Sup au plém e R Dé egar nt cem ds bre N°5 - 20 2 05 Dossier réalisé par : Alain STASSART et Philippe TAQUET ossier Les droits du patient La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient est entrée en vigueur depuis un peu plus de trois ans et elle a déjà fait couler beaucoup d'encre … Mais de quels droits s'agit-il exactement et pourquoi une loi était-elle nécessaire en Belgique ? C'est aussi l'heure d'un premier bilan, avec le rapport du Service de médiation fédéral publié en avril 2005. Contrairement à d'autres pays européens, il n'existait pas en droit belge, une loi spécifique relative aux droits du patient. Or, celle-ci était devenue indispensable pour plusieurs raisons : • si le patient possédait évidemment certains droits, ceux-ci n'étaient pas aisément identifiables, car ils provenaient de sources juridiques éparses (constitution belge, droit pénal, principes généraux du droit médical européen…). Par ailleurs, certaines dispositions légales étaient parfois ambiguës, comme celles relatives au droit de consultation par le patient de son dossier médical ; • l'existence de lacunes importantes dans notre droit, l'exemple classique étant la situation d'un patient qui sombre dans le coma ou la démence et qui est devenu incapable de prendre par lui-même une décision concernant son propre état de santé ; • la correction de dispositions légales défavorables au patient (la transplantation d'organes, loi sur les contrats d'assurance) par rapport à l'exercice de son droit à l'autodétermination et au respect de sa vie privée. Avant de passer en revue ces droits, la précision de quelques notions s'impose : • le patient : toute personne qui reçoit des soins de santé, sous quelque forme que ce soit, à sa demande ou non (parents d'un mineur d'âge, soins donnés en urgence, …). Le principe est que le patient exerce lui-même ses droits, mais il peut être « représenté ». Si un patient n'a pas désigné formellement un mandataire pour le représenter, la loi a prévu, principalement pour son entourage familial, un système de représentation en "cascade"; • les prestataires de soins : les praticiens professionnels visés par la loi sont les médecins, les dentistes, les infirmiers, les pharmaciens, les kinésithérapeutes, les paramédicaux. Actuellement, la loi n'est toujours pas applicable à certains praticiens comme les psychologues ou les chiropracteurs ; • les soins de santé : services dispensés par un praticien professionnel en vue de promouvoir, de déterminer, de conserver, de restaurer ou d'améliorer l'état de santé d'un patient ou de l'accompagner en fin de vie. Certaines matières sont régies par des législations spécifiques (avortement, euthanasie…) et sont exclues du champ d'application de la loi. Mais si le patient a des droits, ceuxci ne sont cependant pas absolus et doivent toujours être analysés dans le respect des droits des prestataires de soins et celui des autres patients. En ne perdant pas de vue que l'objectif primordial de la loi est bien celui d'améliorer la qualité des soins en facilitant le dialogue entre le patient et le prestataire de soins. ● Quels sont les droits du patient ? La loi relative aux droits des patients contient sept articles. La volonté du législateur a été pour une fois de rédiger une loi relativement facile d'accès et compréhensible par tous. Il faut dire que la santé est un sujet qui concerne tout un chacun. Vous trouverez ici les différents articles de la loi et une explication de chacun de ceux-ci. ossier Les droits du patient 1 Le droit à la prestation de services de qualité Page 2 - Déc.2005 "Le patient a droit de la part du praticien professionnel à des prestations de qualité répondant à ses besoins et ce, dans le respect de sa dignité humaine et de son autonomie, et sans qu'une distinction d'aucune sorte ne soit faite." Le droit du patient à des prestations de qualité n'autorise pas le patient à exiger n'importe quel type de traitement. Ainsi, si le médecin doit prodiguer les meilleurs soins possibles, c'est en tenant compte de l'état de la connaissance scientifique au moment des soins, mais également des moyens techniques mis à sa disposition. Ce droit recouvre également le respect des convictions religieuses, philosophiques ou culturelles du patient. 2 Le droit au libre choix du prestataire de soins "Le droit du libre choix du prestataire signifie que le choix du patient d'être soigné par tel médecin n'est pas à considérer comme étant une exigence particulière de sa part. Mais ce droit n'est pas absolu, car il se heurte, sauf en cas d'urgence, au principe de l'acceptation de prise en charge par le médecin. Cependant un médecin qui ne voudrait ou ne pourrait pas pratiquer un traitement est obligatoirement tenu d'adresser le patient à un de ses confrères". Toutefois, différentes législations ( par exemple en cas de contrôle de l'incapacité de travail ) et l'organisation du travail en équipe inhérente aux établissements de soins limitent de facto ce libre choix. 