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Relation dose - effet
Les organismes (OMS, EPA, OEHHA, Ineris) qui se sont
attachés à proposer une dose journalière admissible
ont retenu l’inhibition de la capture de l’iode par la
thyroïde comme effet sanitaire critique. L’étude de
Greer est la seule étude prise systématiquement en
compte par les différents organismes (3). Elle présente
toutefois certaines limites : (i) elle repose sur un faible
nombre de personnes, (ii) elle est de relative courte
durée (14j), (iii) les adultes sains de l’étude ne sont
pas représentatifs du fœtus ou du nouveau-né, (iv)
les apports en ions perchlorates par voie alimentaire
non hydrique n’ont pas été pris en compte et (v)
elle ne donne pas d’information sur le statut iodé
(concentrations sériques ou urinaire en ions iodures)
des participants. De cette étude, la plupart des
organismes (EPA, Anses, Ineris, OEHHA,…) déduisent
une dose journalière admissible de 0,7 µg/ kg pc/j (3)
alors que l’OMS retient 10 µg/kg pc/j (11), sur la base
d’une interprétation différente de la gravité de l’effet
critique retenu.
Exposition globale aux perchlorates
L’exposition globale aux perchlorates provient à la
fois de l’apport hydrique et des apports alimentaires
non hydriques. Aucune donnée n’est disponible
en France sur les concentrations existantes dans
l’alimentation. Aux Etats-Unis, les ions perchlorates
ont été détectés dans de nombreux aliments. Pour
les enfants, les produits laitiers seraient la principale
source d’exposition aux perchlorates alors que
chez les adultes ce serait les légumes. L’Anses (3)
a considéré que la part de l’eau dans les apports
alimentaires quotidiens en perchlorates était de 60 %
pour les adultes et de 100 % pour les nourrissons, nourris
exclusivement au sein ou avec des laits maternisés.
Pour l’OMS, les estimations des apports provenant
de l’eau bue et des aliments sont comprises entre
0,1 µg/kg pc/j et 0,7 µg/kg pc/j, soit des niveaux
inférieurs à 10 µg/kg pc/j. Elle considère ainsi que
l’exposition alimentaire ne constitue pas un problème
de santé (11).
Valeur limite dans l’eau potable
Pour dénir les seuils proposés, l’Anses a fait
l’hypothèse d’une consommation quotidienne
d’eau de 0,75 L pour les nourrissons et de 2 L pour
les adultes. A partir des données de poids corporels
xés conventionnellement à 5 kg pour les nourrissons
et à 60 kg pour les adultes, l’Anses a ainsi déterminé
la concentration maximale admissible dans l’eau de
14,7 (arrondi à 15 µg/L) pour les adultes et de 4,7 µg/L
(arrondi à 4 µg/L pour être plus protecteur) pour les
nourrissons.
Aucune limite n’est indiquée dans la réglementation
européenne pour les perchlorates dans l’eau
potable. En revanche, aux Etats-Unis, bien qu’il
n’existe pas encore de limite fédérale, la procédure
d’élaboration est en cours. La valeur de 15 µg/L est
proposée au niveau fédéral mais certains organismes
(OEHHA, Mass Dep) et quelques Etats ont retenu des
valeurs plus faibles (3).
Situation de l’eau d’alimentation publique
Dans l’eau d’alimentation publique en région
Nord Pas-de-Calais, les ions perchlorates ne sont
pas détectés dans de nombreuses communes
(concentration inférieure aux seuils de détection de
l’ordre du 1µg/L). Le maximum observé est de 77 µg/L.
Plus de cinq cents communes ont été initialement
et sont toujours, pour la plupart, concernées par
une restriction de l’usage de l’eau du robinet pour
les personnes sensibles. Au total, environ 9000
femmes et 5 000 nourrissons seraient potentiellement
concernés par cette restriction d’usage. La carte des
concentrations en perchlorate montre une similitude
visuelle, imparfaite mais frappante, avec celle des
zones de combats de la 1ère guerre mondiale dans
la région (voir cartes 1 et 2 ci- contre). L’utilisation de
munitions perchloratées n’a pas été majeure mais
est avérée (voir plus haut) et constitue la meilleure
explication de la cartographie des pollutions par les
perchlorates.
D’autres sources anciennes et localisées ont pu
également contribuer à la contamination des
sols et, par lixiviation, des aquifères. La disparition
des ressources contaminées en perchlorate en
remontant de l’ancien bassin minier vers la région
lilloise s’explique, non pas par l’arrêt du front de
guerre, mais par la géologie du sous-sol. La nappe
de la craie devient progressivement captive en
s’enfonçant sous les couches géologiques du tertiaire
dont certaines sont argileuses. Le milieu devient alors
fortement réducteur (phénomène de dénitrication
naturel).