Eurosurveillance – 2004 Vol 9 issue 12 – http://www.eurosurveillance.org 3
Après une période d’incubation moyenne de 10 à 14 jours
(extrême de 5 à 18 jours), la plupart des patients restent
asymptomatiques ou ne développent qu’un syndrome pseudo-
grippal.
Habituellement, le début de la maladie est insidieux et se
manifeste par de la fièvre et une altération de l’état général
durant 2 à 4 jours. Dans les cas plus graves, d’autres signes
cliniques apparaissent rapidement: affaiblissement, douleurs
rétro-orbitaires, arthralgies, douleurs lombaires, myalgies,
céphalées, pharyngite, toux, hyperhémie conjonctivale [17, 18].
Dans les formes les plus graves, les patients peuvent souffrir
d'une prostration, de douleurs abdominales, d'un œdème de la
face et du cou, de signes hémorragiques (hémorragies
conjonctivales, saignements des muqueuses, mélénas,
rectorragies, hématuries, saignements vaginaux, hématémèses),
de signes encéphalitiques, d'un syndrome de fuite capillaire et
d'un état de choc. L’hépatite est fréquente et peut être
modérément sévère dans la fièvre de Lassa. Des atteintes
pulmonaires peuvent être observées sous forme de râles, de
frottement pleural et péricardique et de syndrome de détresse
respiratoire de l'adulte dans le cas de la fièvre de Lassa [14].
L’atteinte neurologique et le syndrome hémorragique sont plus
fréquemment observés avec les arénavirus du Nouveau Monde
qu'avec la fièvre de Lassa: les hémorragies gingivales sont
caractéristiques. Les symptômes neurologiques peuvent
englober le délire, la confusion, l'encéphalopathie, les
convulsions et le coma. L’hyperhémie conjonctivale,
l’énanthème pétéchial et/ou vésiculeux du palais, l’érythème
facial, les pétéchies cutanées, l’existence d’adénopathies
généralisées et l’hypotension orthostatique sont souvent
rencontrés dans les fièvres hémorragiques d’Amérique du Sud.
La lymphopénie, la leucopénie et la thrombopénie sont plus
fréquentes et plus profondes en cas d’infection par des
arénavirus du Nouveau Monde. L’élévation des transaminases
ne s'observe d'ordinaire que dans le cas de la fièvre de Lassa.
Les saignements, annoncés par une fièvre élevée persistante,
peuvent débuter après cinq jours de maladie et sont suivis par
une déshydratation, une hémoconcentration, un état de choc,
des hémorragies massives et un collapsus cardiovasculaire. La
mortalité des patients hospitalisés pour une fièvre de Lassa est
de 15 à 20%, bien que la mortalité globale soit estimée à 1 à
2%. Les femmes enceintes présentent le taux de mortalité le
plus élevé (16%) et la mort fœtale est fréquente [19]. Les
séquelles neurosensorielles durables d'une infection par le virus
de Lassa peuvent comprendre la surdité neurosensorielle. Les
virus Junin et Machupo présentent des taux de mortalité plus
élevés qui sont compris entre 10 et 16% [20].
Bunyaviridae (virus de la vallée du Rift et de la fièvre
hémorragique de Crimée-Congo)
La fièvre de la vallée du Rift est le plus souvent observée dans
les régions de l’est et du sud de l’Afrique, mais le virus est
également présent dans la plupart des pays d’Afrique
subsaharienne et à Madagascar. Il s'agit d'une zoonose qui
atteint essentiellement les animaux domestiques (bovins,
buffles, moutons, chèvres, chameaux) et occasionnellement les
hommes [8]. Les bunyavirus sont transmis par piqûres de
moustiques, habituellement du genre Aedes. Toutefois,
beaucoup d’autres espèces de moustiques peuvent transmettre
l’infection. Les humains peuvent également être contaminés
par contact direct avec le sang ou les sécrétions biologiques
d’un animal infecté. Des cas de contamination après inhalation
ont également été rapportés dans des laboratoires où étaient
manipulés des cultures virales ou des échantillons biologiques
contenant le virus.
