alimentation. L'espace
entre les bêtes est de 1,10 m "pour procéder
à la traite
et
assez étroit
pour que les bêtes
couloir de service et ne souillent
La bergerie
restent
perpendiculaires
pas leur
place".
au
se compose de crèches doubles mobiles et
d'auges volantes "permettant de former des groupes
brebis et béliers au moment de la
parturition".
ou
d/isoler
La
mélangerie
doit
comporter
un
certain
nombre
d'instruments dont un mélangeur, un brise-tourteaux, un hachepaille... La "cuisine
à porcs" abrite un cuiseur électrique, un
concasseur, des bacs de mélange...
La mélangerie et la "cuisine
à porcs"
communiquent avec
les réserves à grains ou tubercules. Entre les deux, on doit
pouvoir installer des silos à orge, à blé ou à seigle, une
trémie d'issue du grenier à avoine, une trémie d'issue des
menues pailles, un monte-charge pour les pommes de terre et les
betteraves.
Le bâtiment d'exploitation abrite aussi un fenil et des
greniers à céréales ensachées. Le foin y est emmagasiné sur le
plancher haut de l'espace réservé aux bêtes. Un système
d'abats-foin assure 1'emmagasinement des rations quotidiennes
et leur descente dans les étables. Les caves et les silos-cuves
sont accessibles par des soupiraux. Des monte-charges
permettent d'en remonter le contenu.
L'éclairage du bâtiment est vertical et de type indirect
"réalisé
évitant
par chassis placés en lanterneau au dessus du plafond
l'éblouissèment
des bêtes.".
Il est prévu que les
chassis s'enlèvent pour la ventilation.
A proximité du bâtiment d'exploitation se trouvent la
porcherie, les fumières et le gerbier ou hangar agricole. Les
bâtiments sont espacés les uns des autres en vue de favoriser
la protection contre l'incendie. Les annexes du bâtiment
d'exploitation peuvent être aussi le garage à tracteur, un
petit atelier de réparation, une "chartrie"
qui sert à 1'abris
des charrettes, un poulailler, des clapiers....
80
6 . 4 . 3 . L'adduction d'eau:
Comme nous l'avons évoqué plus haut, avant la guerre de
40, le village s'approvisionnait à un puits communal. Son débit
était si faible en été que les agriculteurs devaient se rendre
à Conty, 5 km plus loin, pour avoir de l'eau.
Dès la fin de la guerre, le village de Dieulefit dans la
Drôme fait don d'une enveloppe au Bosquel. Cela lui permet de
construire un nouveau puits, profond de 95 mètres. Alors on put
songer à alimenter toutes les fermes en eau.
En attendant que le réseau de canalisations d'eau potable
soit installé, le service d'eau courante du village est alors
assuré par un réseau de canalisations provisoires en tubes
d'acier posés à même le sol. Pour parer au plus pressé et parce
qu'un plan existait déjà pour avoir servi en un autre lieu,
c'est VAUBOURDOLLE qui impose en quelque sorte le réservoir
(165), sans se soucier le moins du monde d'esthétique ou
d'intérêt local.
6 . 4 . 4 . La d i s t i l l e r i e :
Le p r o j e t d'aménagement e t de r e c o n s t r u c t i o n du v i l l a g e
prévoyait l ' i n s t a l l a t i o n d'une d i s t i l l e r i e c o o p é r a t i v e .
"Elle devait permettre le développement de la
culture
de
la
betterave
et
contribuer
à
améliorer
considérablement
la richesse du pays et des
exploitants
(...)."
(166)
Cinq h e c t a r e s du t e r r i t o i r e communal ajoutés à 3,30 ha
prélevés sur des t e r r a i n s privés devaient s e r v i r à sa c r é a t i o n .
Cette d i s t i l l e r i e ne fut jamais c o n s t r u i t e . Le t e r r a i n qui
l u i é t a i t d e s t i n é e s t aujourd'hui en l o c a t i o n . Une a s s o c i a t i o n
foncière en assure l a g e s t i o n . Les revenus sont versés au
budget communal e t servent à l ' e n t r e t i e n de l a v o i e r i e .
165. "Cette attitude illustre bien l'antagonisme entre les conceptions des architectes et celles du
Ministère de la Reconstruction: l'idée de faire progresser les techniques et modes de construction se
heurtait à l'utilisation des techniques existantes pour aller plus vite. VAUBOURDOLLE faisait alors
remarquer que c'est ainsi qu'il avait réalisé 1'electrification de la ligne SNCF PARIR-LE MANS, sans
innovation, et en temps voulu." Paul DUFOURNET. Entretiens.
166. R. LACOURLIE. Lettre du 20 décembre 1944. Archives du Génie Rural à Amiens.
81
6.4.5. L'église
Datant de 1790, l'église avait été sérieusement touchée
par les bombardements, mais elle restait debout, du moins ses
murs calcinés. Sa démolition fut à nouveau l'occasion de faire
éclater quelque polémique. Les partisans de sa restauration
soutenaient qu'elle pouvait être réparée et que tout du moins,
on aurait pu conserver ses pierres pour les utiliser
ultérieurement. Les partisans de sa démolition considéraient
pour leur part que construite en moellons de craie, maçonnée
avec de la terre, elle avait tant souffert du feu que sa
résistance devait en être amoindrie au point de la rendre
dangereuse. Aussi, l'église fut elle détruite. D'aucuns
prétendent que ses pierres ont été broyées pour être employées
au remblai, d'autres qu'elles ont été mises de côté (167).
"Le gros oeuvre en était
encore
si solide
que le
tracteur,
tirant
un câble fixé
au mur, se cabra comme
un cheval."
(168)
Plus tard, une église nouvelle, d'un style plus moderne
s'éleva à la même place que l'ancienne. Il s'agit en fait du
résultat d'un travail réalisé par un architecte d'opération qui
s'est inspiré de l'église conçue par Emmanuel GONZE à
Beuvraignes dans la Somme (169).
On baptisa ses cloches en 1952, comme pour signifier que
sa réédification avait pris tout son sens. Ces cloches sont
considérées comme des
"personnes
vivantes
lieux d'honneur parce
qui sont
toujours
placées
qu'elles
doivent
écarter
le
aux
mal."
C'est l'évêque d'Amiens, Monseigneur STOURM, qui est venu
lui-même bénir l'inauguration de l'église. Après en avoir fait
le tour extérieur puis le tour intérieur, les fidèles furent
invités à pénétrer dans les lieux pour assister à la messe. La
cérémonie prit fin par une bénédiction de la statue de SainteThérèse suivie d'une procession rituelle. Ce n'est qu'après le
déjeuner que les cloches, suspendues à une rampe fleurie posée
devant le choeur, furent bénies. A la fin de la liturgie, les
167. P. DÖFOÜBNET, Eléments d'une réponse aux "libres propos" de M. DELAHAÎE. 26 mars 1946. A.N. AFU
10788.
168. G. DELAHARE, Libres propos. 26 mars 1946. A.N. AFÜ 10788.
169. Paul DUFOURNET. Entretiens.
82
parrains des cloches les firent sonner pour la première fois à
toutes volées. Leur son retentit jusqu'au soir, tous les
villageois ayant défilé pour les ébranler et recevoir les
dragées traditionnelles du baptême de la main des parrains
(170).
6.4.6. La mare:
Il y a les partisans de sa conservation et ceux qui en
souhaitent la disparition. Ces derniers n'y voient qu'une
vulgaire zone marécageuse, danger permanent tant pour les
enfants que pour l'ensemble des villageois:
"Il y a lieu
de supprimer
la mare maintenue
par
l/urbaniste
au centre du village,
quel que soit le nom
dont on la baptise,
bassin ou plan d'eau, elle
n'en
demeure pas moins
néfaste
pour
la
salubrité
de
l'habitat."
(17i;
Les premiers arguent de son utilité comme réservoir d'eau
en cas d'incendie, mais aussi en tant qu'abreuvoir pour les
animaux lorsque l'eau viendrait à manquer (172). Son pourtour
maçonné et planté d'arbres milite par contre en faveur de son
côté esthétique.Paul DUFOURNET ne parle-t-il pas d'ailleurs de
"miroir d'eau" dans lequel se refléterait l'image de l'église?
"L'ensemble
que formeront
après la
l'église,
l'eau et les arbres que l'on
être du meilleur effet."
(173)
reconstruction
plantera
doit
En fin de compte, le Comité National à la Reconstruction
se prononce pour le maintien de ce plan d'eau, à titre
décoratif, à condition qu'il soit muni d'une clôture destinée à
empêcher les animaux d'en polluer l'eau (174).
170. Entretiens.
171. Le ministre secrétaire d'Etat à l'Agriculture à l'Ingénieur en Chef du Génie Rural. Lettre du 26
déc. 1942. A.D. 80, 15 J3.
172. P. DUFOGRHET. Enquête sur le Bosquel réalisée pour le délégué régional à la Reconstruction
Immobilière, le 15 juillet 1942. A.D. 80, 15 J3.
Extrait du registre des délibérations du Conseil Municipal du Bosquel. 31 mars 1942. A.H. AFÜ
10788.
173. P. DUFOÜRHET. Lettre du 15 juillet 1942. A.D. 80, Fonds P. DÜF0URNET.
174. Avis du Comité National de la Reconstruction sur le Plan de Reconstruction et d'Aménagement du
Bosquel. Le 18 décembre 1942. A.N. AF0 10788.
83
6.4.7. L'école des 20.000 pierres
C'est en juillet 1942 que les prisonniers du Stalag IIB
décident d'ouvrir une collecte afin d'offrir une école à un
village de France particulièrement éprouvé par la guerre.
Soumis au maréchal PETAIN, leur projet se concrétisa. Ils
purent choisir entre trois noms de localité où les écoles
avaient été détruites. Il semble que la présence parmi eux du
fils d'un habitant du Bosquel les fit se décider pour ce
village (175).
Il y avait à peu près 25.000 français inscrits au Stalag
IIB. En donnant un mark, chaque prisonnier apportait sa pierre
pour reconstruire l'école. C'est ainsi que les prisonniers du
Stalag II B ont envoyé l'équivalent de 200.000 francs français
destinés à l'édification de la nouvelle école.
Le projet du nouveau bâtiment avait été conçu par Jean
BOSSU et Paul DUFOURNET (176) en novembre 1945, mais l'école ne
put être édifiée qu'au cours de l'année 1951.
6.4.8. Une exposition sur la Reconstruction à Amiens?
Le C.R.I projeta d'organiser une exposition sur la
reconstruction à Amiens en septembre 1942. Les épreuves du
concours d'Etudes Provinciales pour la Picardie y seraient
exposées conjointement à une exposition d'urbanisme. Le plan
d'aménagement du Bosquel devant y figurer, Paul DUFOURNET ayant
fait une collecte d'objets trouvés après les bombardements, se
propose de les exposer "afin de donner à penser
ce
qu'était
autrefois
la vie au village"
(177). Il s'agissait de taques
foyeres, de tuiles faitières, de pentures et entrées de
serrures, de poteries, d'enseignes... (178)
6.4.9. La fin de la Reconstruction?
C'est par un courrier du Secrétariat d'Etat à la
Reconstruction que Paul DUFOURNET apprend "qu'en
raison
des
mesures générales
de compression
budgétaire"
il a été décidé
que son poste d'architecte en chef devait être supprimé, la
175.
176.
177.
178.
Conférence du Président du Stalag IIB, Le Bosquel, juin 1991.
Conférence du Bosquel du 26 oct. 1945. A.D.80, 15 J3.
P. DOFOOBHET à l'Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées. Lettre du 31 août 1942.
Voir annexe 1.
84
mission de Paul DUFOURNET s'achève donc le 29 février 1948
(179).
Dorénavant, le Bosquel est englobé dans le secteur du
département de la Somme dont Emmanuel GONSE est l'architecte en
chef.
179. Lettre du 17 novembre 1947. A.D. 80, 15 J12.
85
7. Les aléas de la reconstruction
La question du financement deviendra assez vite du ressort
de l'Etat. Or, un manque de moyens certain, un manque de main
d'oeuvre aussi, auront tôt fait de freiner considérablement les
travaux escomptés. Déblayer, déminer, rectifier, remembrer,
aménager, procéder à l'adduction d'eau, d'électricité....
couvriront une période relativement longue. La reconstruction
proprement dite n'en sera pas moins longue.
7.1. L'arrêt des chantiers?
Si dans ce village, les opérations de remembrement et les
travaux d'aménagement de la voierie sont terminés; si sur les
quinze fermes à reconstruire, trois sont presque achevées alors
qu'en France la reconstruction n'a pas encore débuté, des
conditions
économiques,
et
des
considérations
d'ordre
administratif et réglementaire vont à plusieurs reprises
remettre en cause les opérations déjà engagées.
Fallait-il donc abandonner l'expérience
engagée au
Bosquel, jusque là entièrement approuvée par l'Administration,
et laisser chacun reconstruire à sa manière? Ne valait-il pas
mieux continuer les chantiers en dépit d'un ajustement aux
droits à dommages revus à la baisse?
En octobre 1945 déjà, parce que conçus à partir des
besoins déclarés par les sinistrés sans tenir compte du calcul
du montant de leurs droits réels, il était apparu que les plans
de
reconstruction
des
premières
fermes
étaient
"trop
grandioses" (180). Il fallut alors reprendre les projets.
Continuant de soutenir l'idée du village-témoin, l'équipe des
architectes ne pouvait qu'abonder dans ce sens, ne serait-ce
que pour la crédibilité de leurs réalisations.
Le 11 novembre 1946, Paul DUFOURNET fait le point (181).
Les architectes ont travaillé jusque là suivant des normes,
prescriptions et instructions ministérielles dont les coûts
étaient fondés sur une certaine évaluation des droits à
dommages de chacun. Faute de crédits suffisants, le ministère
s'est vu dans l'obligation de penser à un nouveau calcul des
possibilités d'indemnisation. Que faire alors des chantiers en
cours? Devait-on les modifier en fonction des nouveaux barèmes?
180. Conférence du Bosquel du 4 oct. 1945, A.D. 80, 15 J3.
181. P. DÜFOÜRNET, Note relative au financenent de la reconstruction du Bosquel, 11 nov. 1946, A.D. 80,
Fonds P. DUFOURNET.
86
Devait-on ajuster les plans des fermes dans le sens d'une
réduction des surfaces à reconstruire? Devait-on continuer et
faire payer la différence aux sinistrés? En l'absence d'une
réponse claire et définitive, on décide de suspendre
l'ouverture d'un nouveau chantier au Bosquel. La concrétisation
du plan d'aménagement se trouve alors fort compromise.
En février 1947 (182) les heurts entre les .architectes et
l'administration
sont
tels
que
les
chantiers doivent
s'interrompre. Depuis février 45, 1.200 mètres de routes, un
chateau d'eau et les fondations de trois fermes ont été
réalisés. Mais, d'un point de vue financier, ce résultat se
solde par un déficit de 40 millions de francs. Qui plus est,
les architectes ne sont pas payés.
Le reconstruction a dépassé les droits des sinistrés
(183). En réalité, c'est la ferme QUESNEL, première ferme à
faire l'objet d'une reconstruction, première ferme à devoir
servir de terrain d'expérience, qui est concernée. Afin de ne
léser personne, afin de respecter l'idée d'une phase
expérimentale
dont
cette
ferme
est
le
support,
sa
reconstruction continue comme prévu. Mais, la réalisation des
fermes suivantes doit respecter les possibilités des ayantsdroit. M. CAZAUD, le délégué départemental à la Reconstruction
s'en inquiète:
"Nos services
ont dû interrompre
provisoirement
travaux afin de les reprendre
sur des données
sûres."
(184)
les
plus
Si les crédits d'Etat alloués au Bosquel pour sa
reconstruction
sont effectivement épuisés, les nouveaux
chantiers devront être entrepris sur les crédits des dommages
de guerre, c'est à dire que les prochaines constructions
devront se concevoir dans les limites de l'enveloppe impartie
au titre de réparation des dommages causés par la guerre.
C'est en ce sens qu'une coopérative de reconstruction est
créée au village. Ainsi
"la reconstruction
du Bosquel, trop longtemps vouée à
l'incertitude,
va rentrer dans la norme." (185)
182. "On reconstruit pour démolir", Aux écoutes, 7 février 1947.
183. "La reconstruction du Bosquel se poursuivra sur des données nouvelles", Le Courrier Picard, 10 avril
1947.
184. "La reconstruction du Bosquel se poursuivra sur des données nouvelles", Le Courrier Picard, 10 avril
1947.
185. "La reconstruction du Bosquel: Il reste beaucoup à faire nais quatre femes seront terminées dans
l'été", Le Courrier Picard, 10 mai 1947.
87
C'est dans ce contexte que Gilbert QUESNEL s'entend dire
que
"le calcul
les surfaces
définitivement
charge
que
constructions."
des unités auxquelles
lui donnent
droit
de ses bâtiments
sinistrés
ayant
été
mis au point,
l'Etat
ne prendra à sa
82
% du
montant
des
nouvelles
Il avait alors le choix entre régler de lui-même les 18 %
restant ou bien ne pas reconstruire un des bâtiments prévus
(186).
