ULB I. Faculté des Sciences Appliquées Introduction Ce document a pour but de présenter le concept de vitesse limite de chute d’‛un objet dans un fluide. Dans un premier temps, il présente quelques rappels théoriques indispensables à la compréhension du sujet. Dans la version intégrale du document, plusieurs expériences pertinentes sont ensuite détaillées. Enfin, le phénomène de sédimentation est discuté en guise d’‛illustration du comportement des solides en suspension dans un fluide. Le Professeur contient par ailleurs dans sa version, un mode d’‛emploi lui permettant de reconstruire le montage expérimental en cas de besoin. Une boule de pétanque tombe-t-elle aussi vite qu’‛une balle de tennis ? C’‛est à ce type de question que nous répondrons en partant des principes fondamentaux régissant la chute des corps et plus généralement, les forces qui s’‛exercent sur des corps en déplacement. Pour cela, il est impératif de comprendre le rôle de la gravité, de la poussée d’‛Archimède et des éventuelles forces de frottements (forces de résistance à l’‛avancement). Pourquoi certains corps chutent plus vite que d’‛autres ? Dans la nature, un grand nombre de phénomènes, parfois étranges, peuvent s’‛expliquer par des principes régissant la chute des corps. Nous savons tous qu’‛une sphère chute plus vite dans un gaz que dans un liquide, mais dans ce dernier, il lui arrive en fonction de ses dimensions de flotter. Les flocons de neige tombent moins vite que les gouttes d’‛eau dont les différentes tailles vont influencer leur vitesse de chute (s’‛il sagit d’‛une pluie battante par exemple ou d’‛une brume). Les feuilles mortes qui se séparent des branches en automne décrivent des trajectoires imprévisibles. En outre, une feuille de papier A4 froissée et une feuille intacte tomberont différemment, la feuille intacte pouvant planer sur plusieurs mètres. Ainsi, on sait par expérience que jeter un bloc de feuilles du quatrième étage entrainera la dispersion de celles-ci, donnant au final, une répartition au sol qui n’‛est jamais reproductible. Et biensûr, elles ne toucheront pas le sol en même temps ! On peut aussi prendre comme exemple la formation et l’‛avancée des dunes dans le désert (ou sous la mer, les dunes sont alors dites « sous-marines ») ou la sédimentation de la matière en mer et dans les rivières. 20 2011 - 2012 ULB II. Faculté des Sciences Appliquées Rappels théoriques Les forces agissant sur un solide en chute dans un fluide sont : i. Le poids « C’‛est la force d’‛attraction gravitationnelle que la Terre exerce sur un objet. » Rappel : Le poids est une force dont l’‛unité est le Newton [N], à ne pas confondre avec la masse qui s’‛exprime en grammes [kg]. ii. La force de frottement du fluide C’‛est la force exercée par le fluide dans le sens opposé au mouvement de l’‛objet. C’‛est une force résistante car elle entraine un ralentissement du mouvement de l’‛objet. Sa valeur dépend de la nature du fluide, de la forme de l’‛objet, de sa vitesse et de son état de surface. Dans le cas d’‛un avion par exemple, une grande partie de l’‛énergie développée par le moteur sert à lutter contre les frottements de l’‛air qui le ralentissent lorsqu’‛il est en vol. iii. La poussée d’‛Archimède Lorsqu’‛un corps est plongé dans un fluide (liquide ou gaz), ce dernier exerce sur l’‛objet une force dirigée du bas vers le haut, que l’‛on appelle « la poussée ». Selon le principe d’‛Archimède, cette poussée est égale au poids du volume de fluide que l’‛objet déplace (ce volume est donc égal au volume immergé du corps). La poussée d’‛Archimède peut être calculée à partir de la formule suivante : Où : 𝐹 = 𝜌. 𝑉. 