économie et forêt

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économie
et forêt
ÉCOLOGIE OU ÉCONOMIE :
QUEL COMPROMIS
POUR UNE GESTION FORESTIÈRE
ACCEPTABLE PAR TOUS ?
J.-M. THIOLLAY
NDLR
L’article qui suit s’apparente à ceux qui ont retenu notre attention pour le numéro spécial 1996 “La
Gestion durable des forêts tempérées”, et qui nous ont permis de donner la parole, dans le domaine
forestier, à une large gamme de sensibilités.
La Revue forestière française, pour autant, comme il fut indiqué pour son numéro spécial, ne cautionne pas a priori cette approche de grande ampleur, qui peut faire tout naturellement l’objet de
discussions, voire de réfutations ponctuelles, sur les plans scientifiques ou techniques.
Comparer écologie et économie en matière de gestion forestière est une gageure. Il s’agit de deux
mondes différents. Écologistes et économistes ne se placent pas sur le même plan, ne parlent pas
de la même chose, ont des sensibilités différentes et n’ont pas du tout les mêmes intérêts. Une
longue pratique des protagonistes des deux camps montre que leur incompréhension ne réside pas
tant dans des points de vue opposés que dans une connaissance très superficielle de leurs problèmes respectifs ou dans un manque de sensibilité aux objectifs de l’autre.
Pour clarifier le débat, la présentation des positions de chacun sera volontairement tranchée, voire
simpliste en grossissant le trait afin de mieux faire ressortir les divergences que les uns comme les
autres n’osent pas toujours exprimer clairement. Plus grande sera ainsi la crédibilité du consensus
réel et du nécessaire compromis. Cette vision sera en outre aussi générale que possible, s’appli153
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quant aussi bien à tous les types de forêts, et pas seulement aux forêts tempérées, même si, pour
répondre au but fixé par ce recueil, les seuls exemples cités seront français. Enfin, aucun jugement
de valeur ne sera porté, pour ne laisser place qu’à un exposé de faits sur lesquels se basent des
conclusions et des conséquences pratiques qui ne sont pas de simples opinions mais des réalités.
Les enjeux sont de taille. Il s’agit de faire coexister des aspirations au départ peu compatibles en
réalisant le moins mauvais compromis possible pour la gestion durable des forêts, peut-être notre
patrimoine naturel commun le plus riche.
QUELQUES DÉFINITIONS PRÉALABLES
L’écologiste, artificiellement opposé ici à l’économiste, est seulement un scientifique impartial qui
analyse le fonctionnement naturel d’un écosystème, sans considération a priori d’une productivité
en termes financiers ou économiques. L’économiste en revanche, soucieux de satisfaire des besoins
en bois et de se garantir un revenu financier soutenu à partir de son capital-forêt, ne s’intéresse en
fait au fonctionnement écologique de la forêt que dans la mesure où celui-ci influe sur le rendement
de sa production.
La biodiversité, quant à elle, première préoccupation de l’écologiste, est autant qualitative que quantitative. Elle n’est pas seulement le nombre brut d’espèces vivantes dans un milieu donné, même
pondéré par la qualité de ces espèces ou leur abondance. Ce sont aussi les réseaux complexes d’interactions qui existent entre ces espèces et qui régissent le fonctionnement de l’écosystème forestier tout entier. Ces réseaux sont d’ailleurs cruciaux pour l’existence même de beaucoup d’espèces
qui ne peuvent survivre seules. C’est ainsi que, par forêt, l’écologiste entend un milieu relativement
naturel et diversifié et, contrairement au forestier, il n’accorde pas l’appellation de forêt à des plantations monospécifiques artificialisées où cette biodiversité au sens large est considérablement
réduite.
