
La tectonique des plaques
en cause
Cette chaîne de petites îles, atteignant une altitude de
300 mètres, s’étend sur une quarantaine de kilo-
mètres, au sein de la « ceinture de feu » du Pacifique
– ensemble d’arcs volcaniques s’étirant de la
Nouvelle-Zélande à la Terre de Feu, à l’extrême sud
du continent américain. Autrement dit les Torrès se
trouvent à la bordure de la plaque tectonique dite du
Pacifique, toutes proches de la fosse océanique des
Nouvelles Hébrides, profonde de 8000 mètres. À cet
endroit, la plaque indo-australienne plonge sous la
plaque océanique avec une vitesse de convergence
de l’ordre de 7 centimètres par an. Dans sa subduc-
tion3, la plaque continentale entraîne la base de la
plaque Pacifique qui la chevauche, produisant la
subsidence des îles situées au-dessus, qui s’en-
foncent alors dans l’océan.
Les séismes redistribuent le jeu
Le cycle sismique modifie le niveau de la mer relatif sur
l’archipel. Les tremblements de terre provoquent de
soudains mouvements verticaux de la croûte terrestre :
ces mouvements dits co-sismiques récupèrent en
partie la déformation accumulée en sens opposé entre
deux événements. Parfois, les îles s’abaissent. Ce fut
notamment le cas en 1997, où elles se sont brutale-
ment affaissées d’un mètre. Mais le plus souvent,
quand la lithosphère4 se rompt sous le choc de la
secousse, elles remontent de quelques dizaines de
centimètres dans un effet rebond. Après l’événement
de 2009 par exemple, elles se sont rehaussées de
20cm. Si entre ces deux séismes les îles se sont
enfoncées – comme l’ont montré les mesures géodé-
siques –, à l’échelle des temps géologiques, les îles se
soulèvent, comme l’attestent les terrasses coralliennes
aujourd’hui émergées.
Les anciens
vivaient sur les hauteurs
S’il contribue à l’élévation du niveau apparent de
la mer aux Torrès, le réchauffement climatique
n’a donc pas le rôle dominant qui lui a été attribué.
Le niveau de l’eau monte beaucoup plus vite que
ce que les autorités locales avaient prévu en
tenant compte de la simple hausse mondiale de
niveau des océans. Une erreur d’interprétation
qui a conduit les autorités locales à déménager
Lataw à un endroit qui n’est pas optimal: bien
que le village ait été reculé de plusieurs centaines
de mètres, l’altitude du nouveau site d’implanta-
tion n’a pas suffisamment augmenté pour mettre
à l’abri ses habitants sur le long terme.
Aujourd’hui, la majorité de la population des
Torrès, mais aussi d’autres îles du Vanuatu, vit
sur l’étroite plaine côtière. A l’instar des anciens,
qui résidaient il y a encore un siècle sur les
hauteurs de ces petites îles escarpées, les habi-
tants devraient quitter les zones du littoral les
plus exposées aux variations du niveau de
l’océan. Ces travaux permettent aux autorités
locales de mieux comprendre les changements
de leur environnement et pourront les aider à
l’avenir à prendre les meilleures décisions pour
leur futur.
Rédaction DIC — Gaëlle Courcoux
Le nouveau site du village (à gauche et au milieu) demeure toujours trop près de la côte. Face aux risques naturels dans la région du Vanuatu (à droite, mesures
volcaniques), les habitants de ces petites îles devraient prendre exemple sur leurs ancêtres qui vivaient sur les hauteurs.
Contacts
Valérie BALLU,
chercheure au CNRS en accueil à
l’IRD pour ces travaux
Tél. : +33 (0)1 57 27 84 78
Adresse
Institut de Physique du Globe de Paris
Case 89, Tour 26-16, 3ème étage
4 Place Jussieu
75252 Paris cedex 05
Bernard PELLETIER,
directeur de recherche à l’IRD
Tél. : (687) 26 07 72
UMR 82 Géoazur (IRD / Université de
Nice Sophia Antipolis / CNRS /
Observatoire de la Côte d’Azur)
Adresse
IRD Nouméa
BP A5
98848 Nouméa cedex
Nouvelle-Calédonie
Références
Ballu Valérie, bouin m. n., siméonip.,
Crawford Wayne, Calmant Stéphane,
Boré Jean-Michel, kanas t.,
PelletierBernard. Comparing the role of
absolute sea-level rise and vertical tectonic
motions in coastal flooding, Torres Islands
(Vanuatu).
PNAS
, 2011, 108 (32), p.13019-
13022. doi:10.1073/pnas.1102842108
Becker M., Meyssignac B., LetetreL c., LLoveL
W., cazenave a., delcroix thierry. Sea
Level Variations at Tropical Pacific Islands
since 1950,
Global and Planetary Change
,
2011. doi:10.1016/j.gloplacha.2011.09.004
Mots clés
Réfugiés climatiques, niveau de la mer,
Vanuatu
Coordination
Gaëlle COURCOUX
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1. Ces travaux ont été réalisés en partenariat avec des scientifiques de l’Institut de Physique du Globe de Paris, du Centre National
de Recherches Météorologiques à Brest, du bureau d’études Géo-consulte et du Land Survey Department au Vanuatu.
2. Lent affaissement de l’écorce terrestre.
3. La subduction est le processus de glissement d’une plaque tectonique sous une autre plaque.
4. Littéralement « sphère de pierre », la lithosphère est l’enveloppe rigide de la Terre.
POUR EN SAVOIR PLUS
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