Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES CONCLUSION Au cours de ce travail de thèse, nous avons effectué la mise en place d’une expérience de microscopie en champ proche optique appliquée à l’étude de composants de l’optique intégrée, qui soit opérationnelle dans le domaine des longueurs d’ondes des télécommunications (1.3-1.55 µm). Nous avons mis en œuvre l’utilisation d’une platine piézoélectrique dédiée à l’injection de lumière dans les structures guidantes et utilisé la technologie de l’optique fibrée de manière à optimiser la puissance injectée ainsi que la collection du signal de champ proche. Nous avons appliqué cette technique à l’étude de composants de l’optique intégrée sur verre à base de guide multimode. Nous avons mis en évidence l’influence de la position d’injection sur le processus de formation des images d’interférence au sein d’un guide faiblement multimode. L’étude de la propagation au sein d’un tel guide nous à conduit à calculer une longueur de battement pour cette structure différente de celle prédite par la théorie. Une analyse de l’excitation modale de la structure s’appuyant sur les paramètres dérivés de nos mesures nous a en outre permis de redéfinir le calcul de longueur de battement et ainsi de faire concorder nos mesures à la théorie. Notre deuxième étude a consisté en l’analyse précise du processus de formation des images d’interférence au sein d’une structure de T-magique optique selon divers modes d’excitation. La cartographie du champ propagé nous a permis d’établir un retour sur les paramètres physiques de la structure et sur son fonctionnement. Nous avons notamment mesuré la position exacte des guides d’accès et montré l’existence d’un couplage de lumière à hauteur de 10% entre eux. Nous avons également mis en évidence l’asymétrie de la jonction Y et son influence sur la formation des images d’interférence. Notre étude nous à également conduit à déterminer une largeur de section multimode supérieure à celle donnée par les dimensions du masque d’échange. Enfin, nous avons mis en évidence une longueur de section multimode idéale qui serait supérieure à celle prédite par la théorie. Cette étude à permis de mettre en évidence l’apport incomparable de la microscopie en champ proche optique pour l’étude de tels composants car elle permet, de manière précise et non destructive, un retour sur les paramètres physiques de la structure. Se pose néanmoins le problème du nombre d’excitations accessibles pour une structure donnée. En effet, la résolution du problème inverse qui consiste, à partir d’une carte de champ donnée, à recouvrir la valeur des paramètres définissant les structures, nécessite un nombre d’excitation de cette structure le plus grand possible afin de pouvoir décorréler les différents effets liés à chacun de ces paramètres. Enfin, nous avons porté notre attention sur l’étude d’un imageur MMI conçu en vu de son utilisation comme recombineur pour 4 télescopes astronomiques. L’étude de cette structure pour une excitation donnée nous a dans un premier temps permis de mettre en évidence une valeur pour le contraste d’indice plus élevée (∆n = 2.8x10-3) que celle initialement escomptée (∆n = 1.3x10-3). L’analyse de la propagation pour une excitation différente nous a ensuite conduit à remettre en question l’approximation de la modélisation de la structure par un profil à saut d’indice. Nous avons montré qu’un profil d’indice modélisant un gradient d’indice conduit à une simulation de la structure en excellent accord avec ce qui est observé en champ proche. Le modèle utilisé reste cependant une approximation relativement simpliste du véritable profil d’indice de la 134 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES structure et des études complémentaires sont en cours afin de déterminer précisément, via le calcul du profil des contraintes induites par l’échange, le profil d’indice réel de ces structures. Notre étude à également permis la mise en évidence d’un certain dysfonctionnement de la structure pour l’application de recombinaison de quatre signaux, puisque, pour une excitation donnée, un des signaux de sortie est absent. Nous avons néanmoins pu établir que le dispositif présentait une longueur optimisée de recombinaison de 6200 µm pour un fonctionnement à trois signaux d’entrée seulement. Nous avons donc montré, à travers ce travail, que la microscopie en champ proche optique est un outil inégalable pour l’étude et la caractérisation de composants de l’optique intégrée sur verre. Les cartes du champ propagé obtenues permettent, par résolution d’un problème inverse, un retour fin sur les paramètres physiques des structures étudiées. Nous avons vu qu’il est cependant nécessaire d’avoir plusieurs types d’excitation de ces structures afin de résoudre pleinement ce problème inverse. Néanmoins, nous avons montré, qu’à partir d’un nombre d’excitation suffisantes, le comportement du composant peut être décrit de manière précise et que nous pouvons calculer les valeurs de certains des paramètres optimisant le fonctionnement des structures. 