7.2. Les relations entre architectes et sinistrés:
Lors de l'une des conférences hebdomadaires organisées par
le Ministère de la Reconstruction au Bosquel, on apprend
qu'excepté Maurice GRANDJEAN, les architectes d'opération n'ont
guère tenu compte des objections des sinistrés (187). Il semble
qu'ils aient conçu leurs plans dans l'absolu, sans s'inquiéter
des souhaits ou des besoins réels de leurs clients. L'affaire
est d'importance puisque le délégué du Ministère de la
Reconstruction chargé d'en éclaircir les raisons préconise, non
sans ironie, qu'une personne, "gui fut
un
cultivateur
connaissant
son métier"
se charge de traduire les demandes de
l'un d'eux aux "architectes
parisiens"
(188). C'est ainsi que
l'on recommande aux architectes de prendre un contact étroit
avec les villageois afin de respecter aussi fidèlement que
possible leurs desiderata.
Dans une autre de ces conférences (189), il est précisé
que les sinistrés sont libres de proposer toutes modifications
jugées opportunes, dans le strict cadre cependant du nombre de
points auxquels ils ont droit. Ils doivent être informés "et
parfois
écoutés"
(190). Dans ce but, des réunions étaient
régulièrement provoquées afin de mettre les parties en
présence, afin que les cultivateurs puissent se faire entendre
des architectes. Les travaux ne pouvaient être exécutés
qu'après approbation signée du sinistré, des fiches ayant été
prévues à cet effet (191).
186.
187.
188.
189.
190.
191.
P. DÜPRE à H. QUESNEL. Lettre du 13 oct. 1945. A.D. 80, 15 J3.
Conférence du Bosquel du 7 nars 1946. A.D. 80, 15 J3.
Idem.
Conférence du 17 janvier 1946. A.D. 80, 15 J12.
Lettre aux architectes du 20 février 1946. A.D. 80, 15 J12.
Conférence du 7 février 1946. A.D. 80, 15 J12.
88
7.3. Les expropriations:
Afin de mener à bon terme le projet d'aménagement, il
fallait procéder à des expropriations. Les unes concernaient
des exploitants qui allaient changer d'emplacements, mais
certaines touchaient des particuliers qui allaient devoir
accepter un transfert de leur habitation en un .autre lieu du
village.
Concernée par ce changement, une famille n'en veut point,
considérant qu"on l'oblige
à s'expatrier
jusqu'à
Madagascar"
(192). Frappés d'alignement, d'autres s'insurgent contre la
mesure dont ils font l'objet au point que le Conseil Municipal
demande au Préfet de la Somme de
"réduire
les expropriations
au
seul un intérêt
public
nettement
spécialement."
(193)
strict
minimum que
caractérisé
impose
Des habitants s'oppposent à la poursuite des travaux:
En 1945, un changement de municipalité s' accompagne d'une
vague d'oppositions à la continuation du programme de
reconstruction. D'aucuns estiment que si le remembrement a été
largement favorable à certains, il ne l'a pas été pour tous.
D'autres considèrent qu'il est injuste que deux exploitants
soient restés au centre du village alors que le projet prônait
l'installation des exploitations en périphérie (194). La
nouvelle mairie du Bosquel exige une révision partielle du
projet de remembrement et refuse l'idée d'exproprier sous
prétexte d'alignement les quelques maisons restées debout.
Aussi, afin d'en écarter la menace, l'architecte en chef Paul
DUFOURNET s'est vu obligé d'offrir d'étudier un "ajustage
(des
parcelles)
pour certains
cas particuliers
(...),
seul moyen de
sauvegarder
l'ensemble
(de l'oeuvre
en cours) (195). De même,
ceux qui souhaitent ne pas être reconstruits ne seront donc pas
reconstruits.
Au printemps 1946, une pétition émanant de certains
habitants du Bosquel est envoyée au Ministère des Finances et
192.
193.
194.
195.
Entretiens.
Le Conseil Municipal au Préfet. Lettre du 16 mars 1946. A.D. 80, 15 J12.
P. DUFOURNET à l'Ingénieur en Chef du Génie Rural. Lettre du 8 juin 1945. A.D. 80, 15 J3.
P. DUFOURNET à H. GAY, Lettre du 7 juin 1945. A.D. 80, 15 J3.
de l'Economie Nationale (196). Ils contestent notamment la
décision de démolir certaines maisons qu'ils estiment devoir
être gardées en l'état ou juste rénovées. Ils parlent d'un
remembrement "scandaleusement
partial
au profit
de
quelques
débrouillards".
Ils accusent le projet de reconstruction d'être
une véritable "gabegie".
Dans un rapport concernant cette
pétition, Paul DUFOURNET rétorque qu'évidemment/ on n'entend
que les mécontents et que ceux qui se plaignent, le font
souvent mal à propos ou par principe. Il note qui plus est que
la majorité des signataires ne sont autres que des retraités,
des personnes âgées, ou des veuves ne possédant pas grand chose
sur le territoire de la commune. Sans que cela puisse être
considéré comme un critère en leur défaveur, il faut bien
admettre que rares sont les opérations de remembrement qui ne
soulèvent pas les inimitiés, qui ne déchaînent pas les
passions. Paul DUFOURNET parle fort à propos du "drame de la
terre".
Plus que toute opération susceptible de bousculer les
gens dans leurs habitudes, une réorganisation foncière atteint
toujours la sensibilité de chacun. Changer de parcelle relève
d'une certaine dépossession et l'on tend généralement à donner
plus d'importance à ce que l'on perd qu'à ce que l'on récupère.
Dans le contexte de la Reconstruction, les bouleversements et
la gêne occasionnés, les frais éventuels à supporter ajoutaient
au problème.
7.4. Une véritable course d'obstacles:
La reconstruction est bien plus la conception d'un nouveau
lieu de vie qu'une reproduction améliorée d'un état passé.
C'est pourquoi, reconstruire le Bosquel devait se conjuguer
avec investir et innover et se heurter à bien des obstacles.
Outre les réactions aux procédures proprement dites, les
protagonistes des opérations engagées rencontrèrent nombre de
contraintes matérielles.
En effet, les difficultés financières de l'Etat sont
telles qu'en vue de réduire le prix de revient de la
construction du Bosquel, il est demandé aux architectes de
normaliser la dimension des éléments de menuiserie (197). Qui
plus est, la pénurie de matériaux est telles qu'on parle même
196.
10788.
Pétition à Monsieur le Ministre des Finances et de l'Economie Nationale. 6 avril 1946. A.N. AFU
P. D0F0UÎNET, Rapport au sujet de la pétition envoyée par quelques personnes du Bosquel à
Honsieur le Ministre des Finances et de l'Economie Nationale. 3 mai 1946. A.D. 80, Fonds Paul DUFOUÍNET.
197. Lettre du 28 septembre 1946, A.D. 80, 15 J12.
90
de "disette
prévue
pour
le
ciment"
(198). Paul DUFOURNET
suggère que l'on exploite à nouveau les carrières de craie
situées à proximité du village avec l'aide des prisonniers
allemands. Plus tard, il sollicitera personnellement le
Directeur de la Coordination Industrielle au Ministère de la
Production Industrielle pour que "guelgues attributions
de
matériaux
soient
faites
en faveur
de 1/oeuvre
expérimentale
du
Bosquel".
En vain (199). Le projet d'établir un réseau
électrique souterrain est abandonné parce que trop coûteux
(200). Les toits seront couverts d'ardoises carrées d'Angers
vue l'impossibilité qu'il y a de trouver des ardoises de FUMAY
(201). On pense même les remplacer par du "cardotex" ou des
tôles ondulées en aluminium (202), ce qui necesite une
conception nouvelle des charpentes. A l'automne 1946, le M.R.U
estimant que
"la pénurie de matériaux (est) un obstacle à la mise
en application
rapide d'un programme de
reconstruction
des exploitations
sinistrées",
des hangars tout juste installés pour abriter les récoltes
vont être démontés pour servir à l'édification de certaines
fermes (203). Il suffit que les constructeurs "adaptent
leur
fabrication
dans le sens indiqué".
Quant au bois, il n'en est
pas assez rentré pour que les charpentes puissent être toutes
confectionnées. Et, au cours de la seule année 1946, on est en
rupture de stock de briques, de charbon et de fer. L'essence
fait défaut. Il est difficile de s'en procurer (204). Feuilles
de calque, papier à machine et papier carbone sont aussi
difficiles à trouver (205). A l'automne de cette même année,
les architectes sont contraints de licencier provisoirement
leurs dessinateurs, faute d'argent pour les payer (206). Et
faute de papier, ils correspondent entre eux en utilisant des
enveloppes retournées au dos desquelles ils écrivent (207).
198. Lettre du 24 mai 1945, A.D. 80, 15 J3.
199. P. DUFOURNET au Directeur de la Coordination Industrielle au Ministère de la Production
Industrielle. Lettre du 27 juil. 1945. A.D. 80, 15 J3.
200. Conférence du Bosquel du 28 juil. 1945. A.D. 80, 15 J3.
201. Conférence du Bosquel du 7 sep. 1945. A.D. 80, 15 J3.
202. Conférence du Bosquel du 2 nov. 1945. A.D. 80, 15 J3.
203. Le H.R.U aux délégués départementaux. Lettre du 8 novembre 1946. A.D. 80, 15 J12.
204. P. DUFOURNET au Délégué Départemental à la Reconstruction. Lettre du 27 juil. 1945. A.D. 80, 15 J3.
205. Lettre du 22 janvier 1943. A.D. 80, 15 J12.
206. Ministère de la Reconstruction et de l'urbanisme. Lettre du 16 mars 1946. A.N. AFU 10788.
207. H. GAY à P. DUFOURNET. Lettre du 20 mai 1942. A.D. 80, Fonds P. DUFOURNET.
91
Paul DUFOURNET qui 9 se déplace à bicyclette se voit dans
l'obligation de réclamer un
"certificat
qui (lui)
permettrait
de remplacer
ses
pneus, presque complètement usés et qui menacent de ne
plus durer beaucoup de jours." (208)
Outre le manque flagrant de moyens pour travailler, les
architectes d'opération notent également des irrégularités
quant à l'approvisionnement en matériaux (209). De la même
façon, ils soulèvent la question de la trop grande fluctuation
de la main d'oeuvre: Les jeunes affectés aux chantiers du
Bosquel se font remarquer par leur absentéisme répété, par leur
incompétence et par leur manque d'assiduité au travail (210).
De leur côté, les entrepreneurs se plaignent du manque
d'ouvriers qualifiés recrutés sur place (211)... alors que les
ouvriers eux-mêmes se refusent à travailler si leur traitement
reste insuffisant (212)...
Mais la Reconstruction n'occasionne pas que des problèmes
purement matériels. On peut noter aussi qu'émerge un certain
nombre de conflits d'un genre plus institutionnel entre les
architectes et l'Etat, les architectes et l'entreprise chargée
des travaux, et entre le géomètre et l'architecte en chef par
exemple :
Les honoraires des architectes tardant à venir, Paul
DUFOURNET intervient en leur faveur auprès de la Direction des
Travaux du M.R.U. La situation financière de ses collaborateurs
est telle que certains ont été obligés "de recommencer à faire
la place pour vivre"
(213). D'autre part, l'entreprise a été
autorisée à prendre possession du chantier sans que l'avis des
architectes n'ait été sollicité (214). Enfin, une querelle
éclate entre l'architecte en chef et le géomètre quant à savoir
à qui revient la "paternité" du remembrement du village (215).
208. P. DÜF0UKNET à l'Ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées. Lettre du 8 septembre 1941 (annexe 2).
A.D. 80, Fonds P. DÜFO0MET.
209. Rapport des architectes de l'Opération. Avril 1945. A.D. 80, 15 J3.
210. Conférence du Bosquel du 28 sep. 1945, A.D.80, 15 J3.
211. Conférence du Bosquel du 4 oct. 1945, A.D.80, 15 J3.
212. Conférence du 2 août 1946. A.D. 80, 15 J12.
213. P. DUF0ÜRHET à la Direction des Travaux, lettres du 2 mai 1945 et du 11 déc. 1945. A.D.80; 15 J3.
214. Rapport des architectes de l'Opération. Avril 1945. A.D. 80, 15 J3.
Lettre du 25 juil. 1945. A.D.80, 15 J3.
215. P. D0FOÜRHET à H. GAY. Lettres du 12 av. 1945 et du 7 juin 1945, A.D. 80, 15 J3.
92
Un premier bilan?
Incontestablement, la première ferme aura coûté plus cher
que prévu. Qui plus est, son propriétaire se plaint qu'elle ne
correspond pas à ses besoins; non que sa taille soit démesurée
comme le croyaient certains architectes, mais bien au contraire
parce que la nouvelle surface des bâtiments est moins vaste
qu'autrefois (216).
En réalité, cette ferme a fait l'objet du premier chantier
qui, démarré assez vite finalement, n'a pas bénéficié des
conditions les meilleures (manque de matériau, main d'oeuvre
onéreuse et inexpérimentée, essai de nouvelles techniques) pour
être mené à bien (217). Les enseignements dégagés ont cependant
servi à la conception et à l'édification des autres fermes.
Le souci de concentrer les fonctions de la ferme en un ou
deux bâtiments seulement fut un gain d'espace précieux. Une
surface couverte de moindre importance représentait en quelque
sorte une économie en matériaux utilisés. De la même manière,
se contenter de reconstruire en torchis, en brique ou en bois
comme autrefois aurait probablement coûté plus cher que
d'utiliser des matériaux plus innovants.
Les dépenses furent comparativement les plus importantes
dans le domaine de l'équipement intérieur des habitations.
Passer de simples maisons sans confort ni sanitaires à des
intérieurs comprenant davantage de pièces, un système de
chauffage central pour certains, une salle de bains, un ou
plusieurs WC...cela représentait des dépenses auxquelles on ne
songeait guère auparavant.
"Certaines
concentrations
de
dommages,
à
l'intérieur
de
la
famille,
justifiaient
des
constructions
qui donnaient
à certains
l'impression
d'être
trop importantes,
compte tenu du
patrimoine
immobilier
antérieur
des intéressés.
D'où le mot de
"scandale"
prononcé bien à tort
par les jaloux
et
recueilli
avec dilection
par la presse locale."
(218)
De 1947 à 1949:
Un
Groupement
des
Associations
Syndicales
de
Reconstruction de la région Sud d'Amiens a pris en mains la
suite des opérations de reconstruction du village. Tout va
216. M. QUESHEL. Lettre du 26 oct. 1945. A.D. 80, 15 J3.
217. P. DÜFOURHET, "Hôte relative au financement de la reconstruction du Bosquel", 11 novembre 1946. A.D.
80; Fonds P. DUFOÜKNET.
218. P. DUFOüBNET. "Reconstruction du Bosquel", si, nd. A.D. 80, Fonds P. DUFOÜENET.
93
alors aller très vite. Les projets des architectes ont été
quelque peu remaniés. Les entreprises de la région (219) ont
été sollicitées.
Les quatre fermes entreprises sur les crédits d'Etat sont
alors achevées, conformes à ce que l'on souhaitait:
"des monobloc d'exploitation
éloignés de
l'habitation
et
des
dépendances,
et
dotés
d'un
outillage
perfectionné
permettant
de réduire
la main
d'oeuvre
tout en augmentant le rendement."
(220)
Depuis, quinze chantiers dont neuf fermes sont considérés
comme aboutis. 25 autres sont en cours d'opération. A partir
d'avril 1949, douze nouveaux chantiers sont prévus, dont celui
de l'école.
219. COGETRAVOC, TAVEL PRIVILEGIO ainsi que des artisans locaux.
220. "Abandonnant les décevantes expériences, le Bosquel avance dans la voie de sa reconstruction", Le
Courrier Picard, 2 mars 1949.
94
8. Le Bosquel depuis la Reconstruction
Le nombre des propriétaires du village continua de
diminuer, passant de 215 en 1946 à 183 en 1967. De manière
générale, et comme on peut le constater sur l'ensemble du
territoire français, ce sont les petites et très petites
propriétés qui ont disparu au profit des moyennes. Les
mutations foncières enregistrées affectent généralement les
gens qui ne résident pas au Bosquel.
La période de la Reconstruction a fortement marqué les
habitants qui l'ont vécue. Pas toujours d'accord avec cette
intrusion de l'Etat tant dans leur vie que dans leurs pratiques
ou leur mode d'habiter, ils ont réagi, chacun à leur façon.
"Au départ, ça a été dur. Mais tout ça, ça s'est
fait
peu à peu...
et puis la génération
de l'époque
a
disparu.
Tout a tellement
changé. Avant, c'étaient
des
attelages
partout,
aujourd'hui...
c'est
finit
Ils
ont
fait
des écuries
avec des râteliers
impeccables.
