
34 Santé Éducation - 01 - Octobre-Novembre-Décembre 2013
Santé Éducation
L’ÉCHO DES COLLOQUES
Tout symptôme peut être accompagné d’un sentiment ou
d’une émotion qui envahit tout le champ de la pensée,
réduisant le patient à la seule expression de sa maladie.
Face à cela, la personne montre sa souffrance et l’im-
puissance à laquelle elle est confrontée. Les équipes
soignantes sont parfois démunies face à un tel enva-
hissement et ont besoin de mieux comprendre le vécu
émotionnel du patient afi n de pouvoir lui apporter le
soutien nécessaire.
La question de l’origine psychologique d’une maladie chro-
nique est évoquée. Elle est facilement mise en avant par
l’entourage du patient, le patient lui-même, et parfois le
corps soignant (stress, diffi culté à gérer les problèmes,etc.).
Apparaît alors la prééminence du psychique (réduit à son
expression comportementale) sur le somatique (expres-
sion de la douleur) mettant en avant des liens de causalité
fort réducteurs, qui contribuent à l’augmentation du senti-
ment de culpabilité, car le patient ne saurait pas “gérer”
son psychisme.
L’approche psychosomatique ne fait pas prévaloir le
psychique sur le somatique, mais nous apporte une autre
explication sur la façon de comprendre certaines mala-
dies somatiques où la “confl ictualisation” psychique utilise
davantage le corps comme lieu d’expression. C’est une
question complexe qu’il importe de traiter en respectant
le mode de fonctionnement et l’organisation psychique du
patient. Que l’origine de la maladie soit génétique, envi-
ronnementale et/ou psychique, il importe de prendre soin
du patient dans son unité constitutionnelle, dans sa façon
de fonctionner, dans ce qui lui est propre.
La théorie psychanalytique reconnaît à l’individu sa place
de sujet unique, avec une organisation psychique singu-
lière et complexe. Elle peut aider le patient, son entourage
et les équipes soignantes à une meilleure compréhension
des problématiques auxquelles la maladie les confronte.
Elle porte un éclairage qui permet une analyse plus fi ne
des diffi cultés.
Le psychiatre ou le psychologue peut participer, avec son
savoir-faire, à un programme d’ETP et contribuer à une
meilleure prise en charge.
Rôles et compétences des différents
professionnels intervenant
en ETP dans la prise en charge
psychologique du patient
Face à la complexité de l’être humain, la prise en soins
en général, et éducative en particulier, doit prendre en
considération plusieurs dimensions. La complexité en
miroir devient alors celle de l’équipe soignante. Celle-ci
en tant qu’entité recèle nombre de compétences, biomé-
dicales, psychologiques et sociales, qui sont nécessaires
pour répondre aux besoins du patient. L’interdisciplinarité
qui prévaut alors dans l’équipe, qui se défi nit par le fait
de travailler ensemble en échangeant de façon intense
dans un but commun, devient un principe fondateur de
l’équipe.
Dans ce cadre, on perçoit la complémentarité qui existe
entre tous les professionnels de santé, intégrant le
psychiatre et/ou le psychologue.
Le psychologue, ou le psychiatre, accueille au travers des
consultations, ponctuelles ou régulières, l’expression du
patient, de sa souffrance, de ses représentations... Il tente
de lui offrir un étayage relationnel servant d’assise à l’ex-
pression de son vécu et de ses diffi cultés. Une attitude
bienveillante et soignante permet de renforcer l’alliance
thérapeutique et offre au patient une contenance rassu-
rante, sur laquelle il peut prendre appui. Si la maladie
tend à l’isoler et à le réduire à son unique expression, le
suivi psychologique s’orientera vers une ouverture, un
élargissement perceptif et une prise de conscience de sa
place de sujet. Un travail d’élaboration psychique se met
à l’œuvre et permet une dynamique psychique davantage
porteuse d’actions et de perspectives. Le psychologue ou
le psychiatre participe au travail de l’équipe, par la mise
en commun de sa spécifi cité (éclairage sur les aspects
psychologiques) mais aussi par sa capacité à soutenir
et à prendre en compte la parole de chacun, à “prendre
soin” de l’équipe dans son ensemble…
Par ailleurs, il peut être utile de mettre en place une
supervision avec un intervenant extérieur différent qui
consiste en une analyse des pratiques et un soutien des
équipes afi n, entre autres, de repérer un risque de
burnout
.
L’abord psychologique du patient relève également des
autres professionnels de l’équipe. Dans l’ETP, les inter-
venants sont majoritairement des paramédicaux (infi rmier,
aide-soignant, diététicien, masseur-kinésithérapeute,
etc.). Leurs compétences professionnelles, issues de leur
formation (professions réglementées), leur donnent une
légitimité pour participer à la prise en charge psycholo-
gique du patient. Tous, à des degrés divers, ont des compé-
tences en soin et/ou en accompagnement psychosocial.
Plusieurs sont ainsi nécessaires :
•
construire une relation, une alliance thérapeutique ;
•
pratiquer une écoute active ;
•
favoriser l’émergence d’une demande de la part du
patient et/ou de l’entourage ;
•
repérer et respecter la temporalité du patient ;
•
chercher les complémentarités en équipe ;
•
rester ouvert ;
•
gérer ses propres émotions ;
•
recourir à plusieurs outils (ETP, approches psycho-
sociales, autres…) ;
•
assurer une continuité dans l’accompagnement ;
•
garder une position d’humilité : on n’est pas là pour
trop faire et faire trop vite.
L’un des indicateurs permettant de savoir si l’on est juste
face au patient en ETP consiste à sentir si l’on est en réso-
nance avec lui.
L’accompagnement réalisé par les associations de
patients est un complément important à cette prise en
soins psychologique du patient. Il aide aussi à faire le lien
entre l’hôpital et la ville.
Même si les compétences psychologiques des profes-
sionnels de santé et acteurs sociaux sont réelles, ceux-ci
doivent pour autant connaître leurs limites. Il s’agit
d’écouter l’autre de sa place et de ne pas traiter autre
chose que ce pourquoi on est là. Parfois, il convient de
passer la main au psychologue ou au psychiatre lorsque
émergent des ressentis tels qu’un sentiment d’impuis-
sance face au patient, l’impression de ne plus être assez