135 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES PERSPECTIVES Le potentiel inégalable de la microscopie en champ proche optique pour l’étude de composants de l’optique intégrée voit encore son intérêt s’accroître par le pouvoir de résolution que procure cette technique. En effet, le besoin actuel de dispositifs optiques de tailles toujours plus faibles rend cette méthode de caractérisation locale très attractive. Le domaine des interconnexions optiques, notamment, qui vise à terme le remplacement des connexions métalliques dans les circuits intégrée par des connexions optiques, nécessite une réduction drastique de la taille des composants optiques en vue de leur intégration sur les circuits développée par la microélectronique. Cette réduction nous conduit de nos jours à des composants de tailles inférieures à la longueur d’onde. Ce domaine constitue donc un champ d’investigation parfaitement adapté à l’utilisation de la microscopie en champ proche optique. Deux voies principales sont empruntées jusqu’à présent dans le but de réduire les tailles des dispositifs. L’une d’elles, appelée réfractive, consiste en l’utilisation de matériaux dont le contraste d’indice est élevé (typiquement supérieur à 2) ce qui conduit à un très fort confinement de la lumière et permet le développement de fonctionnalités sur des distances très faibles (MMI NxN de quelques dizaines de microns, virages à angle droit à faibles rayons de courbure…). L’autre voie consiste en l’utilisation des cristaux photoniques qui permettent également la conception de dispositifs optiques complexes de basse dimensionnalité (guide submicroniques, virages, micro-cavités…). L’étude de composants nanophotoniques (sub-longueur d’onde) par microscopie en champ proche optique à été initiée au cours de ce travail. Nous en présentons les premiers résultats ci-après. Notons toutefois que si l’utilisation de la microscopie en champ proche optique pour l’étude de ce type de structure paraît toute indiquée, elle souffre néanmoins de certains handicaps. Premièrement, les structures à fort contraste d’indice aussi bien que celle à base de cristaux photoniques sont sujettes à une forte diffusion de la lumière dans la direction verticale si des défauts sont présents. Ceci influe alors sur la dynamique de détection du signal et il est bien souvent difficile de percevoir le champ évanescent (de niveau faible) qui se retrouve noyé dans le signal diffusé. Mais le point principal limitant l’étude de ces composants de basse dimensionnalité reste la pointe SNOM. D’une part la taille de l’ouverture doit être faible (typiquement inférieure à 100 nm) mais nous devons également posséder une très bonne reproductibilité de ces pointes. Ce sont les deux paramètres majeurs qui ont limités notre travail sur des composants nanophotoniques. 136 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES STRUCTURES REFRACTIVES SUR SOI Le choix de la filière SOI pour le développement de dispositifs pour les interconnexions optiques se base sur les critères suivants : La filière SOI est compatible avec la technologie CMOS. Le Si du SOI forme naturellement un guide d’onde optique à la longueur d’onde de 1.3 µm avec de très faibles pertes si épaisseur d’oxyde > 0.5 µm. Utilisation des techniques de fabrication de la microélectronique. Possibilité d’introduction d’un confinement latéral -> guides Si entourés de SiO2. Grand contraste d’indice Si/SiO2 -> fort confinement -> réduction des tailles des guides à des dimensions sub-microniques et virages à faible rayons de courbure sans pertes prohibitives. De plus quelques microns d’espacement entre guides d’onde suffisent pour éviter la diaphonie. Densité d’intégration importantes dans une techno totalement compatible (intégrable) avec la microélectronique Si. L’étude que nous présentons ici a pour principal but de mettre en évidence la possibilité d’effectuer des mesures quantitatives par microscopie en champ proche optique. Après une brève description de la structure étudiée, nous nous attacherons à déterminer l’origine des pertes observées et à les mesurer. Description du composant Les structures des guides d’ondes sur SOI ont typiquement l’architecture de la Figure p-1. Un oxyde de silicium est déposé sur un substrat de silicium sur une épaisseur d’environ 