Ils
n'ont jamais servi! Pour mettre les chevaux et tout ça,
ça n'a jamais servi!
Aujourd'hui,
on ne peut même pas
rentrer un tracteur dans ces bâtiments.
Les plafonds ne
sont même pas assez hauts pour rentrer du matériel.
Ils
sont
pourtant
immenses et coûtent
une fortune
en
entretien.
Le Bosquel a une guerre de retard!
Les soit
disant
"fermes de l'avenir"
ont été dépassées
avant
d'avoir
servi!"
(1)
Des seize exploitations répertoriées au lendemain de la
Reconstruction:
- deux ont été partagées entre les descendants. Pour l'une
d'elles, l'exploitation continue; les chefs ont une activité
extérieure. Pour la seconde, un des descendants continue
d'exploiter, tout en étant ouvrier agricole chez un voisin.
- Deux exploitations ont été reprises par des gendres.
- Deux autres exploitations par des gendres de deuxième
génération.
- Deux autres encore ont été agrandies, soit par location,
soit par achat de terre supplémentaire. Ce sont les fils qui
les gèrent.
- Une exploitation de 60 hectares a déposé son bilan.
- Aucune des six dernières, n'a trouvé de successeur
familial. Trois d'entre elles sont louées. Les trois autres ont
1. Extrait d'entretiens, tout come tout paragraphe terminé par (*).
95
é t é (ou vont ê t r e ) vendues à des gens de l ' e x t é r i e u r e t
parcelles dispersées.
leurs
8 . 1 . Les e f f e t s du remembrement:
8 . 1 . 1 . Une nouvelle répartition des e x p l o i t a t i o n s :
1942
Nombre
Classes effec.
< 2 h;i
2 à 5
5 à 10
10 à 20
20 à 50
50 à 10( )
> 100 h;i
TOTAL
%
1967
Superf.
ha
%
2
3
2
10
4
1
0
9,1
13,6
9,1
45,4
18,2
4,6
6
23
25
360
238
175
0,7
2,8
3
43,5
28,8
21,2
22
100
827
100
Nombre
effec.
1
1
8
5
1
16
%
6,23
6,23
50
31,3
6,23
100
Superf.
ha
8
10
289
273
167
747
%
1,1
1,3
38,7
36,5
22,4
100
Nombre d'exploitations et superficies exploitées par classe de surface.
S o u r c e i RGA
Le dernier remembrement s'accompagna d'une concentration
des exploitations. Leur nombre diminua alors que leur
superficie s'accroissait. Ce mouvement s'accentua dans les
vingt années qui suivirent. De même, les exploitations qui
étaient jusque là constituées d'une moyenne de vingt à trente
parcelles n'en ont plus désormais que deux ou trois. Comme nous
venons de le noter ci-dessus: dans deux cas seulement, des
héritages ont abouti à un partage des exploitations. L'une
d'elles continue d'être exploitée en
commun par les deux
successeurs, l'autre est partagée et mise en valeur comme deux
unités agricoles. De manière générale, les effets bénéfiques de
la réorganisation foncière ont perduré jusqu'à nos jours.
96
8 . 1 . 2 . Une n o u v e l l e s t r u c t u r e de l a p r o p r i é t é
1946
Classes
Nombre
< 0,3 ha
0,3 à 1
1 à 2
2 à 5
5 à 10
10 à 20
20 à 50
50 à 100
> 100 ha
68
59
19
23
23
11
11
TOTAL
1980
1967
%
1
32,2
27
8,7
10,6
10,5
5,2
5,2
0
0,5
215
100
Nombre
70
34
14
18
19
15
12
1
183
%
Nombre
%
38
18,2
8,6
10
10,2
8,1
6,4
0
0,5
76
28
11
18
14
14
6
4
1
44,2
16,2
6,4
10,4
8,1
8,1
3,6
2,4
0,6
100
172
100
Evolution du nombre de propriétaires par classe de superficie possédée.
Source: cadastre
Depuis ce remembrement, le nombre total des propriétaires
inscrits au cadastre du Bosquel n'a pas cessé de diminuer. Cela
s'est réalisé au profit des biens de taille supérieure à la
moyenne, mais, pour paradoxal que cela puisse être, les très
petits terrains ont augmenté en nombre.
Les fermiers recensés à l'époque ne sont pas devenus
acquéreurs des terres qu'ils louaient. Assurés de pouvoir les
exploiter sans être autrement gênés par une mise en vente de la
part du propriétaire, ils n'avaient aucun intérêt à acheter des
parcelles qu'ils louaient relativement bon marché.
On remarque d'autre part que les propriétaires exploitants
ont cherché à consolider leur patrimoine (le nombre total
d'hectares possédés par des exploitants résidant au Bosquel
s'est en effet accru de plus de 20 % depuis 1950), alors que
les exploitants locataires se sont davantage intéressés à
l'achat de bâtiments ou à l'investissement en matériel.
8.1.3. Un marché foncier peu actif :
Il est bien évident que du fait de la nouvelle structure
du parcellaire, le marché foncier de la commune du Bosquel se
trouva quelque peu immobile. Il n'y eut guère de mutations
enregistrées parmi les parcelles constitutives des seize
97
exploitations dessinées lors du réaménagement. Très peu de
terres ont été mutées dans le domaine agricole, alors que la
plupart des mutations ont touché des terrains situés dans le
village même ou dans la zone jouxtant le village (petits
terrains à bâtir, jardins...)« En somme, seules les parcelles
de moins de deux hectares ou des parcelles de peu d'intérêt
agronomique firent l'objet d'un transfert de -comptes. Par
contre, un nombre de plus en plus important de personnes
résidant à Amiens ou dans des communes voisines ont acquis des
petits biens sur le territoire du Bosquel (2).
8.1.4. Une certaine sclérose en matière de développement
agricole:
Après le .remembrement de 1942, la structure des
exploitations, leur répartition sur le territoire et le
découpage parcellaire dont elles faisaient l'objet ont en fait
figé toute évolution éventuelle. On l'a vu, de telles
opérations avaient pour but de rendre les exploitations
unitaires et viables et d'éviter qu'un démantèlement désastreux
ne soit possible. Il fallait préserver les exploitations
moyennes de type familial, donc empêcher un trop grand
mouvement de concentration de terres au profit des unités
d'exploitation les plus grandes.
Or, si la structure en grandes parcelles d'exploitation
reste un moyen efficace de conservation des terres en fermage,
elle a sclérosé en quelque sorte une évolution potentielle de
l'agriculture locale. S'il est une protection de l'exploitant
face aux bailleurs, un canevas foncier aussi voué à
l'immobilité n'a pu que paralyser toute souplesse dans les
mutations foncières (que ce soit des mutations de propriétaire
à propriétaire (par vente ou succession) ou des mutations de
type locatif de propriétaire à fermier).
De même, réalisé dans un contexte de défense de
l'exploitant en faire-valoir indirect (protection contre tout
fractionnement cultural, contre toute rupture de bail causée
par une vente, contre tout endettement lié au rachat de
parcelles...), un tel remembrement eut pour conséquence de
neutraliser pendant près de deux générations tout changement
éventuel dans la répartition des parcelles telle qu'elle avait
été conçue en 1942.
2.
E. BEETOH, Le Bosquel. 38 ans après le réaménagenent rural et urbain, Paris, 1981, p. 33.
Entretiens et cadastre de Le Bosquel.
98
En fait (3), en termes de reproduction, les seuls
changements rendus possibles sont la division de l'exploitation
entre un ou plusieurs héritiers, ou bien la reprise de
l'exploitation (avec toutes ses terres et corps de bâtiments)
par un autre exploitant. Obligés de s'agrandir, les exploitants
ont donc cherché de l'espace sur les communes avoisinantes.
Aujourd'hui, plus de la moitié de la superficie mise en valeur
par certaines exploitations du Bosquel se trouve sur le
territoire des communes limitrophes. Fait paradoxal, ce
phénomène de dispersion parcellaire intracommunal tant décrié
au moment du remembrement de 42 se retrouve à l'échelle
cantonale dans les années 80.
Qui plus est, le jeu des successions n'a pas facilité la
préservation du parcellaire unitaire recomposé lors de ce
deuxième remembrement. Qu'il y ait eu plusieurs successeurs au
aucun, les exploitations ont été divisées au cours de ces
dernières années. Seuls les cas de successions uniques
(transmission à un fils ou à un gendre) ou de consititution de
GAEC ont permis leur conservation en l'état.
"Mais les démembrements se font automatiquement,
dès
qu'une exploitation
est mise en vente. J'ai 35 hectares
d'un seul tenant qui vont être partagés
en 7 ou 8
parcelles."
(*)
De toute façon, nul ne remet en cause le remembrement
rural, de quelque nature que ce soit. Tout le monde lui
reconnaît des bienfaits. Même s'il est difficile à admettre au
départ... parce que le sentiment de propriété est parfois plus
fort que la raison. Il a de toute évidence garanti une certaine
stabilité de la structure des exploitations, du moins pour un
temps.
A posteriori, le remembrement urbain est tout aussi
apprécié.' Il a corrigé en quelque sorte la dispersion des
petits bâtiments liée aux héritages. A ne vouloir léser
personne lors des successions, on applique un partage
égalitaire qui finalement se traduit par une répartition
irrationnelle des biens. Le remembrement urbain de la
Reconstruction eut pour effet de remédier à cet éclatement en
regroupant les surfaces bâties par famille. Chose qu'aucune
d'elles ne regrette, bien au contraire.
3. P. CLEBGEOT, Le Bosquel, un exemple d'aménagement rural, Paris, 1968, p. 89.
99
8.2. Un nouveau paysage:
Le Bosquel reconstruit n'est plus le Bosquel d'avant la
guerre.
"Quand on a reçu les soldats
qui avaient
combattu
ici,
ils ne / reconnaissaient
rien.
Ils voulaient
faire
un tour à 1 endroit
où ils étaient
avec leurs
canons,
mais ils ne le retrouvaient
plus. Là où il y avait des
pommiers, il n'y avait plus d'arbres
du tout. La route
n'était
plus la même, les maisons étaient
différentes
et avaient
changé de place.
Ils
trouvaient
que tout
avait été chamboulé!" (*)
Les rues ont été redressées, les maisons espacées.
"C'est
trop géométrique
ville
c'est
bien,
mais
agréable
quand ce n'est
diversifié."
(*)
pour un village.
Pour une
un village...
c'est
plus
pas régulier,
quand
c'est
On ne regrette pas le tas de fumier, on ne regrette pas
non plus que la nouvelle disposition des fermes ait fait
disparaître les nuisances du passage du bétail au coeur du
village, on regrette plutôt un certain charme, perdu. Le
village n'a plus son caractère picard. Il fait figure
d'exception et a du mal a assumer une physionomie toute
singulière. D'un village replié sur lui-même, aux maisons
tournées vers l'intérieur et aux cours fermées, est né un
village éclaté, aéré, aux maisons regardant résolument
l'extérieur. Son côté "village propre et régulier" le distingue
peut-être trop des villages voisins qui, même reconstruits (4),
ont su garder leur identité d'origine.
"Il n'y a même pas de style ici. A part à un ou deux
endroits,
les maisons sont taillées
à coups de serpe.
Elles sont très géométriques,
même à l'intérieur".
(5)
Jusqu'à la mare qu'il a bien fallu combler. Elle
ressemblait davantage à un bassin d'eau stagnante et fétide
qu'au miroir d'eau que l'on souhaitait qu'elle devienne. Les
4. Hais parce que reconstruits partiellement.
5. Entretiens.
pompiers ne pouvant même
utilitaire disparut aussi.
pas
la
pomper,
son
caractère
"Il y avait des haies. Il y avait un tour de
ville...
tout autour du village.
Les talus ont été supprimés.
La
forme de la route a changé énormément. Elle passait
pas
du tout là. Il y avait deux mauvais virages
dangereux.
Ils
les
ont
redressés.
Ca a disparu
avec
le
remembrement.
Toutes
les
formes
des
terrains
ont
changé.
Il y avait
pas mal d/arbres.
Ils
ont
été
abattus.
Maintenant,
on met des clôtures,
du
barbelé
pour délimiter
nos parcelles..."
(6)
Trop d'ordre tue le mouvement. Or, il y a quelque chose de
figé dans le nouveau Bosquel. Son parcellaire moins éclaté, son
nombre infiniment moins grand de haies, son réseau de routes et
de chemins moins sinueux et la disposition quasi ordonnée de
ses constructions en ont fait une sorte d'anachronisme
paysager. Il lui manque la fantaisie qu'engendrent la
juxtaposition
ou
la
superposition
d'activités,
de
comportements, de créations individuels et surtout non
simultanés.
8.3. Des bâtiments d'exploitation devenus trop vite vétustés ou
mal adaptés:
Quand la Reconstruction a été terminée, ce que d'aucuns
nomment la "révolution agricole" (7) avait déjà commencé. Non
seulement les machines agricoles avaient fait leur entrée dans
le petit univers du Bosquel, mais
les tracteurs se
multipliaient, les cultures céréalières prenaient de plus en
plus d'importance alors que l'élevage régressait de jour en
jour davantage au point de n'être plus qu'une activité quasi
résiduelle (sauf pour une exploitation).
"Il y avait
des troupeaux
de moutons avant.
allaient
au parc.
Il n'y en a plus
maintenant!
culture a changé aussi. Dans la plupart des fermes,
ont fait
des bâtiments
qui n'ont
pratiquement
servi.
On a eu nos écuries
quand il n'y a plus eu
chevaux!"
(*)
Ils
La
ils
pas
de
Le changement de système de production s'est souvent
accompagné de constructions nouvelles, soit pour accueillir de
6. Entretiens.
7. Entretiens Paul DuFOUP.NET.
101
nouvelles récoltes, soit pour abriter un matériel nouveau et de
plus en plus encombrant.
"Il faut vous dire quand même que nous avons été
rebâtis
trop tôt.
Parce qu'on n'a pas profité
des
progrès.
Le progrès est allé tellement
vite
après la
guerre que, vous verrez,
il n'y a rien de pratique
dans
les installations,
même dans la maison. Ca n'est
plus
moderne, c'est déjà du trop vieux."
(*)
Une des seize fermes répertoriées dans les années quarante
a été pratiquement abandonnée, du moins ses bâtiments et sa
maison d'habitation, du fait que le successeur des anciens
exploitants la met en valeur à partir de son propre siège
d'exploitation situé dans une commune voisine.
"Ils ont voulu un village
moderne, mais ils n'ont
suffisamment
avancé leur projet.
Ils
n'ont
pas
assez loin. Pour eux, la campagne, ça devait rester
campagne." (*)
pas
été
la
La majorité des exploitations ont très vite agrandi leur
surface bâtie, non par augmentation rapide de leur cheptel,
mais du fait de l'adoption de la stabulation libre. Proposée
lors de la reconstruction, mais non intégrée dans les habitudes
locales, elle avait été refusée par la majorité des
exploitants, et par certains architectes. Ils lui préféraient à
l'époque
la stabulation
entravée.
Leur
conception de
l'organisation des étables ne comprenait pas ce principe de
stabulation libre qui allait transformer considérablement les
conditions de travail des agriculteurs (8). Peu de temps plus
tard, il a bien fallu se rendre à l'évidence de l'intérêt de ce
nouveau mode de gestion de l'élevage et concevoir des bâtiments
plus appropriés.
De même, le machinisme agricole s'étant considérablement
développé, la moissonneuse-batteuse ayant fait son apparition
dans la plupart des fermes, les volumes d'engrangement prévus
lors de la reconstruction devenaient quelque peu superflus.
C'est ainsi que les bâtiments abritant les anciennes étables
("ces grands machins là!") ont vu leur usage détourné. Certains
ont été transformés en ateliers, d'autres servent de remise ou
de garage pour un matériel agricole toujours plus diversifié,
d'autres encore ont été purement abandonnés ou transformés en
salle des fêtes familiales.
8. Ce qui n'était pas le cas de Paul DUFOURNET puisque pour l'avoir observé maintes fois en Hollande et
au Danemark, il était très partisan de ce système de stabulation.
102
Faute d'espace suffisant, parce que les portails d'entrée
font rarement plus de six mètres de large, certaines nouvelles
machines de grande envergure ne peuvent pas être garées dans
l'enceinte de l'exploitation.
"J'enraçre tous les ans. J'aimerais
bien qu'on
fasse
tomber la pilasse.
Il y a quatre mètres entre le mur et
la pilasse.
La moissonneuse,
elle
fait
3,90
mètres!
Pour passer, je suis obligé d'enlever
les rabatteurs
de
chaque côté, ou alors je n'entre pas dans la cour1" (*)
On regrette cette économie de distance. De même, on aurait
préféré ne pas être contraints d'accepter un éloignement des
bâtiments entre eux de trente mètres, éloignement considéré ici
comme une perte de terrain et une source d'entretien dont on se
serait volontiers passé.
