158 PRATIQUE & EXPÉRIENCE Expérience et analyse de la mise en place de la méthode du patient traceur dans un centre de rééducation Nicolas Landry1, Jean-Charles Erny2 1-Groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis 2-Centre Richelieu La Rochelle iiJean-Charles Erny – Directeur des soins – Centre Richelieu – 37, rue Philippe Vincent – 17000 La Rochelle E.mail : [email protected] L a Haute Autorité de santé (has) définit la méthode du patient traceur comme « une évaluation rétrospective qui consiste, à partir d’un séjour d’un patient hospitalisé, à analyser les processus de soins, les organisations et les systèmes qui concourent à sa prise en charge » [1]. En quelques années, par le caractère obligatoire de la certification, la has a imposé aux établissements de santé français la mise en place d’une démarche dynamique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins. Le patient traceur1 est l’une des grandes nouveautés de la certification V2014. Cette méthodologie du patient est utilisée comme un outil d’évaluation pour les experts-visiteurs lors de leur visite, mais elle peut également être mobilisée comme méthode d’évaluation des pratiques professionnelles au sein d’une structure. C’est à ce titre que le centre Richelieu de La Rochelle a décidé sa mise en place dans ses unités de soins. Nous décrivons ici le déploiement du projet en cherchant à répondre à un certain nombre de questions concernant ses effets, ses points critiques et difficultés, mais aussi la dynamique impulsée par cette méthode. Présentation du centre Le centre Richelieu est un établissement de santé privé d’intérêt collectif de la Croix Rouge Française, situé en 1- Méthodologie déjà utilisée depuis 2004 aux usa (The Joint Commission) et depuis 2008 au Canada. Résumé L’article décrit la mise en place et l’utilisation continue de la démarche du patient traceur dans un centre de rééducation en insistant sur l’organisation et la gestion de l’opération, et en discutant ses conditions de réussite. À travers cette démarche, il apparaît que l’établissement, le service qualité, le manager, mais aussi la direction adoptent une philosophie du management par la qualité. Sa proximité avec le travail quotidien des soignants et la place prépondérante du patient font de la méthode du patient traceur un outil idéal pour les établissements de santé. Son utilisation doit permettre aux établissements l’optimisation du parcours de soins mais donne l’occasion également aux professionnels d’être au centre des processus décisionnels. Dans un contexte de restructuration et de réorganisation des établissements de santé où certains professionnels s’interrogent sur leur place dans le processus de soins, la méthodologie du patient traceur peut être un formidable levier permettant aux soignants de se recentrer sur le sens de leur engagement, la qualité des soins dispensés. Mots-clés : Patient traceur – Amélioration des Soins – Évaluation des Pratiques professionnelles. Abstract Experience and analysis of implementing the patient tracer methodology in a rehabilitation center This article describes the implementation and continuous use of the patient tracer methodology in a rehabilitation center. It focuses on organization and management of the system and discusses its conditions for success. This approach showed that the establishment, the quality service, the manager and the management had a philosophy of management by quality. The close association with the daily work of the nursing staff and the central position of the patient make the patient tracer methodology ideal for health facilities. It should enable facilities to optimize treatment and give nursing staff the opportunity of being at the heart of decision-making processes. In a situation where healthcare facilities are being restructured and reorganized and where some personnel are questioning their place in the healthcare process, the patient tracer methodology can be a powerful lever allowing nursing staff to refocus on the meaning of their commitment and the quality of the care they provide. Keywords: Patient Tracer – Improving Care – Evaluation of Professional Practices. RISQUES & QUALITÉ • 2015 - VOLUME XII - N° 4 Expérience et analyse de la mise en place de la méthode du patient traceur dans un centre de rééducation plein cœur de La Rochelle. Il exerce depuis plusieurs décennies ses activités dans le champ de ce qui est maintenant défini comme soins de suite et de réadaptation spécialisés (prise en charge des affections respiratoires, des affections de l’appareil