L’aspect économique de la forêt se réduira ici essentiellement à l’exploitation du bois. En effet, dans
nos pays tempérés, hormis les locations de chasse, la forêt offre à son propriétaire peu ou pas
d’autres revenus financiers substantiels que le bois. Les fonctions protectrices, paysagères, touristiques ou récréatives de ces forêts engendrent rarement des revenus directs chiffrables pour le propriétaire, même si leur valeur générale peut être estimée. Enfin, d’autres sources de revenus, parfois
importantes ailleurs, telles que la collecte de produits naturels secondaires, l’agroforesterie ou la
fourniture de protéines indispensables, existent rarement dans nos pays. La notion de multi-usages
est donc généralement limitée dans les forêts tempérées, du moins pour le propriétaire privé, plus
attentif au rendement financier que ne peut l’être un organisme public.
LE PUBLIC, ARBITRE DE POSITIONS DIVERGENTES
Entre l’écologiste, dont les arguments scientifiques se traduisent finalement bien souvent par des
conclusions d’ordre éthique, et l’économiste qui voit d’abord les coûts de gestion et la production
chiffrable de sa forêt, il y a la grande masse du public, généralement sensible aux positions des
deux bords et plus ou moins de l’un ou de l’autre selon ses affinités, selon qu’il est citadin ou rural,
producteur ou consommateur. Bien évidemment, ni les uns, ni les autres n’ont d’œillères et ne se
désintéressent des problèmes de l’autre ni des besoins de la société humaine dont ils sont tous
deux membres et où ils sont également consommateurs de bois. Leurs rôles, séparés ici arbitrairement, sont en fait complémentaires.
Le public est aussi le principal utilisateur des forêts. Sensible de ce fait aux multiples fonctions de
la forêt, il tend à minimiser aussi bien la position de l’écologiste pour qui la forêt est un patrimoine
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biologique de l’humanité tout entière, que celle de l’économiste, qui considère la forêt comme une
source de revenu, un moyen d’existence et un bien d’autant plus personnel qu’il en est directement
propriétaire. L’un y voit l’intérêt général du maintien des grands équilibres climatiques, hydrologiques, faunistiques et floristiques tandis que l’autre se considère comme investi d’une mission de
production par une société avide de ressources, de croissance et d’emplois. Entre les deux, le
public, surtout citadin, voit d’abord dans la forêt l’aspect détente et paysage nécessaire à son équilibre souvent perturbé par l’absence de nature.
DEUX VISIONS DE LA GESTION DURABLE
Tout naturellement, lorsqu’il s’agit de définir les objectifs et les modalités d’une gestion durable,
l’écologiste tend à privilégier le maintien de la biodiversité tandis que l’économiste met en avant le
maintien de la productivité.
Pour l’écologiste, qui pense au milieu naturel, la gestion, au sens d’intervention directe de l’homme,
n’est véritablement nécessaire que pour corriger les séquelles de perturbations ou de modifications
justement provoquées par une gestion antérieure jugée défavorable ou par un déséquilibre provoqué par l’homme, tel que l’élimination des grands prédateurs par exemple. Sinon, la meilleure
“gestion” serait tout simplement l’absence d’intervention, donc de gestion, d’où l’idée de réserves
biologiques intégrales comme mode de gestion le plus “durable”. La durabilité même est une notion
toute relative pour l’écologiste habitué à voir les milieux évoluer en permanence, soit par suite des
successions écologiques, soit à plus long terme sous l’influence des changements climatiques, voire
géologiques. La richesse de la biodiversité, qui évolue en conséquence, est elle-même en partie
basée sur la fréquence et l’importance des perturbations naturelles qui renouvellent et redistribuent
les espèces.
À l’opposé, l’économiste recherche la stabilité et la prévisibilité d’une évolution garante d’un revenu.
Il cherche donc à supprimer les perturbations aléatoires et incontrôlées qui caractérisent le fonctionnement des forêts naturelles et conditionnent leur biodiversité. Il est, bien plus que l’écologiste,
partisan d’une gestion active, seule capable d’assurer une production optimale et soutenue. C’est
bien sûr en fonction de cet objectif seul qu’une forêt “doit” être aménagée, selon l’opinion courante
des forestiers productivistes.