3 Le droit à l'information "Le patient a droit de la part du praticien professionnel à toutes les informations qui le concernent et peuvent lui être nécessaires pour comprendre son état de santé et son évolution probable. La communication avec le patient se déroule dans une langue claire. Le patient peut demander que les informations soient confirmées par écrit… Les informations ne sont pas fournies au patient si celui-ci en formule expressément la demande, à moins que la noncommunication de ces informations ne cause manifestement un grave préjudice à la santé du patient ou de tiers et à condition que le praticien professionnel ait consulté préalablement un autre praticien professionnel à ce sujet… Le praticien professionnel peut, à titre exceptionnel, ne pas divulguer des informations au patient si la communication de celles-ci risque de causer manifestement un préjudice grave à la santé du patient et à condition que le praticien professionnel ait consulté un autre praticien professionnel…" Ce droit à l'information est très général : il concerne aussi bien le diagnostic, les informations préalables à toute intervention que les suites probables du traitement envisagé. Ce droit à l'information comprend aussi les informations relatives au coût financier du traitement et donc aux suppléments d'honoraires qui seraient éventuellement réclamés. Quant au droit de "ne pas savoir", il est strictement réglementé dans l'intérêt des tiers (maladies contagieuses), voire du patient lui-même (tendances suicidaires). Si le patient veut exercer ce droit de "ne pas savoir", il peut le demander à son médecin et cette demande doit être notée dans son dossier. De même, si le médecin refuse de divulguer certaines informations au patient, une motivation écrite doit également figurer dans le dossier du patient. 4 Le droit au consentement éclairé "Le patient a le droit de consentir librement à toute intervention du praticien professionnel moyennant information préalable. Ce consentement est donné expressément, sauf lorsque le praticien professionnel, après avoir informé suffisamment le patient, peut raisonnablement inférer du comportement de celui-ci qu'il consent à l'intervention… Le patient a le droit de refuser ou de retirer son consentement… Si lorsqu'il était encore à même d'exercer ses droits, le patient a fait savoir par écrit qu'il refuse son consentement à une intervention déterminée, ce refus doit être respecté… Lorsque, dans un cas d'urgence, il y a incertitude quant à l'existence ou non d'une volonté exprimée au préalable par le patient, toute intervention nécessaire est pratiquée immédiatement par le praticien professionnel dans l'intérêt du patient…" Le patient jouit des droits à son intégrité physique et à la libre disposition de sa personne, ce qui explique qu'il doit autoriser au prestataire, avant toute intervention, le fait que celui-ci puisse porter atteinte à ses droits. Le consentement est dit libre lorsque le patient dispose de toutes ses facultés de discernement. Il est dit éclairé lorsque le patient a reçu, de la part du prestataire concerné, les informations utiles que celui-ci devait lui fournir "en temps opportun". 5 Le dossier du patient © Claire DEPREZ "Le patient a le droit d'introduire une plainte concernant l'exercice de ses droits auprès de la fonction de médiation compétente. La fonction de médiation a notamment pour mission la prévention des questions et des plaintes par le biais de la communication entre le patient et le praticien professionnel, la médiation et l'information du patient au sujet des possibilités de règlement d'une plainte". Selon la loi, pour être agréés, les hôpitaux doivent disposer d'une fonction de médiation. Un service de médiation fédéral a également été instauré. Outre un rôle général d'information sur la loi, il est compétent pour recevoir les plaintes des patients au sujet des praticiens professionnels qui exercent en dehors des hôpitaux. ● 6 Le droit à la protection de la vie privée "Le patient a droit à la protection de sa vie privée lors de toute intervention du praticien professionnel, notamment en ce qui concerne les informations liées à sa santé Le patient a droit au respect de son intimité. Sauf accord du patient, seules les personnes dont la présence est justifiée dans le cadre de services dispensés par un praticien professionnel peuvent assister aux soins, examens et traitements…" Des exceptions à ce principe doivent être exceptionnelles, mais elles peuvent être justifiées par exemple pour des raisons de santé publique. C'est l'application de ce droit qui a entraîné dans cette même loi une modification importante de la loi sur les contrats d'assurance. Ainsi, le patient et son médecin traitant peuvent faire valoir ce droit pour répondre avec circonspection aux demandes formulées par les compagnies d'assurance lors de la conclusion d'un contrat d'assurance vie. Renseignements : Défense des Membres Mutualité Chrétienne de Liège Place du XX Août, 38 4000 Liège Informations et rendez-vous personnalisés : 04/221.74.44 ossier 7 Le droit à la médiation en matière de plainte Les droits du patient "Le patient a droit, de la part de son praticien professionnel, à un dossier de patient soigneusement tenu à jour et conservé en lieu sûr…Le patient a droit à la consultation du dossier le concernant. Les annotations personnelles et les données concernant des tiers n'entrent pas dans le cadre