locomoteur et du système nerveux). En 2004, la construction d’un nouveau bâtiment a permis un accueil de soixante-cinq lits en hospitalisation complète et de quinze places d’hospitalisation de jour spécialisée alors en médecine physique réadaptative de l’appareil locomoteur et de neurologie. En 2010, le centre a inauguré une unité de réadaptation respiratoire permettant l’accueil de vingt-huit lits et de deux places supplémentaires en hospitalisation de jour. Dans sa volonté de considérer la certification des établissements de santé comme un processus continu et non comme une évaluation quadriennale, le centre Richelieu a choisi d’intégrer les méthodes recommandées par la has dans ses pratiques quotidiennes. Le patient traceur, par son caractère innovant et sa proximité avec les réalités quotidiennes des équipes, a donc été la première motivation pour déclencher cette dynamique. L’has met à disposition de nombreux guides et d’outils d’aide à la mise en place de cette évaluation, sur lesquels le centre Richelieu s’est appuyé et qu’il a souhaité adapter aux spécificités de l’établissement tout en les maintenant conformes aux recommandations. Une préparation indispensable Afin d’ajuster au mieux la méthodologie pour la rendre pérenne et efficace, une phase test se déroule sur les trois unités du centre. Plusieurs étapes sont nécessaires au bon déroulement : La première étape consiste à identifier les animateurs des patients traceurs. Le rapport d’expérimentation disponible sur le site de la has préconise un binôme composé d’un professionnel de santé et d’un intervenant expert dans la démarche. La constitution d’un groupe d’animateurs au centre, composé du directeur des soins et qualité, du stagiaire qualité, de l’assistant qualité et du président de la commission médicale d’établissement (cme) permet de croiser les regards de manière complémentaire sur les organisations, sur la qualité de prise en charge, et sur les processus de soins. À tour de rôle, des trinômes d’animateurs se forment avec pour principe de conserver au moins un professionnel de santé dans le groupe. Comme le recommande la has et afin d’éviter le lien de dépendance qui peut exister entre le soignant et le soigné, il nous semble important de choisir des animateurs extérieurs aux équipes prenant en charge le patient. La seconde étape est centrée principalement sur la diffusion de l’information. Une présentation de la méthode et de ses objectifs aux professionnels se déroule lors des instances (cme, comité de pilotage Qualité et Gestion des risques, réunion des cadres…). RISQUES & QUALITÉ • 2015 - VOLUME XII - N° 4 En effet, en fonction du patient choisi, tous les professionnels de gestion de santé de l’établissement sont susceptibles d’être sollicités pour réaliser l’évaluation du parcours patient. Cette période, certes chronophage, permet d’impliquer progressivement les soignants dans la démarche. Parallèlement, la cellule qualité travaille sur l’adaptation des grilles d’entretien des patients et des équipes : le choix d’un « profil patient », réalisé par le corps médical, doit répondre à un certain nombre de critères préétablis par la cellule qualité : fréquence de prise en charge dans l’unité, patient sortant dans la semaine et en capacité de répondre aux questions. Le choix des patients répondant aux profils choisis est la dernière étape préparatoire : la cellule qualité rencontre les patients pour les informer ; une note d’information est remise et après un accord oral, une traçabilité dans le dossier médical est réalisée. Une évaluation riche d’enseignements L’évaluation des pratiques professionnelles par la méthodologie du patient traceur commence par la rencontre avec le patient, puis elle se poursuit par l’organisation d’une réunion avec les professionnels ayant participé à la prise en charge du patient choisi. Entre le moment où l’accord du patient a été recueilli et celui où il a rencontré les animateurs, l’un des patients a vu son état de santé se dégrader. Celuici n’étant plus en mesure de rencontrer les animateurs, il a donc fallu choisir un autre patient répondant au même profil. À ce titre, il semble nécessaire, voire indispensable, de sélectionner plusieurs patients répondant aux critères préétablis. En dehors de ce léger contretemps, les rencontres avec les patients se sont déroulées dans de bonnes conditions. Le choix du lieu de rencontre a été décidé chaque fois par les patients eux-mêmes, les entretiens ayant eu lieu dans le service où ils étaient suivis (salle de réunion, salle de