Ailleurs, c'est un peu l'inverse:
"Je n'ai que cinq poules....
c'est
beaucoup trop
bâtiments pour cinq poules. Une par bâtiment!"
(*)
de
Quant aux exploitations ayant choisi de développer la
culture industrielle au détriment de l'élevage, elles ont fait
de même. Certaines ont apporté des aménagements intérieurs ou
percé des ouvertures afin de rendre ces bâtiments plus
fonctionnels, les adaptant par exemple à un nouveau système
d'élevage (élevage de lapins).
En ce qui concerne les silos à betteraves, d'aucuns
accusent leur manque évident d'accessibilité.
"Ils
se sont avérés
complètement
inutiles.
C'est
comme des caves, immenses, qui font tout le
bâtiment.
Mais, au lieu d'avoir les betteraves
de plein-pieds,
il
fallait
les remonter.
On les vidait
par ces
trappes.
C'était
important
les
betteraves,
parce
qu'on
en
faisait
beaucoup pour la nourriture
des bêtes.
Et puis
ces caves sont difficiles
d'accès."
(*)
Leur première conception était adaptée à des récoltes
mises en réserve avec des moyens mécaniques aujourd'hui
dépassés. Elles nécessitaient des efforts considérables quand
il s'agissait de sortir leur contenu. Aujourd'hui, soit ils ne
sont plus du tout utilisés, soit on parle de les aménager pour
les adapter à un matériel plus perfectionné.
On critique beaucoup les toitures. Leur entretien est
difficile à assumer. Rares sont celles qui résistent sans
dommages aux vents violents du fait de la fragilité des
103
ardoises ou des tuiles dont elles ont été couvertes. Aussi,
certains les ont remplacées par de la tôle ondulée, moins
onéreuse et d'un entretien plus facile.
Ce qui a beaucoup dérangé, ce que les gens se sont peutêtre le plus mal appropriés, ce sont tous ces lieux conçus pour
une activité particulière et auxquels ont été attribués des
noms jusque là inconnus.
"Là, c'était
la chartrie.
Je ne sais pas
pourquoi,
mais les architectes
appelaient
ça comme ça! On y
mettait
les choses à l'abri.
Ca faisait
plein
de
courants d'air dedans. On n'y était pas biens!"
(*)
Pour le cultivateur local, les pièces, ou les lieux ainsi
inventés, ne correspondaient pas nécessairement à un besoin
donné.
"A côté,
il
y a un petit
atelier.
On
disait
l'atelier.
Ca devait être un atelier...
mais en somme,
on y a toujours élevé des poulets!"
(*)
On décida donc d'y faire toute autre chose.
"Là, c'était
la laiterie,
ça sert
de débarras."
(*)
On en détourna l'usage qui était souhaité.
"Là, c'était
une chambre pour un commis...
c'est plein d'outils...
Personne n'y a jamais
Ah mais
couché!"
(*)
"Là, c'était
un lieu prévu pour une douche, mais il
n'y a jamais eu de douche. Alors, du temps où on ne
ramassait pas les ordures, on y mettait
les boites de
conserve, et les encombrants.
Une fois
par an, on
transportait
tout dans une remorque et on allait
tout
vider ailleurs!"
(*)
Ou, faute d'usage attribué, on en imagina un.
"On n'a jamais su à quoi pouvait servir ce local.
y range des outils de jardinage.
De toute façon, il
a aucune fenêtre.
On n'y voit pas clair. Je ne vois
ce qu'on aurait pu y faire d'autre."
(*)
On
n'y
pas
Des erreurs de conception?
A posteriori, il est bien évident que l'on a tendance à
oublier les bienfaits d'une entreprise et qu'il est plus facile
de se souvenir de ce dont on a été mécontent.
104
C'est ainsi que la mise en place de piliers carrés dans
les étables fut longtemps décriée: les architectes n'avaient
pas songé à l'intérêt qu'il y avait de les concevoir ronds pour
que les bêtes ne se blessent pas. Ils furent donc obligés d'en
arrondir les angles, "alors
qu'il
suffisait
de faire
des
coffrages
ronds pour les poteaux en béton".
(*)
Il est également des manières de la ville qui heurtent les
habitudes de la campagne: L'éclairage des étables est assuré
par de grands carreaux, nombreux, fragiles, qui cassent assez
souvent. Il faut donc les remplacer, les nettoyer. Avant, il
suffisait d'ouvrir ou de fermer les trappes qui faisaient
office de trous de lumière. Et chose qui surprend, les chassis
sont en ciment, non en bois et le mastic se trouve à
l'intérieur. Les architectes auraient mis accidentellement les
coffrages à l'envers, ou bien ils les auraient posé
volontairement ainsi... on-ne sait plus.
Dans un bâtiment d'exploitation, il y avait si peu de
lumière que l'exploitant dut demander que l'on perce des
ouvertures.
"On n'y a jamais vu très clair parce qu'il
a
toujours
eu un éclairage
indirect.
On ne sait pas pourquoi.
On a
été obligés
de faire des trous dans le pisé parce
qu'on
avait du mal à bien voir."
(*)
On raconte même que dans une ferme, le caniveau pour
l'écoulement des déjections animales était installé à l'envers.
Il fallut tout casser au burin pour le refaire. Il s'agirait
plus d'une erreur de réalisation que de conception.
Et s'il n'y a guère de garages à automobiles dans les
fermes,
c'est que, dit-on, les
architectes
concernés
considéraient qu"il n'y
en avait
pas
besoin
dans
les
campagnes".
Mais ce ne sont plus que des anecdotes...
"Tout compte fait,
être démoli...
d'une
le village
a quand même gagné
certaine
manière."
(*)
à
8.4. Des maisons d'habitation au destin bien commun
Avec ou sans négociations, l'ensemble des habitants du
village se plièrent aux impératifs de l'alignement et
acceptèrent les suggestions des architectes d'opération. Une
seule famille s'y opposa. A la suite du remembrement, s'étant
trouvée flouée en matière de largeur de parcelle, elle prit les
devants et sans attendre, fit reconstruire sa maison par ses
propres moyens, à cheval sur deux limites de propriété. Cela
dérangea beaucoup, mais ne remettant pas en cause le projet
général, et ne gênant matériellement personne, il n'y eut pas
de conséquences.
Pour le reste, s'agissant de compromis entre les
propositions des architectes et les besoins des habitants, si
les pièces des maisons, leur distribution et leurs fonctions
étaient proches, voire conformes à une certaine interprétation
idéale du bien-vivre paysan, l'usage que ces derniers en firent
eut parfois tendance à s'éloigner de celui que l'on pouvait
imaginer.
"Vous voyez l'entrée?
Comme je vous l'ai
dit,
les
architectes
nous demandaient
ce qu'on
faisait
en
rentrant.
Comme on se lavait
les mains, ils ont mis un
lavabo dans l'entrée!
Ca ne me plait pas beaucoup parce
que c'est
toujours
sale.
Alors je défends à toute
la
famille de s'en servir."
(*)
Une question d'orientation et de rapport au centre:
La plupart des maisons de ferme, celles qui se situent
désormais en retrait du centre du village, font face à la
campagne
environnante. Le regard peut ainsi embrasser
l'ensemble ou une grande partie du bien exploité. L'idée d'une
telle orientation était un peu celle que l'esprit de
possession, le sentiment d'un véritable attachement à la terre
s'en trouveraient renforcés.
Les cultivateurs d'aujourd'hui avouent que c'est chose
louable, mais ils regrettent "de tourner
le dos à la
route".
Non seulement ils ne voient pas ce qui se passe dans le
village, mais ils ne voient pas non plus l'arrivée de leurs
visiteurs.
"Ma ferme est la dernière
du village.
Si
j'oublie
quelque
chose
et
que le
fournisseur
a fait
sa
tournée...
Il peut se passer quelque chose dans le
centre du pays, je ne le sais pas, je ne le vois pas.
S'il
m'arrive
quelque
chose,
personne
ne le
sait.
Parfois,
quand j'entends
sonner les cloches,
je dois
téléphoner dans le village pour savoir si quelqu'un
est
mort." (*)
Certains auraient préféré avoir leur façade principale
orientée plein Nord, pourvu qu'ils aient pu observer et être
observés.
"Vous savez,
en campagne,
la maison."
(*)
on ne vit
pas beaucoup
dans
Ce n'est pas tant l'orientation des bâtiments qu'ils
mettent en cause, mais une mise en retrait perçue comme une
sorte de mise à l'écart dont ils seraient les victimes.
Dorénavant, pour rencontrer ses voisins, il faut une occasion,
surtout lorsqu'ils habitent au bout du village. Les épiceries
locales ayant disparu, chacun s'en va faire ses courses à Conty
ou dans les supermarchés d'Amiens. C'est chose tout-à-fait
classique dans les campagnes françaises, mais, les fermes du
Bosquel étant trop éloignées les unes des autres, les petits
commerçants ambulants (boulanger, boucher, primeur...) vont de
l'une à l'autre. Ils ne s'arrêtent plus en un point que chaque
villageois pourrait joindre. La situation géographique, idéale
du point de vue des pratiques agricoles, devient un handicap du
point de vue de la sociabilité. Au point qu'une sorte de
distanciation sociale se soit installée entre "ceux du
centre
et ceux de la
périphérie".
Une histoire de lumière:
A en croire les cultivateurs rencontrés, et comme en
témoignent d'ailleurs les anciennes maisons picardes, les
fermes d'autrefois étaient presque aveugles. Seules des petites
fenêtres, en un très petit nombre, laissaient passer le jour.
Cela ne correspondait pas vraiment au souci de clarté et de
luminosité des architectes. D'où la présence de portes et de
grandes baies vitrées dans la plupart des constructions dont
ils s'occupèrent. Si on accueillait avec plaisir cet apport de
lumière, on appréciait moins le froid contre lequel il fallait
se chauffer davantage. On aimait encore moins la corvée du
nettoyage régulier des carreaux! C'est la raison pour laquelle
certains cultivateurs ont soit remplacé les portes vitrées par
des portes pleines, soit posé des doubles-vitrages, soit placé
des fenêtres là où il y avait de grandes baies.
Un confort parfois relatif:
Si les plans proposés étaient bien respectés dans leur
forme, il semble qu'en bout de course, essentiellement du fait
du dépassement des droits à dommages, les salles de bain aient
été laissées à la charge des particuliers. Leur emplacement
était bien prévu, mais laissé vide. Rares sont celles qui n'ont
pas été installées par les villageois eux-mêmes, plusieurs
années plus tard.
"Les architectes
voyaient
grand, mais la maison n'a
jamais été terminée.
Il a fallu
se contenter
du gros
oeuvre et aménager après."
(*)
Il en allait de même des waters. La pièce qui devait les
abriter resta parfois vide:
"On ne comprenait pas qu'on puisse avoir des
fosses
d'aisance
à l'intérieur
de la maison alors qu'on
les
avait
toujours
eues au fond du jardin.
Les
vieilles
personnes disaient
que c'était
sale, qu'il y aurait des
odeurs."
(*)
Généralement, l'installation du chauffage central subit le
même sort. Certains mirent leurs poêles à mazout ou leur
cuisinière en fonte à charbon au rebut dans les années
soixante. D'autres ne l'ont toujours pas fait. L'adjonction de
radiateurs d'appoint ou de systèmes d'aération pour que la
chaleur monte à l'étage suffisent encore.
Dans la plupart des maisons, les architectes avaient prévu
de poser du plancher. Quelques ménagères s'y opposèrent:
"Le plancher,
c'est
beau. Mais quand on a du monde,
c'est
de l'entretien.
En ville,
c'est
pas pareil,
mais
à la campagne, on salit
beaucoup. C'est
poussiéreux."
(*)
Alors elles choisirent de le faire remplacer par du
carrelage. Elles le regrettent bien aujourd'hui parce que le
carrelage est d'un contact très froid ou parce que le mobilier
n'y est guère mis en valeur.
Quant au pisé utilisé pour la construction des deux
premières fermes, dans l'une, il s'est avéré préférable de le
faire couvrir, pour protéger les murs contre l'humidité. Pour
l'autre
"il n'est
pas si vilain
que ça remarquez!
Ca se
désagrège un petit
peu avec la pluie battante
du côté
du pignon de la maison...
Mais l'été,
il y a de la
vigne vierge,
c'est plus joli!"
(*)
Reconstruire signifiait aussi offrir des habitations plus
spacieuses. Or, le passage d'une petite maison à deux ou trois
pièces (dans laquelle on vivait essentiellement dans la
cuisine-salle de séjour) à une grande maison sur deux niveaux
(comportant plusieurs pièces ayant chacune une fonction
spécifique) ne s'est pas fait sans peine. Non seulement il a
fallu s'habituer à partager les activités domestiques selon les
lieux qui leur étaient dorénavant destinés, mais il a fallu
aussi accepter l'idée d'un couloir distribuant ces divers
espaces.
"Dans cette maison, on peut jouer à cache-cache
avec
les portes,
sans jamais se rattraper.
Celle-ci
était
faite pour être ouverte,
mais comme elle n'est pas dans
le milieu,
quand elle ouverte,
on ne peut plus
rentrer
dans la cuisine...
Et si vous ouvrez celle-ci
et
cellelà, on ne peut plus circuler
jusque dans le couloir! De
toute façon, il y a tellement
de portes qu'on
n'aurait
jamais
pu mettre
de meubles.
Alors,
on les
a
condamnées. Et puis il y a des coins partout,
on ne
sait pas pourquoi!"
(*)
Autrefois, lorsque la maison comportait une salle à
manger, elle n'était utilisée que pour les grandes occasions.
On y entreposait, on y exposait même, le beau mobilier et la
belle vaisselle de la famille. On n'y vivait pas. En
multipliant les pièces, la Reconstruction faisait éclater les
usages. On s'y fit ou on ne s'y fit pas. Ou bien on accepta
d'élargir son espace de vie ou bien on le rétrécit à la manière
d'antan autour d'une seule et même pièce faisant office à la
fois de cuisine, salle de séjour, salle à manger et bureau.
On peut voir dans ces comportements très divers un effet
pervers lié à cette possibilité soudaine de passer du jour au
lendemain d'un habitat traditionnel et rudimentaire à un
habitat moderne qui ne devait rien avoir à envier à l'habitat
citadin. La guerre a permis un bond en avant auquel aucun
villageois ne s'attendait: si l'on pouvait être reconstruit, si
l'on pouvait bénéficier des meilleures techniques et d'un
certain confort, pourquoi ne pas exiger que ce qui était prévu
se réalise effectivement?
Placés en situation de privilégiés, les bosquellois ont eu
tendance à oublier que, pour l'époque, ils étaient largement
favorisés et de loin par rapport aux autres cultivateurs. Non
seulement la Reconstruction leur apportait des maisons neuves,
spacieuses et "fonctionnelles", mais elle leur offrait des
sanitaires, intérieurs le plus souvent et surtout, l'eau
courante; progrès considérable dans un village où jusque là, on
utilisait des "tonnes à eau" et des seaux pour s'approvisionner
en eau.
Des fonctions nouvelles ou des usages réappropriés ?
Certaines fermes comportent un vestibule avec portemanteaux et parfois lavabo. Conçu pour faire office de sas
entre l'extérieur et l'intérieur, c'est là que se situe
l'entrée principale.
"Normalement, on doit rentrer par là, mais personne
ne passe par là, sauf ceux qui ne connaissent pas. Il y
a bien un bouton de sonnette,
mais la sonnette
ne
fonctionne plus! (*)
Ce couloir d'entrée, ou cette petite pièce avaient aussi
pour fonction d'éviter que les visiteurs n'entrent directement
dans la cuisine. -Mais les habitudes sont tenaces, une majeure
partie des cultivateurs concernés ont toujours préféré les
faire rentrer directement par la cuisine. Parce que c'est
toujours dans la cuisine que les choses se passent.
Ce vestibule devait servir également à ce que les
habitants des lieux se dévêtent et se déchaussent avant
d'entrer vraiment. Mais, de retour des champs, les picards
avaient déjà pour habitude de se changer (sous un préau, dans
un hangar tout proche... ) avant même de pénétrer dans la
maison. Cette espèce de zone intermédiaire entre le monde du
travail et celui de la vie de famille devenait inutile. C'est
pourquoi on en a condamné l'accès ou bien on y a entreposé des
fleurs ou des bibelots. Pour beaucoup, c'est "de l'espace
perdu".
Le passe-plats situé entre la cuisine et la salle à manger
aura généralement subi le même sort. S'il reste ouvert, c'est
pour accueillir un pot de fleurs ou des photos. Certains le
comparent à un "confessionnal", d'autres à "une trappe".
"C'était
une idée des gens de
croirait
dans un restaurant."
(*)
la
ville.
On se
Quant au petit bureau destiné à recevoir les employés, il
a rarement servi de bureau. Non seulement parce que dès les
années cinquante, la main d'oeuvre s'est faite rare, mais
surtout parce qu'on n'avait guère coutume de recevoir ses
ouvriers agricoles de la sorte. On continua donc de faire comme
avant: les paies se donnaient dans la cuisine autour d'un
verre.
