Abrégé de grammaire lydienne
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Abrégé de grammaire lydienne
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Version originale anglaise : Cyril Babaev
Traduction française : Damien Blanchard – Arthur Laisis
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I. Une histoire de la langue lydienne.....................................................................3
II. Le système phonétique .....................................................................................4
III. Le système nominal.........................................................................................6
IV. Le système verbal..........................................................................................10
V. Le système syntaxique....................................................................................13
VI. Les textes lydiens..........................................................................................15
Note des traducteurs............................................................................................16
Bibliographie.......................................................................................................17
Abrégé de grammaire lydienne
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Les langues anatoliennes ont été considérées comme une branche séparée de l’indo-
européen jusqu’il n’y a pas si longtemps, au début du XXe siècle. En 1906, les archives
royales de l’empire hittite ont été exhumées, et en 1915 le linguiste tchèque Grozny a le
premier déchiffré les signes cunéiformes hittites et établi que cet idiome était probablement
indo-européen. Pendant ce temps, cette seule langue était connue et étudiée par des linguistes
dans ses deux variétés : les signes cunéiformes et les hiéroglyphes. Plus tard, deux autres
langues ont été séparées du hittite, le palaïte, issu du nord de l’Anatolie, et le louvite, langue
des cités-états syro-hittites, dans les régions du sud et de l’ouest de l’empire hittite.
Les historiens étaient conscients de l’existence des Lydiens et de leur langue grâce à
de nombreuses mentions à ce propos dans des sources anciennes. Hérodote décrit quelques
caractéristiques des Lydiens, principalement des noms de personnes et de lieux. Strabon et
Xénophon ont également dépeint la Lydie et ses habitants et transmis leur langue à la
postérité ; mais seules les recherches archéologiques ont aidé à trouver des signes écrits de
celle-ci. L’identification des inscriptions a montré que les origines indo-européennes et
anatoliennes de cette langue étaient évidentes. Actuellement, les études du lydien sont
soutenues en Europe, aux Etats-Unis et intensivement en Russie, les célèbres linguistes
Ivanov, Shevoroshkin et Bayun ont écrit un nombre significatif de travaux importants.
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I. Une histoire de la langue lydienne
Il est reconnu que le lydien et le carien (et peut-être le mésien) dérivent directement de
la langue hittite. Les Lydiens sont ces citoyens du centre de l’empire hittite qui ont décidé de
se déplacer vers l’ouest pour se préserver des invasions des armées assyrienne, araméenne et
syrienne et des tribus des Peuples de la mer, qui sont apparues fréquemment depuis le XIIIe
siècle avant J.-C. Les locuteurs du palaïte sont connus pour avoir été assimilés par des langues
inférieures et supérieures, les Louvites de l’ouest sont partis dans les régions du sud et du sud-
ouest de l’Anatolie, ils étaient appelés Lyciens et Sidètes. Et les Hittites qui ont vécu dans
l’Anatolie centrale et orientale ont soit migrer vers l’ouest soit se mêler aux conquérants et
aux tribus indigènes.
Au VIIe siècle avant J.-C, aucun auteur grec ne mentionne les Hittites, et la Lydie est
très connue dans le monde ancien. Le royaume, gouverné par la dynastie des Mermnades,
s’est développé avec succès et a élargi ses frontières progressivement. Les rois lydiens ont
remporté une victoire décisive contre les Phrygiens et leur royaume, qui a conquis la Misie et
Troie, a repoussé l’intrusion des nomades Cimmériens (parlant iranien) et est constamment
sous la pression des cités-états grecques et ioniennes sur les bords de la mer Egée. A cette
époque, le lydien est en pleine expansion, aussi bien parlé en Misie, Phrygie qu’en Carie ; le
misien est par conséquent assimilé très tôt.
L’influence culturelle grecque est devenue très significative depuis le VIe, et de
nombreuses inscriptions lydiennes sont rédigées à la fois en grec et en lydien (textes
bilingues). Les Grecs ont créé leur propre translittération, ce qui aide grandement les
linguistes modernes à définir la véritable prononciation lydienne. Mais cette influence
helléniste ne devait pas provoquer de grands changements dans la langue avant le IVe siècle
avant J.-C ; à cette époque, une province de l’empire perse était conquise par Alexandre le
Grand. Dès lors, de nombreux colonisateurs grecs ont commencé à arriver et à s’installer en
Lydie, dans la capitale Sardes et sur les côtes, et depuis, la Lydie n’a jamais récupéré son
indépendance, étant pour toujours sous le gouvernement grec. La langue lydienne a cessé
d’être officielle, et dans les trois à quatre siècles suivants, s’est véritablement éteinte. Les
dernières traces écrites en lydien datent du Ier siècle avant J.-C.
