Les obligations positives de la hiérarchie. La hiérarchie a aussi des obligations positives, qui se
résument à promouvoir et garantir la liberté temporelle des fidèles dans la société ecclésiale comme
dans les rapports institutionnels de l'Église avec la communauté civile, par le biais des concordats30 et
autres accords diplomatiques passés avec les instances étatiques31.
Les obligations négatives des États. Cela entraîne, pour les États, l'obligation de ne pas mettre
d'entraves à l'exercice de ce droit, c'est-à-dire l'interdiction des privilegia odiosa qui restreindraient les
droits de liberté des citoyens catholiques en tant que tels. C'est un aspect de ce que l'on appelle le
Droit public ecclésiastique auquel fait pendant le Droit ecclésiastique de l'État32.
Les sujets passifs du droit. 2. Les autres fidèles. Les autres fidèles sont, eux aussi, tenus par le
devoir de respecter la liberté temporelle des laïcs. Le concile s'exprime en ces termes à ce propos :
« Fréquemment, c'est leur vision chrétienne des choses qui les inclinera à telle ou telle solution, selon
les circonstances. Mais d'autres fidèles, avec une égale sincérité, pourront en juger autrement (...). On
se souviendra en pareil cas que nul n'a le droit de revendiquer d'une manière exclusive pour son
opinion l'autorité de l'Église »33, ni d'utiliser d'ailleurs le label « catholique » sans que l'autorité
compétente l'y ait autorisé34, ni non plus d'attribuer à l'Église ses propres opinions35.
Le contenu de ce droit. Globalement, ce droit des autres fidèles est double : en premier, le droit à
avoir dans les affaires temporelles toute opinion non contraire à la foi ou à la morale chrétiennes, à la
faire connaître, à la répandre, à agir en conséquence et à en changer selon sa conscience, sans que du
point de vue canonique personne ne puisse imposer à autrui une prise de position ou un modèle
quelconque ; en second lieu, le droit d'initiative, c'est-à-dire la faculté de s'unir à d'autres citoyens
(donc catholiques ou non) pour mettre en œuvre sa conception de la société, y compris en créant à cet
effet des institutions ou des associations civiles. Cela implique que l'on ne puisse pas interdire ou
limiter le fidèle dans l'exercice de ses droits de citoyen, ni le faire entrer dans des groupes déterminés
de fidèles ou des institutions confessionnelles à l'encontre de sa volonté36.
Un large domaine d'autonomie. Ceci étant, le devoir d'animer l'ordre temporel (c. 225) et la libertas
in rebus civitatis terrenæ (c. 227) supposent un large domaine d'autonomie par rapport à la hiérarchie
30 Cf. Jean-Paul II, message L'Église catholique, aux hautes Autorités des pays signataires de l'Acte final de Helsinki du
1er août 1975, sur la liberté de conscience et de religion, 1er septembre 1980, n° 4 : l'Église catholique revendique,
pour elle-même comme pour les autres confessions religieuses, « la liberté d'annoncer et de communiquer
l'enseignement de la foi, par la parole et l'écrit, y compris en dehors de lieux de culte ».
31 Cf. Dominique Le Tourneau, « La politique concordataire du Saint-Siège », Revue Générale de Droit 30
(1999/2000), p. 719-728. L'on sait que le concordat napoléonien s'applique encore de nos jours partiellement dans les
« départements concordataires » d'Alsace-Moselle. C'est le concordat le plus ancien en vigueur, déjà plus que bi-
centenaire : cf. Bernard Adura-Gérard Cholvy-cardinal Billé, Le Concordat entre Pie VII et Bonaparte, 15 juillet
1801, Paris, Cerf, 2001 ; Le Bicentenaire du Concordat. Colloque 10 et 11 septembre 2001 sous la dir. de Mgr Joseph
Doré et de Mgr Pierre Raffin, Strasbourg, Éditions du Signe, 2001.
32 Cf. B. Jeuffroy et F. Tricard, Liberté religieuse et régimes des cultes en droit français Textes, pratique administrative,
jurisprudence, Paris, Cerf, nouvelle éd., 2005, xviii + 1853 p. ; Patrick Valdrini, Jean-Paul Durand, Olivier Échappé,
Jacques Vernay, Droit canonique, Paris, Dalloz, coll. « Précis », 2e éd., 1999, 3e partie, « Droit public ecclésiastique
et droit civil ecclésiastique français », nos 736-990.
33 Concile Vatican II, const. past. Gaudium et spes, n° 43/c.
34 Cf. c. 216, 300, 803, 808 CIC 83 ; c. 19, 632, 642 § 1 CCEO.
35 Cf. Comm. 2 (1970), p. 94.
36 Cf. José Tomás Martín de Agar, « Il diritto alla libertà... », a.c., p. 145-146.
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