"Vous avez là un bureau.
Il est grand
mouchoir de poche et il sert à tout."
(*)
comme un
Et le bureau devint chambre d'appoint (idéal pour les
personnes âgées qui n'ont plus à monter l'étage pour accéder à
l"espace nuit"; idéal aussi pour faire des économies de
chauffage puisqu'on ne vit plus qu'au rez-de-chaussée), ou bien
salle de repassage. Il est vrai qu'on y classe parfois les
papiers de l'exploitation et qu'on peut y trouver le téléphone,
mais de façon presque accessoire. Tout comme on a pu y
rencontrer quelques volailles!
"Quand même, il fallait
bien qu'ils
fassent
un peu
•• comme, bon leur
semblait.
Alors
on capitulait.
On
disait:
ben soit!
Mais après, on faisait
bien comme on
voulait
..."
(*)
9. Une expérience fructueuse?
De manière générale, les Bosquellois sont assez satisfaits
d'avoir fait l'objet d'autant d'attention, d'avoir "été les
chouchous de la Nation jusqu'à la Libération" (9).
Même si "comparer les maisons d'autrefois
à
d'aujourd'hui
c'est
comme comparer un éléphant
lapin de Garenne"
(*),
celles
à un
à posteriori, ils regrettent de n'avoir pas été plus avant, de
n'avoir pas anticipé l'évolution, parfois même de s'être
laissés porter par les événements. Mais le contexte de
l'époque, le fait qu'ils ont tout perdu durant cette guerre, le
fait qu'on ait bien voulu s'occuper d'eux, le fait aussi d'être
donnés en exemple à l'ensemble de la France sinistrée... leur
inspiraient un certain respect, voire une certaine sujétion.
"Après la Reconstruction,
les dimanches, il n'y
avait
que des promeneurs. Des gens venaient visiter
l'église.
Le bosquel était
un lieu où on venait
se
promener.
C'était
le côté "pays le plus détruit
de france"
qui
les attirait.
C'était
un petit
peu le pays-type
qu'on
venait voir."
(*)
9. Entretiens.
Ill
Si quelques cultivateurs particulièrement avertis avaient
bien été associés à l'élaboration du projet, ils avaient été
consultés afin de mieux cerner les besoins d'un village
agricole susceptible de bénéficier des techniques modernes du
moment, non pour les dépasser.
Au cours de l'élaboration du projet d'aménagement, Paul
DUFOURNET
regrettait
déjà
qu'à
la
faveur
du
grand
bouleversement qu'avait été le remembrement, on ne soit pas
allé plus loin (10), mais il n'était pas possible de faire sur
ce seul village et en une seule fois toutes les transformations
économiques et sociales imaginables. Ne serait-ce que parce que
les populations n'y étaient pas préparées. Ne serait-ce aussi
du
fait
des
nombreuses
contraintes
tant
financières
qu'administratives ou de doctrines propres aux représentants de
l'Etat, principal financeur donc décideur.
La Reconstruction n'est plus que du passé. Malgré son
caractère atypique, le Bosquel est devenu un village comme les
autres. Aujourd'hui les exploitations ayant survécu aux aléas
économiques sont soit celles qui ont su intensifier leurs
cultures céréalières ou betteravières, soit celles qui ont
adopté des techniques d'élevage hors-sol, soit celles dont le
chef a une activité extra-agricole.
Le village vit, survit, du fait de l'accueil d'une
population de type résident secondaire, une population qui
travaille à Amiens. Des habitants ayant vécu la Reconstruction,
il ne reste plus grand monde. La population se renouvelé donc.
Le Bosquel n'est plus un village de cultivateurs, mais un
village-banlieue d'Amiens. BRETON (11) parlait déjà de communedortoir en 1980. Ce phénomène s'est confirmé. Hormis un caférestaurant, il ne reste plus aucun commerce au village.
"La civilisation
devient
urbaine.
viennent habiter la campagne." (12)
Les
citadins
Cette co-habitation de deux populations aux origines et
aux pratiques différentes vient accentuer la perte de
convivialité que l'on soulignait plus haut:
10. P. DCF0ÜRNET, "Quelques précisions au sujet du Bosquel". 30 décembre 1946. A.D. 80, Fonds P.
DUFOURNET.
11.
E. BRETON, Le Bosquel. 38 ans après le réaménagement rural et urbain, Paris, 1981, p. 94.
12. P. DUFOURNET, "Qu'en advient-il de la maison traditionnelle paysanne et bourgeoise en France?" Actes
du colloque "Archéologie du paysage". Paris, E.N.S, mai 1977, p. 530.
"Ce sont des jeunes qui ont racheté les maisons des
personnes décédées. En principe,
ils travaillent
tous à
l'extérieur,
sur Amiens, sur Conty ou aux
alentours.
Ils partent le matin, ils rentrent
le soir. Mais il n'y
a plus personne au village".
(*)
Au point que lors d'une cérémonie seuls, ou presque seuls,
ceux qui sont invités se déplacent. A Oresmaux ou dans les
villages paysans voisins, invités ou pas, les gens vont à la
mairie ou à l'église. Non seulement parce qu'ils se sentent
concernés, mais parce qu'il existe encore un esprit de village,
un certain besoin de continuité, la recherche d'une
interconnaissance. Il semble qu'au Bosquel, il y ait un certain
désinvestissement, comme un repli.
D'un point de vue encore plus général, sur le plan de
l'habitat comme sur celui de l'économie agricole, la population
du Bosquel s'est vue propulsée relativement vite dans un
univers plus moderne, un univers auquel elle ne s'attendait
certes pas. Il lui a fallu apprendre à vivre dans un cadre
nouveau, utiliser des lieux nouveaux, transformer ses
habitudes, adopter de nouvelles pratiques tant dans le travail
que dans le quotidien. Mais la dynamique impulsée s'est vite
essoufflée. Les innovations apportées commencent à dater.
10. Quelques repères historiques
Loi du 11 octobre 1940: création du Commissariat à la
Reconstruction.
(Il est chargé d'appliquer des lois fondées sur le
principe que l'Etat intervient pour assurer la reconstitution
des biens détruits ou endommagés par la guerre et dont
l'utilité économique et sociale est admise).
1941: Création de la délégation Générale à l'Equipement
National.
(Elle doit préparer un plan décennal pour l'équipement du
pays).
Le 20 juin 1942, le projet de reconstruction et
d'aménagement de la commune du Bosquel est soumis à l'enquête
préalable à son approbation. Les habitants du Bosquel ainsi que
les intéressés des commune svoisines peuvent alors présenter
leurs observations sur les travaux projetés.
Le 15 juillet 1942,. le procés-verbal d'enquête contient
huit déclarations dont six sont contraires au projet. Toutes
concernent des refus d'expropriation.
Le 18 décembre 1942, le Comité National de la
Reconstruction
donne
un
avis
favrable
au
projet de
reconstruction et d'aménagement du Bosquel.
Le 22 mars 1943 le projet de reconstruction et
d'aménagement du Bosquel est déclaré d'utilité publique pendant
15 ans conformément aux dispositions de l'article 10 du décret
du 7 février 1941, complété par le décret du 26 mai 1941..
Du 1er au 15 juin 1943: avis d'enquête pour l'examen des
opérations de reconnaissance de classement et d'évaluation des
propriétés devant faire l'objet d'un remembrement au Bosquel.
L'arrêté du 4 avril 1943 porte délimitation du périmètre
de reconstruction de la commune de le Bosquel.
Loi du 16 juin 1943: Loi d'urbanisme qui représente en
quelque sorte la Charte de l'Equipement.
(Nécessité d'obtenir un permis de construire avant toute
entreprise de (re)construction)
Le 10 janvier 1944, les opérations prévues au projet de
reconstruction du Bosquel sont déclarées urgentes.
Le 7 octobre 1946, le remembrement du Bosquel est clôturé
et devenu définitif par arrêté préfectoral.
Noèl 1947: achèvement de la première ferme dite ferme
QUESNEL.
Le 1er avril 1963: Suppression du Service des Dommages de
Guerre de la Somme.
Annexes
Annexe 1
Exposition de la reconstruction à Amiens
Le Bosguel
A. Projet d/aménagement
1. Plan de situation
2. Plan d'état actuel avec indication des destructions.
3. Projet d'aménagement proprement dit au 1/2.000e ou au
1/1.000e.
4. Rendu du plan d'aménagement, en couleur ou au trait, sorte
de vue aérienne, ech. 1/2.000e.
5. Partie centrale du village, éch l/500e.
6. Vue cavalière de la partie centrale du village.
7. Croquis et perspective du futur centre communal.
B. Etude monographique:
8. Schéma géologique.
9. Graphique de population.
10. Etat du cadastre de 1808 et évolution du village depuis
cette époque.
11. Vieux plan du village (XVIIIéme).
12. Schéma d'évolution historique.
13. Schéma morphologique: "village fermé et champs ouverts".
Les raisons qui postulent de maintenir une agglomération.
14. Position de l'agglomération: "La charpente du terroir, les
chemins".
15. Rapport du village au finage.
16. Etude monographique de la ferme traditionnelle en Amiénois
(cas du Bosquel), montrant comment elle tient au parcellaire et
les raisons qui doivent la faire maintenant évoluer. Fermes et
rues de ferme.
17. L'aspect général et l'âme du village (citation d'écrivain).
18. Plan du terroir avant remembrement (1934)
19. Plan du terroir après remembrement (1935)
20. Avant-projet du remembrement en cours (M. GAY, géomètre)
115
C. Documents divers:
21. Photos du village avant sa destruction
22. Photos des fêtes, cavalcades, processions qui montrent
l'existence d'une vie locale des plus intéressantes.
23. Photos du Bosquel après sa destruction.
D. Objets du folflore recueillis au Bosquel
Dl. Géologie;
Fossiles et minéraux locaux
D2. Histoire:
Beau silex taillé acheuléen trouvé sur le site du Bosquel
Petites poteries franques trouvées au Bosquel.
D3. Folfklore:
- Belle collection de taques foyeres (une trentaine) en fonte,
des XVI, XVII, XVIII et XIXémes siècles: sujets variés et
intéressants (Phoebus, Cupidon, Saint Eloy, Napoléon, scènes
funéraires, armoiries, cavalier, atelier d'artisan...). Une
pancarte indique le sens de ces objets: "ces taques foyeres
marquent ici le souvenir des anciens foyers détruits du
Bosquel".
- Tape à beurre décorée au couteau.
- Lampes à huile décorées de coqs ou de fleurs de lys.
- Très beau garde-feu en fer forgé (XVIIes) avec fleur de lys.
- Une statuette de Saint Biaise, patron du pays, en bois, et en
cours d'exécution par un vieil artisan, le dernier dans cette
région.
- Bouquet de moisson.
- Bassinoires en cuivre.
D.3. Objets du folklore ménager:
- Collection de poteries de terre assez complète et très variée
(vases, cruches, bouteilles, jarres, gourdes, dont une très
grande cruche vernissée d'un bel effet décoratif. Toutes ces
poteries ont des galbes intéressants).
- Lampes à huile.
116
- Nombreuses crémaillères décorées.
- Soufflet.
D.4. Objets de folfkore de métier;
- outils divers
- faucilles
- serpes
- un grand métier à tisser
- rouet
- dévideuse
- quenouille
- pince
- navettes
D.5. Eléments du bâtiment:
- Diverses sortes de tuiles locales, faitages, arêtiers
- Pentures, clefs de murs, entrées de serrures
D.6. Objets divers;
- Mesure a grains en pierre
- Une torse d'Ecce Homo en pierre, assez fruste, trouvé dans
les décombres
- Colonne en pierre décorée de fleurs de lys
- Fragment d'une des cloches de l'église
- Clef du porche de l'église démolie
117
Annexe 2
Le 8 septembre 1941
Demande de bon pour
pneu de bicyclette
Monsieur l'Ingénieur en Chef
des Ponts-et-Chaussées
61, mail Albert 1er
AMIENS Somme
Monsieur l'Ingénieur en chef,
Je me permets de solliciter de votre obligeance un
certificat qui me permettrait de remplacer mes pneus de
bicyclette, presque complètement usés, et qui menacent de ne
plus durer beaucoup de jours.
Vous pourriez indiquer peut-être que je suis nommé par le
Commissariat Technique à la Reconstruction pour l'établissement
des plans d'urbanisme des communes de Rumigny, Saint-Sauflieu,
Oresmaux, le Bosquel, localités situées jusqu'à 20 kms
d'Amiens, que mon seul moyen de prospection est la bicyclette,
et qu'il est absolument nécessaire que je puisse changer mes
pneus (déjà bien usés par les tournées que je fais dans cette
région depuis mars dernier) si je veux continuer mon travail.
Je vous prie d'agréer, Monsieur l'Ingénieur en chef,
l'expression de ma parfaite considération.
Paul DUFOURNET
Annexe 3
La Coopérative Départementale de Reconstruction de la Somme
Son rôle est de calculer le montant des dommages de guerre
des adhérents en fonction des séries de prix et des barèmes,
puis de fixer les besoins de chacun et de grouper les commandes
de matériaux en vue d'obtenir les prix de revient les plus
avantageux. Elle doit également traiter avec les entrpreneurs
pour une masse de travaux dans un secteur donné en vue
d'accélérer la reconstruction.
Elle est créée en mai 1947 à l'initiative de la FACSAS.
Monsieur Léon ROPIQUET, plus grand propriétiare exploitant
du Bosquel en est nommé président, alors que Monsieur Pierre
BARNABE en devient le directeur
Annexe 4
Les commissions départementales de la reconstruction:
Présidées par le Préfet, elles sont constituées d'un
délégué à la Reconstruction, des représentants du conseil
général, des maires des villes et communes rurales sinistrées,
des associations de sinistrés, des entrepreneurs, des
syndicats, des techniciens et des architectes attachés à la
reconstruction.
Le rôle de ces commissions consiste en:
- l'agrément des plans d'urbanisme et des marchés
- Le visa des permis de construire
- la question des dommages de guerre
- la répartition des crédits, matériaux et main
d'oeuvre alloués au département (13)
Le maire doit être le correspondant du délégué à la
reconstruction dans sa commune.
13. Alloués selon un coefficient "d'intérêt national".
Annexe 5
Les
indemnisations
M. BILLOUX, a l o r s m i n i s t r e d e l a r e c o n s t r u c t i o n en 1946 s e
t r o u v e c o n f r o n t é a u p r o b l è m e du r è g l e m e n t i n t é g r a l d e s dommages
d e g u e r r e . I l e s t c h a r g é p a r l e g o u v e r n e m e n t d e p r é p a r e r un
p r o j e t de l o i a f i n de s i m p l i f i e r l e s m u l t i p l e s l é g i s l a t i o n s q u i
s'enchevêtrent.
I l e x i s t e en e f f e t t r o i s c a t é g o r i e s d e dommages ( 1 4 ) p a r m i
l e s q u e l s f i g u r e l e dommage " p e r s o n n e l e t f a m i l i a l " . I l c o n c e r n e
essentiellement
des
dommages
d'ordre
mobilier
dont
la
r é p a r a t i o n e s t p r i o r i t a i r e , mais pour l a q u e l l e l ' E t a t f r a n ç a i s
manque d e f o n d s .
14. Le (tonnage "d'économie nationale" (industrie, commerce, agriculture) qui concerne la remise en route
d'une branche productive.
Le dommage "de luxe et de superflu" (galerie de tableaux, collections d'art...)
Et le dommage "personnel et familial"
Annexe 6
Les règles administratives à respecter en matière de plan de
reconstructi on
"Le plan établi par l'architecte urbaniste est soumis à
Paris à la Commission Technique à la Reconstruction qui le
prend en considération. Puis le plan est transmis à la section
d'urbanisme du Comité National de la Reconstrcuion. Celui-ci
fait ses obsevations, s'il y a lieu, et demande à l'architecte
de poursuivre son étude dans le sens désiré. Ceci fait, le plan
est alors soumis à une enquête de commodo et incommodo qui dure
10 jours et au cours de laquelle tous les citoyens intéressés
peuvent faire connaître leurs critiques s'ils le jugent à
propos. En même temps, le conseil municipal se prononce et le
plan
est
soumis
au
sous-comité
départemental
de
la
Reconstrcution présidé par le Préfet, assisté de techniciens
auxquels sont adjoints le maire et deux notabilités désignées
par le Préfet.
Ce Comité Départemental
intervient comme commision
d'enquête et c'est sur le vu de son avis et avec l'approbation
du Préfet que le plan est enfin sanctionné par le Comité
National et qu'un décret ministériel intervient."
Le Journal d'Amiens, 27 août 1941.
B d.fc>1 dL o ç j Dtr EL p» I n d_ e
Archives du Ministère de la Reconstruction
ROSEN, Jacques. Guide des Archives
l'Urbanisme et du logement. 1940-1960.