1 µm pour isoler le guide du sus-mentionné substrat. On fait alors croître une couche de silicium de 400 nm d’épaisseur sur l’oxyde enterré et diverses étapes de gravure sont réalisées afin d’obtenir un guide confiné latéralement de largeur environ 400 nm. Une couche de silice d’encapsulation est alors déposée au dessus du guide formé. Nous avons donc ainsi un guide d’onde de 400 nm par 400 nm, théoriquement monomode à la longueur d’onde de 1.3 µm. Figure p-1 : Architecture des guides d’ondes sur SOI étudiés. Le guide de silicium est encapsulé dans une matrice de SiO2 d’environ 0,4 µm d’épaisseur. Une épaisseur d’1 µm d’oxyde enterré est choisi de manière à isoler totalement le guide du substrat. 137 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES La structure dont nous présentons l’étude ici est constituée d’un guide droit suivi d’une jonction Y dont un des bras possède une série de 44 guides en arcs de cercle de rayon de courbure de 10 µm, comme schématisée sur la Figure p-2. L’autre bras, dit bras de référence, est un guide droit. L’injection dans les structures se fait à l’aide d’une transition adiabatique qui fait 2 µm de large à l’entrée et s’amenuise afin d’adapter le mode au guide de 0.4 µm de large. Afin de coupler au mieux la lumière d’injection, nous utilisons une fibre lentillée qui fournit un diamètre de faisceau en son point focal d’environ 2 µm. La source utilisée est une diode laser DFB émettant à 1.3 µm. Figure p-2 : Représentation schématique de la structure étudiée. Ces composants ont initialement été conçu en vue de leur caractérisation en régime de transmission. Le mode guidé dans le silicium est très fortement confiné et un calcul rapide nous indique que le champ évanescent lié à ce mode ne pénètre pas au delà de 200 nm dans la silice, ce qui le rend indétectable en surface de l’échantillon. Cependant, lorsque l’on injecte la lumière dans ces structures, nous pouvons clairement voir apparaître la lumière guidée par observation à l’aide d’une caméra placée au dessus de l’échantillon. Ceci témoigne de pertes importantes de la structure dans le plan perpendiculaire à la propagation. La valeur de ces pertes sera calculée dans la section suivante à travers l’étude de la propagation dans la zone des virages. Notons cependant que ces structures à fort contraste d’indice sont très sensibles aux paramètres géométriques du guide et que, notamment, une rugosité importante peut-être à la base des pertes observées. Observation de la lumière propagée au sein des guides courbes La Figure p-3 présente une vue d’ensemble des 44 arcs de cercles constituant la zone de virages. L’image supérieure est tirée des mesures de topographie et l’image inférieure est la reconstitution de la propagation telle qu’observée en champ proche optique. Nous pouvons tout d’abord noter que la lumière semble suivre parfaitement le chemin tracé par les guides. Ceci nous indique que la lumière observée est bien issue de la propagation et n’est pas due à un éclairement externe de la structure. L’image optique présente des points d’intensité élevée au niveau des inversions de courbures des virages, laissant transparaître un niveau de pertes plus important au niveau de ces points d’inflexion. Notons enfin que la lumière propagée n’est plus visible au delà de la zone des virages. 138 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES Figure p-3 : Images de champ proche topographique (en haut) et optique (en bas) des guides courbes. Les rayons de courbures sont de 10 µm. La lumière guidée est clairement visible et suit parfaitement les courbes. Des pertes ont cependant lieu au niveau des points d’inflexion (inversion de courbure des guides). Nous reportons sur la Figure p-4 les images de champ proche topographiques (à 2 et 3 dimensions) et optique correspondant à la zone marquée par un rectangle blanc sur la Figure p-3. L’image topographique nous renvoit une hauteur de structure de 400 nm, ce qui correspond à celle escomptée. La largeur du guide observée est de 1 µm. Compte tenu de l’épaisseur de la couche de silice d’encapsulation, cette donnée est en bonne adéquation avec les paramètres technologiques. Nous pouvons en outre remarquer que la structure présente une excroissance sur la partie gauche du guide. Nous avions, dans un premier temps, songé que cette excroissance pouvait être un artefact du à un effet de double pointe (phénomène d’oscillation verticale de la pointe SNOM qui, pour des topographie très prononcées, peut engendrer une répétition de l’image). Cette idée à cependant été écartée du fait que le renflement apparaisse toujours sur le même bord du guide, quelque soit le sens de balayage. Aussi cette