effets des perchlorate exposition via l`eau d`a des connaissances sc

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#4
DOSSIER
EFFETS DES PERC
EXPOSITION VIA
DES CONNA ISSA
QUI O U V R E N T S
DES APPOR TS EN
En octobre 2012, les préfectures et l’Agence
Régionale de Santé du Nord Pas-de-Calais
ont émis des restrictions d’usage de l’eau
d’alimentation
publique
dans
plusieurs
communes en raison d’une concentration
élevée en ions perchlorates. Cet article dresse
un panorama des connaissances entourant
cette décision.
500
+ DE
COMMUNES CONCERNÉES
PAR DES RESTRICTIONS
D’EAU DANS LE NORD - PAS
DE CALAIS
En Aquitaine et Midi-Pyrénées, les ions
perchlorates ont été mis en évidence dans des
ressources en eau utilisées pour l’alimentation
publique et situées à proximité d’installations
industrielles susceptibles d’en rejeter. La
Lyonnaise de Eaux, qui gérait ces ressources,
a décidé de rechercher les perchlorates dans
plusieurs captages situés en région Nord Pasde-Calais. Ces recherches ont abouti à la mise
en évidence de perchlorates dans plusieurs
ressources alimentant la métropole lilloise
Que sont les perchlorates,
où les trouve-t-on et pourquoi
sont-ils utilisés ?
Sous forme solide, les perchlorates se présentent
sous forme de sels dont les plus courants sont
les perchlorates d’ammonium, de potassium et
de sodium. Ils sont naturellement présents en
grande quantité dans quelques rares endroits
comme celui du désert de l’Atacama au Chili.
A cet endroit, ils y sont associés à de grandes
quantités de nitrates qui ont amené ces roches
sédimentaires à être utilisées comme engrais
(salpêtre chilien), notamment aux Etats-Unis.
Dans l’eau, ces sels se dissolvent complètement
et sont à l’origine de la présence de perchlorate
#4
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HLORATES SUR LA SANTÉ ET
L’EAU D’ALIMENTATION PUBLIQUE :
NCES SCIENTIFIQUES INCOMPLÈTES
SUR LA PROBLÉMATIQUE
IODE
C. HEYMAN, CELLULE DE L’INSTITUT DE VEILLE SANITAIRE EN RÉGIONS NORD PAS-DE-CALAIS PICARDIE
C. RAOUL, AGENCE RÉGIONALE DE SANTÉ NORD PAS-DE-CALAIS
G. BINET, AGENCE RÉGIONALE DE SANTÉ NORD PAS-DE-CALAIS
P. CHAUD, CELLULE DE L’INSTITUT DE VEILLE SANITAIRE EN RÉGIONS NORD PAS-DE-CALAIS PICARDIE
sous forme d’anion ClO4-. Celui-ci migre facilement
vers les aquifères où l’on considère qu’il reste très
stable. Il possède des propriétés oxydantes fortes (1).
Le perchlorate d’ammonium peut par ailleurs être
synthétisé et utilisé dans de multiples applications
industrielles mettant en jeu ses propriétés explosives
et détonantes, en particulier dans les milieux militaire
et aérospatial. Il constitue par exemple 70 % du
propergol utilisé comme carburant pour les fusées. Il
est aussi présent dans les dispositifs pyrotechniques,
la poudre de certaines munitions et dans les systèmes
de déclenchement des « airbags ».
Lors de la 1ère guerre mondiale, le perchlorate
d’ammonium fut employé dans 2 types d’obus
de tranchées : le crapouillot français et le minen
allemand, qui n’ont constitué qu’un faible
pourcentage des explosifs tirés. Environ 120 tonnes
de munitions sont encore récupérées chaque
année en région Nord Pas-de-Calais. Le taux de
munitions n’ayant pas explosé durant la guerre 1418 est d’environ 30 %.
Effets sur la santé - Toxicité
MÉTABOLISATION
Après ingestion, les ions perchlorates sont
rapidement absorbés au niveau du tractus gastrointestinal d’où ils se distribuent dans tout l’organisme
et plus particulièrement au niveau de la thyroïde.
Leur demi-vie sanguine est de l’ordre de 6 à 12h.
Ils sont éliminés dans les urines (ou le lait maternel)
dans lesquelles ils sont couramment mesurés (2).