Nationales, si. nd. 206 p.
du ministère de
Mission Archives
(AFU 10 788: Le Bosquelf dossier général)
15 avril 1941: Lettre désignant P. DUFOURNET pour établir
le PAR.
1942: Plan de situation des fermes.
• 21 mars 1942: Extrait du registre de délibération du
Conseil Municipal du Bosquel.
17 avr. 1942: Lettre du commissaire à la Reconstruction
Immobilière à Mr le Délégué régional pour le département de la
Somme annonçant la décision de prendre le Bosquel et Oresmaux
comme villages prototypes.
15 juil 1942: Programme des servitudes du PAR du Bosquel.
Prévisions d'ordre sanitaire.
Dossier administratif (18 pièces)
5 sep. 1942: Note sur la reconstruction du Bosquel jointe
à l'envoi fait au secrétaire du cabinet du Maréchal PETAIN.
Pièces relatives
d'urbanisme :
à
l'étude
et
à
l'instruction
du
projet
18 déc. 1942: Extrait du PV de la réunion du Comité
donnant son accord au PAR.
18 déc 1942: Comité National de la Reconstruction. Rapport
au
retour
de
l'enquête
publique
relative
au projet
d'aménagement et de reconstruction (PAR).
15 janv. 1943: Demande d'Approbation du projet de
Reconstruction et d'Aménagement du Bosquel au Délégué Général à
L'Equipement National.
22 janv. 1943: Note au directeur du MRU présentant le
projet.
28 janv. 1943: Approbation du projet par le Délégué
Général à la Reconstruction.
22 mars 1943: Arrêté portant approbation et DUP du PAR.
4 Avril 1943: Arrêté portant délimitation du périmètre de
reconstruction de la commune
Extrait
du
Journal
Officiel
du
23
avril 1943:
l'approbation vaut DUP.
20 mars 1945: lettre du MRU à son délégué local concernant
le début des travaux.
2 avril 1945. New York Herald Tribune. Article de Sarah
LAMPORT au sujet du remembrement du Bosquel.
12 juin 1945: Lettre de Mr. LACOURLIE, Ingenieur en chef
du service du Génie Rural du Ministère de l'Agriculture en
direction de P. DUFOURNET : demande d'arrêter les démarches
d'un second remembrement.
20
Octobre
1945:
Délimitation
du
périmètre
de
reconstruction du Bosquel.
17 déc. 1945: Réunion d'information sur le remembrement du
Bosquel.
2 janv. 1946: Rapport du délégué départemental au MRU sur
le remembrement.
29 janv. 1946: Réponse de l'Ingénieur du GREF au délégué
Départemental du MRU quant à la question de surseoir ou non aux
démolitions, quant au problème des réclamations.
14 mars 1946: Le MRU au délégué Départemental de la Somme
pour demande d'examen de la situation suite au Courrier Picard
du 2 mars 1946.
16 mars 1946: Le conseil municipal du Bosquel au préfet de
la Somme au sujet d'une révision souhaitée.
19 mars 1946: "Sur les 16 cultivateurs, 14 sont contents
du remembrement". Courrier Picard.
19 mars 1946: Lettre du délégué départemental au MRU
faisant le point de la situation suite à un article
diffamatoire paru dans le courrier picard du 2 mars.
26 mars 1946: Libres propos (très amers) de Georges
DELAMARE.
28 mars 1946: L'inspecteur Général de l'Urbanisme au
préfet de la Somme pour signifier qu'aucun des 3 points de la
demande du maire du Bosquel ne relèvent de sa compétence.
2 avril 1946: Note du Directeur Général de l'Urbanisme au
Directeur des Travaux et au Commissaire Général Des Dommages de
Guerre.
Avril 1946: Réponse aux libres propos de G. DELAMARE
4 avril 1946: Lettre concernant la réalité de la
Reconstruction.
5 avril 1946: Position de la Fédération des Syndicats
Agricoles du canton de Conty, favorable au remembrement en
cours.
6 avril 1946: Pétition de sinistrés du Bosquel mécontents.
9 avr. 1946: Lettre de sinistrés à 100 %, au délégué
départemental de la Reconstruction pour faire activer les
travaux.
15 av. 1946: Le délégué départemental à la Reconstruction
au MRU: rendant compte de l'urgence de la révision du PAR.
I mai 1946: Projet de réponse au ministre du MRU au sujet
de la Révision du projet de reconstruction de la part de la
Direction de l'Urbanisme et de l'Habitation.
3 mai 1946: Lettre de l'Urbaniste en chef de la
circonscription de Laon St Quentin au M.R.U concernant la
révision du projet de reconstruction.
3 mai 1946. Rapport au sujet de la pétition envoyée au
Ministère des finances et de l'Economie Nationale.
II juil. 1946: Demande de révision du PAR.
13 sept. 1946: Demande d'enquête du Directeur de
l'Urbanisme.
17 sep. 1946: Note à Mr. PROTHIN.
27 sep. 1946: Visite du chef de la section remembrement
d'Amiens.
19 nov. 1946: Lettre de P. DUFOURNET au Délégué
Départemental du MRU.
124
AFU 10788. Le Bosquel
: Projet d'Aménagement
Reconstruction. Le Bosquel. urbaniste: Paul DUFOURNET.
et
de
Dossier administratif 1:
4 sept. 1940: Arrêté du Préfet de la Somme
20 fév. 1941: Désignation de Paul DUFOURNET, Urbaniste.
26 déc. 1941: Présentation du PAR.
19 sept. 1941: Extrait du memorandum des séances de la
section d'Urbanisme du Comité National de la Reconstruction.
4 fév. 1942: P.V de séance de la sous-commission de la
Reconstruction.
18 mars 1942: Mise à l'enquête du PAR.
21 mars 1942: Extrait du registre des délibérations du
conseil municipal du Bosquel.
13 juin 1942.: Arrêté du Préfet de la Somme portant
ouverture d'enquête.
23 juin 1942: Publication de l'avis d'enquête.
Juil. -Dec. 1942: Divers certificats des maires/affichage
du PAR.
15 juil. 1942: Procès-Verbal d'enquête.
17 juil. 1942: Extrait du registre aux délibérations du
Conseil Municipal du Bosquel.
22 juil. 1942: P.V de la séance de la sous-commission
départementale de la Reconstruction.
20 juil. 1942: P.V de la conférence entre services civils.
24 oct. 1942: DUP du PAR de la commune du Bosquel.
25 nov. 1942: Avis du Préfet de la Somme.
18 déc. 1942: Rapport de M. REMAURY, délégué régional du
commissariat à la Reconstruction.
18 déc. 1942: Avis et P.V de la séance du comité national.
15 janv. 1943: Avis du commissaire à la Reconstruction.
Janv. 1942: Approbation du PAR.
28 janv. 1943: Idem de la part du délégué général à
l'Equipement National.
23 mars 1943: Arrêté Interministériel portant approbation
et déclaration d'utilité publique du PAR.
Divers courriers annonçant l'approbation du PAR.
Projet d'Aménagement et Plan de Reconstruction du Bosquel.
Projet d'arrêté du maire.
CAB 1047: Annexe au rapport d'activité de la Sramno. Année 1963
La
Reconstruction
terminée.
du
département
AFU 1 0 8 3 5 : D o s s i e r Génér-al
grannie ( 1 9 4 1 - 1 9 6 8 ï
est
pratiquement
28 avr. 1941: Lettre de l'Union des Syndicats Agricoles de
la Somme.concernant les fermes isolées.
2 mai 1941: L'Ingénieur en Chef des Ponts & Chaussées
informe le Commissaire Technique à la Reconstruction de la
lettre émanant de l'Union des Syndicats agricoles de la Somme.
10 juin 1941: Constitution de groupements de communes en
vue de l'étude du PAR.
6 août 1941: Réquisition de géomètres par le Service de
Restauration Paysanne.
11 août 1941: Idem.
27 août 1941: Idem.
7 mai 1942: Une exposition d'art et d'architecture à
Amiens.
23 mai 1942: Annonce de la mise à l'enquête du PAR au
Maire du Bosquel.
21 août 1942: Nomination de l'Association. Syndicale de
Remembrement et de Reconstruction du Bosquel.
22 août 1942: Le Commissariat à la Reconstruction à M.
GAZET, Ingénieur en chef des Ponts & Chaussées au sujet du PAR.
2 sep. 1942: L'Ingénieur en chef des Ponts & Chaussées au
sujet du PAR du Bosquel.
15 sep. 1942: Idem au sujet de l'exposition.
26 sep. 1942: Procédures d'approbation du PAR.
13
nov.
1943:
Tableau
faisant
connaître
l'état
d'avancement des PAR.
2 mars 1946: Le Courrier Picard: "Monsieur BILLOUX
définit, à.Amiens, sa politique".
2 mars 1946: Lettre de Dufournet.
2 av. 1952: Etat d'avancement des études d'urbanisme des
communes sinistrées du département de la Somme.
7 déc. 1954: Il n'y a aucun Plan d'Aménagement en cours
sur les communes non sinistrés.
22 fév. 1956: Demande de la liste des PAR encore en cours
dans la Somme.
Archives départementales de la Somme
Fonds DUFOURNET
15 J 1;
21 mars 1942: Extrait du registre aux délibérations du
Conseil Municipal.
Immeubles-types: Du fermier, du logement des animaux, de
la maison du commerçant et du propriétaire rural.
5 nov. 1945: Le service d'Architecture du Bosquel à
Coterelle.
9 nov. 1945: Conférence du Bosquel.
6 déc. 1945: Télégramme.
7 déc. 1945: Conférence du Bosquel.
13 déc. 1945: Remise des avant-projets de fermes.
14 déc. 1945: Conférence du Bosquel.
21 déc. 1945: idem.
22 déc. 1945: Les méandres de l'administration.
28 déc. 1945: Conférence du Bosquel.
27 oct. 1957: Election des membres des Tribunaux
paritaires des baux ruraux du Bosquel.
15 J 3 dossier A (Correspondance année 1945):
8 fév. 1945: Accueil de Maurice GRANDJEAN au Bosquel.
12 fév. 1945: Qui va payer les 500 000 hommes censés
travailler aux Chantiers de la Reconstruction?
12 fév. 1945: Lettre d'un architecte à Paul Dufournet.
21 fév. 1945: Proposition de nomination des architectes
par M. CAZAUD.
22 fév. 1945: Inscription à l'ordre des architectes de M.
DUPRE.
22 fév. 1945: Liste des architectes.
22 fév. 1945: Lettre des architectes au MRU qui
s'enquièrent des payeurs.
25 fév. 1945: Lettre de M. GRANDJEAN à P. DUFOURNET.
Avril 1945: Rapport des Architectes de l'opération à P.
DUFOURNET.
Avril 1945: Tableau des matériels nécessaires à la
Reconstruction.
11 av. 1945: Désistement de DAMERVAL.
12 av. 1945: Lettre de P.DUFOURNET à GAY.
2 mai 1945: P. DUFOURNET exige un accompte pour son
équipe.
2 mai 1945: P. DUFOURNET demande à l'Inspecteur Général de
l'Urbanisme d'être rapporteur auprès du MRU du projet du
Bosquel.
2 mai 1945: Lettre de P. DUFOURNET à MORIN, ingénieur, au
sujet du PAR (Béton de terre)
24 mai 1945: Manque de ciment.
1 juin 1945: Cantonnement des jeunes
7 juin 1945: P. DUFOURNET demande un RDV à M. GAY.
8 juin 1945: Le renouvellement de la mairie du Bosquel
s'accompagne d'une opposition au remembrement.
127
11 juin 1945: Réponse de GAY à P. DUFOURNET.
17 juin 1945: Les riverains de la mare du Bosquel
souhaitent sa suppression.
19 juin 1945: C R du Bosquel. Essais de béton de terre.
19 juil. 1945: Conférence du Bosquel.
24 juil. 1945: Propositions d'honoraires faites au MRU
pour l'équipe des architectes.
27 juil. 1945: A propos d'un réservoir sous-terrain.
27 juil. 1945: Les contrats des architectes. •
27 juil. 1945: Demande d'attribution de ciment.
28 juil. 1945: Conférence du Bosquel.
30 juil. 1945: Additif au C R du 20-7-1945.
31 juil. 1945: Les salaires des architectes.
31 juil. 1945: idem.
1 août 1945: Construction du réservoir.
1 août 1945: Extrait du registre des délibérations du
Conseil Municipal du Bosquel.
7 sep. 1945: Conférence du Bosquel.
22 sep. 1945: idem.
4 oct. 1945: idem.
8 oct. 1945: idem.
9 oct. 1945: Demande de crédits pour achever les
maquettes.
12 oct. 1945: Conférence du Bosquel.
13 oct. 1945: Calcul des unités de la première ferme.
15 oct. 1945: Résumé des réflexions sur les projets de
ferme du Bosquel.
26 oct. 1945: Au sujet de la petitesse de certains
bâtiments annexes.
19 oct. 1945: Conférence du Bosquel.
25 oct. 1945: Note relative à l'approbation des plans de
ferme.
26 oct. 1945: Conférence hebdomadaire du Bosquel.
29 oct. 1945: Demande d'avis concernant les projets du
Bosquel.
31 oct. 1945: Destruction de baraques par une tempête.
2 nov. 1945: Conférence du Bosquel.
6 nov. 1945: P.V. de chantier du Bosquel.
6 nov. 1945: Rapport justificatif des architectes sur les
dispositions adoptées pour la reconstruction du village.
11 déc. 1945: Situation difficile qui est faîte aux
architectes.
17 déc. 1945: Construction de maquettes.
17 déc. 1945: Conférence du Bosquel.
15 J 3. Dossier B (série photocopiée):
1945: C.R de la mission confiée à P. MAURIN par le MRU sur
le Bosquel.
9 av. 1945: Rapport de P. DUFOURNET pour la réunion des
urbanistes.
1945: Rapport sur la réorganisation foncière et le
remembrement de la propriété rurale.
12 av. 1945: Courrier.
6 juin 1945: CR de la réunion corporative de Rogy.
sd: Désignation des travaux à exécuter.
128
15 J 3 dossier C
11 août 1947: Lettre de la Société Nationale de la Petite
propriété Terrienne.
Contrat 1: Etat des cultivateurs exploitants.
Fiche technique n*8: Un exemple de remembrement: le
Bosquel.
sd: Note précisant la pensée des auteurs de la
reconstruction rurale.
P. Dufournet: "La ferme de 25 ha en Amiènois" in: Concours
d'Etudes Provinciales. Picardie.
sd: Lettre relative à la non prise en compte de
l'évolution des techniques agricoles modernes dans les PAR.
4 janv. 1949: Proposition d'utiliser la tuile mécanique
plutôt que l'ardoise.
sd: Description de la ferme QUESNEL.
sd: Note relative à l'approbation des plans de ferme du
Bosquel.
sd: Additif au rapport de P. DUFOURNET.
17 juin 1945: CR d'une réunion du MRU sur la
Reconstruction du Bosquel.
sd: Liste des propriétaires du Bosquel ne figurant sur
aucun état.
sd: Implantation des bâtiments agricoles.
sd:
Rapport
justificatif
des
Architectes
sur
la
Reconstruction du Bosquel.
4 av. 1945: Lettre de M. GAY à P. DUFOURNET.
7 mars 1956: Conférence du Bosquel.
15 juil. 1942: Rapport d'enquête au délégué à la
Reconstruction sur le remembrement.
5 fév. 1948: La mission d'architecte au Bosquel.
5 nov. 1947: Les habitants du Bosquel annoncent leur
intention de rompre toute attache avec les architectes de
l'opération.
sd. "Le Bosquel, village-type".
26 déc. 1942: Les déceptions face aux résultats du PAR.
5 fév. 1948: Le MRU rejette la proposition de bénévolat de
P.DUFOURNET.
16 fév. 1946: Lettre de P.DUFOURNET.
1947: "Exploitation agricole. Directives générales pour la
composition des plans d'ensemble". Paris. Imp. Nationale. 1947,
MRU, Min. de 1'Agrie.
15 J 12 et 13 fdossier vert: 1943-1946Ï:
25 av. 1943: "Constructions non continues".
6 mars 1967: Bibliographie sommaire sur les villages
picards.
Avril 1944: Essai sur l'habitat rural en Picardie.
18 mai 1957: Exemple d'un échange amiable de parcelles
après exposé rapide de l'historique du PAR.
11 mai 1948: Extrait du registre aux délibérations du
Conseil Municipal.
si, Le Bosquel: Lettre manuscrite adressée à P. DUFOURNET
de la part d'un sinistré concernant le PAR.
si, nd: Lettre de P. DUFOURNET à G. QUESNEL.
129
Lettre du MRU à P. DUFOURNET concernant ses appointements.
Service d'Architecture du Bosquel: ferme CotterelleDragonne (annexe à la note justificative des dispositions
adoptées).
Liste des entrepreneurs travaillant à la construction des
ISAI.
