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LE NATURALISTE CANADIEN, VOL. 128 N
ENTOMOLOGIE
Des objets récipients, tels des pneus abandonnés dans
l’environnement, accumulent l’eau des précipitations
dans laquelle des moustiques porteurs potentiels du
virus du Nil viennent déposer leurs œufs.
Des animaux récepteurs et disséminateurs
L’extension géographique du virus lui a permis de
s’implanter sur la côte est des États-Unis, puis de se dissémi-
ner rapidement, non seulement dans les régions tropicales
et subtropicales de ce pays, mais aussi dans ses régions tem-
pérées et celles d’une bonne partie du Canada. Une chose
apparaît certaine : des conditions particulièrement avanta-
geuses ont permis au virus du Nil occidental de s’établir et
de se disséminer à travers tout le continent nord-américain.
Ainsi, sa multiplication fut assurée dans le corps et les tissus
de certains oiseaux, ceux-ci constituant alors les
virus. Quelque 200 espèces d’oiseaux pourraient alors être
infectées, mais nombreuses sont celles qui sont en mesure de
développer une immunité contre le virus. Ce sont les Cor-
vidés (corbeaux, corneilles, geais, etc.) qui semblent les plus
touchés ; à cet effet, ils sont devenus des indicateurs précis de
la présence du VNO dans diverses régions du Québec comme
Une autre condition soutenant le succès de l’instal-
lation du VNO en Amérique est l’existence d’un mode de
transfert lui permettant de passer d’un oiseau à un autre ;
ce passage allait être assuré par des piqûres de moustiques
ou maringouins, surtout les espèces inféodées aux oiseaux.
Ainsi, les moustiques femelles, en quête d’un repas sanguin
soutenant le développement de leurs œufs, peuvent prélever
des particules virales présentes par centaines de millions
dans le sang d’un oiseau déjà contaminé ; puis, au moment
d’un second repas sanguin, ils les inoculent à un autre oiseau.
L’éventualité d’un second repas sanguin chez les moustiques
demeure plutôt rare sous nos latitudes ; toutefois, il peut arri-
ver qu’une femelle, dérangée lors d’un premier repas pris sur
un oiseau infecté, soit amenée à piquer une autre fois, trans-
férant alors le virus à son nouvel hôte. Le moustique est alors
du virus du Nil. En Amérique du
vecteur du virus du Nil. En Amérique du vecteur
Nord, plus d’une quarantaine d’espèces sont susceptibles de
porter le virus ; au Québec, jusqu’à présent, six espèces ont été
trouvées infectées. Il s’agit de
Coquillettidia perturbans
. Toutefois, elles pourraient
être une vingtaine à pouvoir réaliser une telle transmission.
Parmi les espèces mentionnées, celles qui appartiennent au
, surtout ornithophiles, sont considérées comme
. Les autres constitueraient des
, c’est-à-dire qu’elles le transmettraient de façon
occasionnelle. Le moustique ne paraît pas affecté par la pré-
sence du virus, bien que peu de données existent sur le sujet.
Il faut signaler que même si un moustique recherche surtout
des oiseaux pour son repas de sang, il peut pro ter de mam-
mifères et parfois des humains pour satisfaire ses besoins en
composantes sanguines. Rappelons qu’avec le très grand
nombre d’individus que peut comporter une population de
moustiques, rares sont ceux qui auront puisé sur des oiseaux
infectés au VNO et encore plus rares ceux qui devront piquer
une seconde fois. Mais, le constat est là, le virus peut atteindre
des humains et divers animaux, d’où la nécessité de mieux
connaître le cycle de transmission et les risques encourus. La
période de transmission du VNO se situe surtout du début
juillet à la mi-septembre ; il s’agit du moment où les espèces
de moustiques estivales sont les plus abondantes et actives.
Il apparaît opportun de mentionner que d’autres
organismes se sont révélés, en laboratoire ou dans la nature,
comme des vecteurs potentiels du virus du Nil. C’est le cas
des tiques ou acariens, très nombreux dans les nids d’oiseaux
ou les terriers de mammifères, qui pourraient maintenir ou
ampli er sa dissémination. On ne sait pas si d’autres arthro-
podes hématophages – puces, poux, simulies (mouches
noires), tabanidés (taons) et cératopogonidés (brûlots) –
pourraient jouer un rôle dans le cycle de transmission du
Des conditions environnementales
Tel que mentionné plus tôt, certains moustiques se
sont davantage associés aux humains et à leurs animaux
domestiques a n d’assurer leur approvisionnement en sang.
Il n’est donc pas étonnant de constater que
espèce ornithophile dans la nature, soit principalement por-
teuse du virus du Nil occidental dans l’est de l’Amérique. Il
est bon de souligner que les femelles de cette espèce, sous la
forme adulte, peuvent passer l’hiver dans les habitations ou
les abris les protégeant du froid. Une autre espèce de ce genre,
, peut aussi être considérée comme importante dans
la dissémination du VNO. Ainsi, dans nos régions, le pro-
blème du virus du Nil est surtout urbain : les
arrivent à coloniser l’eau croupissante de gîtes arti ciels tels
les pneus abandonnés, les réservoirs, les pataugeuses et les
bains d’oiseaux non entretenus ; en somme, des objets rebuts
qu’on trouve souvent dans les cours arrières des maisons, des
commerces et des entreprises industrielles. Dans les régions
de l’ouest du Canada et des États-Unis, le problème du VNO
est plutôt rural ; son principal vecteur avec
, espèce colonisant les mares naturelles en