excroissance est-elle bien réelle. Elle ne semble cependant pas affecter la propagation, l’image optique ne présentant pas de dissymétrie majeure. Si nous comparons maintenant l’image optique à l’image topographique, nous pouvons voir un décalage entre ces dernières, la lumière semblant se propager à côté de la structure. Nous attribuons ce phénomène au fait que l’ouverture optique de la pointe soit décalée par rapport à son apex qui, lui, détermine le point de prise d’image topographique. Enfin, il est intéressant de noter que la lumière propagée ici observée présente des profils très larges (de l’ordre de 3 µm de largeur à mi-hauteur), bien loin de ce que nous verrions si nous observions directement le mode guidé dans le silicium. Nous avons mentionné précédemment que ce mode était inaccessible par mesure de 139 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES Figure p-4 : Images de champ proche topographique et optique d’une partie des virages. La topographie présente une hauteur de guide de 400 nm pour une largeur de crête de 1 µm. L’ouverture de la pointe est décalée par rapport au point de prise d’image topographique se qui engendre un décalage entre image topographique et image optique. champ proche, du à l’épaisseur importante de silice d’encapsulation. Nous pouvons néanmoins remarquer que la lumière observée semble confinée (quoique très faiblement) dans la couche de silice, ce qui lui permet de suivre le contour dessiné par les guides. Structure modale Les calculs menant au comportement monomode de la structure ont été effectués sur une structure idéale telle que reportée sur la Figure p-1. Il s’avère cependant que la structure réelle, dont une image par microscopie électronique en transmission est donnée sur la Figure p-5, est légèrement différente. On se rend alors compte que la silice d’encapsulation suit les contours du guide silicium et que ce dernier présente une forme trapézoïdale. Si l’on, calcule les modes d’une telle structure, on se rend compte qu’il existe un mode confiné dans le silicium dont les pertes sont faibles et tout un ensemble de modes fuyants délimités par l’interface SiO2/Air. Figure p-5 : Image TEM de la structure étudiée. Le guide de silicium présente une géométrie trapézoïdale et la silice d’encapsulation suit les contours du guide. 140 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES Origine des pertes Nous attribuons les pertes observées sur l’image globale reportée sur la Figure p-3 à deux sources différentes. Les points de surintensité observés aux niveaux des inversions de courbure des virages sont attribués aux pertes, au niveau des virages, du mode fondamental localisée dans le silicium. La Figure p-6 présente les mesures d’intensité (en dB) effectuées au niveau de ces points de surintensité, tracées en fonction du nombre de virages. La pente de la courbe nous permet de quantifier les pertes liées à l’énergie guidée dans le silicium dans cette zone de virages : PertesSi = 0.12 ± 0.02 dB / virage (1) Cette valeur est en excellente corrélation avec celle obtenue par des mesures effectuées en transmission sur ces échantillons par N. Schnell dans le cadre de son travail de thèse. Figure p-6 : Atténuation de l’intensité propagée en fonction du nombre de virages. En ce qui concerne la halo plus large observé, nous avons pu l’attribuer à un des modes fuyants que nous avons calculé et les pertes associées à ce mode sont de 130 ± 10 dB/cm. Cette valeur est en excellent accord avec les mesures effectuées en champ libre par N. Schnell et les résultats des simulations concernant ce mode. Nous voyons donc ici tout l’intérêt de l’étude par microscopie en champ proche optique de ce type de composants. Nous pouvons en outre noter qu’un autre attrait de cette technique, par rapport aux méthodes de mesures classique, est le fait de pouvoir observer une zone ciblée de l’échantillon et d’effectuer des mesures sur celle-ci tout en s’affranchissant d’éventuels dysfonctionnement du composant dans une zone en amont de celle observée. Dans notre cas, par exemple, nous avons également imagé la jonction Y précédent la zone des virages. Nous avons pu observer une très forte asymétrie dans la séparation du signal issu de la jonction. 68 % de la lumière se couple sur le bras contenant les virages et seulement 32 % est couplée dans le bras de référence. Une telle asymétrie rend impossible la mesure de perte par transmission. La microscopie en champ proche optique, elle, permet de se libérer de ce dysfonctionnement et, en outre, de faire un retour sur les mesures en transmission par l’évaluation de cette asymétrie. 