Les difficultés de comportement chez les élèves : l`urgence d`agir en

Programme Actions concertées
La persévérance et la réussite scolaires
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résultats de recherche
les difcultés de comportement chez les élèves :
l’urgence d’agir en concertation
chercheure principale
Michèle Déry
Universi de Sherbrooke
les difficuls de comportement chez les élèves gurent parmi les
problèmes les plus complexes à gérer, tant pour les enseignants que pour
les intervenants et les parents. Au Québec, près de 25 000 élèves des éco-
les publiques reçoivent des services scolaires complémentaires pour des
difficultés de comportement, dont la moitié est inscrite au primaire. Les
demandes d’intervention pour ces difficultés sont trois fois plus nombreuses
que pour tout autre problème durant l’enfance. Une équipe de recherche
dirigée par Michèle Déry, professeure en psychoéducation à l’Université de
Sherbrooke, a d’ailleurs constaté qu’un pourcentage élevé de ces jeunes
souffrait de problèmes très vères et pouvait présenter, au départ, un ou
plusieurs troubles de santé mentale. Ces constatations soulèvent de sérieu-
ses questions sur la capacité de lécole à faire face, seule, aux difficultés
de comportement des élèves. À cet égard, l’équipe de Michèle Déry souligne
l’urgence d’agir en concertation avec le secteur des services sociaux et de
déployer les intervenants les plus qualifiés s le primaire afin d’intervenir
le plus tôt possible dans la trajectoire de ces jeunes.
Des nuances importantes
Sous le vocable « difficultés de comportement », plusieurs nuances
sont à apporter, notamment selon que ces difficultés sont suffisamment
graves pour satisfaire aux critères d’un trouble oppositionnel ou d’un trouble
des conduites (TO/TC), ou qu’elles s’accompagnent d’un trouble déficitaire
de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ou de traits antisociaux
(faible empathie, absence de remords, dureté, impulsivité). Des recherches
ont montque, plus les difficultés de comportement sont précoces
ou graves, plus elles sont à risque de persister. Si lélève présente en plus
de ses difficultés de comportement un TDAH ou des traits antisociaux, les
probabilités de persistance sont aussi plus élees. En revanche, les
chercheurs ne savaient pas si ces trois problèmes (présence/absence de
TO/TC, de TDAH, de traits antisociaux) contribuaient de manière interactive
ou indépendante à identifier des groupes d’élèves distincts quant à leur
trajectoire évolutive, ni s’ils interagissaient avec des caractéristiques
cognitives, sociales et familiales des élèves pour faire varier la persistance
des difficultés.
Afin d’approfondir les liens entre
ces difrents facteurs, léquipe de
Michèle Déry a alisé une recherche
longitudinale sur l’adaptation scolaire
et sociale et le parcours dans les servi-
ces de trois cohortes d’élèves du primai-
re, suivies tous les deux ans, sur une
période de six ans. Ces cohortes étaient
composées de 324 élèves (260 garçons
et 64 lles) des trois cycles du primaire qui, au début de l’étude, recevaient
tous des services scolaires complémentaires pour des difficultés de com-
portement. Ils ont été recrutés en 1999, 2000 et 2001. Une quatrième
cohorte, composée exclusivement de filles en difficulté de comportement
(n = 38), a été recrutée en 2004 pour avoir un meilleur aperçu des difficultés
présentées par leslles. Enfin, un groupe témoin recru en 2002 et composé
d’élèves sans difficulté de comportement a participé à létude. Lun des
apports majeurs de ces travaux menés dans le cadre d’une action concertée
sur la persévérance et la réussite scolaires du Fonds québécois de la recherche
sur la société et la culture en collaboration avec le ministère de l’Éducation,
du Loisir et du Sport est d’avoir réussi à distinguer les groupes d’élèves
selon la sévérité et l’évolution de leurs difficultés.
Gravité des difficultés
En analysant l’évolution de ces élèves, l’équipe de Michèle Déry a
constaté que les élèves dont l’évolution des difficultés de comportement
est la plus négative sont ceux qui ont un TO/TC avec la présence simultanée
d’un TDAH et de traits antisociaux (20 % de l’échantillon). « Non seulement
les difficultés de ces élèves ont-elles persisdans le temps, mais leur
nombre a même augmenté à la fin de létude », a noté Michèle Déry, et ce,
malgré les services daide reçus. Ces élèves se distinguent aussi par de
moins bonnes habiletés cognitives (impulsivité, rigidité cognitive, difficulté
d’organisation) et un environnement familial antisocial (notamment des
démêlés avec la justice), et ils vivent de lisolement social. Sur une période
de six ans, un pourcentage de plus en plus élevé de ces jeunes fréquentait
Les élèves dont l’évolution
des difficultés de comportement
est la plus négative sont ceux
qui ont un TO/TC avec la
présence simultanée d’un
TDAH et de traits antisociaux.
une classe spéciale ou suivait un cheminement particulier, allant de 30 %
au début de l’étude à plus de 70 % six ans plus tard. À 16 ans, 60 % des
élèves de ce groupe avaient abandonné lécole, ce qui est nettement plus
éleque dans les autres groupes. Près de 67 % des crocheurs de ce
groupe avaient une consommation problématique de drogues et dalcool
comparativement à 20 % du groupe témoin.