SUCCESSIONS FORESTIÈRES ET BIODIVERSITÉ
L’évolution naturelle de la richesse spécifique au cours des successions dans les milieux forestiers,
aussi bien tempérés que tropicaux, est l’argument scientifique à la base des prises de positions écologiques. Ces phénomènes ont donné lieu à de nombreuses études, portant notamment sur la flore,
les oiseaux et les insectes et le schéma général ci-dessous, dans ses grandes lignes, a un caractère quasi universel. Du milieu initial le plus ouvert, nu ou déjà herbacé, au stade le plus évolué de
la végétation forestière, c’est-à-dire la forêt climacique primaire, la biodiversité tend à augmenter
constamment, sauf au passage d’un stade jeune, de type taillis ou gaulis où elle stagne et même
diminue par rapport aux stades précédent (buissons, fourrés) et suivant (futaie). Cette biodiversité
augmente lentement, mais constamment, au cours du vieillissement de la forêt notamment à cause
de la diversification qui se produit. En effet, la mort des arbres, les chablis, les épiphytes, les parasites, les herbivores, les inondations et autres perturbations font progressivement de toute forêt primaire une mosaïque de milieux différents, où toutes les strates sont représentées, et où un grand
nombre d’espèces peuvent trouver, ici ou là, leur habitat spécifique. De plus, le développement des
phénomènes de compétition et de prédation tend à réduire l’abondance des espèces habituellement
dominantes et à faciliter ainsi la survie d’un plus nombre d’espèces rares.
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Que cette réalité, qu’il faudrait bien sûr illustrer plus longuement, soit souvent niée par le forestier,
vient du fait que celui-ci n’a plus l’expérience de ce qu’est réellement une forêt primaire, c’est-àdire généralement après deux à plusieurs siècles sans intervention humaine. En Europe moyenne,
seule la forêt de Bialowieza en Pologne offre un tel exemple, et mieux encore, en milieu tropical et
territoire français, la forêt de Guyane. Le forestier ou l’économiste, qui parlent d’une forêt “à l’abandon”, ne voient et ne considèrent justement que le stade relativement court et jeune de la forêt qui
se “ferme” et où effectivement la biodiversité tend à diminuer momentanément. De tels stades ne
durent tout au plus que quelques dizaines d’années, ce qui est peu au regard de la succession
complète qui atteint plusieurs siècles. Mais l’aversion de l’économiste pour ce “laisser faire” de
l’évolution naturelle est que justement la productivité économique y évolue de façon décroissante.
En effet, les taux de croissance des bois sont optimaux dans les stades jeunes et diminuent dans
les stades âgés où, de plus, les perturbations, citées plus haut, tendent à diversifier les essences et
les diamètres, ce qui ne facilite pas la commercialisation, d’autant plus que la qualité des fûts
vieillissants est aussi affectée. Pourtant, c’est encore la forêt primaire, lors de sa première exploitation, qui produit les plus forts volumes et les meilleurs bois, mais au prix d’une “gestion” naturelle
de plusieurs siècles, incompatible avec les notions actuelles de rendement économique. L’exemple
fameux des forêts vierges du Nord-Ouest des États-Unis, et de l’attrait qu’elles exercent sur les
exploitants, est encore là pour nous le rappeler.
À la boutade classique de l’écologiste selon laquelle ce sont les lianes, les chablis, les arbres morts,
etc… qui font la richesse d’une forêt, s’oppose la gestion économique qui cherche à optimiser la
croissance des bois et les rendements à l’hectare. Pour cela, s’imposent la sélection des seules
essences les mieux adaptées, l’uniformisation des classes de taille, l’élimination de tout parasite ou
compétiteur, ainsi que la suppression des facteurs défavorables (drainage, amendement du sol, protection contre les incendies ou les tempêtes), et bien sûr l’élimination des arbres morts ou mal
formés, en un mot de tout ce qui tend à favoriser la biodiversité ! Minimiser les coûts finaux d’exploitation est aussi un objectif économique de plus en plus présent. Tout ce qui permet d’augmenter la taille et l’uniformisation des parcelles, leur coupe à blanc et leur desserte par un réseau de
routes devient alors l’objectif qui lui aussi va à l’inverse d’une optimisation de la biodiversité.