𝑔 𝜌 : la masse volumique du fluide considéré (en kg/m³) V : le volume d’‛eau déplacée, qui est égal au volume immergé de l’‛objet (en m³) g : l’‛accélération de la pesanteur (en m/s²) 21 2011 - 2012 ULB Faculté des Sciences Appliquées Si la poussée est supérieure ou égale au poids de l’‛objet, celui-ci flotte. Au contraire, si la poussée est inférieure au poids de l’‛objet, celui-ci coulera. Influence de la forme : Pour un même poids, un objet coule ou flotte en fonction de sa forme. Ci-contre, la pâte à modeler sous forme de boule coule car son poids est supérieur au poids du volume d’‛eau qu’‛elle déplace. Cette même pâte en forme de barque flotte car sa surface de contact avec l’‛eau est ainsi augmentée, ce qui lui permet de déplacer plus d’‛eau. Le poids de l’‛eau Figure 8 : Influence de la forme déplacée devient ainsi supérieur au poids de la pâte, ce qui lui permet de ne pas couler. Influence de la densité : Plus un liquide est dense, plus la poussée d’‛Archimède subie par un objet plongé dans ce liquide sera importante. L’‛eau salée étant plus dense que l’‛eau douce, la poussée d’‛Archimède est par exemple plus importante en mer que dans un lac. Figure 9 : Influence de la densité Influence du poids Pour un même volume, un objet coule ou flotte en fonction de son poids. Considérons 3 boites identiques (de même volume). La 1ère boite ne contient que de l’‛air. Elle flotte car son poids est inférieur au poids du volume d’‛eau qu’‛elle déplace. La 2e boite contient un peu de riz. Elle est par conséquent un peu plus lourde que la 1ère. Elle s’‛enfonce un petit peu mais ne coule pas car son poids est toujours supérieur au poids de l’‛eau qu’‛elle déplace. e La 3 boite contient beaucoup de riz. Son poids devenant ainsi supérieur au poids de l’‛eau qu’‛elle déplace, elle coule. Figure 10 : Influence du poids 22 2011 - 2012 ULB Faculté des Sciences Appliquées Questions de réflexion 1) Pour un objet entièrement immergé, la poussée d’‛Archimède dépend-t-elle de la profondeur à laquelle se trouve l’‛objet ? 2) Pour un objet partiellement immergé, la poussée d’‛Archimède dépend-t-elle de la profondeur à laquelle se trouve l’‛objet ? 3) La masse du corps immergé influence-t-elle la poussée d’‛Archimède ? 4) Soient 3 corps de même masse mais de volume différent entièrement immergés dans le même fluide (de l’‛eau par exemple). Parmi les objets représentés ci-dessous, quel est celui qui subira la poussée d’‛Archimède la plus importante ? Pour quel objet la poussée d’‛Archimède est-elle la plus petite ? 5) Soient 2 objets identiques entièrement immergés dans 2 fluides différents (de l’‛eau et de l’‛alcool). Que pouvez-vous dire sur la poussée d’‛Archimède subie par les objets dans les deux cas sachant que l’‛alcool est moins dense que l’‛eau ? 23 2011 - 2012 ULB Faculté des Sciences Appliquées Réponses 1) Non, car une fois l’‛objet entièrement immergé, le volume immergé ne varie plus. Donc, la poussée d’‛Archimède étant proportionnelle au volume immergé de l’‛objet, celle-ci ne varie plus (𝐹 = 𝜌𝑉𝑔). Conclusion : Pour un objet entièrement immergé, la profondeur n’‛influence pas (plus) la poussée d’‛Archimède subie par cet objet. 2) Oui, car contrairement au cas précédent, en faisant varier la profondeur d’‛immersion, on fait varier le volume immergé, donc également la poussée. Conclusion : Pour un objet partiellement immergé, la poussée d’‛Archimède dépend de la profondeur. 3) Non, seul le volume immergé du corps a une influence sur la poussée. Conclusion : La masse n’‛influence pas la poussée d’‛Archimède. 