INTRODUCTION De par leur répartition et leur comportement, les tiques sont capables de transmettre de nombreuses maladies humaines et animales, bactériennes, virales ou parasitaires. Sept maladies transmissibles par les tiques ont une importance épidémiologiques en France : cinq sont bactériennes (Maladie de Lyme, Fièvre Boutonneuse Méditerranéenne, Fièvre Q, Ehrlichiose et Tularémie), une parasitaire (Babésiose) et une virale (Encéphalite Virale à Tiques). Les différentes infections transmises par les tiques sont des zoonoses faisant intervenir 3 protagonistes : le réservoir animal, le vecteur et l’agent pathogène, l’homme n’étant qu’un hôte de rencontre accidentel. Les tiques sont des ectoparasites hématophages stricts. Cette hématophagie est à l’origine de la transmission de germes pathogènes. Dans ce QDND, nous aborderons principalement la maladie de Lyme et la fièvre boutonneuse méditerranéenne. MALADIE DE LYME La maladie de Lyme ou borréliose de Lyme est une maladie bactérienne due à un spirochète du genre Borrelia. L’affection doit son nom à la ville du Connecticut où elle a été reconnue pour la première fois aux Etats-Unis en 1975. Agent causal : Récemment, grâce à des méthodes de biologie moléculaire, plusieurs groupes de recherches ont indiqué la complexité antigénique de Borrelia burgdorferi (B.b). Ces études ont conduit à la sub-division de l’espèce initiale en 4 nouvelles espèces : B. burgdorferi stricto sensu, B. garinii, B. Afzelii et B. japonica. Les 3 premières espèces sont directement liées à la maladie de Lyme. La dernière, B. japonica, présente essentiellement au Japon, ne semble pas intervenir dans l’étiologie de la maladie. L’intérêt de cette nouvelle classification fut démontré par des travaux recherchant la ou les espèces responsables des différents symptômes. En effet, il semble que l’espèce B. burgdorferi stricto sensu soit plutôt responsable des manifestations rhumatologiques tandis que les espèces B. garinii et B. afzelii provoqueraient respectivement de manière prépondérante les manifestations neurologiques et dermatologiques de la maladie de Lyme. Ces 3 espèces co-habitent dans les bocages et les forêts de notre pays et il a pu être montré la co-existence d’espèces différentes chez un même patient. Fréquence et groupes à risques : La maladie de Lyme existe sur tous les continents mais prédomine dans l’hémisphère nord. Elle peut être contractée dans toutes les régions de France, avec probablement des zones à risque plus marqué (les forêts de l’Aubrac par exemple). En France, on observe plus de 1000 nouveaux cas de borrélioses chaque année, ce qui permet de conclure à l’endémicité de la borréliose dans notre pays. Toutes les activités qui exposent à des contacts avec les tiques constituent un facteur de risque : promenade en forêt, camping… ainsi que travaux agricoles et forestiers, situations où elle est reconnue comme maladie professionnelle. Réservoir, transmission : Le réservoir de germes est très vaste puisqu’il intéresse de nombreuses espèces de mammifères (cervidés, bétails, petits rongeurs, chiens,…), des oiseaux et enfin les tiques. Il semble que les animaux puissent rester porteurs de Borrelia pendant de longues périodes de leur vie sans manifestations cliniques. La transmission à l’homme se fait très généralement par piqûre de tique du genre Ixodes (Ixodes ricinus en Europe). Les tiques peuvent transmettre la maladie à tous les stades de leur développement (larve, nymphe et adulte). D’autres insectes ont été très rarement incriminés dans la transmission (taons, certaines mouches…). La contamination humaine se superpose à la période d’activité maximale des tiques, fonction des conditions climatiques, et se fait donc en France entre le début du printemps et la fin de l’automne. Pathogénie : Après inoculation de Borrelia au niveau de la peau à la suite de la piqûre, la borréliose de Lyme évolue schématiquement en trois phases comme la syphilis. La phase primaire s’exprime essentiellement par une lésion cutanée s’étendant à partir du point d’inoculation : l’érythème chronique migrant (ECM). Cette lésion qui n’est pas constante, peut s’accompagner parfois de signes généraux et évolue spontanément et favorablement dans un délai variable. A partir du point d’inoculation, Borrelia