Le boulanger rennais entreprend à Rio de Janeiro
Durant dix ans, Christophe Bruneau a tenu une boulangerie à Rennes. Aujourd'hui, il vit à Rio où il a
ouvert un laboratoire dans une favela.
Christophe Bruneau aura 50 ans en juin. Un anniversaire qu'il fêtera à Copacabana, au Brésil, où il vit
désormais avec sa femme Faty. « La chaleur humaine, les gens qui vous prennent dans les bras pour
vous dire bonjour... C'est un vrai pays de fête », apprécie ce boulanger tombé amoureux du Brésil lors
d'un séjour en 2010. « Ma femme ne m'avait jamais vu sourire comme ça », se souvient-il. Et ce soleil ! «
Tous les jours, je suis en tongs, en short et t-shirt ».
Une carte postale ? Christophe Bruneau a passé l'âge d'être naïf. Mais après avoir tenu des boulangeries à
Paris et à Rennes (dix ans rue Vasselot), les années avaient fini par donner un petit goût de trop cuit à son
enthousiasme. À Rio, il a retrouvé la gourmandise d'entreprendre.
Il ne parlait pas portugais
En novembre dernier, il a ouvert son laboratoire de pâtisserie dans la favela de Bonsucesso, dans la
banlieue de Rio. Le secteur n'a pas encore été totalement pacifié par les forces de l'ordre. Qu'importe, en
attendant, il s'acquitte de « l'impôt sécurité » imposé par les gangs locaux (environ 100 € par mois).
Pour recruter, un simple mot sur la porte et ce sont plus de vingt prétendants qui se présentent le
lendemain. « Pas besoin d'annonce à Pôle emploi. Je leur demande : 'Tu sais faire ça ?' Ils disent oui,
mais ils ne l'ont jamais fait. » Sem problema (pas de problème, en portugais).
Depuis deux ans, Christophe a formé Wilson Lugano, un jeune Brésilien de 23 ans. Et côté salaire, il verse
le double du revenu minimum mensuel (700 reals, soit 231€). Persuadé que la qualité du travail passe aussi
par une bonne rémunération. « Mais bon, parfois, certains ne viennent pas le matin alors qu'en partant
la veille, ils t'avaient dit "À demain". C'est le Brésil. Je me suis adapté. »
Cap sur les JO
Et son projet commence à prendre forme. Christophe Bruneau vend ses macarons et viennoiseries à
plusieurs restaurants de Rio. Mais le boulanger rennais a de l'appétit. Dans ce pays qui accueillera aussi les
Jeux olympiques en 2016, il projette de produire des pâtisseries et croissants surgelés et de les distribuer
dans les hôtels, restaurants et sites touristiques de Rio dont l'agglomération compte plus de dix millions
d'habitants. « Côté potentiel, j'ai une autoroute de dix ans devant moi », estime l'ancien boulanger
rennais, de retour dans la capitale bretonne, il y a quelques jours, pour y trouver des investisseurs prêts à
l'aider (1).
Rien ne semble entamer son moral. Lors de son arrivée, à Rio en 2011, il s'était associé avec un autre
entrepreneur français. « En attendant d'obtenir mon visa, je travaillais la nuit. Je produisais jusqu'à 13
000 coques de macarons par nuit. Et du jour au lendemain, il m'a évincé », relate-t-il. Christophe
Bruneau s'apprête à engager une procédure aux prud'hommes. « Pour les heures supplémentaires non
payées et pour le travail non déclaré », confirme son avocate, Me Nathalie Bardot.
Bosseur, Christophe Bruneau qui a appris le portugais sur le tas, a foi en ce proverbe brésilien : « La
volonté raccourcit le chemin. » OF 15.5.2014
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