EFFETS SUR L’ORGANISME
A ce jour, aucune étude scientifique n’a pu mettre
en évidence d’effet mutagène ou reprotoxique. Le
principal effet d’intérêt des perchlorates est d’être un
inhibiteur compétitif du passage des ions iodures vers
les cellules de la thyroïde (3). Ils agissent au niveau
d’une protéine membranaire, le symporteur sodiumiode qui permet à l’iode de pénétrer activement,
contre le gradient de concentration défavorable
à un passage passif (4). L’effet inhibiteur a été
montré dans plusieurs études, dont celle de Greer
en 2002 (5) réalisée chez des volontaires sains avec
l’utilisation d’iode radiomarqué en concentrations
plus élevées que celles rencontrées en expositions
environnementales.
Cet effet biologique est précurseur d’une éventuelle
baisse, selon la dose d’exposition, de la synthèse
des hormones thyroïdiennes T4 (thyroxine) et T3
(triiodothyronine) (figure 1) par les thyrocytes
(cellules de la thyroïde). Ainsi, l’effet suspecté d’une
exposition aux ions perchlorates est une diminution
de l’activité de la thyroïde, pouvant aller jusqu’à
l’hypothyroïdisme. Les hormones thyroïdiennes
ont de multiples fonctions dans le corps humain
et leurs récepteurs sont présents sur tous les tissus.
Elles contribuent, entre autres, au développement
neurologique, à la régulation thermique, à la
régulation de l’activité cardiaque, à la croissance
et au développement osseux (4). Dans l’étude de
Greer, si l’inhibition du passage de l’iode a bien été
mise en évidence, en revanche, aucune diminution
parallèle des hormones thyroïdiennes n’a été
observée.
6
#4
un dépistage de l’hypothyroïdie à la naissance. En
France, il est effectué le 3ème jour après la naissance
par la mesure de la concentration de l’hormone
thyréostimulante hypophysaire (TSH) qui est un
indicateur du fonctionnement thyroïdien.
L’adulte en état de carence d’apport en iode est
également considéré comme potentiellement
sensible à une surexposition aux perchlorates.
Figure 1 : schéma du fonctionnement thyroïdien,
(source : exposition aux contaminants organiques et
effets potentiels sur les fonctions thyroïdiennes chez la
femme enceinte, le nouveau-né et l’adulte, Dallaire
Renée, Thèse de doctorat, Université Laval, Canada)
A très forte dose (sans commune mesure avec une
exposition environnementale), les perchlorates sont
utilisés dans un cadre médical pour traiter certaines
hyperthyroïdies liées à des surcharges en iode (4).
POPULATIONS LES PLUS À RISQUE DE SUBIR UN EFFET
DE L’EXPOSITION AUX PERCHLORATES
Le fœtus et le nouveau-né sont considérés comme
étant les plus sensibles au déficit d’hormones
thyroïdiennes. En effet, la totalité de leurs thyrocytes
sont utilisés pour la fabrication des hormones et ne
laissent aucune marge d’adaptation contrairement
à l’adulte dont un certain nombre de thyrocytes
sont au repos et mobilisables lors d’une baisse de
disponibilité d’iode (3). Par ailleurs, le stade fœtal
et les premiers mois de vie sont une période critique
du développement neuro-cognitif dans lequel les
hormones thyroïdiennes ont un effet important.
Les ions perchlorates peuvent traverser la barrière
placentaire. Ainsi, malgré la compensation d’une
diminution de l’activité thyroïdienne fœtale par la
thyroïde de la mère, il recommandé, par précaution,
aux femmes enceintes d’éviter de s’exposer aux
perchlorates.
Les effets d’un manque d’hormones thyroïdiennes
chez le nouveau-né peuvent être compensés par un
traitement médical adéquat commencé le plus tôt
possible. Aussi, de nombreux pays ont mis en place
Aux doses environnementales, l’importance de
l’influence des ions perchlorates sur la baisse de la
synthèse des hormones thyroïdiennes reste discutée.
D’autres anions tels que les thiocyanates ou les
nitrates ont aussi la propriété d’inhiber le passage de
l’iode vers la glande thyroïde. Par ailleurs, le maintien
d’une bonne activité thyroïdienne est également
tributaire des apports en iode via l’alimentation. Ce
sont ces interactions qui jouent le rôle de facteur de
confusion dans de nombreuses études menées dans
des contextes d’exposition par l’eau de boisson de
l’alimentation publique.
