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EFFETS DES PERCHLORATES SUR LA SANTÉ ET
EXPOSITION VIA L’EAU D’ALIMENTATION PUBLIQUE :
DES CONNAISSANCES SCIENTIFIQUES INCOMPLÈTES
QUI OUVRENT SUR LA PROBLÉMATIQUE
DES APPORTS EN IODE
sous forme d’anion ClO4-. Celui-ci migre facilement
vers les aquifères où l’on considère qu’il reste très
stable. Il possède des propriétés oxydantes fortes (1).
Le perchlorate d’ammonium peut par ailleurs être
synthétisé et utilisé dans de multiples applications
industrielles mettant en jeu ses propriétés explosives
et détonantes, en particulier dans les milieux militaire
et aérospatial. Il constitue par exemple 70 % du
propergol utilisé comme carburant pour les fusées. Il
est aussi présent dans les dispositifs pyrotechniques,
la poudre de certaines munitions et dans les systèmes
de déclenchement des « airbags ».
Lors de la 1ère guerre mondiale, le perchlorate
d’ammonium fut employé dans 2 types d’obus
de tranchées : le crapouillot français et le minen
allemand, qui n’ont constitué qu’un faible
pourcentage des explosifs tirés. Environ 120 tonnes
de munitions sont encore récupérées chaque
année en région Nord Pas-de-Calais. Le taux de
munitions n’ayant pas explosé durant la guerre 14-
18 est d’environ 30 %.
Effets sur la santé - Toxicité
MÉTABOLISATION
Après ingestion, les ions perchlorates sont
rapidement absorbés au niveau du tractus gastro-
intestinal d’où ils se distribuent dans tout l’organisme
et plus particulièrement au niveau de la thyroïde.
Leur demi-vie sanguine est de l’ordre de 6 à 12h.
Ils sont éliminés dans les urines (ou le lait maternel)
dans lesquelles ils sont couramment mesurés (2).
EFFETS SUR L’ORGANISME
A ce jour, aucune étude scientique n’a pu mettre
en évidence d’effet mutagène ou reprotoxique. Le
principal effet d’intérêt des perchlorates est d’être un
inhibiteur compétitif du passage des ions iodures vers
les cellules de la thyroïde (3). Ils agissent au niveau
d’une protéine membranaire, le symporteur sodium-
iode qui permet à l’iode de pénétrer activement,
contre le gradient de concentration défavorable
à un passage passif (4). L’effet inhibiteur a été
montré dans plusieurs études, dont celle de Greer
en 2002 (5) réalisée chez des volontaires sains avec
l’utilisation d’iode radiomarqué en concentrations
plus élevées que celles rencontrées en expositions
environnementales.
Cet effet biologique est précurseur d’une éventuelle
baisse, selon la dose d’exposition, de la synthèse
des hormones thyroïdiennes T4 (thyroxine) et T3
(triiodothyronine) (gure 1) par les thyrocytes
(cellules de la thyroïde). Ainsi, l’effet suspecté d’une
exposition aux ions perchlorates est une diminution
de l’activité de la thyroïde, pouvant aller jusqu’à
l’hypothyroïdisme. Les hormones thyroïdiennes
ont de multiples fonctions dans le corps humain
et leurs récepteurs sont présents sur tous les tissus.
Elles contribuent, entre autres, au développement
neurologique, à la régulation thermique, à la
régulation de l’activité cardiaque, à la croissance
et au développement osseux (4). Dans l’étude de
Greer, si l’inhibition du passage de l’iode a bien été
mise en évidence, en revanche, aucune diminution
parallèle des hormones thyroïdiennes n’a été
observée.
C. HEYMAN, CELLULE DE L’INSTITUT DE VEILLE SANITAIRE EN RÉGIONS NORD PAS-DE-CALAIS PICARDIE
C. RAOUL, AGENCE RÉGIONALE DE SANTÉ NORD PAS-DE-CALAIS
G. BINET, AGENCE RÉGIONALE DE SANTÉ NORD PAS-DE-CALAIS
P. CHAUD, CELLULE DE L’INSTITUT DE VEILLE SANITAIRE EN RÉGIONS NORD PAS-DE-CALAIS PICARDIE