UN CONTEXTE GÉNÉRAL CHANGEANT
Tout d’abord, lorsque tous les coûts environnementaux directs et indirects sont inclus, il n’est jamais
certain que le bois soit un matériau plus “écologique” que d’autres matériaux alternatifs qui existent
pour beaucoup d’usages du bois. À l’économiste qui voit dans la promotion du bois l’assurance d’un
débouché sûr, d’une valorisation de la forêt et donc d’une gestion sylvicole durable, l’écologiste
tend à substituer une “exploitation” de la valeur patrimoniale qui pourra être d’autant plus prise en
compte que la valeur économique et le besoin en bois diminueront. C’est ainsi par exemple que le
débat sur l’écocertification est devenu complexe. Initialement proposé dans l’idée de réduire l’exploitation des forêts (tropicales), le concept a été retourné contre ses promoteurs en un argument
de vente qui pourrait augmenter à terme la consommation de certains bois en obtenant l’adhésion
de consommateurs a priori hostiles à l’utilisation excessive de bois.
La position générale des naturalistes d’autrefois, qui voyaient dans nos forêts tempérées des lieux
privilégiés de conservation des richesses naturelles, s’est sensiblement nuancée devant les excès
de bien des aménagements sylvicoles. L’attitude des producteurs de bois a également évolué.
Considérés autrefois comme les garants contre la crainte d’un manque de bois qui guidait les politiques forestières, ils doivent maintenant promouvoir leurs produits pour en assurer la vente face à
la concurrence d’autres bois et d’autres matériaux.
Sans nuire aux besoins économiques de la société, le consommateur écologiste d’aujourd’hui peut,
lorsque le bois est irremplaçable, privilégier certaines essences et certains modes de gestion au
détriment d’autres qui remplissent les mêmes fonctions en ayant même parfois une rentabilité supé156
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rieure. Cette possibilité de choix se double d’un impact politique lorsque les bois tempérés, issus
d’une gestion coûteuse, sont mis en concurrence avec des bois étrangers issus de forêts primaires
où l’extraction est le seul coût. À terme, il est à craindre que peu de forêts tropicales puissent être
gérées durablement si on leur impose des critères de rentabilité économique comparables à ceux
des forêts tempérées, et ceci pour des raisons purement naturelles de taux de croissance plus lents,
de diversité spécifique plus grande ou de parasitisme et de compétition plus élevés.
POUR UNE GESTION FORESTIÈRE CONSERVATRICE DE LA BIODIVERSITÉ
Il est bien évident que les options sylvicoles sont nombreuses, même dans notre cadre économique
contraignant. Parmi ces différents modes de gestion, certains autorisent une meilleure conservation
de la biodiversité que d’autres. Toutefois, nous avons vu que les tendances de gestion productiviste
et conservatrice tendaient à être opposées. L’expérience montre en effet que concilier les deux ne
peut être que le résultat d’un compromis où chacun des partenaires accepte de ne pas optimiser
au mieux ses propres objectifs pour laisser place à ceux de l’autre.
Certains aménagements forestiers sont parfois cités comme des exemples de réussite écologique
(par exemple la cédraie du Mont Ventoux, la sapinière de l’Aigoual ou la chênaie de Tronçais), mais
par rapport à quel critère ? Dans bien des cas, forestiers et même naturalistes se satisfont d’un
mode de gestion parce qu’il est le meilleur de ceux qui sont sous leurs yeux pour comparaison.
