RepèRes éConomiques | 5
RBC Gestion mondiale d’aCtifs
vendre ? En fait, nous avons déjà constaté que cela se
produit un peu. La Chine semble avoir réduit son taux
d’accumulation et, ces dernières années, plusieurs pays
se sont tournés vers des pays moins endettés comme
l’Australie et le Canada pour y faire une partie de leurs
achats. Mais l’ampleur de ce changement devrait être
limitée et ses conséquences, assez négligeables.
D’abord, nous savons que les banques centrales
ont tendance à être moins inconstantes dans leurs
investissements que la plupart des autres investisseurs.
La Chine et le Japon sont, et de loin, les plus importants
porteurs de titres d’emprunt étrangers et ils détiennent
des titres du Trésor américain pour des raisons tout à fait
pragmatiques. Leurs achats empêchent leur monnaie de
s’apprécier et fournissent à leurs économies marchandes
des conditions d’accès avantageuses aux acheteurs
américains. Pour ce qui est des solutions de rechange, on ne
voit pas comment la Chine pourrait investir les centaines
de milliards de dollars de ses réserves ailleurs sans
perturber le marché. Aucun des autres importants marchés
obligataires du monde n’est en bien meilleure forme.
Ensuite, nous savons que le marché des titres du Trésor
américain fait l’objet d’une demande très élastique. En
conséquence, la disparition d’un important acheteur
n’exigerait qu’une légère hausse de taux pour attirer
une demande de substitution. Cela a été parfaitement
démontré lorsque la Réserve fédérale américaine
a cessé ses gigantesques achats en juin sans que le
marché obligataire en soit sensiblement touché.
Néanmoins, malgré l’absence d’un seuil absolu de viabilité
bien défini, le simple fait que le ratio d’endettement
des États-Unis entre dans un territoire inexploré depuis
la période d’après-guerre des années 1943 à 1950 est
une raison suffisante pour faire preuve de prudence
et, espérons-le, pour remédier à la situation.
Un catalyseur utile
La débâcle provoquée par la question du plafond de
la dette et la tentative peu convaincante de procéder
à une réforme budgétaire qui a suivi ont donné lieu
essentiellement à de mauvaises nouvelles. Mais cela
pourrait receler quelques bonnes nouvelles. Parfois, un
événement perturbateur – dans ce cas-ci, un abaissement
de la cote de solvabilité – peut être le plus efficace des
incitatifs pour régler un problème de longue date.
mais
c’est une pente savonneuse, car la dette continue
d’augmenter à un rythme de plus en plus rapide.
La viabilité de la dette
À l’heure actuelle, le Trésor consacre un petit pourcentage
du total de ses dépenses au service de la dette :
seulement 1,4 % du PIB, un creux jamais vu en 39 ans.
La faiblesse sans précédent des taux d’intérêt rend le
fardeau croissant de la dette supportable, une situation
peu susceptible de changer beaucoup au cours des
prochaines années. Ce qui changera la donne cependant,
c’est l’augmentation de la dette et la probabilité d’une
hausse des taux d’intérêt à moyen terme. Étant donné la
tendance actuelle de la dette, le Trésor pourrait devoir
dépenser deux fois plus (proportionnellement au PIB)
au titre du service de la dette dans une décennie.
Les pays ayant les dettes gouvernementales les plus lourdes
ont tendance à souffrir d’une croissance économique plus
lente.4 Un ratio dette/PIB à 90 % pourrait être, en quelque
sorte, un seuil au-dessus duquel un pays risque de glisser
dans une situation économique gênante. D’après certaines
définitions de la dette plus alarmistes, les États-Unis ont
déjà franchi les portes de l’enfer. Heureusement, notre
mesure de prédilection (une mesure plus adéquate à cette
fin) – à savoir la dette fédérale détenue par le public –
donne à entendre que les États-Unis en sont encore à une
certaine distance. Mais les projections de base indiquent
clairement qu’ils s’acheminent dans cette direction.
En réalité, il n’existe probablement pas de seuil magique
d’endettement. L’énorme dette du gouvernement japonais
le prouve. Contrairement aux États-Unis, le Japon a peu
de dettes envers les investisseurs étrangers et il détient
des avoirs importants hors du pays, tandis qu’un peu
plus de la moitié de la dette publique des États-Unis
est détenue par des investisseurs étrangers, et de façon
disproportionnée par des banques centrales étrangères.
Cela indique que les obligations américaines ont toujours
fait l’objet d’une forte demande, mais il y a aussi un risque.
Qu’arriverait-il si les investisseurs étrangers cessaient
de les acheter – ou pire – s’ils commençaient à les
4 Les mécanismes de transmission et le lien de causalité font encore l’objet de ques-
tionnements importants, et il y a aussi un certain degré d’incertitude quant à savoir si
le rythme plus lent de la croissance est une simple conséquence temporaire de la mise
en œuvre de mesures d’austérité budgétaire visant à réduire la dette de ces pays.
Mais le message fondamental est clair : un lourd fardeau de la dette ne crée pas des
conditions propices à la croissance.