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Environnement, Risques & Santé Vol. 6, n° 3, mai - juin 2007
Pollution de l’air et santé respiratoire
e Centre international
de recherche sur le can-
cer (CIRC) a répertorié,
en 1997, l’exposition profes-
sionnelle à la silice cristalline
comme cancérogène pour
l’homme. Cette décision a été
l’objet de controverse, notam-
ment en raison du manque de
données exposition-réponse,
de l’absence d’homogénéité
des résultats des études por-
tant sur la relation entre expo-
sition professionnelle à la
silice et risque de cancer du
poumon, de l’insuffisance de
prise en compte des facteurs
potentiels de confusion, taba-
gisme en particulier mais aussi
expositions à d’autres cancéro-
gènes comme l’amiante ou les
hydrocarbures aromatiques
polycycliques (HAP). Dans ce
contexte, une étude multi-
centrique a été mise en œuvre
en Europe afin de préciser le
rôle des expositions profes-
sionnelles dans la survenue
du cancer du poumon, en
prenant en considération le
tabagisme et les expositions
concomitantes à d’autres
cancérogènes rencontrés en
milieu de travail.
Une étude cas-témoins
multicentrique
européenne
Cette étude a été conduite dans
sept pays d’Europe, dans une
région du Royaume-Uni et
15 régions d’Europe centrale et
orientale : une région de Rou-
manie et une de Russie, deux de
Pologne, trois de Slovaquie et de
République Tchèque, et cinq de
Hongrie.
Elle a inclus tous les cas incidents
de cancer du poumon histologi-
quement ou cytologiquement
confirmés, survenus de 1998 à
2002 chez les sujets âgés de 20
à 74 ans. L’identification des cas
s’est fondée sur une recherche
active, clinique et anatomo-
pathologique, auprès des ser-
vices hospitaliers et l’étude a
inclus, parmi les patients hospi-
talisés et au cours des trois mois
suivant le diagnostic, les cas éli-
gibles habitant dans la région
d’étude depuis une année au
moins avant le diagnostic.
Les témoins, appariés aux cas
pour le sexe et l’âge à trois ans
près, étaient indemnes de can-
cers et de maladies associées au
tabagisme. Ils ont été recrutés
pour tous les centres d’étude sauf
deux, au Royaume-Uni et en
Pologne, en milieu hospitalier,
dans le même hôpital que les cas
ou dans des hôpitaux desservant
la région dont étaient issus
les cas. Au Royaume-Uni les
témoins ont été choisis à partir
des registres des médecins géné-
ralistes et, dans un des centres
de Pologne, ils provenaient des
registres de population.
Un entretien en tête-à-tête a per-
mis de préciser le mode de vie,
les données démographiques et
socio-économiques, les antécé-
dents médicaux, les antécédents
familiaux de cancer et de taba-
gisme, ainsi que les historiques
résidentiels et professionnels vie
entière. Le volet professionnel de
l’interview a fait l’objet d’une
attention particulière : historique
complet et questions sur les
expositions, sur les tâches effec-
tuées, les machines utilisées,
l’environnement au travail, le
temps passé à chaque tâche, les
expositions spécifiques. Un ques-
tionnaire portant sur 18 emplois
spécifiques a également été rem-
pli, intéressant notamment la
mécanique automobile, le travail
du bois, la peinture, la soudure,
l’isolation, l’agriculture, l’impri-
merie, les métiers de la mine et
des carrières, l’industrie du coke,
le travail en fonderie, l’industrie
chimique.
Des experts locaux ont évalué la
probabilité, l’intensité et la durée
d’exposition à la silice.
La silice :
facteur de risque
de cancer du poumon ?
Au total 2 852 cas et 3 104
témoins étaient éligibles ; le taux
de réponse était de 84 % pour les
cas et de 85 % pour les témoins.
La proportion de fumeurs, ex-
fumeurs inclus, était plus forte
chez les cas (90 %) que chez les
témoins (64 %). La prévalence
vie entière d’exposition à la silice
était de 15 % chez les cas et de
10 % chez les témoins.
Des ajustements ont été effectués
sur le tabagisme et sur tous les
agents d’exposition profession-
nelle évalués. Les
odds ratios
(OR) n’ont sensiblement changé
qu’après ajustements sur l’expo-
sition aux poussières de bois et
aux poussières de matériaux
d’isolation, dont l’amiante.
Exposition professionnelle à la silice cristalline
et risque de cancer du poumon :
étude cas-témoins multicentrique européenne*
L
Mots clés : cancérogènes professionnels ; étude cas-témoins ;
étude multicentrique ; Europe ; exposition professionnelle ;
silice ; tumeur poumon.
Selon les résultats d’une étude multicentrique européenne portant sur près de 3 000 cas et plus
de 3 000 témoins, ayant pris en compte le tabagisme et l’exposition à d’autres cancérogènes
rencontrés en milieu de travail, l’exposition professionnelle à la silice cristalline pourrait être un
facteur de risque de cancer du poumon.
A European multicenter study of nearly 3,000 cases and more than 3,000 controls, which took
both smoking and occupational exposure to other carcinogens into account, found that occupa-
tional exposure to crystalline silica may be a risk factor for lung cancer.
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L’étude montre une association
entre exposition professionnelle
à la silice cristalline et accrois-
sement du risque de cancer du
poumon.
Après ajustement sur l’âge, le
sexe, le centre, le niveau d’édu-
cation, l’exposition aux pous-
sières de matériaux d’isolation et
de bois, l’OR pour le cancer du
poumon en rapport avec le fait
d’avoir été exposé à la silice cris-
talline était de 1,44 (IC à 95 % :
1,22-1,69). L’ajustement sup-
plémentaire sur le tabagisme a
réduit l’OR à 1,37 (IC à 95 % :
1,14-1,65).