repos). L’entretien, d’une durée de 45 minutes, a été réalisé de manière semi-directive à l’aide de la grille d’entretien patient. À la différence des questionnaires de satisfaction que le patient remet à la fin de son séjour, ces rencontres ont permis une analyse nettement approfondie du parcours des patients. À titre d’exemple, Madame T évoque lors de l’entretien le manque d’intimité ressenti lorsque les soignants entrent rapidement dans sa chambre après avoir brièvement frappé à la porte, élément qu’elle n’avait jamais transmis ni aux équipes, ni formulé dans le cadre du questionnaire de satisfaction. La prise en compte de l’expérience du patient, apport innovant de la méthode du patient traceur, est l’un des points forts de cette évaluation des pratiques professionnelles. Un débriefing entre les animateurs permet ensuite de synthétiser les points forts, les points à améliorer et prépare la rencontre avec les équipes. La ren- 159 160 Expérience et analyse de la mise en place de la méthode du patient traceur dans un centre de rééducation contre avec l’équipe constitue l’une des difficultés majeures de la méthodologie du patient traceur car l’organisation de cette réunion se révèle d’une complexité importante. En effet, il faut réunir un certain nombre de professionnels de santé du service durant leur temps de travail, sans entraver le fonctionnement normal du service. La direction doit être partie prenant de la démarche afin de mettre à disposition tous les moyens permettant le bon déroulement de cette évaluation collective. Selon la méthodologie proposée par la has, l’évaluation en équipe du parcours du patient doit durer entre 2 heures et 2 h 30. Le centre a décidé de consacrer 1 h 30 à cette étape, ce qui permettait à tous les participants de s’exprimer librement. La richesse de cette évaluation repose sur sa pluridisciplinarité, il est donc essentiel de ne pas exclure de professionnels. Pour chaque étape de la prise en charge (accueil, prise en charge de la douleur…), les professionnels doivent dégager les points forts et les points sur lesquels le parcours du patient a connu des difficultés. L’animateur a pour tâche de faire émerger ces points en respectant un timing court. Suite à une synthèse immédiate réalisée à partir des constats de l’analyse, la dernière étape de cette réunion consiste pour l’équipe à élaborer des propositions d’actions d’amélioration. Cette phase constitue le temps fort de la méthode du patient traceur. En effet, il est demandé aux professionnels d’être force de proposition dans l’amélioration de leur unité et de leur travail au quotidien. L’appropriation de ces actions sera favorisée à la fois pour eux mais également pour leurs collègues. Les actions d’amélioration n’émanent pas d’une hiérarchie mais elles sont le fruit d’une réflexion du collectif. Réfléchir sur des actions simples, concrètes et proches des réalités du terrain, donne tout son sens à la démarche qualité. L’annexe I présente un exemple d’analyse de parcours pour une patiente opérée d’une prothèse de genou prise en charge en rééducation. L’analyse critique de la méthode : les points forts, les points à améliorer Une évaluation (informelle) à chaud a montré que 100 % des participants conseilleraient cette méthode à d’autres professionnels. L’ensemble du corps médical semble s’en être également félicité et a déjà fait part de son désir de poursuivre cette démarche. Les patients également se sont montrés satisfaits d’être acteurs de l’amélioration des soins au sein du centre. Tous ont d’ailleurs reçu un courrier de remerciement pour leur participation, accompagné d’une synthèse des actions d’amélioration prévues à l’issue de la démarche. La rédaction d’un document de synthèse, reprenant les points forts, les points à améliorer et le plan d’action, a permis de communiquer les résultats à l’en- semble de la structure. Progressivement, les unités doivent devenir autonomes dans la réalisation de cette méthode d’évaluation. Un accompagnement de la cellule qualité est indispensable, qui s’appuie sur des supports maintenant existants (grille d’entretien, note d’information, fiche de synthèse…). Bien que la phase test ait été considérée comme satisfaisante, la méthodologie du patient traceur ne peut échapper, comme toutes les méthodes d’évaluation, à une analyse de ses forces et faiblesses. Suite au bilan réalisé avec l’ensemble des participants, la bonne appropriation de la méthode par les professionnels revient rapidement comme point fort. L’évaluation sur le principe de parcours patient est conforme à la