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Préface
Anne Laude
Président de l’Association Française de Droit de la Santé
Jadis, au Moyen-âge, on chassait des villes les fous comme les
étrangers, on les éloignait à jamais en les embarquant sur des navires.
Quelques années plus tard, les lieux d’internement construits et dirigés
un temps par des notables, ont été avant tout, choses de police, d’ordre
public, mais n’avaient en aucun cas une vocation médicale.
L’internement, création institutionnelle propre au XVIIème siècle,
répond en effet au moment où « la folie perçue sur l’horizon social de la
pauvreté, de l’incapacité au travail, de l’impossibilité de s’intégrer au
groupe, commence à former texte avec les problèmes de la Cité »1.
Songeons alors au foisonnement de la folie dans le ciel de la
Renaissance. C’était Don-Quichotte, c’était le roi Lear, il y a moins de
quatre siècles…
Par la suite, tout est changé : voilà la folie « recluse, dans la for-
teresse de l’internement… »2. Tellement recluse d’ailleurs, que tout le
monde se souvient de cette scène mythique où Pinel, médecin à la
direction de Bicêtre, horrifié par leur sort, obtient de Couthon la libé-
ration des fous enchaînés3.
Les chaines tombent, les fous se trouvent libérés. Retrouvent-ils
pour autant l’usage de leur libre volonté, aliénée dans le vouloir du
médecin ?
Liberté, sécurité, soins. Comment s’articule ce triptyque dans le
cadre de soins psychiatriques ?
1 -
In
J. Colombel : Michel Foucault, Ed. O. Jacob, 1994, spéc. p. 95.
2 - Colombel,
op.cit
,
loc.cit
.
3 - M. Foucault :
Histoires de la folie. Le nouveau partage
, Ed Gallimard 1972, p. 415.
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