Le risque attribuable associé à
l’exposition professionnelle à la
silice cristalline était de 4 % pour
les deux sexes, de 5 % pour les
hommes et de 1 % pour les
femmes.
Les fumeurs exposés à la silice
avaient un risque de cancer du
poumon accru en comparaison
des fumeurs non exposés
(OR = 1,41 ; IC à 95 % : 1,07-
1,87). Des augmentations de
risque semblables ont été obser-
vées chez les anciens fumeurs
(OR = 1,31 ; IC à 95 % : 0,99-
1,73) et les sujets n’ayant jamais
fumé (OR = 1,41 ; IC à 95 % :
0,79-2,49).
Le risque était plus manifeste
pour le tertile supérieur d’expo-
sition cumulée (OR = 2,08 ; IC à
95 % : 1,49-2,90), la durée d’ex-
position (OR = 1,73 ; IC à 95 % :
1,26-2,39) et la durée pondérée
d’exposition (OR = 1,88 ; IC à
95 % : 1,35-2,61).
CG
* Cassidy A1, Mannetje A, van Tongeren M,
et al
. Occupational exposure to crystal-
line silica and risk of lung cancer. A mul-
ticenter case-control study in Europe.
Epidemiology
2007 ; 18 : 36-43.
1Roy Castle Lung Cancer Research Pro-
gramme, Cancer Research Centre, Uni-
versity of Liverpool, UK.
a prévalence de l’asthme
de l’enfant, aux États-Unis
comme dans de nombreux
pays industrialisés, va croissant.
Nombre d’études incriminent des
facteurs environnementaux et
sociaux dans la genèse de cette
maladie, et l’exposition aux moi-
sissures est au banc des accusés.
Des auteurs américains de l’
Envi-
ronmental Protection Agency
des
États-Unis (US EPA) ont, en 2004,
montré que certaines moisissures
étaient statistiquement plus fré-
quentes dans les habitations à
dégâts des eaux (moisissures du
groupe 1), tandis que d’autres
étaient rencontrées dans toutes les
habitations (groupe 2). En 2006,
se fondant sur cette répartition en
deux groupes, ces auteurs publient
une nouvelle étude visant à éva-
luer les populations de moisissures
au domicile d’asthmatiques, ayant
subi des dégâts des eaux.
Une étude comparative
Cette étude, dont l’objectif était de
déterminer si des moisissures spé-
cifiques se trouvaient à des
concentrations significativement
accrues dans des habitations ayant
subi des dégâts des eaux où
vivaient des asthmatiques, a com-
paré ces concentrations à celles
mesurées dans des habitations sans
dégât des eaux apparent.
Les concentrations de moisissures
ont été mesurées aux domiciles
ayant subi des dégâts des eaux,
dans l’air et dans la poussière de
60 chambres à coucher d’enfants
asthmatiques, à Cleveland, dans
l’Ohio, et dans 22 habitations sans
dégâts des eaux servant de
témoins.
Les mesures, spécifiques, ont été
effectuées par PCR (
Polymerase
Chain Reaction
) quantitative.
Un score de moisissures a été cal-
culé en prenant en compte les
niveaux de moisissures, évalués
dans chaque habitation.
Une association
entre asthme
et deux moisissures
spécifiques ?
L’âge moyen des enfants inclus
dans l’étude, dont 66 % étaient
noirs, était de 6,8 ans. Plus des trois
quarts de ces enfants avaient un
asthme persistant léger à sévère.
Un tiers des familles avait un
revenu annuel inférieur à
20 000 dollars et 83 % d’entre elles
résidaient dans des habitations tra-
ditionnelles à une seule famille.
Deux types de moisissures,
Sco-
pulariopsis brevicaulis
et
Tricho-
derma viride
, se sont avérés
présents à des concentrations signi-
ficativement plus élevées dans
les habitations des asthmatiques,
en comparaison des habitations
témoins (
P
< 0,05). Pour trois autres
types de moisissures (
Penicillum
crustosum
,
Stachybotrys charta-
rum et Wallemia sebi
),
P
était infé-
rieur à 0,1.
Les concentrations de sept
autres moisissures, dont
Alter-
naria alternata
,
Cladosporium
cladosporioides
,
Cladosporium
sphaerospermum
, sont apparues
significativement plus basses au
domicile des asthmatiques que
dans les habitations des témoins.
Les auteurs insistent sur l’utilité
d’un indice prédictif de la pré-
sence de moisissures au domicile
et du risque de survenue de
l’asthme, en présence de dégâts
des eaux, manifestes ou inappa-
rents.
CG
* Vesper SJ1, McKinstry C, Yang C,
et al
. Spe-
cific molds associated with asthma in water-
damaged homes
J Occup Environ Med
2006 ; 48 : 852-8.
1Environmental Protection Agency, Cincin-
nati, USA.
Brèves
L
Moisissures spécifiques associées
à l’asthme dans les habitations
à dégâts des eaux*
Pollution de l’air et santé respiratoire
Les résultats d’une étude américaine, fondée sur des mesures dans l’air et la poussière du domicile,
associent deux types de moisissures spécifiques à l’asthme dans les habitations ayant subi des dégâts
des eaux. L’humidité n’étant pas toujours apparente, les auteurs voient dans cette association l’intérêt
d’un indice de moisissures prédictif de la survenue de l’asthme dans les habitations à dégâts des eaux.
This American study measured two types of molds specific to asthma in the air and dust of water-
damaged homes. Because dampness is not always apparent, the authors see this association as
potentially useful as a mold indicator for predicting asthma in homes with water damage.
Mots clés : asthme ; champignons ; eau ; enfant ; États Unis ;
exposition environnement ; facteurs socioéconomiques ; humidité ; logement.
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