La période d’incubation varie de deux à six jours. Le premier
signe clinique de la maladie est une fièvre biphasique. Le
premier accès fébrile persiste environ quatre jours. Après un ou
deux jours de répit, la fièvre réapparaît et persiste durant deux à
quatre jours. Habituellement l’atteinte est peu sévère et associe à
la fièvre des perturbations du bilan hépatique. Dans les cas
sévères, des hémorragies et des atteintes cérébrales et
rétiniennes peuvent survenir [21]. Moins de 1% des patients
développent dans les deux à quatre jours après le début de la
maladie un syndrome hémorragique. Les caractéristiques
cliniques sont identiques à celles des autres FHV (épistaxis,
hématémèse, méléna et saignement gastro-intestinal). La
guérison survient habituellement entre deux jours et une
semaine. Les rétinites et les méningo-encéphalites surviennent
habituellement entre la première et la troisième semaine après le
début de la maladie. Dans 1 à 10% des cas, il existe une atteinte
de la macula avec baisse de l’acuité visuelle. La mortalité des
patients infectés par le virus de la vallée du Rift est de l’ordre de
1% et touche essentiellement les patients qui ont des
manifestations hémorragiques [21].
La fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC) est
endémique en Afrique, en Europe et en Asie. En 2001 plusieurs
épidémies ont été rapportées au Kosovo, en Albanie, en Iran, au
Pakistan et en Afrique du Sud. C’est une maladie transmise par
les tiques. Elle est associée à une mortalité élevée chez
l’homme. Des cas d’infection nosocomiale ont été rapportés
chez des techniciens de laboratoire. Le virus de la FHCC peut
infecter de nombreuses espèces d’animaux domestiques et
sauvages.
L’infection est transmise à l’homme par contact direct avec le
sang ou les tissus infectés de bétail ou après une morsure de
tique. La durée d’incubation est de un à trois jours (maximum 9
jours). La survenue des symptômes est brutale avec de la fièvre,
des myalgies, des vertiges, des cervicalgies et une raideur de
nuque, des douleurs dorso-lombaires, des céphalées, des
douleurs orbitaires et une photophobie, des nausées, des
vomissements, une diarrhée et des douleurs abdominales. Après
quelques jours, le patient peut présenter des troubles de
l’humeur, puis devenir confus et agressif. En deux à quatre
jours, l'insomnie, un état dépressif et de la lassitude remplacent
l’agitation. Les douleurs abdominales peuvent se localiser au
niveau de l’hypocondre droit et une hépatomégalie peut être
palpée. On note aussi l’apparition d’une tachycardie,
d’adénopathies périphériques, de pétéchies ou d’ecchymoses de
la peau et des muqueuses. Les signes hémorragiques incluent
des mélénas, des hématuries, des épistaxis et des gingivorragies.
Une hépatite est habituellement présente. Un syndrome de
défaillance multi-organique, avec insuffisance hépato-rénale et
pulmonaire, peut se développer à partir du cinquième jour. Le
taux de mortalité est proche de 30%.
Le traitement est symptomatique. La ribavirine peut être
efficace. Le traitement au plasma immun de patients guéris ne
s'est pas révélé efficace.
Flaviviridae (virus de la fièvre jaune, de la fièvre
hémorragique d’Omsk et de la maladie de la forêt de
Kyasanur)
La fièvre jaune est transmise par les moustiques. Un grand
nombre de ses symptômes sont communs à ceux d'autres fièvres
hémorragiques virales. Cependant, l’atteinte hépatique sévère
est caractéristique. Après une incubation de 3 à 6 jours,
surviennent brutalement de la fièvre, des céphalées, une
altération de l’état général, un affaiblissement, des douleurs
lombo-sacrées, une bradycardie, des nausées et des
vomissements. Cet état persiste 3 jours et est suivi par une
rémission de 24 heures. Il s’ensuit la phase d’intoxication avec
un ictère cutanéo-muqueux, une albuminurie, une oligurie, une
instabilité hémodynamique et des manifestations hémorragiques