réalité vécue au quotidien par les soignants. L’aspect pluridisciplinaire de la méthode permet un échange, sur un temps déterminé, de leurs pratiques et de leur organisation. Les actions d’amélioration en découlent naturellement et proviennent directement des professionnels. Enfin, la prise en compte de l’expérience du patient constitue une véritable richesse dans cette évaluation. Les informations apportées par les patients ont mis parfois en lumière certains décalages entre les pratiques professionnelles et le ressenti des soignés. À titre d’exemple, Madame R, souffrant d’une atteinte neurologique la rendant paraplégique, a exprimé son malaise lors de l’utilisation par l’aide-soignant d’un verticalisateur, se vivant alors « comme une marchandise manipulée par un transpalette ». L’équipe pluridisciplinaire qui n’avait jamais recueilli ce type de témoignage, s’en est émue. L’action d’amélioration privilégiée est la suivante : les soignants prennent désormais davantage de temps pour expliquer le recours à ce matériel en se souciant de favoriser les échanges avant d’y installer le patient. Par ailleurs, cette phase test a permis de mettre en évidence certains points à améliorer. La première difficulté a été d’organiser ces réunions pluridisciplinaires. Bien que prévues longtemps à l’avance, ces réunions peuvent subir les conséquences des aléas d’un service de soins telles qu’une urgence vitale, des absences de dernière minute, des congés du personnel. Ainsi, une des évaluations a eu lieu sans la présence du cadre de l’unité et du médecin qui a suivi la patiente. Cette absence d’encadrement a affaibli considérablement la méthode. Bien qu’issues d’une réflexion collective, les actions d’amélioration proposées par l’équipe peuvent s’avérer en décalage avec les possibilités de l’établissement. Une validation par le coordonnateur médical, le cadre de santé et le directeur des soins et de la qualité permet de contractualiser les propositions des équipes. Leur validation est formalisée sur le document de synthèse qui sert d’outil de communication. Puis, comme le recommande la has, les actions les plus significatives sont inscrites dans le Programme d’amélioration RISQUES & QUALITÉ • 2015 - VOLUME XII - N° 4 Expérience et analyse de la mise en place de la méthode du patient traceur dans un centre de rééducation 161 Annexe I Exemple d’analyse du parcours d’une patiente de 70 ans opérée d’une prothèse de genou et prise en charge en rééducation. 1 2 Pourquoi ce patient ? •• Dans le cadre de la phase test, il a été décidé de choisir un profil de patient couramment pris en charge dans l’unité •• Patiente communicante •• Patiente sortante dans les deux semaines 3 Parcours du patient Personnes rencontrées •• Hospitalisation complète en chirurgie orthopédique au groupe hospitalier La RochelleRé-Aunis •• Hospitalisation complète au centre Richelieu •Médecin coordonnateur – Unité locomoteur • Cadre de santé – Unité locomoteur • Infirmière – Unité locomoteur • Aide-soignante – Unité locomoteur • Secrétaire médicale – Unité locomoteur • Ergothérapeute – Unité locomoteur • Kinésithérapeute – Unité locomoteur •Professeur d’activités adaptées (APA) – Unité locomoteur Mode de sortie : Domicile 4 Outils utilisés : •• Grille d’entretien •• Notice d’information au patient Synthèse Points positifs : •• Patiente vue par le médecin à l’hôpital avant son admission •• Organisation pluridisciplinaire de l’évaluation initiale de la patiente •• Prescription médicamenteuse faite dès l’admission de la patiente (continuité de son traitement pris en compte) •• Une réflexion sur le rapport-bénéfice risque sur la prise en charge de la douleur •• L’évaluation et prise en compte régulière de la douleur •• Remise de document d’exercice de base liée à de l’autorééducation •• Enseignement par l’APA sur l’intérêt de la gymnastique •• La vérification à toutes les étapes de la prise en charge de l’identité de la patiente •• Consultations pluridisciplinaires hebdomadaires •• Organisation de la sortie de la patiente •• Chambre double (stimulation avec l’autre patiente, compagnie,…) Points à améliorer : •• Traçabilité des bilans orthopédiques en début de séjour •• Absence d’information sur la convocation d’une possibilité de déprogrammation de séjour •• L’impossibilité pour l’IDE d’appeler à l’extérieur avec le téléphone professionnel (non-connaissance de la procédure) •• Qualité des bracelets d’identification •• Checklist de sortie •• Information du patient sur ses résultats d’examens complémentaires (prise de sang) •• Absence de déclaration