de ce droit de consultation. Le patient a le droit d'obtenir, au prix coûtant, une copie du dossier le concernant ou d'une partie de celui-ci". Depuis la loi, les patients peuvent désormais consulter leur dossier sans passer par l'intermédiaire d'un médecin, à l'exception des annotations personnelles (notes rédigées par le médecin et qui n'ont pas été communiquées à d'autres praticiens professionnels) pour lesquelles ce concours est encore indispensable. Les médecins doivent donner satisfaction à la demande du patient de consulter son dossier ou d'en obtenir copie dans un délai de 15 jours. Autre nouveauté de la loi : après le décès du patient, les époux et certains parents ont le droit de consulter le dossier du défunt, mais à des conditions strictes et toujours par l'intermédiaire d'un médecin. Page 3 - Déc.2005 Gros plan sur le service médiation ossier Les droits du patient Une des principales nouveautés liées à la loi relative aux droits des patients concerne l'obligation pour les hôpitaux de garantir un service de médiation en matière de plainte. Une nouvelle fonction au sein du monde hospitalier encore trop peu connue du grand public. Nous avons rencontré, Emmanuel Legrand, médiateur hospitalier compétent pour tous les établissement dépendants du Centre Hospitalier Chrétien (CHC) (cliniques, polycliniques, maisons de repos et de soins,…). "Le rôle principal du médiateur est de servir de relais, de faciliter la communication entre le patient et le prestataire de soins. La plupart du temps, l'origine du problème vient d'un manque de dialogue entre les deux parties. Soit que l'information n'a pas été donnée, soit qu'elle n'a pas été comprise par le patient. Mon rôle est de faire en sorte de renouer le dialogue entre les parties en conflit pour arriver à une solution à l'amiable, en veillant à respecter une neutralité indispensable. J'interviens aussi en seconde ligne ; lorsque l'on fait appel à mes services, je demande toujours si la personne s'est déjà adressée à la personne concernée ou à la direction de l'établissement pour faire part de ses griefs " explique Emmanuel Legrand. La plupart des plaintes enregistrées par le service médiation du CHC concernent essentiellement des problèmes de soins médicaux." On enregistre grosso modo une trentaine de plaintes par année. C'est très peu en regard du nombre de patients qui font appel aux services du CHC. En général une solution à l'amiable se dégage. Il y a eu au départ une crainte de la part du monde médical de voir une explosion des plaintes, cela n'a pas été le cas. La fonction ne semble pas avoir créé le besoin", poursuit le médiateur du CHC. Une fonction récente dans l'univers médical qui est appelée à évoluer. Mais pas de doute que la principale qualité pour ce poste reste et restera l'écoute." Lorsque le patient vient nous trouver il est bien souvent dans l'émotion qui peut gêner sa capacité d'analyse. Il est important de pouvoir écouter cette émotion et parfois la cadrer; parfois écouter suffit à régler le problème" termine Emmanuel Legrand. Et au niveau fédéral ? Le Service de médiation fédéral a divulgué au mois d'avril le premier rapport annuel de ses activités. Au total, 414 demandes d'avis ou de plaintes de patients ont été enregistrées pour l'année 2004 en Belgique. Des patients Page 4 - Déc.2005 francophones sont concernés dans 205 dossiers (69 avis et 136 plaintes dont 103 ont été directement réorientées vers les médiateurs locaux). Les plaintes adressées aux médiateurs hospitaliers ne font évidemment pas partie de ces statistiques, mais nombre de plaintes concernant les hôpitaux ont cependant abouti sur la table des médiateurs fédéraux. Un peu moins de 40% des plaintes réorientées vers les médiateurs locaux mettent en cause le rôle joué sur le terrain par les médiateurs hospitaliers .Les autres plaintes concernent davantage les médecins spécialistes et le motif de plainte le plus couramment cité est la violation du droit à une prestation de qualité, dans le respect de la dignité. Autres motifs fréquents: la violation du droit à la copie du dossier médical et des plaintes concernant des facturations contestées, pour lesquelles les médiateurs ne sont pas compétents. Quelques recommandations ont également été formulées à l'attention de la Commission fédérale « Droits du patient ». Parmi celles-ci, la demande de nouvelles campagnes de sensibilisation, car la loi est, semble-t-il, encore fort méconnue ! ● Pour les hôpitaux de la région liégeoise, quatre fonctions de médiateurs hospitaliers ont été instaurées : •Emmanuel Legrand : Pour les cliniques du Centre Hospitalier Chrétien (St Joseph, Espérance, Notre Dame Waremme, Notre Dame Hermalle, St Vincent, Ste Elisabeth). Tel: 04/224.81.55. [email protected] •Caroline Doppagne : Pour les hôpitaux du GIE pôle hospitalier liégeois (CHU, CHR, CHBAH,André Renard). Tel: 0498/311.112. [email protected] •Delphine Dortu : Pour les soins psychiatriques : Tel: 04/344.18.96. [email protected] •Marie-Noëlle Cornet : CHPLT. - Tél : 087/21 27 37 [email protected] Service de médiation fédéral Droits du patient : •Marie-Noëlle Verhaegen, Eurostation n°40, place Victor Horta, boîte 10, 1000 Bruxelles. Tel: 02/524.85.21.