peut aussi disséminer par voie hématogène et ensemencer d’autres organes comme le cerveau, le cœur, les articulations,… qui sont alors le siège de manifestations cliniques secondaires observées quelques semaines après la contamination. Ces manifestations vont, elles aussi, souvent régresser spontanément même en l’absence de traitement. Ultérieurement des manifestations chroniques constituent la phase tertiaire de la maladie qui apparaît en général après plusieurs années. Les tableaux réalisés sont en général liés à l’action directe du germe notamment aux phases primaire et secondaire. La responsabilité d’un processus immunologique associé est très probable en particulier lors des phases secondaires tardives et de la phase tertiaire. Cette distinction en trois phases est remise actuellement en question pour ne retenir qu’une phase précoce et une phase tardive. Clinique : 1. Phase primaire L’érythème chronique migrant (ECM) pathognomonique constitue la manifestation clinique essentielle de cette phase. Il débute 3 à 30 jours après l’inoculation de B.b., siège préférentiellement au niveau des membres inférieurs (50% des cas), en particulier au creux poplité ou à la partie haute de la cuisse. Il peut également siéger au niveau du tronc, des membres supérieurs, du visage ou du cuir chevelu. Il s’agit initialement d’une petite macule ou papule rouge modérément inflammatoire, centrée sur le point de piqûre. La lésion va évoluer de façon centrifuge, typique de l’ECM, pour atteindre un diamètre variable pouvant atteindre 20 à 30 cm (voire plus). La lésion est ronde ou ovalaire, présente une bordure périphérique active, plus érythémateuse que le centre qui, peu à peu retrouve une teinte sensiblement normale. L’ECM n’est pas prurigineux habituellement. Il peut être associé à une adénopathie satellite et/ou des manifestations générales (fébricule, céphalées, arthralgies) qui traduisent la dissémination septicémique précoce du germe. En l’absence de traitement, l’ECM persiste 3 à 4 semaines (parfois plus), avant de pâlir et disparaître sans séquelle. 2. Phase secondaire Elle révèle parfois la maladie, l’ECM pouvant manquer ou être passé inaperçu (30 à 50% des cas). Elle peut coexister avec l’ECM lorsque celui-ci est d’évolution prolongée. Elle survient la plus souvent quelques semaines à mois après la phase primaire. Manifestations cutanées Rares en France, plus fréquentes aux USA, il s’agit de lésions multiples d’ECM, identiques à la lésion primaire à l’exception du point de piqûre central qui est absent. Chacune de ces lésions évolue de façon centrifuge, souvent associées à des manifestations générales. Manifestations articulaires Les arthralgies, précoces, sont fréquentes. Les arthrites sont de survenue plus tardive et moins fréquente ; elles réalisent une mono- ou une oligo-arthrite touchant surtout les grosses articulations en particulier le genou. Le tableau est celui d’une arthrite aiguë typique, évoluant par poussées brèves, séparées par des périodes de rémission plus ou moins complètes. Ces poussées répétées d’arthrites peuvent évoluer vers le tableau d’arthrite chronique de la phase tertiaire. Manifestations cardiaques L’atteinte cardiaque est soit une myocardite, soit une péricardite, les deux pouvant être associées. La myocardite s’exprime le plus souvent par des troubles de la conduction, en particulier auriculo-ventriculaires, responsable d’un BAV qui peut être complet. Tout trouble de la conduction au cours de la maladie de Lyme impose l’hospitalisation. Dans d’autres cas, la myocardite se traduit par des signes d’insuffisance cardiaque. Ces atteintes cardiaques sont caractérisées par leur variabilité dans le temps et par leur évolution habituelle vers la guérison sans séquelles. Manifestations neurologiques Les complications neurologiques de la borréliose de Lyme sont plus fréquentes en Europe qu’aux Etats-Unis. Ces variations cliniques observées entre les différentes zones géographiques seraient liées à la variabilité dans la répartition des espèces de B. b. Ainsi, la prédominance des manifestations neurologiques en Europe serait liée à la présence de B. garinii dont le tropisme pour le tissu nerveux est plus marqué. Ces manifestations neurologiques peuvent être révélatrices de la maladie et sont les suivantes : -la méningo-radiculite sensitive Elle débute en général dans le territoire de la piqûre de la tique. Elle peut rester localisée à ce niveau ou s’étendre aux métamères adjacents. Elle est responsable de douleurs très importantes, notamment nocturnes, mal calmées par les antalgiques et les antiinflammatoires. L’examen clinique peut être normal ou objectiver une hypoesthésie, une diminution de la force musculaire ou une abolition des réflexes dans le territoire intéressé. -les atteintes motrices périphériques isolées sont possibles mais rares. -l’atteinte des nerfs crâniens est fréquente. Tous les nerfs peuvent être touchés mais c’est l’atteinte du nerf facial, uni- ou bilatérale qui est de loin la plus fréquente. -les atteintes centrales, encéphalitiques, cérébelleuses ou médullaires sont plus rares. Lorsqu’elles sont isolées, elles peuvent être difficiles à rapporter à leur véritable cause. -l’atteinte méningée. Le plus souvent muette cliniquement, elle se traduit par une méningite lymphocytaire (une centaine d’éléments par mm3), avec protéinorachie élevée et normoglycorachie. Il existe généralement une augmentation oligoclonale des gamma-globulines intrathécales. Cette atteinte méningée peut être isolée. Elle est fréquente, mais non constante chez les patients ayant une atteinte neurologique périphérique ou centrale. Autres manifestations Plus rares, il peut s’agir d’hépatites granulomateuses, d’atteintes oculaires, ORL ou musculaires. Manifestations générales A l’exception d’une asthénie souvent marquée, inexpliquée, elles sont rares. Il n’y a pas de fièvre, en général, au cours d’une borréliose de Lyme. Les manifestations décrites précédemment peuvent être isolées ou parfois associées chez un même patient. 3. Phase tertiaire Des mois ou des années après l’infection peuvent apparaître des manifestations tertiaires parfois en apparence primitives. Manifestations cutanées -L’acrodermatite chronique atrophiante (ACA) ou maladie de Pick-Herxheimer est une atteinte des membres inférieurs principalement. Elle réalise au début une infiltration inflammatoire peu spécifique de la peau, plus ou moins étendue qui évolue en plusieurs mois ou années vers une atrophie cutanée laissant un épiderme fin recouvrant un réseau veineux superficiel très apparent. -Le lymphocytome cutané bénin se traduit par des nodules de 1 à 2 cm de diamètre, de couleur rouge ou violette. Il n’est pas spécifique de la borréliose de Lyme mais dans ce cas se localise au niveau du lobule de l’oreille et sur le scrotum. Manifestations articulaires Elles réalisent une mono ou un oligo-arthrite intéressant essentiellement les grosses articulations et en particulier le genou. Le respect des poignets et des articulations des mains et le caractère peu inflammatoire permettent d’éliminer une arthrite rhumatoïde. Manifestations neurologiques Les manifestations sont très variées et traduisent des atteintes médullaires ou/et cérébrales, responsables de tableaux neurologiques ou psychiatriques divers (pseudo-sclérose en plaque, démence,…). D’autres manifestations tardives sont possibles (atteintes cardiaques, musculaires,…) mais encore mal connues car difficiles à rattacher de façon formelle à l’infection par B.b.. Diagnostic biologique : Le diagnostic est avant tout clinique. Les données biologiques standards sont le plus souvent normales (numération formule sanguine, VS < à 30 mm à la première heure). La sérologie : Les examens sérologiques utilisent de multiples méthodes (immunofluorescence, hémagglutination, ELISA, Western blot) pour lesquelles les réactifs ne sont pas bien standardisés et dont la sensibilité et la spécificité sont variables. En règle générale, le test ELISA ou équivalent est utilisé en première intention avec recours au Western blot pour la confirmation (ce test pouvant être effectué à l’initiative du biologiste en cas de recherche d’Ac positive). Il est préférable d’utiliser une technique permettant de différencier les Ac IgG des Ac IgM plutôt que d’utiliser une méthode dosant les Ac totaux (IgG, M et A ). Un test sérologique utilisant un petit nombre de protéines recombinantes sera plus spécifique mais moins sensible qu’un test utilisant un lysat de Borrelia. Quatre éléments doivent être pris en compte dans l’interprétation du résultat