LES ÉTUDES ÉPIDÉMIOLOGIQUES
Dix études épidémiologiques se sont intéressées
au lien entre la concentration en perchlorate
dans l’eau d’alimentation et le fonctionnement
thyroïdien chez le nouveau-né (7). Aucune étude
ne montre d’augmentation de la prévalence de
l’hypothyroïdisme congénital. Toutefois, deux études
retrouvent une association entre les concentrations
hydriques et une altération modérée de la fonction
thyroïdienne (8;9). Cinq études se sont intéressées,
quant à elles, au lien entre la concentration
en perchlorate dans l’eau d’alimentation et le
fonctionnement thyroïdien chez la femme enceinte
ou en âge de procréer. Une seule étude montre une
association positive, contrairement aux autres (7).
Cette association n’est observée que chez les
femmes présentant une concentration urinaire
en iodures inférieure à 100 µg/L. Pour les femmes
qui présentaient une concentration supérieure à
100 μg/L, la concentration urinaire en perchlorate
était prédictive du niveau sérique de TSH mais pas du
niveau sérique de T4 (10).
Les études épidémiologiques se heurtent à la
difficulté de concilier la maîtrise des facteurs de
confusion et la puissance statistique liée au nombre
de données disponibles. Ainsi, par exemple, pour des
raisons de faisabilité, dans la plupart des études, ni
la consommation d’eau du robinet, ni le statut iodé
des femmes enceintes ou des nouveau-nés ne sont
connus.
#4
7
EN POPULATION GÉNÉRALE
Les données d’iodurie sont disponibles pour 20062007 dans l’aire géographique Nord - Picardie Normandie (13). La médiane de l’iodurie est de
146 µg/L (IC 95 % [128-156]) et le 20ème percentile
est de 68 µg/L (IC 95 % [62-83]). Au vu des critères de
l’OMS, le statut nutritionnel en iode est globalement
satisfaisant. Cette situation s’est améliorée au regard
des chiffres de 1999 qui montraient la persistance
d’une déficience modérée en iode pour une partie
plus conséquente de la population.
CHEZ LES JEUNES ENFANTS ET LES FEMMES ENCEINTES
OU QUI ALLAITENT
Chez les jeunes enfants de 10 jours à 6 ans, une étude
menée en 2000-2001 dans la région lilloise a fait état
d’une médiane de 196 µg/L et d’un pourcentage
d’enfant carencé (iodurie inférieure à 50 µg/L) de
7 % (14). En 2005, pour des enfants de moins de 1
an, la médiane était de 328 µg/L et le pourcentage
d’enfants carencés de 11 % (15).
Pour les femmes enceintes ou qui allaitent, l’OMS (16)
recommande des apports en iode de plus de 250 µg/j
alors qu’ils ne sont que de 150 µg/j habituellement pour
les adultes. Une iodurie de moins de 150 µg/L et de
moins de 100 µg/L est considérée comme insuffisante
respectivement pour les femmes enceintes et
pour celles qui allaitent. Il n’existe pas de données
d’iodurie chez les femmes enceintes dans le nord de
la France. Néanmoins, dans le sud de la France (17),
dans une zone où l’iodurie en population générale
est proche de celle du Nord, le pourcentage de
femmes enceintes dont l’iodurie, mesurée en 200708, est insuffisante, c’est-à-dire inférieure à 150 µg/L,
est de 66 % ; la médiane d’iodurie étant de 116 µg/L.
Les apports iodés sont souvent insuffisants pendant
la grossesse comme cela a été déjà plusieurs fois
dénoté en Europe de l’ouest.
Statut iodé de la population
Dans une étude récente (12), une baisse modérée
mais significative de la concentration en thyroxine
(T4 libre et totale) a été observée lorsque les
concentrations urinaires en perchlorate et en
thiocyanate étaient élevées, en même temps que
les concentrations en iode étaient basses. Comme
déjà mentionné, les effets possibles des perchlorates
aux doses environnementales sont à considérer à
l’aune des apports en iode et de l’exposition aux
autres inhibiteurs de la captation d’iode. Un apport
optimal en iode est susceptible de contrebalancer
l’effet des perchlorates.
SOURCES D’IODE
L’iode est principalement apporté par l’alimentation.
Le lait est le principal contributeur en France, du
fait de l’enrichissement des fourrages en iode et
de l’utilisation de produits de désinfection iodés.
Les aliments les plus riches sont cependant les
produits de la mer, crustacés, poissons et algues (la
consommation de ces dernières explique l’iodurie
souvent élevée dans certains pays, comme le
Japon). L’enrichissement du sel en iode tel que
recommandé en France contribue à lutter contre la
déficience en iode. Pour les femmes enceintes, une
supplémentation par compléments alimentaires est
recommandée (18).