141 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES STRUCTURES A BASE DE CRISTAUX PHOTONIQUES Les cristaux photoniques sont des structures dont l’indice diélectrique varie de manière périodique à l’échelle de la longueur d’onde sur une ou plusieurs directions de l’espace. Cette variation de l’indice optique suivant les différentes directions entraîne l’apparition de gammes de fréquence pour lesquelles la lumière ne peut alors plus se propager. Par analogie avec la propagation des électrons dans un cristal, ces bandes de fréquences sont nommées bandes interdites photoniques. La réalisation d’une périodicité sur toutes les directions de l’espace peut ainsi permettre de réfléchir une onde lumineuse quelque soit son angle d’incidence et sa polarisation. Le cas d’un cristal photonique à trois dimensions, s’il a été proposé théoriquement, reste cependant difficile à réaliser technologiquement. En revanche, le cas à une dimension est facilement mis en œuvre et a déjà été grandement employé, il s’agit du miroir de Bragg. Un cristal photonique à deux dimensions est quant à lui réalisé par un motif périodique triangulaire de piliers semiconducteur dans l’air ou de trous d’air dans un matériau semiconducteur. La deuxième solution est cependant la plus employée de part sa plus grande facilité d’implémentation technologique. Un des attraits de ce genre de structures repose sur l’insertion contrôlée de défauts au sein du cristal lors de sa fabrication. Ainsi, le retrait d’une (ou plusieurs) rangée(s) entière(s) de motifs génère des états au sein de la bande interdite qui peuvent être le support d’un champ électromagnétique propagatif. Autrement dit, l’apparition d’un défaut linéique dans le cristal forme un guide d’onde (voir Figure p-7). L’espacement et les rayons des trous considérés étant de l’ordre d’une fraction de longueur d’onde, les guides d’ondes formés présentent des dimensions sub-microniques. L’intérêt de l’utilisation de la microscopie en champ proche optique pour l’observation de telles structures se fait alors pressentir. Figure p-7 : Vu schématique d’un cristal photonique à deux dimensions composé de trous d’air dans un matériau semiconducteur. Le motif périodique est triangulaire et un défaut linéique (une rangée de trous manquante) permet le guidage de la lumière. Au cours de ce travail de thèse nous avons initié une étude sur les guides d’onde à base de cristaux photoniques. Une observation préliminaire consistait en la mise en évidence du guidage au sein d’un guide formé par le retrait d’une seule ligne de motifs. Ces guides sont alors nommés W1. 142 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES Description de la structure La structure que nous avons étudiée consiste en un motifs périodique triangulaire de trous d’air dans une matrice d’InP dont une rangée de trous a été omise. Le confinement latéral de la lumière s’effectue donc par le cristal. Le confinement vertical est quant à lui obtenue grâce à une structure multicouche dont l’empilement est schématisé sur la Figure p-8. Le cœur du guide est constitué d’une couche de GaInAsP de 480 nm d’épaisseur déposée sur un substrat d’InP. La structure est ensuite recouverte de 200 nm d’InP. Les motifs des trous gravés ont une période de 360 nm pour un diamètre de trous d’environ 230 nm. Le motif est gravé sur une profondeur avoisinant 3 µm. Une telle profondeur est nécessaire pour que les parois des trous soient les plus verticales possibles au niveau de la couche guidante de GaInAsP. Figure p-8 : Empilement multicouche permettant le confinement vertical de la lumière. Le cœur du guide est constitué de GaInAsP. Le motif triangulaire présente une période de 360 nm. Les trous ont un diamètre de 230 nm et la profondeur de gravure avoisine les 3 µm. L’injection directe de lumière dans le cristal ne permettant un couplage au mode guidé suffisant, un guide de type ridge est utilisé pour remplir cette fonction. Le guide accède alors à la partie du dispositif contenant le cristal. Les dix premières rangées du cristal au niveau du guide forment une transition adiabatique permettant l’adaptation du mode guidée dans le ridge vers le guide W1. Cette transition consiste en une série de trous de diamètres croissants permettant de réduire la taille du guide dans le cristal de 3 à 1 rangée. Une partie de cette transition est visible sur l’image topographique reportée sur la Figure p-9a. Mise en évidence du guidage de la lumière. Les images obtenues sur ces guide W1 sont présentées sur la Figure p-9. L’image topographique présente une excellente résolution. Les trous ainsi que les espacements entre ces derniers sont clairement définis et l’on peut estimer la résolution topographique comme étant inférieure à 150 nm. Une zone zoomée