Valéry NDONGO
> " UN GARS DU KWATT
QUI RÊVE TOUT HAUT DE FAIRE DU CINÉMA "
3
VOIR PARIS ET MOURIR JEUNE > ENTRETIEN AVEC
Ce Valéry-là ne gazouille pas sur le net mais, à Yaoundé, au kwatt, il tape les divers avec ses
cotars, autrement dit au quartier, il discute avec ses potes. De tout, de rien, des filles,
de la mondialisation, de l’identité, de l’intégration, de l’autre, des autres. A intervalles
réguliers, il vient au TARMAC livrer ses réflexions. Il y a ses habitudes, surtout celle
de nous faire rire, de nous convier, l’instant d’un spectacle à entendre son camfranglais,
sa langue, savoureuse, gouailleuse, inventive. Il revient ici sur son parcours, ses premiers
spectacles présentés au TARMAC, sur son évolution à la scène, à la ville et… au kwatt.
Bernard MAGNIER
Afin de faire connaissance, pourriez-vous
nous dire quel a été votre parcours avant de
monter sur scène ?
Valéry NDONGO
Mon parcours est simplement le
cheminement d’un enfant du kwatt qui
n’a pas eu d’autre choix que de sortir ses
tripes pour trouver sa voie mais qui a quand
même eu la chance de croiser sur sa route
des professionnels dont les conseils l’ont
encouragé à persévérer. Je n’ai pas reçu de
formation académique en art dramatique,
ce que je fais en tant qu’artiste, c’est le
résultat de ma propre expérience de la vie.
Comment êtes-vous venu au "one man
show" ?
Un peu par hasard. J’ai toujours voulu
faire du cinéma. Je rêvais comme tous ceux
de mon âge de devenir une star à Hollywood
et de ravir un Oscar. Pour concrétiser mon
rêve, je me suis mis à la recherche d’une
école de cinéma, et, deux ans plus tard, j’ai
trouvé une école de théâtre à Yaoundé. Ce
n’était pas ce que je cherchais mais c’était
mieux que rien, surtout que la plupart de
mes idoles (De Niro, Al Pacino, Denzel
Washington, Delroy Lindo…) ont fait du
théâtre avant de faire du cinéma. J’ai claqué
la porte de cette école parce que les cours
étaient aux antipodes de l’art dramatique.
En 2000, j’ai assisté par hasard à
un spectacle de "La ronde des poètes du
Cameroun" au Centre culturel français
de Yaoundé à l’occasion du "Printemps
des poètes". Une longue histoire a alors
commencé avec la poésie. Les amis de "La
ronde des poètes" m’ont encouragé dans
cette voie. Le premier poème que j’ai adapté
véritablement en sketch est un poème de
Francis Bebey intitulé Musica Africa. Dès
lors, j’ai commencé à écrire des sketches. En
2002, pendant les Rencontres Théâtrales
Internationales du Cameroun, j’ai assisté à
un spectacle d’Essindi Mindja, un pionnier
du one man show au Cameroun, décédé
en juillet 2005, et, ce jour là, j’ai découvert
le "one man show". Dès le lendemain, j’ai
commencé à regrouper tous mes sketches
et à en écrire des nouveaux dans le but de
faire un spectacle.
En janvier 2004, mon premier "one
man show" était prêt et présenté au public
du Centre culturel français de Yaoundé.
Depuis lors, je fais du "one man show"
en ayant toujours une activité importante
dans le théâtre parce je suis définitivement
tombé amoureux du théâtre.
MON INSPIRATION VIENT
DU "KWATT ", DU QUARTIER
Où puisez-vous la matière de vos spectacles ?
Mon inspiration vient du "kwatt", du
"quartier" qui est considéré par les jeunes
comme leur véritable "maison". Je joue avec
tout ce qui se passe dans mon entourage et
les événements du quotidien constituent
une source intarissable de sketches. De
même que les médias offrent aussi une très
large gamme de possibilités avec l’actualité
internationale qui bouge plus que son
ombre. Je me sers de mon imagination et
de l’observation du quotidien pour enrichir
mon travail.
Comment s'élaborent vos sketches ?
Travaillez-vous seul ?
Je conçois mes sketches de deux façons.
Soit je décide de travailler sur un thème
et je regroupe tous les éléments à ma
disposition qui traitent de ce sujet (copains,
télévision, presse, internet…) pour écrire le
texte. Soit je joue d’abord le sketch avant de
l’écrire. Ça se passe presque toujours entre
copains. Parfois, j’improvise une histoire.
Parfois, l’un de mes potes sort une blague
que je trouve superbe et je décide d’en faire
un sketch. Ensuite, je trouve du temps,
généralement la nuit (simplement parce
qu’il y a plus de calme au kwatt la nuit) pour
écrire le texte. Chaque fois que j’écris un
texte, je pense à la façon de le jouer. J’essaye
d’écrire comme je parle. Les répétitions
m’aident à enrichir le jeu et même le texte.