Deuxième constat : A première vue, les critères d'appartenance semblent essentiellement de
nature économique. Cette dominante explicite cachtoutefois d'autres critères moins évidents
mais plus déterminants.
Troisième constat : Les conditions d'appartenance à ces deux entités ne sont pas toutes
explicites. En effet, les pays dits du Nord sont certes les plus riches et les plus industrialisés
du globe, mais ils ne sont pas les seuls à être prospères ou industriels. Il ne viendrait
cependant à l'idée de personne de placer au Nord les riches monarchies du golfe arabo-
persique, ni nombre d'Etats du Sud dont la majeure partie du PNB vient pourtant de leur
production manufacturière.
Quatrième constat : de plus en plus, les deux termes ont tendance à devenir des mots-
symboles, Nord étant désormais synonyme de richesse et Sud de pauvreté.
II- Nord et Sud, quels contours et quelles frontières ?
1/ Les contours du Nord
Appartenir au Nord, c'est donc avoir la fortune et l'industrie anciennes.
Mais ce n'est pas seulement cela : si «le Nord» est, dans le champ économique, une sorte de
tiroir dans lequel on place les grands pays industriels (devenus en grande partie post-
industriels, mais la représentation est ici plus prégnante que la réalité), il ne se réduit pas à
cela. Cet espace, dont quelques Etats ont pu forcer la porte du fait de leur puissance
économique, réunit avant tout les héritiers de la même civilisation industrielle, née sur le
même terreau culturel, et supposée tirer sa singularité d'un dynamisme trouvant lui-même sa
source dans l'incessante tension vers le progrès qui la caractérise. A cette modernité
économique doit correspondre de préférence, dans le champ politique, le système
démocratique. L'Occident, composé des puissances bien assises d' Europe et d'Amérique du
Nord, depuis longtemps accoutumées à dire la norme et à être la référence du monde,
constitue bien le centre de ce Nord géographiquement introuvable et en définissent seules les
conditions d'appartenance.
Peut-on, quand on réunit suffisamment d'atouts, passer au Nord ? Pas tout à fait. Il existe
aujourd'hui de par le monde quelques zones grises, de la Turquie au Mexique ou à la Corée du
Sud, qui n'appartiennent plus vraiment au Sud et pas encore au Nord, attendant que ce dernier
les coopte vraiment. Elles n'entreront pas pour autant en son centre.
Les Etats qui forment le cour du Nord connaissent certes des divergences dont il ne faut pas
sous-estimer l'ampleur, mais elles ne remettent pas – ou pas encore - en cause leurs liens de
parenté. Ces querelles altèrent sans doute les rapports euro-américains, sans toutefois porter
atteinte à leurs étroites convergences d'intérêts. L'analyse des regroupements opérés lors de
la dernière réunion de l'OMC à Cancùn (septembre 2003) montre que le Nord n' est pas mort,
et que plusieurs parties des Suds se sont réunies pour lui faire face. Il y avait longtemps que
les relations internationales n'offraient pas une telle caricature de la dualité Nord-Sud. D'un
côté, Européens et Nord-Américains défendant ensemble leurs subventions à l' agriculture
tout en tentant de faire accepter le paquet dit de Singapour, ie la libéralisation du commerce
des services. De l'autre, une alliance improbable mais efficace (en laquelle le commissaire
européen Pascal Lamy n'avait pas voulu croire) entre grands et petits pays du Sud aux intérêts
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