de 2x2 µm² est également reportée sur laquelle nous pouvons reconnaître le motif triangulaire 143 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES élémentaire. Nous remarquons en outre une légère oscillation verticale de la pointe dans le sens du balayage (de la gauche vers la droite). (a) (b) Figure p-9 : Images topographique (a) et optique (b) du guide W1 et zooms (2x2 µm²) correspondant à la zone marquée d’un carré blanc. L’image optique, quant à elle, présente également quelques singularités intéressantes. Nous pouvons notamment noter la présence de points de surintensité espacés périodiquement qui semblent correspondre avec les bords du guide. Cette délimitation du guide laisse présager que la lumière est effectivement guidée par ce dernier. Notons en outre que l’image optique présente également une très bonne résolution. Certains points de surintensité de diamètres d’une centaine de nanomètres sont en effet clairement visibles, la résolution optique peut donc être estimée comme étant inférieure à λ/10. Nous ne pouvons cependant pas identifier directement la lumière guidée sur cette image car le signal évanescent est noyé dans un fond continu de lumière parasite. La zone zoomée met en évidence ce phénomène : nous ne pouvons pas 144 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES distinguer l’intensité propagée au sein du guide. Afin de contourner ce handicap, nous avons filtré l’image (par transformée de Fourier), de manière à supprimer les composantes de basses fréquences spatiales, pour n’en garder que les détails fins. L’image filtrée est reportée sur la Figure p-10a. Le filtrage nous permet de faire ressortir les points de surintensité mais met également en évidence la présence d’une onde se propageant entre ces points. Lorsque l’on superpose cette image à l’image topographique (Figure p-10b). Nous nous apercevons que les points de surintensité correspondent exactement aux deux premières rangées du cristal bordant le guide et que l’onde propagée est confinée dans les limites de ce dernier. Le guidage est alors clairement mis en évidence. Figure p-10 : (a) Image optique (15x15 µm²) après filtrage des basses fréquences spatiales. (b) Superposition de l’image optique filtrée et de l’image topographique. Le guidage de la lumière est mis en évidence. Nous remarquons également que le signal est plus intense sur le bord droit du guide. Nous attribuons ce phénomène à un couplage de la lumière vers le cristal qui soit décalée par rapport au centre du guide. La tâche très intense visible (en bas à droite) sur l’image optique brute (Figure p-9b) confirme cette hypothèse. Nous pouvons en outre constater que la lumière guidée présente des oscillations périodiques dont la période coïncide avec celle du cristal. Cela signe la présence d’ondes de Bloch dans le guide étudié. Une étude de la structure par simulation numérique FDTD à 3 dimensions est en cours afin d’affiner l’analyse des cartes de champs obtenues. Cette étude nous a donc permis de montrer que le champ proche optique pouvait permettre de visualiser les ondes de Bloch de ces structures périodiques dont les dimensions sont inférieures à la longueur d’onde. Une résolution inférieure à λ/10 a été atteinte. Ce résultat encourageant donne lieu à de nouvelles études en cours sur les cristaux photoniques qui constitues le cadre de la thèse de M lle Delphine Néel. 145 Conclusion et Perspectives : VERS L’ETUDE DE COMPOSANTS NANOPHOTONIQUES La microscopie en champ proche optique s’avère donc être un outil inégalable pour l’étude des composants de l’optique intégrée. L’obtention de la carte du champ propagé à des résolutions bien inférieure à la longueur d’onde nous ouvre les portes de la compréhension du fonctionnement intrinsèque de structures souvent complexes et dont les paramètres physiques ne sont usuellement déterminés que par des voies indirectes ce qui limite la quantité d’information accessible. La microscopie en champ proche optique se heurte cependant à un handicap majeur, celui de la reproductibilité des sondes. La taille de l’ouverture étant prépondérante sur la résolution. L’utilisation de sondes de champ proche sans ouverture constitue une des voies possibles de contournement de ce handicap. Cependant, l’utilisation de sondes à ouvertures restant plus facile à implémenter, l’effort porté à l’amélioration de leur reproductibilité est toujours présent. Ce handicap une fois éludé, les moyens mis en œuvres portant à croire que ce sera bientôt le cas, gageons que la microscopie en champ proche optique s’imposera comme un outil incontournable de caractérisation des structures photoniques dont les tailles se voient inexorablement réduites. 146