premiers à suggérer que les taches floues observées au télescope étaient peut-être
des univers-îles ou des systèmes d'étoiles semblables à la Voie Lactée. Cette
hypothèse a cependant été rejetée par les astronomes pour n'être reprise qu'en
1920. La réalisation, il y a moins d'un siècle, que notre galaxie n'est pas unique et
surtout n'est pas au centre de l'Univers est une révolution de la pensée
cosmologique aussi importante que l'acceptation du système de Copernic qui a
enlevé à la Terre sa place au centre du système solaire.
Qu'est-ce qui a amené les astronomes à se reposer la question au début du siècle?
La principale raison est que les premières méthodes de détermination des distances
étant de plus en plus au point, la dimension gigantesque de la Voie Lactée ne faisait
plus de doute. Combiné au fait que la nature gazeuse de certaines nébuleuses était
également un fait bien établi, un astronome comme Shapley estima tout
naturellement que toutes les nébuleuses devaient être gazeuses et à l'intérieur de la
Voie Lactée. D'autres astronomes, comme Heber Curtis (1872-1942), n'étaient
cependant pas d'accord et l'Académie Nationale des Sciences de Washington
organisa donc le débat de 1920 afin de tenter de résoudre cette controverse.
Trois questions principales ont été débattues au cours de cette assemblée:
1- QUELLES SONT LES DISTANCES DES NéBULEUSES SPIRALES?
2- EST-CE QUE LES NéBULEUSES SONT COMPOSéES D'éTOILES OU DE GAZ?
3- POURQUOI N'Y A-T-IL PAS DE NéBULEUSES SPIRALES DANS LE PLAN DE LA VOIE LACTéE?
En faveur des distances rapprochées pour les spirales, Shapley propose un
argument qui s'appuie sur les résultats de l'astronome van Maanen. Celui-ci venait
de publier un article où il prétendait avoir mesuré des mouvements propres de
rotation dans la nébuleuse spirale M101 de 0.02"/année. Ceci impliquait donc que
M101 était proche sinon ses régions extérieures auraient été en rotation à une
vitesse plus grande que celle de la lumière! Quoiqu'à l'époque, ces résultats
semblaient fiables, des observations subséquentes ont permi de montrer que les
mesures de Van Maanen étaient inexactes.
De son côté, Curtis déduit une très grande distance pour M31 (Andromède) en
comparant la brillance de ses novae à celles de la Voie Lactée. Shapley prétend que
les novae ne sont pas un bon indicateur de distance car on en a observée une en
1885 qui était beaucoup plus brillante que les autres, impliquant une distance près
de nous. On se rendit compte, plus tard, que cette dernière était une supernova, un
phénomène intrinsèquement plus brillant qu'une nova.
Curieusement, l'argument de Shapley contre l'interprétation stellaire des spirales,
est que la Voie Lactée, dans l'environnement du Soleil, a une brillance de surface
beaucoup plus faible que dans les parties centrales de la plupart des spirales. C'est
pourtant le même Shapley qui, comme on l'a vu au chapitre précédent, a démontré
que le Soleil n'est pas au centre de la Galaxie, mais à une distance qu'il a estimée (à
l'époque) à 14 kpc.
En ce qui concerne l'absence de spirales dans le plan de la Galaxie, Shapley doit
faire appel à l'intervention d'une nouvelle force de répulsion qui explique aussi les
grandes vitesses de récession observées. Sur ce point, Curtis semble plus fort; son
argumentation est que plusieurs spirales vues par la tranche semblent avoir une
bande centrale de matériel absorbant. Il en conclut que si la Voie Lactée a une telle
bande, si le Soleil est au milieu de cette bande et si les spirales sont extérieures à
la Voie Lactée, alors la zone d'exclusion peut s'expliquer. Ses arguments font
cependant appel à trois hypothèses non confirmées à l'époque.
Si on analyse les arguments des deux protagonistes, il faut avouer que Shapley en
sort gagnant même si c'est lui qui avait tort. Il est quand même étonnant de voir
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