Mais, lorsque des écologistes pourront être associés à l’élaboration des plans de gestion forestière,
il est certain que des règles simples pourront être introduites qui amélioreraient sensiblement la biodiversité pour un coût minime en terme de production. Ainsi par exemple, cela fait longtemps que,
dans d’autres pays, on a démontré l’inocuité du maintien d’arbres morts et que leur préservation a
permis d’enrichir biologiquement certaines forêts. Une planification de la mosaïque forestière (taille
et distribution des parcelles de différents âges et composition), soucieuse du maintien d’espèces
sensibles à la fragmentation, n’implique pas nécessairement un coût supplémentaire pour le gestionnaire. Le maintien, au sein des grandes futaies régulières de Chênes du Centre ou du Nord-Est
de la France d’une proportion substantielle d’essences moins prisées mais bien adaptées qui compensent leur moindre valeur par une croissance plus rapide, est un exemple peu coûteux de diversification. Le maintien le long des allées forestières et de leurs fossés d’une flore abondante par
limitation des fauches et des curages peut augmenter notablement la biodiversité des grands
massifs forestiers, y compris dans les Landes. Le maintien des tas de branches après les coupes
au lieu du brûlage systématique des résidus favorise la survie de plusieurs espèces intéressantes.
Si de telles prescriptions simples, et bien d’autres du même type, devraient être faciles à faire
accepter, d’autres, plus fondamentales et plus coûteuses en termes de perte de productivité, opposeront longtemps encore écologistes et économistes. Parmi les nombreux exemples de mesures qui
pourraient favoriser la biodiversité, on pourrait citer le vieillissement des futaies (au-delà de 200 ans),
le recours exclusif à des essences autochtones, le maintien des chablis, la préservation des
essences secondaires ou même non exploitables (fruitiers, arbustes), le non-empierrage des allées
forestières, la proscription des traitements insecticides, et plus encore le maintien d’arbres ou îlots
non exploités.
CONVERGENCES ET COMPROMIS :
POUR UN RAPPROCHEMENT ENTRE ÉCOLOGIE ET ÉCONOMIE
Le domaine où se retrouvent les différents intérêts est évidemment celui de la recherche scientifique.
En effet, la connaissance de la biologie des espèces ou du fonctionnement des écosystèmes
apporte beaucoup à la conservation de la biodiversité comme à l’amélioration de la productivité. La
divergence apparaît lorsque l’économiste cherche à utiliser la connaissance des contraintes écologiques,
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non pour les intégrer à la gestion, mais pour les contourner. Enfin, les deux parties sont soumises
à des contraintes extérieures communes, notamment celles imposées par les goûts du public
(demande sociale), mais aussi, par exemple, par les changements climatiques globaux ou les pollutions diffuses. Les exigences politiques, sous la forme du respect de directives européennes ou de
conventions internationales, peuvent également imposer des obligations aussi bien en ce qui
concerne les options ou les moyens de conservation que l’organisation du marché des bois ou de
la production.
L’écologiste, par sa connaissance du milieu naturel, peut éclairer les choix politiques et aider le gestionnaire à définir la sylviculture la plus respectueuse de l’environnement qui est presque toujours
d’ailleurs la moins coûteuse en interventions. Cette gestion qui suivrait d’aussi près que possible les
tendances naturelles de la végétation locale est seule à même d’assurer une exploitation durable où
la conservation de la biodiversité serait un objectif clairement affiché et effectivement recherché. La
mise en œuvre de cet objectif impose un dialogue et aussi des concessions mutuelles. Malgré ces
efforts, et à cause des contraintes économiques actuelles, on n’évitera pas localement le recours à
l’ancienne partition entre zones protégées et espaces dévolus à la production. Les limites du compromis conciliant production et biodiversité paraissent en effet assez vite atteintes en fonction des
impératifs économiques modernes. Une alternative est alors de “rentabiliser” les richesses naturelles
d’une forêt libérée des contraintes de la production. C’est tout le problème abordé jusqu’ici en
termes d’écotourisme ou de chasse, autre moyen de concilier durablement écologie et économie.
Au-delà s’élèvent déjà quelques voix prônant la simple et seule valeur d’existence, notion purement
éthique, comme la première raison d’être de la biodiversité, susceptible de transcender tous les
appétits économiques.
J.-M. THIOLLAY
Directeur de Recherches au CNRS
Laboratoire d’Écologie
ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE
46, rue d’Ulm
F-75230 PARIS CEDEX 05
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