Léquipe a relevé que les élèves du groupe avec un TO/TC, mais sans
la présence simultanée dun TDAH et de traits antisociaux (45 % de l’échan-
tillon), présentent aussi un pronostic peu encourageant. Sur une période
de six ans, leurs difficultés comportementales sont encore élevées et demeu-
rent relativement stables. Ce groupe connaît aussi dimportantes difficultés
familiales et relationnelles au primaire. Par contre, ces élèves ont maintenu
un taux de fréquentation scolaire comparable aux autres élèves sans diffi-
culté : 26 % ont abandonné lécole, mais 50 % dentre eux avaient une
consommation problématique de drogues et d’alcool.
De leur té, les élèves dont les difficultés de comportement ne
satisfaisaient pas aux critères du TO/TC (35 % de l’échantillon) ont le pronostic
le plus favorable (qu’ils aient ou non un TDAH ou des traits antisociaux
simultanément), même si leurs difficultés comportementales se maintiennent
de façon relativement stable sur six ans. Ces jeunes ont de meilleures habi-
letés cognitives, profitent d’un plus grand
réseau social et roivent un meilleur
encadrement parental. Même si dans ce
groupe, les parents montrent moins
d’engagements et nourrissent plus d’at-
titudes gatives vis-à-vis de l’enfant
que ceux du groupe moin, les pratiques
éducatives parentales semblent adéquates.
Ces jeunes sont aussi moins à risque de velopper des problèmes compor-
tementaux sérieux et leur taux de fréquentation scolaire est comparable à
celui dautres élèves sans difficulté de comportement. De ce groupe, 21 % ont
abandonné l’école et, parmi les décrocheurs, 37,5 % ont une consommation
problématique de drogues et d’alcool.
Léquipe de Michèle ry a aussi noque les difficultés des filles
s’accompagnent deux fois plus souvent de problèmes intériorisés : près de
34 % des filles présentaient de l’anxiété néralisée par rapport à 17 % des
garçons, et des pourcentages semblables ont été relevés pour la pres-
sion. Au total, 43 % des filles présentaient une combinaison de troubles
extériorisés et intériorisés comparativement à 24 % chez les garçons.
« Les jeunes devraient
pouvoir bénéficier de mesures
d’intervention plus intensives
et à long terme. »
Mesures daide à privilégier
Comment aider les élèves en difficulté de comportement? « Les jeu-
nes devraient pouvoir bénéficier de mesures dintervention plus intensives
et à long terme », affirme Michèle Déry. Parmi les groupes d’élèves ayant
des difficultés de comportement au primaire, de 68 % à 90 %, selon la
gravité de leurs difficultés, recevaient des services d’aide à l’école au but
de leur étude. En revanche, seulement 50 % des élèves continuaient de
recevoir des services six ans plus tard. En moyenne, ces élèves avaient deux
rencontres par mois avec leur accompagnateur. À cet égard, l’équipe est
unanime : le milieu scolaire se doit d’agir en concertation étroite avec les
centres jeunesse et les centres de santé et de services sociaux. « Lécole,
à elle seule, n’est pas en mesure de contrer la gravité des difficultés ren-
contrées par un pourcentage élevé d’enfants au primaire. »
Léquipe de Michèle Déry suggère que les interventions à mener
auprès des élèves du primaire qui ont un TO/TC, ou une combinaison de
problèmes (TO/TC, TDAH et traits antisociaux), fassent lobjet d’une concer-
tation entre l’école et le seau des services sociaux le plus rapidement
possible. À l’adolescence, la concertation avec les centres jeunesse appa-
raît d’autant plus appropriée qu’il demeure difficile d’offrir un accompagne-
ment à des adolescents qui n’ont plus grand intérêt pour l’école : rappelons
que 60 % des élèves du groupe en plus grande difficulté ont décroché de
l’école et sont, par conséquent, difficilement joignables par le biais du
milieu scolaire.
partenaires
Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture
Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport
rence
Difficultés de comportement, adaptation scolaire et parcours dans
les services, Michèle Déry, Université de Sherbrooke, 2008, 119 pages.
Une réalisation de :
Fonds de recherche sur la société et la culture
Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport
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