de la sérologie : -Il existe de faux positifs parce que le sujet est porteur d’Ac dirigés contre des bactéries proches de B.b. (tréponèmes, leptospires) mais également avec des micro-organismes ayant des déterminants antigéniques communs (MNI, tuberculose…). Un TPHA doit être effectué pour tout prélèvement positif en sérologie de Lyme. -Compte tenu de la fréquence de la bactérie dans les biotopes forestiers, la prévalence des porteurs sains (sérologie positive sans maladie) peut atteindre 15 à 20% dans certains groupes de patients (séjours fréquents et prolongés en forêt, chasseurs). Une sérologie positive n’aura de valeur pathologique que dans un contexte clinique spécifique. -La réponse sérologique à l’infection est relativement tardive après la contamination ; les IgM apparaissent 3 à 6 semaines après le contact infectant et les IgG apparaissent plus tard et atteignent leur maximum en plusieurs mois. En fait, en début de maladie, la sérologie est le plus souvent négative. En cas de forte présomption, un contrôle sérologique doit impérativement être réalisé un à deux mois après le premier prélèvement. Pour les formes compliquées précoces, essentiellement les neuroborrélioses, la sérologie est plus fréquemment positive, mais les taux d’Ac restent modérés. Dans les arthrites ainsi que dans les acrodermatiis chronica atrophicans (ACA), la réponse en Ac est particulièrement intense avec une sensibilité proche de 100%. La présence d’anticorps dans le LCR au cours des formes neurologiques ou dans le liquide synovial dans les formes articulaires sont des arguments relativement fiables en faveur du diagnostic. La ponction lombaire est fortement recommandée à ce titre dans les formes méningées. IgM IgG Erythema Migrans Neuroborréliose positif faible ou positif faible négatif souvent négatif positif faible Arthrite et ACA rarement positif positif fort En confirmation, le Western-Blot permet d’obtenir une bonne spécificité ; il est plus informatif au niveau qualitatif mais manque quelquefois de sensibilité. La culture : L’isolement de B.b. par culture (à partir du sang, du LCR, d’une biopsie ou de liquide synovial) reste difficile et n’est pas utilisé en routine. Cette méthode est peu sensible en raison de la difficulté de la technique et du faible taux circulant de spirochètes chez un patient infecté. La recherche d’ADN par amplification génique : La mise en évidence de l’ADN bactérien, en particulier dans le liquide synovial et le LCR est intéressante (analyse hors nomenclature / prix = 55€). Diagnostic différentiel : Les particularités sémiologiques de l’ECM typique permettent de le distinguer des réactions cutanées secondaires aux piqûres d’autres acariens ou insectes. En pratique, il convient surtout d’envisager le diagnostic de borréliose de Lyme devant des manifestations neurologiques, articulaires ou cardiaques mal expliquées, en particulier dans les zones d’endémie. Une sérologie positive ne permet pas à elle seule de retenir le diagnostic de borréliose de Lyme. Evolution, pronostic : Le risque d’évolution vers une phase secondaire ou tertiaire après une contamination initiale, en l’absence de traitement antibiotique, n’est pas systématique mais mal évalué. Le pronostic de la maladie traitée correctement est en général bon mais le risque d’évolution ultérieure ne peut pas être formellement éliminé. Traitement : Son but est de guérir les manifestations cliniques et d’éviter l’évolution vers des phases secondaires ou tertiaires en stérilisant l’ensemble des organes potentiellement infectés. De nombreux antibiotiques sont actifs sur B.b. En pratique on utilise une bêta-lactamine ou une cycline. ECM isolé (sans signe clinique de dissémination septicémique) : amoxicilline 3 à 4 g/24h pendant 14 jours ou doxycycline 200 mg/jour pendant 14 jours chez l’adulte. ECM avec signes de diffusion septicémique ou phase secondaire de la maladie : amoxicilline 6 à 8 g/jour pendant 21 jours ou ceftriaxone 2 g/jour par IM ou IV pendant 21 jours. Phase tertiaire : ceftriaxone 2 g/jour pendant au moins 1 mois. Prévention et surveillance : La prévention est difficile compte tenu de la diversité du réservoir animal. La résistance des tiques aux insecticides rend difficile leur destruction. La meilleure prévention est individuelle et