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#4
Relation dose - effet
Valeur limite dans l’eau potable
Les organismes (OMS, EPA, OEHHA, Ineris) qui se sont
attachés à proposer une dose journalière admissible
ont retenu l’inhibition de la capture de l’iode par la
thyroïde comme effet sanitaire critique. L’étude de
Greer est la seule étude prise systématiquement en
compte par les différents organismes (3). Elle présente
toutefois certaines limites : (i) elle repose sur un faible
nombre de personnes, (ii) elle est de relative courte
durée (14j), (iii) les adultes sains de l’étude ne sont
pas représentatifs du fœtus ou du nouveau-né, (iv)
les apports en ions perchlorates par voie alimentaire
non hydrique n’ont pas été pris en compte et (v)
elle ne donne pas d’information sur le statut iodé
(concentrations sériques ou urinaire en ions iodures)
des participants. De cette étude, la plupart des
organismes (EPA, Anses, Ineris, OEHHA,…) déduisent
une dose journalière admissible de 0,7 µg/ kg pc/j (3)
alors que l’OMS retient 10 µg/kg pc/j (11), sur la base
d’une interprétation différente de la gravité de l’effet
critique retenu.
Pour définir les seuils proposés, l’Anses a fait
l’hypothèse d’une consommation quotidienne
d’eau de 0,75 L pour les nourrissons et de 2 L pour
les adultes. A partir des données de poids corporels
fixés conventionnellement à 5 kg pour les nourrissons
et à 60 kg pour les adultes, l’Anses a ainsi déterminé
la concentration maximale admissible dans l’eau de
14,7 (arrondi à 15 µg/L) pour les adultes et de 4,7 µg/L
(arrondi à 4 µg/L pour être plus protecteur) pour les
nourrissons.
Exposition globale aux perchlorates
L’exposition globale aux perchlorates provient à la
fois de l’apport hydrique et des apports alimentaires
non hydriques. Aucune donnée n’est disponible
en France sur les concentrations existantes dans
l’alimentation. Aux Etats-Unis, les ions perchlorates
ont été détectés dans de nombreux aliments. Pour
les enfants, les produits laitiers seraient la principale
source d’exposition aux perchlorates alors que
chez les adultes ce serait les légumes. L’Anses (3)
a considéré que la part de l’eau dans les apports
alimentaires quotidiens en perchlorates était de 60 %
pour les adultes et de 100 % pour les nourrissons, nourris
exclusivement au sein ou avec des laits maternisés.
Pour l’OMS, les estimations des apports provenant
de l’eau bue et des aliments sont comprises entre
0,1 µg/kg pc/j et 0,7 µg/kg pc/j, soit des niveaux
inférieurs à 10 µg/kg pc/j. Elle considère ainsi que
l’exposition alimentaire ne constitue pas un problème
de santé (11).
Aucune limite n’est indiquée dans la réglementation
européenne pour les perchlorates dans l’eau
potable. En revanche, aux Etats-Unis, bien qu’il
n’existe pas encore de limite fédérale, la procédure
d’élaboration est en cours. La valeur de 15 µg/L est
proposée au niveau fédéral mais certains organismes
(OEHHA, Mass Dep) et quelques Etats ont retenu des
valeurs plus faibles (3).
Situation de l’eau d’alimentation publique
Dans l’eau d’alimentation publique en région
Nord Pas-de-Calais, les ions perchlorates ne sont
pas détectés dans de nombreuses communes
(concentration inférieure aux seuils de détection de
l’ordre du 1µg/L). Le maximum observé est de 77 µg/L.
Plus de cinq cents communes ont été initialement
et sont toujours, pour la plupart, concernées par
une restriction de l’usage de l’eau du robinet pour
les personnes sensibles. Au total, environ 9000
femmes et 5 000 nourrissons seraient potentiellement
concernés par cette restriction d’usage. La carte des
concentrations en perchlorate montre une similitude
visuelle, imparfaite mais frappante, avec celle des
zones de combats de la 1ère guerre mondiale dans
la région (voir cartes 1 et 2 ci- contre). L’utilisation de
munitions perchloratées n’a pas été majeure mais
est avérée (voir plus haut) et constitue la meilleure
explication de la cartographie des pollutions par les
perchlorates.
D’autres sources anciennes et localisées ont pu
également contribuer à la contamination des
sols et, par lixiviation, des aquifères. La disparition
des ressources contaminées en perchlorate en
remontant de l’ancien bassin minier vers la région
lilloise s’explique, non pas par l’arrêt du front de
guerre, mais par la géologie du sous-sol. La nappe
de la craie devient progressivement captive en
s’enfonçant sous les couches géologiques du tertiaire
dont certaines sont argileuses. Le milieu devient alors
fortement réducteur (phénomène de dénitrification
naturel).
