GEOPOLITIQUE ECS1 14 MODULE I – Thème 1 – CHAPITRE 2
1.2.3.1. La)préférence)impériale)britannique)
Par l’instauration d’un tarif douanier général en 1932 (Import Duties Act), la Grande-Bretagne se donne le
moyen de négocier avec ses principaux partenaires un régime préférentiel en échange de contreparties. De
nombreux accords bilatéraux sont signés avec les dominions mais aussi avec les Etats membres de la zone
sterling (pays scandinaves). Cette politique d’accords privilégiés entraine un recentrage du commerce britannique
sur l’Empire, et plus globalement sur la zone sterling, en terme d’approvisionnement (importations) ou de
débouchés (exportations).
Attention, il faut néanmoins nuancer les résultats de ce repli impérial :
• En valeur, comme en volume, les exportations britanniques n’ont toujours pas retrouvé en 1939 leur
niveau, pourtant médiocre, de 1929.
• L’écart entre les importations et les exportations se réduit et la Grande Bretagne est contrainte
d’acheter de plus en plus de produits manufacturés dans ses colonies.
• La part du commerce britannique dans les importations de l’Inde et des dominions recule entre 1913
et 1939.
Plus qu’un renforcement du lien colonial, on peut donc se demander si ce repli ne rend pas la Grande-Bretagne
plus dépendante de ses colonies et de sa zone monétaire plutôt que l’inverse !
1.2.3.2. La)«)redécouverte)»)de)l’empire)colonial)par)la)France)
Inaugurée par l’exposition coloniale de 1931, la décennie est marquée par une volonté française de mieux tirer
parti de son Empire. Les investissements extérieurs français sont ainsi dirigés à 50% vers les colonies en
1939 alors qu’ils ne l’étaient qu’à 10% en 1913. Les débouchés coloniaux représentent une part de plus en plus
importante des exportations françaises : 50% des exportations automobiles et 85% des exportations cotonnières
en 1938. Mais comme pour la Grande-Bretagne, ces chiffres cachent une réalité plus inquiétante :
• La rapidité de la croissance des exportations vers les colonies et l’importance des industries anciennes
dans cette croissance montre que le marché colonial n’a pour fonction que de « freiner les reculs,
plutôt qu’accélérer les avances » (Jacques Marseille)
• Comme pour la Grande-Bretagne, on observe que les importations progressent plus vite que les
exportations.
• Contrairement à l’Empire britannique, l’Empire français est trop faible pour compenser le recul des
échanges avec l’étranger et la France souffre au même titre que les pays qui ne disposent pas de
colonies (Allemagne) à la fin de la décennie.
La reconversion coloniale française est rapide mais plus symbolique qu’efficace. Elle permet, en outre, de
retarder une nouvelle fois la modernisation de l’appareil de production dans les secteurs anciens.
1.2.3.3. Réussite)japonaise)et)pragmatisme)américain)
Le repli colonial britannique et français doit être pris au sens strict tant il contraste avec le rôle moteur que
l’impérialisme japonais assigne à la conquête de débouchés industriels coloniaux et de sources
d’approvisionnements privilégiés dans toute sa sphère de domination. La croissance et la structure des
échanges sont sans commune mesure avec celles des puissances européennes : doublement de la part des
échanges avec « l’Empire » et forte croissance notamment des exportations. Au repli impérial européen, il faut
donc opposer le véritable impérialisme japonais. On observe ici les caractères de l’autarcie d’expansion que
l’on retrouve dans une moindre mesure avec la sphère d’influence régionale que développe l’Allemagne
(12,5% du commerce allemand est réalisé en 1938 avec les pays d’Europe du Sud-est contre 5% en 1929).
Les Etats-Unis reconstituent, sous la forme d’un impérialisme commercial et monétaire fondé sur la suprématie
financière du pays, les échanges interaméricains dans le cadre d’un réseau construit sur le Reciprocal Trade
Agreement Act de juin 1934. Celui-ci autorise la signature d’accords de réduction tarifaire mutuelle et permet de
renforcer l’influence des Etats-Unis sur l’Amérique latine.
Si les empires coloniaux apparaissent davantage comme une solution de repli dans une logique de survie qui ne
s’inscrit pas dans le long terme pour les métropoles coloniales, les régimes autoritaires construisent de véritables
blocs pour préparer la guerre dès le milieu des années 1930 alors que les Etats-Unis se replient sur leur « pré
carré ». Les années 1930 sont véritablement marquées par un cloisonnement qui est la conséquence des
stratégies commerciales nationales concurrentes. Cette défiance se retrouve dans la faillite du système de sécurité
collective mis en place après la Première guerre mondiale.