consiste à retirer les tiques le plus rapidement possible avec précaution pour ne pas casser le rostre. Il n’est pas justifié de traiter systématiquement par antibiotiques les sujets venant d’être piqués par une tique. Toutefois chez la femme enceinte, un traitement par amoxicilline est souhaitable en raison du risque d’infection fœtale. Un vaccin est disponible aux Etats-Unis. FIEVRE BOUTONNEUSE MEDITERRANEENNE Agent causal : La fièvre boutonneuse méditerranéenne (FBM) est due à Rickettsia conorii, bactérie intracellulaire stricte de la famille des rickettsies ; elle est endémique dans le sud de la France, sur tout le pourtour méditerranéen. Réservoir, transmission : La maladie est transmise par la tique brune du chien, Rhipicephalus sanguineus, qui pique rarement l’homme mais dont le taux d’infection est très élevé. L’infection des tiques est héréditaire (trans-ovarienne). Elles sont donc à la fois réservoir et vecteur de la maladie. Le chien joue un rôle comme réservoir de tiques. Fréquence et groupes à risques : La répartition géographique de la maladie est celle de Rhipicephalus sanguineus. Malgré le caractère habituellement méditerranéen de la maladie, le diagnostic ne doit pas être d’emblée écarté en dehors des zones d’endémie : il ne faut négliger ni les séjours récents (du patient ou du chien) en zone infestée, ni la facilité d’installation de micro-foyers de R. sanguineus dès que le climat ou le biotype le permet. C’est ainsi que des cas autochtones ont été diagnostiqués jusque dans le Puy de Dôme ou le Poitou. La FBM sévit sur le mode endémique avec poussées épidémiques estivales. L’incidence moyenne de la maladie dans le Sud de la France est de 50/100 000 habitants par an. Pathogénie La bactérie injectée par la tique se fixe sur sa cible, la cellule endothéliale vasculaire, où elle se multiplie. Cette multiplication engendre bactériémie et vascularite (phénomènes locaux d’éruption purpurique). La piqûre de la tique est indolore et celle-ci doit rester attachée au moins 20 heures pour transmettre la maladie. Après piqûre de tique, l’antibioprophylaxie n’est pas conseillée car elle s’accompagne, dans un délai de 7 à 15 jours après son arrêt, de formes cliniques différées de la maladie. FIEVRE Q La fièvre Q (« query fever » : query = « à élucider ») est due à une bactérie Coxiella burnettii. Il s’agit d’une zoonose ubiquitaire aux manifestations cliniques polymorphes qui peut se présenter sous forme aiguë ou chronique. La transmission se fait le plus souvent au contact d’animaux infectés (ovins, caprins, chats… chez lesquels l’infection est généralement inapparente), par inhalation d’aérosols contaminés ou par ingestion de lait cru. La transmission par les tiques reste anecdotique. TULAREMIE Clinique Six jour en moyenne après la piqûre, les premiers signes apparaissent, constitués au départ d’un syndrome général associant une fièvre élevée (39°C), des céphalées violentes dans plus de 50% des cas et des algies diffuses (arthralgies, myalgies, rachialgies) dans 1 cas sur 3. L’examen clinique minutieux retrouve l’escarre d’inoculation, la fameuse tache noire, 3 fois sur 4. Celle-ci peut siéger dans les plis (aines, aisselles), ou dans le cuir chevelu ou il faudra savoir la rechercher. Elle est indolore, rouge ou noirâtre, et peut être confondue avec un furoncle ou une excoriation. Elle peut être drainée par quelques adénopathies. En 3 à 5 jours, la période d’état est atteinte avec au premier plan une éruption maculo-papuleuse fébrile. Les signes généraux s’amplifient (asthénie majeure, hypotension, amaigrissement). Les manifestations extracutanées ont une intensité variable qui conditionne le pronostic de la maladie. Diagnostique biologique Sur le plan biologique, dans les premiers jours une thrombopénie et une leucopénie sont obervées, suivies d’une hyperleucocytose à polynucléaires. Les transaminases et les LDH sont fréquemment élevées. L’hyponatrémie et l’hypocalcémie sont des signes péjoratifs. Le diagnostic repose sur la sérologie, l’immuno-fluorescence indirecte constituant la technique de référence. Deux sérums doivent être prélevés à 7 ou 10 jours d’intervalle. Une séroconversion, la présence d’IgM ou une augmentation significative (x4) du titre des Ac signent le diagnostic. L’identification de la