#4
Carte 1 : concentrations initiales en perchlorate sur le réseau d’eau d’alimentation
publique mesurées entre fin 2011 et septembre 2012 (avant la prise de mesures de
gestion) (Source : ArcGIS, données ARS Nord – Pas de Calais)
Carte 2 : délimitation géographique des zones détruites pendant la 1ère guerre mondiale
(Source : Wikipedia)
9
10
#4
Solutions techniques pour diminuer les
concentrations en perchlorate dans l’eau
d’alimentation publique
Pour les collectivités concernées par des mesures
de restriction d’usage de l’eau d’alimentation
publique, plusieurs solutions peuvent être envisagées
pour réduire la teneur en perchlorates dans l’eau
distribuée :
- Mettre en service une interconnexion existante
pour une dilution partielle ou une substitution
complète de la ressource contaminée par une
autre ressource indemne de perchlorates ou
moins contaminée ;
- Etudier la faisabilité de créer une interconnexion,
lorsque celle-ci n’est pas déjà existante ;
-Etudier la faisabilité de mettre en place un
traitement de l’eau de la ressource contaminée.
Les deux premières solutions sont réalisables à
condition que la ressource de remplacement soit
indemne de perchlorates ou, a minima, moins
contaminée, et que celle-ci puisse fournir un volume
suffisant.
Les deux dernières solutions nécessitent des études
technico-économiques de plusieurs mois voire
plusieurs années avant la mise en service et, ont des
répercussions plus sensibles sur le prix de l’eau.
Les traitements existants ne sont pas autorisés en
France. Plusieurs essais ont été mis en place pour
tester l’efficacité. Il peut s’agir, selon les cas, de résines
échangeuses d’ions (spécifiques ou non spécifiques
aux perchlorates ou aux nitrates) ou de traitements
membranaires (nanofiltration ou osmose inverse).
A ce jour, seule la dilution par interconnexion a pu
être mise en œuvre. Elle explique la réduction du
nombre de communes concernées.
Conclusion
Les connaissances scientifiques ne permettent pas
d’écarter l’existence d’effets sanitaires liés à une
exposition de la population aux perchlorates via
l’eau de boisson ou l’alimentation. Ils concerneraient
avant tout les fœtus et les très jeunes enfants dans
des situations de carence d’apports en iode et
d’exposition concomitante aux autres inhibiteurs
compétitifs du passage de l’iode vers la thyroïde.
En région Nord Pas-de-Calais, des études
épidémiologiques sont en cours. Elles permettront
de répondre aux questions d’une éventuelle surincidence des cas néonataux d’hypothyroïdie
et de l’existence d’une association entre le
fonctionnement thyroïdien et les concentrations en
perchlorate de l’eau du robinet. En cas de résultats
positifs, il pourra être pertinent d’explorer la relation
de causalité entre l’exposition aux perchlorates et un
dysfonctionnement thyroïdien significatif. A cet effet,
d’autres études maîtrisant les facteurs de confusion
(quantité d’eau consommée en fin de grossesse,
statut iodé individuel, marqueurs d’exposition aux
autres inhibiteurs compétitifs du passage de l’iode
vers la thyroïde,…) seront nécessaires.
Si les apports en iode se sont améliorés ces derniers
temps, ils sont encore insuffisants pour une part de
la population générale. Ils pourraient concerner une
part encore plus importante des femmes enceintes
et qui allaitent; mais qui n’est pas connue dans la
région. La problématique des perchlorates dans
l’eau potable met notamment en lumière celle
de l’insuffisance des apports en iode pendant la
grossesse, qui concerne également les populations
non exposés aux perchlorates.
Bien qu’étant l’aliment le plus surveillé, le nombre
de paramètres du contrôle sanitaire de l’eau reste
nécessairement limité. Aussi, la découverte de
contaminations jusqu’alors inconnues nécessite une
organisation réactive d’évaluation et de gestion du
risque.
#4
Références
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EPA : Environmental protection agency (USA)
OEHHA : Office of Environmental Health Hazard
Assessment (Californie)
Mass Dep : Massachussetts department of
environmental protection
Anses : agence nationale de sécurité sanitaire de
l’alimentation, de l’environnement et du travail
ATSDR : agency for toxic substances and disease
registry
OMS : organisation mondiale de la santé
DREES : Direction de la recherche des études
statistiques
Ineris : Institut national de l’environnement industriel
et des risques
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