Lettre tapuscrite (P.V d'une réunion à propos des
réclamations relatives au remembrement), si, nd.
16 mars 1946: Demande de révision du remembrement.
6 août 1945: Le service d'Architecture du Bosquel au
Délégué Régional du MRU au sujet de l'affectation qui sera
faîte des parcelles de terrain.
8 nov. 1946: Une pénurie de matériaux impose que les
hangars déjà construits soient détournés de leur fonction
première et servent à l'édification de certaines fermes.
15 J 12 et 13 (Dossier rouge 1940-1941^
"Histoire des expropriations"
2 nov. 1940: Désignation de M. DAMERVAL comme Architecte
Communal.
6 mars 1941: Avis aux Préfets.
22 août 1941: A propos de Saint-Sauflieu et Rumigny.
25 sep. 1941: A propos du terrain scolaire.
15 oct. 1941 Demande d'habilitation à concevoir un projet
de stade.
18 oct. 1941
22 oct. 1941
18 déc. 1941
A propos du levé de plan du Bosquel.
Réponse.
Lettre du Colonel Roger le Clerc, Commandant
du 50éme Régiment d'Infanterie. Prisonnier en Poméranie.
15 J 12 et 13 (Dossier: Association Syndicale):
22 janv. 1942: Essais de matériaux et manque de papier
calque.
26 mai 1942: Le Commissariat à la Reconstruction est
favorable à la nomination de P. DUFOURNET comme architecte en
chef.
Avis d'enquête pour l'examen du classement et des limites
des propriétés au Bosquel.
22 juin 1942: Réunions des 15, 16 et 17 juil. au Bosquel
15 sep. 1942: Au sujet du report du remembrement.
9 oct. 1942: Lettre à un agriculteur.
18 déc. 1942: Convocation de la réunion des Architectes
chargés de la Reconstruction.
24 déc. 1942: Nomination du Directeur de l'Association
Syndicale.
24 déc. 1942: Au sujet du remembrement d'Oresmaux et de sa
vue théorique idéale.
8 janv. 1943: Au sujet d'une rencontre avec le géomètre.
22 janv. 1943: Au sujet de la pénurie de calques.
26 janv. 1943: Au sujet de chemins à empierrer.
3 fév. 1943: Le PAR doit recueillir l'adhésion des
sinistrés. Un bureau de coordination des études d'immeublestypes est créé.
5 fév. 1943: P. DUFOURNET à M. GAY.
130
2 mars 1943: Ne pas créer trop de valeurs de terres.
3 mars 1943: Idem.
11 mars 1943: La liste des bâtiments à détruire
ultérieurement n'étant pas dressée, ils ne sont pas détruits.
18 mars 1943: Demande de la liste des maisons à conserver.
24 mars 1943: Modèle pour le règlement d'honoraires des
architectes.
24 mars 1943: Au sujet du P.A.R et des maisons à
conserver.
31 mars 1943: Couler le Bosquel et Oresmaux dans le moule
d'Orléans.
31 mars 1943: Dossier au Commissariat à la Reconstruction.
13 av. 1943: Demande de l'avant-projet du géomètre.
15 av. 1943: Au sujet du remembrement d'Oresmaux.
13 mai 1943: Signature des dossiers du contrat.
19 mai 1943: Ce qu'il faut et ne faut pas détruire.
29 mai 1943: La commission d'enquête du Bosquel des 16-18
juin.
22 juil. 1943: Demande à P.Dufournet une liste des
villages où la reconstruction peut être appliquée.
31 juil. 1943: Attribution du contrat n°2 pour les
communes du Bosquel et d'Oresmaux.
15 J 12 et 13 (dossier: première phase de la reconstruction^:
17 janv. 1946: Conférence hebdomadaire du Bosquel.
24 janv. 1946: Conférence du Bosquel.
31 janv. 1946: Conférence du Bosquel.
fév. 1946: Extension du périmètre de reconstruction.
7 fév. 1946: Conférence du Bosquel.
14 fév. 1946: Conférence du Bosquel.
16 fév. 1946: Au sujet d'un total trop faible des points
acquis pour bénéficier d'une reconstruction intégrale.
16 fév. 1946: Question de l'inclusion du Bosquel dans la
zone contrôlée par l'architecte en chef.
20 fév. 1946: Qui est responsable de la ferme QUESNEL?
20 fév. 1946: Honoraires des architectes.
21 fév. 1946: Avant-projet de la ferme FOLLET.
27 fév. 1946: Au sujet des points.
27 fév. 1946: Divergences entre les commandes émanant des
divers architectes.
21 fév. 1946: Conférence du Bosquel.
26 fév. 1946: Liste des dossiers instruits et des points
obtenus.
28 fév. 1946: Conférence du Bosquel.
5 mars 1946: Etat de la reconstruction.
11 mars 1946: L'hygiène des maisons rurales.
14 mars 1946: Les réunions du Bosquel n'auront plus lieu
que tous les 15 jours.
16 mars 1946: Série de sinistrés non indemnisés.
20 mars 1946: Liste des sinistrés, de leurs architectes
respectifs.
30 mars 1946: Courrier.
30 mars 1946: Courrier.
2 av. 1946: Démission d'un architecte.
5 av. 1946: Fédération des Syndicats Agricoles du Canton
de Conty.
131
6 av. 1946: La nouvelle répartition des points.
11 av. 1946: Conférence du Bosquel.
17 av. 1946: Courrier.
25 av. 1946: Conférence du Bosquel.
30 av. 1946: Lettre d'un sinistré.
10 mai 1946: Conférence du Bosquel.
24 mai 1946: Conférence du Bosquel.
31 mai 1946: Révision du PAR.
7 juin 1946: Conférence du Bosquel.
8 juin 1946: Courrier.
17 juin 1946: Liste de ceux qui n'ont toujours pas réagi
aux propositions de Reconstruction.
17 juin 1946: Service d'urbanisme du Bosquel au MRU.
17 juin 1946: Au sujet d'une construction future.
18 juin 1946: Au sujet du supplément de dépenses liées à
un changement de matériaux.
18 juin 1946: Au sujet de la modification d'une conception
de plan.
1 juil. 1946: Attribution de points pour deux sinistrés en
indivision.
5 juil. 1946: Conférence du Bosquel.
11 juil. 1946: Au sujet d'une réclamation du Maire du
Bosquel à propos du remembrement.
2 août 1946: Conférence du Bosquel.
13 août 1946: Des sinistrés n'ont pas donné d'avis au
sujet de leur indemnisation.
18 août 1946: Au sujet des chassis standards.
6 sep. 1946: Conférence du Bosquel: La question des 42
vieillards du village.
18 sep. 1946: Au sujet du remembrement.
26 sep. 1946: Attribution de points.
28 sep. 1946: Il faut faire des économies en réduisant les
types de menuiseries.
11 oct. 1946: Conférence du Bosquel.
18 oct. 1946: Conférence du Bosquel.
19 oct. 1946: Au sujet de la transformation d'une maison.
19 oct. 1946: Au sujet d'un changement de matériau.
21 oct. 1946: Au sujet de la transformation de bâtiments
d'exploitation.
21 oct. 1946: Au sujet d'une fumière belge.
26 oct. 1946: Installation d'une famille dans une
construction définitive.
26 oct. 1946: Au sujet d'une réparation de baraquement.
28 oct. 1946: Au sujet de la remise en cause de la
participation de l'Etat dans les PAR.
30 oct. 1946: Acte notarié des indivisaires.
9 nov. 1946: Au sujet de la "gabegie" (selon le fisc)
engendrée par la construction de la ferme QUESNEL.
18 nov. 1946: M. GRANDJEAN au Chef du Service des
Estimations des dommages de guerre.
20 nov. 1946: Au sujet de la ventilation d'un déficit lié
à la première maquette.
20 nov. 1946: P. DUFOURNET à l'entrepreneur.
21 nov. 1946: Une entreprise doit suspendre ses travaux.
5 déc. 1946: Les USA sont favorables à l'expérience du
Bosquel.
12 déc. 1946: Des photos circulent.
21 déc. 1946: Au sujet de la reconstruction d'une ferme.
132
21 dec. 1946: Idem.
15 J 12 et 13 (dossier: Architecte d'ensowiKle) ;
27 dec. 1941: Le Centre rural du Bosquel doit être rangé
parmi les ensembles susceptibles de motiver une étude spéciale
en vue d'un plan d'urbanisme.
8 janv. 1942: Courrier.
2 oct. 1943: Liste des architectes agréés.
22 oct. 1943: A U sujet du libre choix des sinistrés quant
aux architectes.
22 fév. 1945: Demande du plan définitif du remembrement du
Bosquel.
22 fév. 1945: Demande des dossiers n°l.
1 mars 1945: Courrier.
23 mars 1945:Courrier.
15 J 12 et 13 (Le Bosquel. 1947!:
30 janv. 1947: Contrats d'architectes pour le Bosquel.
31 janv. 1947: Demande de dérogation pour modifier une
cloison de ferme.
31 janv. 1947: Au sujet du remembrement.
3 mars 1947: Il n'est pas question de remanier le
remembrement au Bosquel. Simple correction de parcelles.
17 mars 1947: Demande d'un rapport général d'activités.
1 av. 1947: Rapport de P. DUFOURNET.
5 av. 1947: Obligations de restreindre les voeux en
matière de reconstruction du fait des réductions de budgets.
8 déc. 1947: Au sujet du renvoi des architectes
d'opération.
15 J 12 et 13 (Dossier maison-type!:
"Instructions techniques sommaires relatives au logement
de l'exploitant et de l'ouvrier agricole". Paris, M.R.U, Min.
Agriculture, Direction Générale du Génie Rural, Imp. Nationale,
1946, 57 p.
"Instructions
techniques
sommaires
relatives
à la
construction et à l'aménagement
des écuries, étables,
porcheries". Paris, M.R.U, Min. Agriculture, Direction Générale
du Génie Rural, Imp. Nationale, 1945, 43 p.
15 J 12 et 13 (Le Bosquel: 1948-1949!:
6 fév. 1948: P.V de la réunion ayant eu lieu à la ferme
ROPIQUET.
30 av. 1948: Au sujet de la radiation de P. DUFOURNET
comme architecte en chef.
24 juin 1948: Nomination de M. GONZE pour l'élaboration de
la suite des travaux.
7 juil. 1948: Lettre concernant la radiation de P.
DUFOURNET.
24 juil. 1948: Réaction de P. DUFOURNET.
133
24 av. 1949: Au sujet d'un article pour "L'architecture
d'aujourd'hui".
15 J 12 et 13 fContrats^:
(1945): Contrat type provisoire d'architecte d'opération.
(1941):
Contrat
pour
l'exécution
de
la
mission
d'architecte en chef de la Reconstruction.
(1941): Contrat d'architecte en Chef de groupe.
15 J 12 et 13 (Le Bosouel 1948-1948Ï:
sd: Démission.
28 janv. 1947: Courrier.
3 juin 1947: Le problème de l'estimation des biens sur la
base de 1939.
13 juin 1947: Décharge des architectes de toute
responsabilité si les bâtiments se dégradent.
23 juin 1947: Estimation de biens détruits avec les
nouveaux barèmes.
13 sep. 1947: Problème du nouveau calcul des droits et
dommages.
oct.
1947: Dossiers des dommages
et projets de
reconstruction.
14 nov. 1947: Note de P. DUFOURNET.
Liste présumée complète des sinistrés n'ayant pas déposé
de dossiers.
5 déc 1947: Question d'honoraires.
14 janv. 1948: PV d'enquête au sujet d'une réclamation
concernant une vacherie.
23 janv. 1948: Annonce d'une réunion.
19 fév. 1948: Réclamation des honoraires dus aux
architectes lésés après le changement d'avis du MRU concernant
le statut des nouvelles constructions
15 J 12 et 13 (Le Bosquel 1945-1946^:
22 fév. 1945: 500 jeunes vont travailler à la
reconstruction.
29 mars 1945: Liste des architectes désignés pour la
reconstruction du Bosquel.
19 janv. 1946: Extension du périmètre de reconstruction.
1 fév. 1946: Quelques fragments de compensation?
6 fév. 1946: Accord du MRU pour l'extension du périmètre
de reconstruction.
6 mars 1946: Annonce du périmètre de reconstruction.
28 mars 1946: Dossier pour éclaircir les articles
diffamatoires de la presse.
2 janv. 1947: Asphyxie des chantiers et problème du coût
du PAR.
Calcul de la vétusté.
15 J 12 et 13 (dossier: Coupures de presse):
10 dec. 1941: Journal d'Amiens
- "Personne ne doit perdre de vue que l'unité française
est à reconstruire".
30 oct. 1942: Le Progrés de la Somme
- " Le Bosquel, village-essai".
3 nov. 1942: Le Progrés de la Somme
- "Le Plan de Reconstruction du Bosquel".
4 nov. 1942: Le Progrés de la Somme
- "Le Plan de Reconstruction du Bosquel (suite)".
28 juin 1943: Les nouveaux temps.
- "Le Bosquel, petit hameau picard rasé par la guerre,
servira de "village témoin" pour le reste de la France
dévastée".
si. nd.:
- "La reconstruction des campagnes dévastées: le Bosquel,
petit village picard rasé par la guerre, servira de village
témoin pour le reste de la France dévastée".
12 mars 1945: Le Courrier Picard
- "La croisade du remembrement".
30 mars 1945: Le Courrier Picard
- "Le remembrement du Bosquel".
2 mars 1946: Le Courrier Picard
- "Mr. Chabanne maire du Bosquel parle du mécontentement
de ses administrés".
22 mars 1946: Le Journal Agricole
- "Le remembrement est une étape indispensable".
26 avril 1946: Le Courrier Picard
- "Le Bosquel "village-témoin" sera doté de fermes
modèles".
si. nd.:
- "Mr. PUCHEU, Min. de l'Intérieur dans la Somme. Au
Bosquel".
10 avril. 1947: Le courrier Picard
- "La reconstruction du Bosquel se poursuivra sur des
données nouvelles"
10 mai 1947: Le Courrier
- "La reconstruction du Bosquel: il reste beaucoup à faire
mais 4 fermes seront terminées dans l'été".
8 mars 1949: Journée du Bâtiment
- "A travers les chantiers. Le Bosquel, "chantier-témoin"
doit être reconstruit dans l'année".
Articles, ouvrages ou documents de portée générale:
Association Grenobloise pour la Recherche Architecturale.
La reconstruction dans les Alpes Françaises: 1945-1955.
Grenoble, Architecture et Urbanisme, 1983, 42 p.
BAUDOUI,
Rémi.
Planification
territoriale
et
reconstruction (1940-1946). Thèse 3ème cycle d'Urbanisme. Paris
XII, sous la direction de B. VAYSSIERE, 1984, 326 p.
BAUDOUI, Rémi, "Between regionalism and functionalism :
French reconstruction from 1940 to 1945" in : Jeffry, H.
DIEFENDORF (ed.), Rebuilding Europe's bombed cities. Hong-Kong,
Mac Millan, 1990, pp. 16-30.
BEDARIDA,.
Marc.
"Dossiers
Reims",
Architectes,
Architecture (195), Mars 1989, pp. 24-29.
BELMONT. N. "Arnold Van Gennep", Hier pour demain. Arts,
Traditions et Patrimoine, 1980, pp. 151-154.
CHAILLEUX,
Jean-Yves.
"Villes
reconstruites:
le
recentrage", Diagonal (76), 1989, pp. 23-25.
CONSOLA, Chantai. "Contexte local et projet architectural"
in: L'habitat rural. Nouveaux modèles, nouveaux usages.
Colloque de l'Association des Ruralistes Français, Amiens,
1985, dactyl. 14 p.
COSTE, Michel. "Perreymond, un théoricien des quartiers et
de la restructuration", Les Annales de la Recherche Urbaine
(22), pp. 47-57.
DAUNTON, M. J. "L'histoire de la planification urbaine
existe-t-elle?", Les Annales de la Recherche Urbaine (22), pp.
71-87.
DURAND, Yves. "Chantiers et projets urbains sur les ruines
de juin 1940. L'exemple des villes sinistrées du Loiret", Revue
d'Histoire de la Deuxième Guerre Mondiale (79), juil. 1970, pp.
1-36.
DAVIS, Ian. "Disasters as agents of change?", Habitat
International, VII (5/6), 1983, pp. 277-310.
DOURLENS, Christine. "Villes, risques et périls", Les
Annales de la Recherche Urbaine (40), pp. 3-10.
DURAND, Yves. "Chantiers urbains et projets urbains sur
les ruines de juin 1940. L'exemple des villes sinistrées du
Loiret", Revue d'histoire de la seconde guerre mondiale (79),
juil. 1970, pp. 1-36.
FAURE,
Christian.
"Le
chantier
1425,
enquête
d'architecture rurale. La consécration de l'ethnologie rurale
fraçaise par le régime de Vichy" in: L'habitat rural. Nouveaux
modèles, nouveaux usages. Colloque de l'Association des
Ruralistes Français, Amiens, 1985, dactyl. 12 p.