d’un événement indésirable suite à un défaut de respect de procédure •• Évaluation de la douleur avant de proposer un antalgique RISQUES & QUALITÉ • 2015 - VOLUME XII - N° 4 5 Actions d’amélioration ➔➔ Tracer le premier bilan orthopédique très tôt sur séjour court ➔➔ Tracer l’intervention de l’ergothérapeute à l’admission dans le dossier du patient ➔➔ Ajouter dans le courrier de convocation la possibilité d’une déprogrammation de dernière minute ➔➔ Tracer dans le dossier patient tous les événements liés à la prise en charge ➔➔ Créer une checklist de sortie, d’admission (dossier patient informatiséI)* ➔➔ Informer les patients sur leurs résultats d’examens complémentaires ➔➔ Evaluer la douleur avant de proposer un antalgique (sensibilisation par l’IDE douleur) * Action inscrite dans le Plan d’action - PAQSS Validation Médecin coordonnateur : Date : 20/04/2015 Visa : Dr Validation Cadre du service: Date : 20/04/2015 Visa : K.M Validation Directeur des soins /Qualité : Date : 20/04/2015 Validation Cadre médicotechnique : Date : 20/04/2015 Visa : C.T Visa : J-C E 162 Expérience et analyse de la mise en place de la méthode du patient traceur dans un centre de rééducation de la qualité et de la sécurité des soins de l’établissement. Les autres difficultés rencontrées sont liées à l’animation des réunions. Il est parfois difficile de rester sur le parcours du patient choisi sans faire de généralités. Il est essentiel de recentrer les échanges sur le sujet du patient sélectionné. Le rôle et la place de l’animateur dans cette évaluation sont déterminants. Les animateurs doivent adopter une attitude bienveillante. Les professionnels doivent se sentir en confiance et non jugés par un élément extérieur du service. Une animation défaillante aboutira à l’échec de la méthode. Le choix des animateurs doit être une étape à ne pas négliger car, de ce choix dépend en partie la réussite ou l’échec de la méthode du patient traceur. Des leviers possibles dans le management Trois bénéfices secondaires de l’utilisation de cette méthodologie pour l’encadrant nous semblent aujourd’hui intéressants à explorer : La réflexivité Les solutions toutes faites n’existent pas. Le patient traceur tend à restituer une certaine autonomie aux soignants. Il permet aux professionnels de santé d’intégrer une démarche participative qui favorise la réflexion et les initiatives. Se questionner, s’interroger, suppose une reconnaissance de l’autre, l’acceptation des avis divergents. L’absence d’interrogation engage une perte de sens pour les professionnels. Les difficultés relationnelles au sein des établissements et celles liées aux situations complexes des soins sont éclairées par l’interrogation amenée par la démarche du patient traceur qui permet un espace de dialogue et de réflexion. Cet effort d’aller au-delà de son quotidien va permettre une délibération qui conclura à la meilleure solution possible ou à la moins mauvaise. La réciprocité Le patient traceur est propice aux échanges interprofessionnels et interunités. Le décloisonnement des unités, des métiers, permet d’accroître la cohérence des pratiques au sein d’un établissement, d’un pôle par exemple (pour les structures les plus importantes). Favoriser le décloisonnement pourrait bien aboutir, à terme, grâce à l’émergence d’échanges, de nouvelles compétences, à un sentiment d’équité mieux partagé, à une meilleure cohésion globale source de satisfactions individuelles pour les soignants. Manager aujourd’hui, c’est avoir la capacité d’apporter ou de faire émerger des solutions originales aux problèmes d’adaptation professionnels. Ainsi est créée une « intelligence collective » [1], bénéfique aux équipes, aux patients, mais aussi au manager. La lutte contre l’autoritarisme L’encadrement est là pour permettre cet espace d’échanges, pour susciter, pour interroger, et non pour imposer des points de vue qui relèveraient de l’autoritarisme. Le management autoritaire du « décider-contrôler » laisse place au management participatif pour encourager la « création du sens », être garant d’une vision créatrice. Pour parvenir à cela, le cadre de santé doit accepter de travailler lui-même son rapport à l’autre, de s’interroger sur l’extériorité et ne surtout pas s’enfermer dans la toute-puissance. Référence 1- Haute Autorité de santé (has). Le patient-traceur en établissement de santé. Méthode d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. Guide méthodologique. has, Saint-Denis, 2014, 62 p. Conflit potentiel d’intérêts : aucun RISQUES & QUALITÉ • 2015 - VOLUME XII - N° 4