4) La poussée d’‛Archimède est la plus grande pour l’‛objet ayant le volume le plus grand. Elle est la plus petite pour l’‛objet ayant le volume le plus petit. Conclusion : Le volume du corps a une influence directe sur l’‛intensité de la poussée exercée par l’‛eau sur le corps. 5) L’‛alcool étant moins dense que l’‛eau (de masse volumique moindre), la poussée d’‛Archimède subie par l’‛objet dans l’‛alcool sera inférieure à celle subie dans l’‛eau. Conclusion : La nature du liquide a une influence directe sur l’‛intensité de la poussée exercée par ce liquide sur l’‛objet. 24 2011 - 2012 ULB iv. Faculté des Sciences Appliquées Représentation de ces différentes forces Ces différentes forces peuvent se représenter par des vecteurs (« objet » mathématique entièrement défini par une direction, un sens et une norme). Le tableau suivant montre les différents paramètres de ces vecteurs : La force de pesanteur 𝑷⃗ La poussée d’‛Archimède 𝑭𝒂⃗ La résultante des forces de frottements 𝒇⃗ Où : - Origine Direction Sens Le centre de gravité G de l’‛objet La verticale passant par G Du haut vers le bas Le centre de gravité C du volume de fluide déplacé Le centre de gravité G de l’‛objet La verticale passant par C La verticale passant par G Du bas vers le haut Opposé au mouvement Valeur 𝑃 = 𝑚𝑔 𝐹 = 𝜌𝑉𝑔 𝑓 = 𝑘𝑣 Pour les vitesses faibles : 𝑛 = 1. Pour les vitesses importantes : 𝑛 = 2. Alors que la force de pesanteur et la poussée d’‛Archimède sont deux forces qui restent constantes au cours de la chute (on suppose que la masse volumique et la forme de l’‛objet ne changent pas), on remarque que la force de frottement elle, augmente à mesure que la vitesse de l’‛objet augmente. Nous reviendrons dans le point suivant sur ce détail de la plus haute importance. Enfin pour terminer, voici un diagramme résumant le système de force : Figure 11 : Système de force 25 2011 - 2012 ULB Faculté des Sciences Appliquées III. Chute libre ? Chute libre: Un objet est en chute libre quand il n’‛est soumis qu’‛à son poids. Dans ce cas, les frottements ainsi que la poussée d’‛Archimède sont négligés. Rien ne s’‛oppose à la chute de l’‛objet : sa vitesse ne cesse donc d’‛augmenter (c’‛est ce qu’‛il se passe dans l’‛espace où en raison du vide, il n’‛y a ni frottements ni poussée). Chute avec frottements: Dans la réalité, les forces de frottement ne peuvent pas être négligées. L’‛allure de la vitesse en fonction du temps est comme suit: On distingue au cours de la chute deux régimes : un premier régime dit transitoire, durant lequel la vitesse augmente puis un second régime dit permanent, au cours duquel la vitesse ne varie plus ; on atteint une vitesse dite « limite ». Afin de mieux comprendre l’‛existence de cette vitesse limite, transcrivons le phénomène mathématiquement en partant de l’‛expression de la seconde loi de Newton : Figure 12 : Régimes de vitesse ∑ 𝐹⃗ 𝑒𝑥𝑡 = 𝑚. 𝑎⃗ Où ∑ 𝐹⃗ 𝑒𝑥𝑡 est la somme de toutes les forces extérieures agissant sur l’‛objet en chute discutées précédemment : 𝑃 est le poids, 𝐹𝑎 est la poussée d’‛Archimède, 𝑓 est la force de frottement du fluide : ∑ 𝐹𝑒𝑥𝑡 = − 𝑃 + 𝐹𝑎 + 𝑓 Où nous considérons que les forces orientées du bas vers le haut (la poussée d’‛Archimède et la force de frottement du fluide) sont positives et les forces orientées du haut vers le bas (ici le poids uniquement) sont négatives. Lorsqu’‛un objet est lâché dans l’‛air par exemple avec une vitesse initiale nulle, la force de frottement associée à l’‛air est nulle au départ, en effet : 𝑓 = 𝑘. 