FAURE, Christian. Folklore et révolution Nationale.
Doctrine et action sous Vichy. 1940-1944. thèse 3ème cycle
d'Histoire. Lyon IV, 1986, t. 1: 670 p.
FAURE, Christian. "Le film documentaire sous Vichy. Une
promotion du terroir", Ethnologie Française, XVIII (3), 1988,
pp. 283-290.
FAURE, Christian. Le projet culturel de Vichy. Lyon. PUL,
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FREY, Jean-Pierre. "Le Creusot. Urbanistique patronale",
Les Annales de la Recherche Urbaine (22), pp. 3-46.
GARAUDET. J. "Le problème de la reconstruction", Arts de
la France (1), déc. 1945, p. 33.
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(1936-1944). Paris, CERF, 1984.
Institut
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d'Architecture
(IFA).
Les trois
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Coli
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"dossiers
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documents", 1983, 49 + 39 + 51 p.
JEANNOT, Gilles. "Les ingénieurs dans la reconstruction :
images et stratégies. Cahiers de l'IHTP (5), juin 1987, pp. 6982.
KOPP, Anatole., BOUCHER, Frédérique., PAULY, Daniele.
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Archives de Paul Dufournet, non classées
DOSSIER 1:
P. CLERGEOT, Le bosquel. Un exemple de réaménagement
rural. Paris, Mém. Maîtrise géographie, 1968, 161 p.
2 lettres de l'auteur à Monsieur DUFOURNET
P. DUFOURNET, "Le Bosquel. Observations", 4 av. 1969, (4
exemplaires de 2 feuillets concernant le travail de P.
CLERGEOT).
P. DUFOURNET, "Reconstruction du Bosquel", 26 janv. 1968,
6 p. (Notes critiques au sujet du "village-type" et des
tergiversations de l'administration).
DOSSIER 2
Chemise 2a:
Plan de masse de l'exploitation agricole de Mr QUESNEL,
sept. 1955
Plan de masse de l'exploitation de Mr FOLLET, sept. 1955.
Fond de plan topographique de la commune du Bosquel, éch
au 1/2000, Commissariat technique à la reconstruction
immobilière.
2 fonds de situation des fermes du Bosquel, 9 et 5.11.45.
5 plans cadastraux au 1/5000 de la commune du Bosquel,
1945.
2 dessins de la partie centrale du village par P.
DUFOURNET, 1944.
Projet d'aménagement DUP de la commune du Bosquel par P.
DUFOURNET, sd. Photo.
Autre photo.
Plan de section de la commune du Bosquel, mars 1941.
Atlas routiers de TRUDAINE, (fin XVIIIéme) A.N:
- section E du village.
- Les Orémeaux
- St SAUFLIEU
- SAUFLIEU
- Hébécourt
- Commune de Saint-Sauflieu, 28 août 1805.
- Village de Rumigny.
- Village de Sauflieu, 1750.
7 photos du plan cadastral du Bosquel
Carte de Tassigny autour du Bosquel
Photo d'une carte figurant le Bois de l'Epine
Coupure de presse. Le courrier Picard, "A l'occasion d'une
visite aux chantiers d'Amiens, M. COTY, Ministre de la
reconstruction...", 1er Mars 1948.
Pétition à Monsieur le Ministre des Finances et de
l'Economie Nationale, Mars 1946 émanant des "sinistrés du
Bosquel".
"Le Bosquel", si, sd, Note de P. DUFOURNET sur un projet
d'aménagement. 3 p.
Lettre du délégué départemental du ministère de la
Reconstruction
annonçant
le
début
des
travaux
de
Reconstruction, 20 mars 1945.
Lettre de P. DUFOURNET au ministère, nov. 1946.
Le Figaro, 13 juin 1946, "Les jeunes désertent le
village", "Dans la Somme, une petite cité renaît de ses
ruines".
'
Lettre à Mr le Préfet de la Seine concernant un parrainage
de la commune du Bosquel, 14 mai 1942.
New York Herald, april, 3, 1945. "Picardy Village,
Burnedly Nazis, Redivides Land".
2 photos d'une exposition sur le projet d'aménagement du
Bosquel. si, nd.
Photo d'une carte postale du Bosquel. sd.
2 photos du village sinistré, sd.
Plan de maison., sd.
Chemise 2b: ("Expositions")
Le Bosquel, report du village et du finage. Description du
parcellaire.
Les zones à prévoir.
5 Photos de maquettes d'exploitations agricoles.
Photo d'une charpente
Photo de l'exposition du projet
Photo du parcellaire réaménagé. Plan cadastral.
Un dossier diverses photos pour exposition et reportagephoto du "Progrés de la Somme".
Chemise 2c: ("Le village détruit")
Diverses photos du village détruit.
Chemise 2d: ("L'ancien village")
Photos d'une fête de bienfaisance de 1938.
Album "BOSSU" sur le Bosquel. Photos diverses.
Chemise 2e:
Photos en vrac.
DOSSIER 3:
Chemise 3a:
Plan de constitution de coffrages en béton banché.
Photo d'outillages.
liste bibliographique relative aux diverses études sur le
béton de terre et le béton de terre stabilisé. 28 références,
23 fév. 1950. Lettre de l'Institut Technique du B.T.P à
P.DUFOURNET.
"Béton banché. programme de l'enquête", D.E juin 1943,
programme de concours pour le coffrage et l'exécution de murs
en béton banché.
"Les routes en sol-ciment", circulaire série D, n°7, 1
déc. 1943., 25 p.
Rapport sur les constructions provisoires en béton de
terre. C.C.I.P 5331., 8 p, si, nd.
2 notes
Divers courriers de l'Institut du B.T.P à P. DUFOURNET,
années 1946 et 1948.
"Mécanique des sols appliquée à la construction de
chaussées en sol stabilisé", Journal du bâtiment, 27 janv.
1948.
"La mécanique du sol et les routes" coupure de presse,
idem, juin 1947.
Copie de la note adressée par le Lab. du B.T.P à Pol
ABRAHAM au sujet du béton de terre. 16 avr. 1943, 4 p.
"Recherches sur la résistance du sol. La stabilisation des
terrains". Circulaire série D n' 10, 5 mars 1945, 4 p.
142
Chemise 3b ("Béton d'argile stabilisé"):
"Maisons en béton de terre".12 p. Conférence
P.DUFOURNET, 18 juil. 1945. Musée de l'Homme.
Divers copies de courriers de P.DUFOURNET. Année 1946.
2 notes sur le béton chinois. 2 feuillets.
Croquis béton banché.
de
Chemise 3c:
Comparaisons d'éléments de prix de revient. Janvier 1950
Divers courriers sur le béton de terre stabilisé.
Chemise 3d:
Document sur le béton de terre. Courrier.
Note à propos du béton à base de glaise.
Traduction d'un texte anglais sur le béton de terre
stabilisé, juin 1948, 31 p.
Extrait du Boletin da Direccao general dos servicos de
urbanizacoas, n°l 1947. Lisbonne. Procédé préconisé pour les
habitations à bon marché. 5 p .
Bibliographie concernant les applications du béton de
terre dans la construction. 8 p.1948?
Bulletin mensuel de la Société Académique d'Architecture
de Lyon, exercice 1922-1923, n" 2. 32 p.
Compte rendu d'essais. Cité de Longueau, 18 juil. 1945.
M.H EWALDSEN, M.A. RIBER, Traduction à propos de la maison
GEOTECK.déc 1948, 13 p.
Divers courriers.
L'exécution d'un mur d'essai en béton de terre stabilisé à
Ivry. Circulaire de l'Inst. Tech, du B.T.P, série D, n° 13, 30
janv. Í946,
Quelques photos.
Documents divers:
Revue du Génie militaire Mai-juin 1947, 292 p.
Art et technique du béton armé, n° 23, 1964.
"Le béton de terre", Juin 1950, Dactyl., 47 p.
Housing and Town and Country Planning. United Nations, New
York, Oct. 1950, Bull. n° 4.
La technique des travaux. Sept.- Oct. 1949, n' 9-10.
143
"Constructions de terre en France et à l'étranger",Dossier
Documentaire. Ministère de la Culture. Service des Etudes et
des Recherches. Oct 1984.
Les cahiers de l'ANAH, Sept. 1982, n" 22.
Rapport TERGNIER. Lab. du B.T.P, qqes photos. 1945.
Actes du 92ème congrès national des sociétés savantes.
Strasbourg et Colmar. 1967, section d'archéologie.
Techniques et architecture, sept.- Oct. 1943, n° 9-10.
A. MEYNIER, Question d'histoire agraire: "A quoi servent
nos études: structures agraires et remembrement". Annales,
1947, n* 1. pp. 105-107. extrait.
"Le béton de terre". Cahiers du Centre Scientifique et
Technique du Bâtiment, 1950, n°8.
"Reconstruction du Bosquel", rapport , 5 p. 26 janv. 1968.
J. BOSSU, "Le Bosquel, village de la Somme". Un dépliant.
4 p., sd.
G. BARDET, "Le Vléme salon des urbanistes", Revue
d'Administration Communale, juin 1939, n°6., pp. 169-173.
Bâtir n° 5, juin 1950.
DOSSIER 4:
Actes du 92 éme congrès national des Sociétés savantes,
op. cit.
J. BOSSU, "Le Bosquel, village de la Somme".
Une note sur la ferme du Bosquel.
Références des documents donnés par P.DUFOURNET aux A.D de
la Somme. Cotés dans la série J au numéro 15.
Liste des publications de J. BOSSU.
DOSSIER 5:
P. DUFOURNET, "Reconstruction du Bosquel", 5 p.26 janv.
1968.
J. VINCENT, "La reconstruction des villes et des immeubles
sinistrés après la guerre de 1940-1943", sd, ni, pp. 116-120.
(A propos du Bosquel).
"L'oeuvre qui se prépare". Urbanisme, Le nouveau Travail
Fév; 1943.(4 p. sur la reconstruction en Picardie).
"Ce qui a été fait et ce que l'on fait pour les
sinistrés". Coupure presse. Progrés de la Somme, 27 août 1941.
"Les sinistrés de la Somme ne sont pas abandonnés", Le
Journal d'Amiens., 27 août 1941.
Diverses coupures de presse. Journal d'Amiens, 1941-1946.
DOSSIER 6:
Le Renouveau. Bull. Paroissial du Bosquel, Août 1952, n°
10.
Note relative à l'approbation des plans de fermes du
Bosquel, Paris, Min. sd.
P. DUFOURNET, "Pour une archéologie du paysage".
Souscription.
Extrait du rapport justificatif du projet d'aménagement et
plan de reconstruction
Divers plans de fermes.
P. DUFOURNET, "Comment se sont construits les villages
picards, ce qu'il en advient". Revue Tech, et Archi. Techniques
locales. n° 2-12, nov. 1943.
Annales E.S.C, extrait du n° 4, juil. 1974.
DOSSIER 7:
Chemise 7a:
Lettre de l'IGREF à propos du remembrement rural du
Bosquel et des réclamations en découlant. 20 déc. 1944.
Rapport sur les travaux du remembrement. 25 sep. 1943.
Divers courriers sur le remembrement.
Chemise 7b:
Présentation
du
reconstruction type.
village
et
des
raisons
d'une
Chemise 7 c :
Documents inédits relatifs à l'offensive allemande au sud
d'Amiens, juin 1940.
Chemise 7 d:
Courriers divers, extraits de P.V au sujet des fermes
Rapport du Directeur Général des travaux sur la
reconstruction du Bosquel, village témoin. 22 fév. 1947, 27 p.
145
Chemise 7e: ("1942-1943")
Contrat
n°
X.
Commissariat
à
la
reconstruction.
Association Syndicale du Bosquel. 22 janv. 1943. (Principes
d'aménagement, programme des immeubles types)
Chemise 7f: ("1941-1942")
Contrat pour l'établisement d'un projet d'aménagement. 9
avr. 1941.
28 nov. 1941: soumission du projet à la Direction Générale
des Eaux et Forêts.
Divers courriers y faisant suite.
Opérations de remembrement urbain. 23 mai 1942.
DOSSIER 8:
P. DUFOURNET, "Une unité agricole. Le Bosquel. Principes
Généraux d'Aménagement". Plaquette en 34 planches de papier
calque, si, nd.
Courrier de l'année 1946 sur le remembrement,
Libres propos de G. DELAMARE. 23 Mars 1946. Texte
radiophonique.
Pétition au Ministre des Finances. "C'est le désordre
organisé".
P. DUFOURNET, "La réorganisation foncière et l'urbanisme",
circulaire de l'I.T. DU BTP, série A, n° 8, 15 juin 1945.
DOSSIER 9:
Grille CIAM d'urbanisme, juin 1949. 7éme congrès.
Planches d'une expo.
DOSSIER 10:
V. BRANDICOURT, Clochers de Picardie, 1905, Bull. SAP,
n°4. pp. 429-460
O. THOREL, "Les ecces homos des anciens puits publics à
Amiens", Bull. SAP, n°2 et 3, 1909, pp. 67-94.
Coupures de presse, Juin, juil. 1939.
Une planche photos.
Une introduction.. "En Picardie...".11 mai 1990, 10 p.
"Glanes d'ethnographie , d'art populaire et de folklore".
Sommaire. 11 mai 1990.
Idem, présentation, 10 p.
Série des photos de petits bâtiments.
Reconstruction du Bosquel, 10 p histoire.
"Bibliographie des textes repris dans cet ouvrage..."
Bibliographie des titres de P. DUFOURNET concernant la
Picardie
Idem pour l'Aménagement du territoire
Idem sur le Village picard
DOSSIER 11:
P. DUFOURNET, Plans et schémas de thèse pour l'Institut
d'Urbanisme de Paris. 1939-1945.
Le Bosquel. Vue d'ensemble et conclusions sur sa
reconstruction.
Fêtes religieuses et civiles au Bosquel
Terminologie du bâtiment et détails de construction.
Amienois. Système de construction
Diverses photos
Exploitations agricoles du Bosquel
P. DUFOURNET, "Le village et l'habitation rurale en
picardie septentrionnale". Plan de thèse. 1941-1942.
Chemise lld:
Coupures de presse: "les études géographiques en
Picardie". 1944.
Urbanistica. Anno XIX, n° 4, extraits, (à propos du
Bosquel).
G. LECOMPTE, "Les projets d'aménagement des petites villes
et villages de la Somme", si, nd.
R. AUZELLE, "Maison d'ouvrier agricole", l'Arvchitecture
Française, 1942, n" 15.
P. DUFOURNET, "Cours d'urbanisme et de Planification,
chap. XII: "l'espace agricole". 90 p. si, nd.
DOSSIER 12:
Chemise 12a:
Divers plans.
Diverses photos
P.
DUFOURNET,
"Qu'en
advient-il
de
la
maison
traditionnelle paysanne et bourgeoise en France?" si, nd, 5 p.
Région de la Somme, Modes de construction et emploi des
matériaux locaux et traditionnels. Plan
P. DUFOURNET, "Comment se sont construits les villages
picards et ce qu'il en advient", Techniques et "architectures
(11-12), nov. 1943.
P.
DUFOURNET,
"L'aménagement
des
campagnes",
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construction moderne, (9), janv. 1946., pp. 26(-270.
P. DUFOURNET, "La réorganisation foncière et l'urbanisme",
circulaire de l'I.T du BTP, série A, n° 8, 15 juin 1945.
G. BARDET, "Le VI éme salon des urbanistes", Revue
d'administration communale, si, nd.
P. DUFOURNET, "Régionalisme et tradition", Techniques et
architecture, vol VI, (3-4), 1948, p. 152.
Dr. CAYLA, "L'avenir de la maison traditionnelle en
France", Cahiers de la Ligue Urbaine et rurale, (54), sd.
P. DUFOURNET, "Survivances de la construction en pan de
bois et torchis en Picardie", Actes du Colloque "Le bois dans
la Gaule Romaine et les provinces voisines", Caesarodunum, tome
XXI, 1985, pp. 230-238.
Annales E.S.C, 4 juil 1974, extraits.
P. DUFOURNET, M. FLORENTIN, "Maisons en béton de terre
stabilisé", Circulaire de l'IT du BTP, série D, n° 12, 15 déc.
1945.
R. AUZELLE, P. DUFOURNET, "Le béton de terre stabilisé",
Techniques et architecture (9-10), 1943.
DOSSIER 13:
13 b: Fiches pour identification de villages ou bâtiments
13 c:
P.
DUFOURNET,
"Qu'en
advient-il
de
la
maison
traditionnelle..."
Annales ESC
P. DUFOURNET, "Maisons en béton de terre stabilisé"...
P. DUFOURNET, "Une expérience de construction en béton de
terre stabilisé", 10 p, si, nd;
P. DUFOURNET, "Sorrus, Note sur la formation d'une commune
du ponthieu", actes du 94éme Congrès National des Sociétés
Savantes . Pau 1969, pp. 402-448.
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