bactérie à partir de biopsie cutanée de la « tache noire » par Immunofluorescence directe ou la culture sur milieu cellulaire à partir du sang est réservée à des centres spécialisés pour le diagnostic des formes graves. Evolution, pronostic : Le pronostic dépend du terrain de l’hôte et du délai thérapeutique. La FBM a une fausse réputation de bénignité. Sa létalité pour les patients hospitalisés est de 2,5%. Les formes malignes (5 à 6% des cas) surviennnent en particulier chez les sujets âgés, les alcooliques et les patients porteurs de déficit en G6PD. La forme maligne comporte une atteinte polyviscérale avec coma, détresse respiratoire et insuffisance rénale. Elle est mortelle dans 50% des cas. Le traitement précoce empêche cette évolution défavorable. Traitement : Chez l’adulte : doxycycline (VIVRAMYCINE, 200 mg/j classiquement pendant 7 jours ou jusqu’à 2 jours après l’apyrexie, ou prise unique de 2 comprimés (200 mg). En cas d’allergie ou contre-indication, fluoroquinolones (CIPROFLOXACINE) pendant 5 jours. Chez l’enfant : la josamycine 500 mg/kg/j pendant 8 jours est une alternative, de même que chez la femme enceinte (3 g/l). Prévention et surveillance : La meilleure prophylaxie consiste à éviter les piqûres de tiques. La durée d’attachement nécessaire à la transmission (20h) justifie, en période estivale en zone d’endémie, un dépistage soigneux, en particulier chez les enfants. L’agent causal de cette infection bactérienne est Francisella tularensis. Le réservoir est constitué par les rongeurs et plus particulièrement le lièvre. La contamination humaine a lieu lors de manipulation de l’animal, Francisella tularensis franchissant la peau saine. Plus anecdotique, la tularémie peut être transmise par des tiques. La forme clinique la plus fréquente est ulcéro-glandulaire, associant un syndrome grippal à une ulcération nécrotique avec adénopathie satellite. EHRLICHIOSE Les Ehrlichia sont des bactéries intracellulaires strictes avec un tropisme particulier pour les éléments figurés du sang. L’ehrlichiose recontrée en France est l’ehrlichiose granulocytique humaine (EGH). Elle est transmise par la morsure d’une tique, Ixodes ricinus, principal vecteur de Borrelia burgdorferi. Les symptômes sont peu spécifiques type syndrome pseudogrippal. Une leucopénie et une thrombopénie sont retrouvées dans la plupart des cas. L’EGH peut être grave, entraînant des décès par infections opportunistes liées à la neutropénie profonde. BABESIOSE La babésiose, épizootie parasitaire due à Babesia divergens est éventuellement transmise à l’homme par des tiques Ixodes. Les rares cas français (9 cas rapportés) sont observés en été, dans les régions d’élevage bovin intensif, chez des travailleurs ruraux ou des touristes. Le tableau clinique est pseudo-palustre, particulièrement grave chez les sujets splénectomisés ou immunodéprimés ENCEPHALITE VIRALE A TIQUES L’Encéphalite virale à tiques, également transmise par Ixodes ricinus est rare en France. Le virus circule entre les rongeurs sauvages et autres petits mammifères et les tiques. L’homme est un hôte accidentel, soit par piqûre de tiques soit par ingestion de lait (principalement de chèvre) contaminé. Le tableau clinique débute par un syndrome grippal qui évolue vers une méningo-encéphalite. CONCLUSION La transmission de l’agent infectieux, qui se fait soit par régurgitation, soit par les déjections de la tique, ne peut se faire que si la tique reste attachée un temps suffisant (au moins 20 heures pour la fièvre boutonneuse méditerranéenne). La première règle est donc d’extirper la tique le plus précocement possible (dans un mouvement circulaire après l’avoir agrippée près du rostre fiché dans la derme). Il importe donc de s’inspecter consciencieusement au retour d’une promenade en forêt ou dans des broussailles, tout en gardant à l’esprit d’une part que la piqûre de certaines tiques peut être parfaitement indolore et d’autre part que les larves et les nymphes peuvent passer facilement inaperçues. Enfin, hormis des soins de désinfection, aucune couverture antibiothérapique n’est à conseiller en l’absence de signe clinique. Le patient doit être surveillé et impérativement consulter au moindre signe. S. EYRARD - J.P. BOUILLOUX prochain sujet : interprétation des résultats du spermogramme