𝑣 = 𝑘. 0 = 0 Dans sa chute, l’‛objet va accélérer : sa vitesse va augmenter. Mais dans le même temps, la force exercée par l’‛air (ayant pour effet de le ralentir) augmente également puisque ces deux valeurs sont directement liées. Comme dit précédemment, le poids et la poussée d’‛Archimède eux ne varient pas. Après un certain temps donc, cette force de frottement aura une valeur telle que les forces en jeu se compenseront : 26 2011 - 2012 ULB Faculté des Sciences Appliquées En effet, la force de frottement et la poussée d’‛Archimède égaleront exactement le poids, entrainant une résultante des forces nulle : ∑ 𝐹⃗ 𝑒𝑥𝑡 = 0 Et par la seconde loi de Newton : ∑ 𝐹⃗ 𝑒𝑥𝑡 = 0 = 𝑚. 𝑎⃗ = 𝑚. 0 La masse de l’‛objet ne pouvant être égale à zéro subitement, on constate que c’‛est l’‛accélération qui s’‛annulera. Or un objet dont l’‛accélération est nulle, est un objet dont la vitesse reste constante : cette vitesse est sa vitesse limite. Pour une sphère en chute dans un fluide, cette vitesse limite peut être calculée à l’‛aide de la formule suivante : 𝑣 (lim) = Où : 4. 𝑔. 𝑑 𝜌 − 𝜌 . 3. 𝐶𝑥 𝜌 g est l’‛accélération gravitationnelle (9,81 m/s2) d est le diamètre de la sphère (m) 𝜌 est la densité de l’‛objet (kg/m3) 𝜌 est la densité du fluide (kg/m3) 𝐶𝑥 est le «coefficient de trainée » de l’‛objet : c’‛est un nombre sans dimension, qui est d’‛autant plus faible que l’‛objet a une forme aérodynamique. L’‛aérodynamisme peut se définir comme la faculté à pénétrer, à progresser dans l’‛air. Plus l’‛objet est aérodynamique, moins l’‛air oppose de résistance au mouvement. Exemples : Une boule de papier et une feuille de papier intacte : pour cette dernière, l’‛air oppose une beaucoup plus grande résistance. Un camion, qui vu de face, peut être considéré comme un véritable « mur roulant » sur lequel l’‛air va littéralement « s’‛écraser » et par là-même ralentir le camion. Une simple voiture par exemple, offre à l’‛air beaucoup plus de possibilités de la contourner « tout en douceur ». 27 2011 - 2012 ULB IV. Faculté des Sciences Appliquées La sédimentation Cette dernière partie a pour but de montrer une des conséquences que peuvent avoir les paramètres discutés précédemment sur un objet, plus précisément une particule, en suspension dans un fluide. Lorsque des particules de matières quelconques cessent progressivement de se déplacer au sein d’‛un mélange inhomogène, ce qui est le cas dans un lac par exemple, un processus va s’‛enclencher à la suite duquel les particules semblables vont se regrouper au sein d’‛une couche : c’‛est ce que l’‛on appelle la sédimentation. Les facteurs induisant la sédimentation sont variés mais à la lumière des expériences faites précédemment, nous allons expliquer l’‛influence d’‛un paramètre majeur. Nous avons vu qu’‛au plus un objet avait une masse élevée, au plus sa vitesse limite était importante puisque la densité du solide est directement proportionnelle à la vitesse limite : 𝑣 (lim) = . . . . Figure 13 : Sédimentation obtenue avec du sable Dans un lac ou en mer par exemple, c’‛est exactement ce qu’‛il se passe : en raison d’‛une vitesse de chute plus élevée, les particules les plus lourdes vont plus rapidement rejoindre le fond et constituer ensemble une couche. Les particules un peu moins lourdes se disposeront juste au-dessus et ainsi de suite. En géologie, on dit que les sédiments (particules) se disposent en strates (couches). En chimie, le terme « décantation » est plus souvent utilisé et cette dernière constitue assurément l’‛un des procédés les plus utilisés pour la séparation des mélanges : c’‛est de cette manière que fonctionnent certaines stations d'épuration d’‛eau avec d’‛énormes bassins de décantation. La petite bouteille montrée à la figure 13 sera amenée en classe, sera secouée par les élèves, qui pourront voir une heure plus tard à peine, les différentes couches qui se sont établies. Figure 8 : Strates dans la roche Figure 9 : Bassin de décantation 28 2011 - 2012