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II. Le système phonétique
Le lydien a rité son système phonétique de son ancêtre hittite, mais a développé de
nombreux traits curieux, qui sont inconnus du hittite, du louvite ou du palaïte Une de ces
principales caractéristiques réside dans le système des voyelles lydiennes. Le hittite ne
disposait que de cinq d’entre elles : trois brèves, a, i, u et deux longues ā et ī. Le lydien n’a
pas seulement créé le son o, il a aussi acquis deux voyelles nasales, qui peuvent être écrites
ainsi : ã et . Finalement, le système lydien des voyelles est le suivant :
a < anatolien commun *a, et aussi *o devant consonne labiale. En hittite, c’est aussi un a
ex. lyd. da (donner), hit. da, louv. da (prendre)
ã < hit. ā, aussi pour une voyelle + n
ex. lyd. amãś < anat. *amans (aimant)
e < hit. e, i
< anat. *ē, aussi pour e + n
ex. lyd. qn (tuer) hit. kwen-
i < anat. *, aussi pour e, i
ex. lyd. kiś- (peigner/ratisser), hit. et louv. kiš-, anat. *kès
o < hit. au, uwa. Ce son manque au hittite, mais il a été repris ici en lydien
ex. lyd. śoy (remplir), hit. suwai-
u < hit. u, uwa
ex. lyd. kud (où), hit. kuwad
y < hit. ī
Les voyelles nasales n’étaient pas la seule invention des Lydiens. Le sidète et en
particulier le lycien les ont également utilisées, et il y en avait même quatre en lycien. Ce
chiffre était à la réduction des nasales m, n après les voyelles, et à la nasalisation des
longues voyelles. Nous ne pouvons exclure l’influence lycienne comme une possible source
de la nasalisation des voyelles en lydien. Quelquefois le son nasal a remplacé le vieux ā.
Les quatre sonantes /m/, /n/, /r/ et /l/ n’ont pas été conservés en lydien, comme c’est
le cas en hittite et dans les autres langues anatoliennes. Le lydien les a transformés en une
combinaison de consonne + voyelle :
anat. *tr > lyd. tor, tro (parler)
Les mutations phonétiques affectant les voyelles lydiennes n’étaient pas si nombreux,
mais nous ne savons peut-être pas tout à leur propos. Le seul échange connu entre voyelles
dans la langue est le suivant :
a - (amu - je, moi; mis - mon)
y - i (qy / qi – ce qui, cela)
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Les consonnes du lydien sont en plus grand nombre que dans le hittite ou le louvite.
Le plus important processus qui se déroule dans la transition du hittite au lydien est la
palatalisation de nombreuses consonnes, la plupart dentales, fricatives, nasales et liquides.
Certains linguistes croient même que toutes les consonnes ont leur équivalente palatale en
lydien, mais l’orthographe ne suit seulement qu’une partie d’entre elles. Ci-dessous, la table
du système des consonnes lydiennes :
Phonème Exemple Variante
palatale Exemple
b (< b, p) bira (maison)
d da (donner) δ (< d') [dz] δivi (dieu)
f (< p) fadol (construit)
g (< g, h)
h aśtarho (défenseur)
k (< k, h) kardal (fait)
l borliś (année) λ (< il) [l'] kλida- (terre)
m (consonne et syllabe) amãś (aimant)
n nãrś- (fort) ν (< in) [n'] ftamνidν (défini)
q (< kw) qn (tuer)
r
s [s] fnsλifi (faire du mal)
ś [s'] eśa (petit-fils)
t kantoru (je crois) τ [ts] karττ (abolir)
v viδ (contrsuire)
Les variantes palatales existent également en carien, mais aucune trace d’entre elles
n’ont été observées en lycien et sidète. De toute évidence, ce processus consonantique était
purement présent vers la fin du hittite. Ces variantes ont généré soit de légères différences
entre consonnes soit des combinaisons de consonne + voyelle (e or i). Certaines théories
disent ce phénomène plus proche de processus tels que la lénition celtique au milieu du mot,
quand les consonnes en position intervocalique sont assouplies et palatalisées. Mais ceci est
sujet à des études plus poussées.
Les changements de consonnes dans un mot ne sont pas fréquents en lydien, et les
seuls qui sont remarqués sont les suivants : b - v - f (par exemple, borli / forliune année), et
d - t à la fin d’un mot (par exemple, kod, kot – comment ?).
Dans son ensemble, la phonétique lydienne montre de nombreux et intéressants
processus internes, qui étaient jusqu'alors inconnus dans la plupart des autres groupes IE.
Nous ne devons pas oublier le mélange d’éléments anatoliens avec les langues syriaque,
araméenne et hourrite, et l’influence des substrats asiatiques des langues aborigènes. Nous
verrons ultérieurement comment ces éléments non IE ont influencé la morphologie de la
langue lydienne.
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